Td corrigé CONDILLAC ÉCONOMISTE par AUGUSTE LEBEAU (PARIS ... pdf

CONDILLAC ÉCONOMISTE par AUGUSTE LEBEAU (PARIS ...

l'examen, le contrôle des comptes et leur validation, ..... Il s'agit de positionner le titulaire du diplôme pour corriger des failles, repérer des incohérences (factures non conformes ...... BTS Comptabilité et Gestion, version du 21/12/2014 Page 1 sur 122 ...... E.2. Mathématiques appliquées. U2. 3. CCF. 2 situations d'évaluation .




part of the document



CONDILLAC ÉCONOMISTE

par AUGUSTE LEBEAU

(PARIS, GUILLAUMIN, 1903)



« Il est essentiel, pour quiconque veut faire par lui-même des progrès dans la recherche de la vérité, de connaître les méprises de ceux qui ont cru lui en ouvrir la carrière. »

« L’expérience du philosophe comme celle du pilote, est la connaissance des écueils où les autres ont échoué, et sans cette connaissance il n’est point de boussole qui puisse le guider. »

Condillac, Essai sur l’origine des connaissances humaines, Introduction




PRÉFACE


     Si l’histoire de la philosophie revendique l’abbé de Condillac, l’histoire des doctrines économiques doit aussi retenir son nom.
     Économiste, Condillac l’a été au même titre que Quesnay, Turgot ou Adam Smith, ses contemporains.
     Il a en effet publié, en 1776, un traité systématique d’économie politique, Le Commerce et le Gouvernement considérés relativement l’un à l’autre. Malgré son titre modeste, ce livre embrasse réellement l’ensemble de la science. Sans doute, si l’on considère les progrès accomplis depuis un siècle, il requiert aujourd’hui de grands développements, mais dans ses 586 pages  il contient les éléments de tous les problèmes que discutent les économistes modernes.

***

     La communauté de tendances des économistes français qui luttèrent, de 1750 à 1780, pour le triomphe des idées de liberté dans le domaine de la vie économique, amena les historiens qui les étudièrent au XIXème siècle à les ranger tous sous le drapeau physiocratique.  Ils les considérèrent en tant qu’École et presque jamais individuellement. C’est ainsi que certains auteurs qu’avaient combattus les Physiocrates furent, à cause de quelques théories communes et en dépit de beaucoup d’autres où ils s’affirmaient nettement schismatiques par rapport à l’École de Quesnay, étiquetés Physiocrates. Tel fut le sort de Condillac.
     Naguère encore presque oublié comme économiste, dans les rares ouvrages parus avant ces dernières années où son nom est mentionné, il se trouve perdu parmi les disciples plus ou moins directs du médecin de Louis XV ; Le Commerce et le Gouvernement considérés relativement l’un à l’autre n’apparaît que comme un simple exposé des doctrines physiocratiques, et même comme un exposé des plus fidèles dans l’Histoire de l’Économie politique d’Adolphe Blanqui par exemple : « Cet ouvrage, dit-il, est une des expositions les plus précises et les plus claires qui aient été faites du système des Économistes au XVIIIème siècle. » 
     L’ouvrage de Condillac n’est pas que cela : s’il se rattache par certains côtés aux idées physiocratiques, il s’en sépare sur des points capitaux. Ce n’est qu’en 1862 que M. Macleod en signala l’importance, et, dans son History of economics, il rappelle que M. Michel Chevalier le félicita « d’avoir découvert » Condillac.
     Depuis, différents Dictionnaires d’économie politique lui ont consacré de courts articles, et la plupart des histoires des doctrines économiques ont analysé brièvement ses idées.
     Il n’est guère, en outre, de traité récent d’économie politique qui n’expose sa théorie de la valeur. Mais son œuvre n’a jamais encore été l’objet d’une étude spéciale.
     Quesnay, Vincent de Gournay, le marquis de Mirabeau, Turgot ont suscité de nombreuses monographies : Condillac n’a jamais eu la sienne.
     Et cependant tous les historiens des doctrines économiques s’accordent actuellement à reconnaître le grand intérêt qui s’attache au Commerce et au Gouvernement considérés relativement l’un à l’autre et d’éminents économistes ont manifesté le regret de le voir rester enseveli dans l’oubli.
     Aussi espérons-nous que, si imparfait qu’il soit, ce livre aura quelque utilité. L’étude des théories du passé est toujours féconde en enseignements précieux ; elle est une condition essentielle du progrès scientifique. C’est là, certes, une idée qu’il est presque banal d’exprimer aujourd’hui : grâce à cette suprématie de l’esprit historique, qui, comme on l’a dit, caractérise par-dessus tout le XIXème siècle, il ne viendrait à l’esprit de personne de la contester. Mais si cependant elle réclamait une justification, c’est à Condillac lui-même que nous aurions recours, car jamais philosophe n’a proclamé, en termes plus nets, la nécessité de connaître les différentes conceptions scientifiques qu’a imaginées dans le passé l’esprit humain à la recherche de la vérité. « Il est essentiel, pour quiconque veut faire par lui-même des progrès dans la recherche de la vérité, de connaître les méprises de ceux qui ont cru lui en ouvrir la carrière. L’expérience du philosophe, comme celle du pilote, est la connaissance des écueils où les autres ont échoué, et sans cette connaissance il n’est point de boussole qui puisse le guider. » (Essai sur l’Origine des connaissances humaines, Introduction.)

***

     Cet ouvrage se divise en quatre parties.
     La première est consacrée à des recherches historiques sur Condillac et sur Le Commerce et le Gouvernement considérés relativement l’un à l’autre.
     Nous avons essayé de dégager, dans la seconde, les caractères généraux de la science économique à l’époque où parut Le Commerce et le Gouvernement et les progrès qu’il réalisa ; de mettre en lumière les liens qui unissent la philosophie de Condillac à son économie politique. Les deux derniers chapitres traitent de la méthode condillacienne et de son application à la science économique.
     La troisième partie est constituée par une analyse très objective du Commerce et du Gouvernement. Le dernier chapitre contient des notes historiques qui ont pour but de montrer que Condillac appuyait ses raisonnements non seulement sur des hypothèses, mais sur des faits.
     Enfin, dans la quatrième, nous examinons, à la lumière des progrès actuels de la science et relativement aux ouvrages des contemporains de Condillac, ses principales théories.

     Ce plan appelle quelques observations.
     Nous n’avons gardé de» la biographie de Condillac que ce qui nous a paru indispensable pour éclairer la formation de ses idées économiques. Nous avons rejeté dans une note un bref résumé de sa vie, estimant qu’une biographie détaillée eût été sans intérêt.
     Les développements qui concernent la méthode de Condillac paraîtront peut-être exagérés. Mais il était nécessaire de leur donner une très grande ampleur, car Condillac lui-même, au début du Commerce et du Gouvernement nous renvoie expressément à sa Logique et nous annonce que son but capital a été d’appliquer l’un des principes les plus importants de sa méthode à la science économique. Nous devons en outre faire remarquer que Condillac est avant tout un logicien et que l’influence que sa méthode a exercée sur toutes les sciences a été, jusqu’au milieu du XIXème siècle, considérable.
     La troisième partie n’est, si nous osons nous exprimer ainsi, qu’une réduction de l’original. C’est une analyse absolument objective. Nous avons tenu à ne couper l’enchaînement des idées de Condillac par aucune critique, ni réflexion personnelle. Nous sommes fermement convaincu qu’en agissant ainsi nous avons fait, quoi qu’il en puisse paraître, œuvre plus utile que si nous avions disséqué idée par idée et rendu méconnaissable Le Commerce et le Gouvernement. L’examen critique se trouve par suite séparé de l’analyse proprement dite et rejeté dans la quatrième partie.
     Peut-être dira-t-on qu’il eût mieux valu renvoyer le lecteur au livre lui-même que lui offrir un simple résumé ? Mais c’est à notre avis une erreur certaine. La lecture d’un ouvrage comme celui de Condillac exige un temps relativement long et, pour en dégager les principes essentiels, une étude souvent difficile ; notre troisième partie abrège considérablement temps et travail. Il serait éminemment précieux, pour tous ceux qui étudient l’histoire des doctrines économiques, d’avoir pour chaque économiste du passé un résumé fidèle de son œuvre, à la fois bref et cependant suffisamment étendu pour permettre de juger non seulement telle ou telle idée, mais de se faire une impression d’ensemble, de distinguer facilement les caractères généraux, la méthode suivie, d’apercevoir nettement l’enchaînement des idées, sans être dérouté par des critiques inspirées le plus souvent par les conceptions personnelles du commentateur.
     Tel est le but de notre troisième partie.




PREMIERE PARTIE

RECHERCHES HISTORIQUES SUR
CONDILLAC ET SUR SON ŒUVRE
ÉCONOMIQUE.





CHAPITRE PREMIER

L’HOMME ET LE MILIEU



     La biographie, comme l’a dit Rossi, peut avoir son utilité pour l’histoire de la science, car il est parfois des faits personnels qui exercent une influence certaine sur le développement scientifique de l’individu et sur les créations de son génie (1). C’est ainsi, par exemple, que les divergences qui séparent les conceptions économiques de Vincent de Gournay et de Quesnay trouvent leur explication dans la différence des milieux où ils vécurent et des occupations auxquelles ils se consacrèrent.
     La vie de Condillac n’offre aucune de ces particularités remarquables (2) : elle se passa tout entière dans l’étude ;

(1) Rossi, Journal des Economistes, année 1842, t. Il, p. 222.

(2) Condillac était né à Grenoble en 1715, d’une famille de robe appartenant au Parlement du Dauphiné et alliée à celle des Tencin. En 1746 il fit paraître l’Essai sur l’origine des connaissances humaines ; en 1749, le Traité des Systèmes. En 1762 il est nommé, en même temps que Fontenelle, membre de l’Académie royale de Berlin. Deux ans après parut le Traité des Sensations, ouvrage par lequel il est surtout connu maintenant et dont Michelet a dit que le titre contenait tout le siècle. Après avoir publié l’année suivante le Traité des Animaux, il fut choisi comme précepteur de l’Infant de Parme, et c’est pour ce prince qu’il composa le Cours d’études, qui comprend, outre des Leçons préliminaires, la Grammaire, l’Art d’écrire, l’Art de raisonner, l’Art de penser, et un cours d’Histoire ancienne et moderne. Condillac revint en France vers 1768 et, le 22 décembre de cette année, il fut élu membre de l’Académie française où il succéda à l’abbé d’Olivet. En 1770 il semble s’être retiré à la campagne, dans son château de Flux près de Beaugency. Il s’occupa, de 1770 à 1775, de la publication du Cours



4 CUNDILLAC ECUXOMISIIî:

sa régularilô et sa dignité furent constantes dans ce siècle où tant d’abbés n’eurent d’abbé que le nom, tel (îraliani. S’adressant à rinfant duc de Parme et de Plaisance, dont il fut le précepteur de 1757 à 1767, il trace celte fine esquisse de Texistence d’un homme heureux : « Quand on ne connaît pas le monde, dit-il, on l’imagine tout autrement et on juge par exemple que Paris est la ville des plaisirs ; mais, puisque vous n’êtes point fait pour y vivre, il faut vous apprendre que vous n’avez rien à regretter. A Paris les hommes les plus heureux ne sont pas enveloppés dans le tourbillon du monde : ils se tiennent à l’écart. Occupés par état ou par goût, ils ne cherchent un délassement que dans une compagnie d’amis choisis, occupés comme eux. Ils ne s’ennuient jamais quand ils sont ensemble, parce que leur conversation a toujours un objet. S’ils se taisent, ils ne s’ennuient pas encore, parce qu’ils ne se sont pas imposé la loi de parler comme font ceux qui n’ont rien à dire » (1). Telle fut sa propre vie : ce fut celle d’un penseur et d’un sage (2).

En retracer l’heureuse uniformité ne jetterait aucune lumière sur la formation de ses théories économiques. Cependant, quelles que soient l’originalité et la force d’esprit d’un

d’études, et, en 1776, il fit paraître Le Commerce et le Gouvernement considérés relativement l’un à Vautre. Le 2 {léceml)re 1777, le comte Ignace Potocki, grand notaire de Lithuanie, lui demandait, au nom du gouvernement de la Pologne, de composer une logique à l’usage des écoles palalinales. Condillac accepta et publia en 178() sa Logique, l^ même année, le 2 août, il mourut, à l’âge de 65 ans. Il laissait inachevé un ouvrage, la Langue des calculs, où il se proposait de montrer comment on peut donner à toutes les sciences la même exactitude qu’aux mathématiques. En 17î»8, on donna, d’après ses manuscrits, une nouvelle édition de ses (iMivres complètes, en 2:1 volumes. (Paris, Ch. llonel éditeur). — En 1821-21, une autre édition de ses cruvres complètes fut faite par M. A.-F. Tliery en IC vul.in-8" (Paris).

(1) Coiulillac, Œurrrs complclcs, t. XVII : Histoire moderney p. HîK^. — Paris, 17U8; Ch. Houel, édit.

(2) Daniiron, Mémoires pour servir à Vhisloiro de la philosophie au
w’ui* siècle, t. III. Paris, 18IU.



homme, il ne peut jamais se soustraire eomplèlement às(m temps, échapper à l’influence des idées qui dominent. Cette influence est d’autant plus grande qu’il est en relations plus étroites avec ses contemporains qui dirigent le mouvement intellectuel et qu’il y est lui-même plus activement mêlé.

Il est donc un côté de la vie de Condillac qui ne saurait nous laisser indifférents, surtout si l’on considère qu’il vécut au xviiio siècle, à cette époque où, parmi d’ardents enthousiasmes et de passionnées critiques, naissait la science économique : quels furent ses amis, ses lectures, son rôle dans les polémiques provoquées par les écrits de Quesnay et de ses disciples, telles sont les questions auxquelles nous essaierons de donner une réponse dans ce chapitre et dont la solution nous paraît devoir être utile dans l’étude du Commerce et du Gouvernement considérés relativement Vun à l’autre s

m

Dans sa propre famille, Condillac rencontra d’abord un homme qui fut Tun des représentants les plus connus du socialisme au xviip siècle, son frère l’abbé de Mably. Sauf en quelques rares passages de ses livres d’histoire et du Commerce et du Gouterncivcnt^ il ne se fit guère l’écho des théories fraternelles.

Il semble qu’il subit davantage Tinfluence de Jean-Jacques Rousseau. Il l’avait rencontré, vers 1740, chez un autre de ses frères qui était grand prévôt de Lyon. L’auteur du Contrat 5a