la servuction - Le Manager Marketeur
IAE - Université de Lyon 3 ... Email : vernette@univ-tlse1.fr ..... Un examen du
modèle d'immersion (« flow ») proposé par Hoffman et Novak (1996) ..... de point
de vente, Actes du 4ème Colloque Etienne Thil, La Rochelle, 27-28 septembre.
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La servuction « on line » :
points communs et spécificités face à la
servuction traditionnelle
William SABADIE
Maître de Conférences
IAE - Université de Lyon 3
Equipe de recherche IRIS
Email : HYPERLINK "mailto:william.sabadie@univ-lyon3.fr" sabadie@univ-lyon3.fr
Eric VERNETTE
Professeur des universités
I.A.E. de Toulouse
Laboratoire de recherche C.R.G-Marketing
Email : HYPERLINK "mailto:vernette@univ-tlse1.fr" vernette@univ-tlse1.fr
La servuction « on line » :
points communs et spécificités face à la
servuction traditionnelle
Résumé
Lobjectif de cette communication est dexpliquer en quoi la relation médiatisée par un site Web peut être envisagée comme une relation de service et le site Web comme un élément du système de servuction. Corrélativement, il sagit détudier les points communs et les spécificités des servuctions électronique et traditionnelle. Le propos est de montrer que la littérature sur les rencontres de services traditionnelles et sur limpact de la technologie dans les services fournit une base théorique solide pour le management des relations électroniques.
Mots clés : servuction, relations électroniques, rencontre de service, Internet
Abstract
The objective of this communication is to explain in what ways the contact mediated by a Web site can be regarded as a relation of service and the Web site as an element of the system of servuction. Correlatively, the question is to study common points and specificites of electronic and traditional servuctions. We want to show that the literature on the traditional service encounters as well as on the impact of technology on the delivery of services allows one to provide a solid theoretical basis for the management of electronic relations.
Key words : servuction, electronic relations, service encounter, Internet
Remerciements
Les auteurs remercient Jean-Philippe Galan pour ses suggestions.
Parmi le grand nombre de questions théoriques et managériales consécutives à la diffusion des services internet, tant dans les domaines du B to B et B to C, celle de la pertinence des modèles et concepts traditionnels du marketing constitue un champ de réflexion et de recherche majeur (Dubois et Vernette, 2001). En effet, le concept de « e-marketing » ne bouleverserait pas nécessairement tous les schémas et modèles traditionnels de comportement du consommateur, même sil impose des ajustements et des reformulations majeurs, comme ceux proposés par le modèle dimmersion dHoffman et Novak (1996) ou de Novak, Hoffman et Yu (2000). Ainsi un concept marketing classique, tel que celui de servuction (Eiglier et Langeard, 1987) pourrait conserver un éclairage théorique intéressant pour le marketing management dun site internet, au prix dadaptations liées au fonctionnement du Web. Dans la même direction, Filser (2001) montre les apports et les limites des modèles traditionnels de choix dun point de vente, lorsquils sont appliqués dans un contexte de commerce électronique.
Cependant, lInternet créé un univers virtuel, tel que la distinction traditionnellement opérée par le marketing entre produits et services sur la base de leur tangibilité na plus forcément de sens (Volle, 1999). Plus particulièrement, les sites de e-commerce, tels que Amazon.com révolutionnent la vente de produits de grande consommation en abolissant la frontière entre produits et services. Même si les produits vendus sont bien réels, ce qui est présenté au consommateur n'est qu'un avatar, une abstraction, les produits et les services sont accessibles sous une forme digitalisée identique au travers dun réseau dinformation unique (Rayport et Svioka,1995). De plus, l'intangibilité des produits sur le Web facilite l'intégration des services dans l'offre des distributeurs (Grönroos et al., 2000). Aujourdhui les vendeurs en ligne ne fournissent pas quun choix de produits mais un accès 24 heures par jour toute lannée, une diminution des barrières géographiques grâce à des coûts et des délais de livraison de plus en plus faibles, un support pour la sélection de produits
De telle sorte que le site Web est devenu le lieu de la rencontre de service. Mais lintangibilité de la relation dépasse le cadre du e-commerce. Ce constat est également valable pour des sites informatifs ou ludiques. Le propos est de montrer que la nature de la relation électronique peut amener chercheurs et managers à sinspirer des principes de management dune servuction.
L'objectif de cette communication est dévaluer en quoi la distribution électronique peut être considérée comme une relation de service et le site Web comme un élément du système de servuction (Eiglier et Langeard, 1987). Le site Web est défini comme l'interface technologique qui soutient la rencontre de service (service encounter) entre l'entreprise et ses clients. Dans un premier temps, nous envisageons les apports du marketing des services au management de la relation médiatisée par un site Web. Il sagit donc de montrer que la littérature sur les rencontres de service, sur la qualité de service, ainsi que sur l'impact de la technologie sur la délivrance des services permet de fournir une base théorique solide pour appréhender la relation entre un fournisseur et un client médiatisée par un site Web. Nous présenterons les analogies quil est possible détablir entre les concepts de service « traditionnel » et lapproche des services « on line ». Dans un second temps, par un effet de feed-back, les nouvelles technologies, et notamment celles qui permettent le libre service, modifient la conception traditionnelle de la rencontre de service. Nous soulignerons ainsi les implications managériales découlant de ces spécificités et tracerons quelques pistes de recherche pour la servuction électronique.
I - Le site Web comme INTERFACE DE LA rencontre de service
Eiglier et Langeard (1987) ont une conception systémique de la production du service : le service constitue lobjectif et le résultat du système de « servuction » dun prestataire. La servuction est définie comme « lorganisation systématique et cohérente de tous les éléments physiques et humains de linterface client-entreprise nécessaires à la réalisation dune prestation de service dont les caractéristiques commerciales et les niveaux de qualité ont été déterminés. » Dans loffre de service, on distingue souvent les services principaux (« core service ») qui satisfont le besoin principal du client et les services auxiliaires (« peripheral services ») qui facilitent laccès au service de base ou y ajoute de la valeur (Eiglier et Langeard, 1987 ; Grönroos, 1984, 1993).
Le service résulte de linteraction de trois éléments de base nécessaires à sa production et à sa distribution : le client, le support physique et le personnel en contact qui subissent, en arrière-plan, la coordination du système dorganisation interne à lentreprise et la présence des autres clients. Le concept de servuction souligne limportance du processus. Le service, en tant que résultat, ne peut être dissocié de la manière selon laquelle il est fourni (Grönroos, 1984). La rencontre de service (service encounter) est décrite comme le « moment de vérité » au cours duquel les clients et les employés coproduisent le service (Bitner, 1990, 1995 ; Eiglier et Langeard, 1987 ; Zeithaml et al., 1988).
Le marketing des services repose sur les spécificités de ce secteur dactivité : lintangibilité, linséparabilité et lhétérogénéité. Les services sont traditionnellement considérés comme physiquement intangibles, ils sont un acte de la part du prestataire et une expérience pour le bénéficiaire (Bateson, 1977). Le processus de production dun service est simultané à sa distribution et à sa consommation (Eiglier et Langeard, 1987 ; Grönroos, 1984). Les services sont hétérogènes dans la mesure où ils reposent sur une relation interpersonnelle et que leur évaluation est à la fois situationnelle et subjective.
Chercheurs et managers ont envisagé les conséquences de ces spécificités sur le management de la relation entre les clients et lentreprise. Or, toutes les entreprises, quel que soit leur secteur d'activité, créent une relation de service lorsqu'elles décident de mettre en ligne un site Web. Corrélativement, la question qui se pose est de savoir si le concept de rencontre de service est applicable et opportun pour définir la nature de la relation entre un vendeur virtuel et ses clients. Par conséquent, il est intéressant comparer les principes de management de la relation dun service traditionnel avec ceux dun service électronique, en partant des trois grandes spécificités reconnues pour le concept dun service traditionnel.
Intangibilité
Les services sont caractérisés par leur intangibilité. Demblée, on constate que lInternet renforce cette caractéristique dans la mesure ou lexpérience dachat se déroule dans un environnement virtuel. Les produits et les services existent comme des informations numériques (Rayport et Svioka, 1995). Le site Web soutient la rencontre de service en remplaçant linfrastructure matérielle traditionnelle des prestataires et peut être conçu comme un magasin virtuel (Filser, 2001). Cette accentuation de lintangibilité des services électroniques a des incidences sur lajustement de loffre à la demande, la protection de loffre et son évaluation (cf. tableau 1). Certaines facilitent le processus de gestion de la servuction on line, dautres le compliquent.
Ajustement de loffre à la demande
Dans environnement de service traditionnel, lajustement de loffre à la demande est un problème crucial. Les activités de services sont souvent soumises aux fluctuations temporelles de la demande. En cas daffluence, le prestataire est obligé dadapter son potentiel de production ou de refuser des clients. Sil accepte un nombre de clients supérieur à ses capacités, il court le risque de créer de linsatisfaction (temps dattente, délais de livraison, erreurs dans la prise de commande, etc.).
La distribution électronique des services nest que partiellement soumise à ces effets, doù un avantage potentiel en terme de flexibilité de la servuction. LInternet permet de proposer réseau de distribution international, 24h/24h, à un grand nombre de clients. Il est toujours possible de surdimensionner le serveur (nombre daccès simultanés, vitesse de transfert des données) pour faire face à des pointes de trafic limitées dans le temps, par un investissement technologique dun coût acceptable. En revanche, la maîtrise de lencombrement du réseau et léquipement personnel des clients en informatique nest pas maîtrisable en B to C. On peut cependant noter que cette contrainte est plus facile à gérer dans le cas de services Intranet. Au fond, dans un environnement électronique, lajustement des capacités de loffre à la demande concerne essentiellement le système dorganisation en back-office. En effet, la servuction nimpose pas nécessairement la présence physique du personnel de contact (le traitement des réclamations ou laide en ligne peut conduire à prévoir un personnel via une plateforme téléphonique par exemple). La performance du prestataire repose en grande partie sur la flexibilité et la réactivité de la chaîne logistique qui assure notamment la gestion des stocks, la livraison des produits et le service après-vente. Remarquons enfin que, lexistence de produits manquants a souvent posé problème pour lexécution de la commande du « panier électronique », bien quen théorie, la gestion des stocks soit facilitée par lautomatisation des processus de saisie électronique de la commande.
Tableau 1 - Lintangibilité de la servuction traditionnelle versus électronique
CaractéristiquesServuction
TraditionnelleServuction
Electronique
Ajustement offre et demande
Capacités de servuction
Gestion du temps dattente
Gestion des réclamations
Focalisation sur ladéquation des moyens de distribution à la demande
Difficile ou coûteuse
«Yield management »
Ajustable mais coûteux
(personnel de contact)
Traitement en temps réel possible
Focalisation sur ladéquation de la logistique (préparation, manquants, expédition)
Flexibilité théorique aisée (accès, vitesse) ; en pratique difficile à contrôler (saturation réseau).
Réactivité technique possible
Traitement en temps réel difficile ou coûteux ; « Hot line »Protection de loffre
Protection difficileProtection difficile, voire impossibleCritères dévaluationDifficultés pour évaluer loffre avant la productionIdentique avec un risque perçu plus fort (sécurité transaction, livraison, délais
)
Protection des services
Loffre de services est facilement imitable dans la mesure où elle ne peut être brevetée. De la même manière, on constate labsence de protection légale sur le concept de site Web, son ergonomie et même ses éléments graphiques. Malgré tout, la marque et le nom de domaine sont protégeables pour un coût très modique. Dune manière générale, lutilisation de la technologie et de la distribution électronique ne constituent pas un avantage compétitif à long terme (Volle, 1999 ; Tomiuk, 2000). Cest pourquoi, la qualité des services reste le principal moyen de différenciation des offres électroniques et de fidélisation des clients.
Evaluation des services
Lintangibilité rend difficile lévaluation dun service avant, et même parfois après sa consommation (Eiglier et Langeard, 1987). Par comparaison avec lacquisition de produits tangibles, lachat de services est perçu comme présentant un degré de risque plus élevé durant les phases préalables à lachat.
Les caractéristiques de la distribution électronique participent à renforcer ce sentiment de risque. Lachat en ligne présente des incertitudes quant aux caractéristiques des produits/services commandés et à la fiabilité des procédures mises en uvre par le prestataire (délais de livraison, sécurité des paiements, gestion des réclamations, etc.). Dautre part, les problèmes de sécurité et de confidentialité constituent un réel obstacle à son développement. Enfin, dans un environnement de service traditionnel, la confiance repose notamment sur la relation interpersonnelle qui est absente de lenvironnement électronique. Ceci constitue un handicap certain pour la servuction électronique face à la servuction tradionnelle.
Face à ce constat, les prestataires doivent utiliser des réducteurs de risques. Cases (2002) distingue les réducteurs de risques liés aux conséquences dun mauvais achat (éléments garantissant léchange du produit, le remboursement) et ceux liés à lincertitude de lachat (la connaissance de lenseigne et/ou la marque, lavis des autres clients, la crédibilité et la précision de linformation).
Le distributeur peut améliorer la confiance des clients à chaque étape du processus dachat. Labsence de contact physique avec le prestataire lors de lachat en ligne renforce le besoin de clarté et de précision des informations sur loffre. Les possibilités graphiques et interactives dInternet permettent dadapter la forme et le contenu des informations délivrées aux internautes selon leurs attentes et leurs motivations (cf. annexe 1). La crédibilité de linformation peut être renforcée par la dimension sociale de lexpérience de service. Par exemple, certains vendeurs proposent à leurs clients de prendre connaissance et même de discuter avec dautres clients pour connaître leurs avis sur loffre (« ce sont des gens qui ne travaillent pas pour eux alors je peux croire ce quils disent »). Dussart (1999) parle de transparence qui permet aux clients tout comme aux vendeurs de diminuer le risque perçu de la situation. Les clients peuvent également avoir la possibilité de tester les produits ou services (les shareware par exemple.) et/ou de faire des simulations. Muylle et al. (1999) parlent de virtualité (marketplace anchorage) : les opportunités offertes à lutilisateur dexpérimenter virtuellement, de simuler la réalité (observer un objet sur tous les angles en cliquant sur les parties qui nous intéressent, faire un devis gratuit dune assurance auto).
Le distributeur peut rassurer les clients en fournissant un accusé réception de la demande (« dès que jai commandé jai de suite un mail, puis jen reçois un autre quand ils ont reçu un disque puis un troisième pour me dire quils lont bien envoyé») et en les informant de son bon déroulement. Parfois, les clients ont aussi la possibilité dannuler des commandes (Amazon.fr laisse à ses clients la possibilité dannuler leur commande tant que cette dernière na pas été expédiée).
En labsence déléments objectifs de nature à atténuer le risque perçu, limage de marque et la notoriété semblent des réducteurs de risque potentiellement très important. Des études empiriques semblent montrer que le nom de marque est important lorsque les attributs dun produit sont difficiles à évaluer en ligne (Donthu et Garcia, 1999). Selon Filser (2001), lintégration du site Web dans un ensemble de canaux de servuction contribue à laccroissement de la confiance des clients. Dans ce cas, linterface Web offre des leviers de synergies en sappuyant sur la force du capital de marque des réseaux de distribution traditionnel des enseignes (Fnac, Nouvelles Frontières, La Redoute,etc). De plus, la possibilité doffrir à linternaute un contact interpersonnel, activable à tout moment. dun simple clic, constitue un réducteur de risque intéressant.
Enfin, les politiques en matières de confidentialité des données personnelles et de sécurisation des paiements contribuent à rassurer linternaute et influencent la qualité de lexpérience dachat en ligne (Cases, 2001 ; Korgaonkar et Wolin, 1999). Hoffman et Novak (1999) remarquent que les utilisateurs qui refusent de fournir des informations personnelles seraient prêt à la faire si le site expliquait comment ces données sont employées (cf. annexe 2).
Inséparabilité
La simultanéité de la production, de la consommation et de la distribution dun service a plusieurs conséquences : dune part, la qualité de linteraction entre le client et lentreprise est déterminante pour la réussite de la servuction, dautre part, le client participe à la production du service, enfin des interactions se produisent entre les clients consommateurs du service. Dans un environnement de service électronique, ces trois éléments existent de la même façon, et caractérisent ainsi la nature interactive dune relation médiatisée par un site Web (cf. tableau 2).
Tableau 2 - La simultanéité de la servuction traditionnelle versus électronique
Servuction
TraditionnelleServuction
ElectroniqueInteraction homme/hommeInteraction homme/machineParticipation des clients
Contrôle des clientsCohabitation des clientsCommunauté virtuelle
Interaction
Traditionnellement, la réussite de linteraction entre les clients et lentreprise repose sur le rôle du personnel en contact (Parasuraman et al., 1985 ; Bitner, et al., 1990 ; Hartline et Ferrell, 1996 ; Salerno, 2001). Par exemple, Bitner et al. (1990) ont identifié trois sources de satisfaction ou d'insatisfaction des clients vis-à-vis d'une relation de service : la capacité du personnel à personnaliser le service, la résolution des problèmes et les éléments inattendus qui surviennent durant l'expérience.
Lutilisation de la technologie modifie la nature de la rencontre de service (Dabholkar, 1994 ; Bitner et al., 2000 ; Meuter et al., 2000). Elle se substitue à la rencontre interpersonnelle. Dans un environnement Internet, si la qualité de la servuction repose toujours sur les éléments de linteraction, cest le site Web lui-même qui soutient la relation. Pour Ghose et Dou (1998), linteractivité est un facteur multidimensionnel qui, sur le site Web, se manifeste par des fonctions spécifiques telles que les liens hypertextes, les assistants virtuels ou les outils de simulation. L'interaction avec le site est vue comme l'étendue avec laquelle l'utilisateur peut participer en modifiant la forme et le contenu du site en temps réel (Deighton, 1996). Les particularités du Web font que le site commercial fournit l'occasion au consommateur d'adapter l'environnement d'achat à ses besoins. Finalement, par rapport à une servuction classique, le e-consommateur est en mesure de créer son propre service, sans sur-coût financier, doù un accroissement potentiel de valeur du service offert : certains auteurs voient dans cette possibilité technique et parlent de « mass-customazation ». On remarquera, comme nous lavions noté en introduction, que de ce point de vue, il devient difficile de séparer dans lInternet les produits des services purs : ainsi quand Dell offre au e-consommateur la possibilité de construire son ordinateur sur-mesure, les interpénétrations du tangible et de lintangible sont maximales, ce qui conduit à la production dun output « hybride » mi produit, mi service.
Plus généralement, lintroduction des technologies de self-service en général et de lInternet en particulier conduit à sinterroger sur la nature des interactions entre les clients et les employés dans le marketing des services (Dabholkar, 2000 ; Meuter et al., 2000). En effet, il nest plus nécessaire de proposer physiquement la présence dun vendeur qui facilite la transaction : la généralisation des guichets bancaires automatisés fournit un bon exemple de cette évolution. Mais cependant, la substitution des éléments relationnels de la servuction par une interface homme/machine peut ne pas convenir à tous les types de prestations. Ainsi que le notent Walker et Craig-Lees (1998), quand une relation interpersonnelle est normalement attendue, il faut veiller à ce que la technologie ne crée pas une distance avec le client. Ce point est confirmé par Galan et Sabadie (2001) qui montrent que la majorité des internautes souhaitent disposer d'un contact par courrier ou par discussion en ligne sur une site Web commercial (" l'essentiel c'est que l'on puisse avoir quelqu'un à qui parler au cas ou l'on aurait un problème... ça aura beau être très simple, très clair, pour certains pour moi se sera sûrement très compliqué. Il faut vraiment soit que je puisse poser des questions directe et que j'ai une réponse soit par l'intermédiaire de quelqu'un soit par un système de réponses déjà préétablies"). Ces contacts peuvent servir à recueillir et à traiter les réclamations des clients dont l'importance a été soulignée par Bitner et al. (1990). Ils peuvent favoriser l'expression des clients en cas de problème et permettre la correction rapide d'éventuelles erreurs. Le vendeur en ligne peut également mettre à la disposition de ses clients des outils d'assistance pour les informer et les guider tout au long du processus d'achat ou de consommation (cf. annexe 3). Ces outils ont notamment pour rôle de pallier l'absence du personnel en contact qui pouvait orienter et conseiller les clients (FAQ, assistant virtuel, messagerie, conseil en ligne).
Malgré tout, ces aides ne sont pas toujours aisément mobilisables, car toute servuction « on-line » implique pour le consommateur un apprentissage minimal, plus ou moins important selon son expertise antérieure et ses caractéristiques socio-démographiques, doù une perte de valeur potentielle du service électronique par rapport à une servuction traditionnelle. La qualité de lergonomie du site devient alors un attribut déterminant pour le choix dun site et la satisfaction consécutive à sa visite (Gonzales, 2001 ; Ladwein, 2001).
Rôle des clients
Le client est un acteur du système de servuction. La participation du client se mesure par le degré deffort, en termes physiques et mentaux, nécessaire à la production et à la réalisation du service. Cette participation offre la possibilité de personnaliser le service rendu (Hartline et Ferrell, 1996 ; Salerno, 2001). Mais elle constitue également une source dimprévisibilité et derreurs lorsque le client nadopte pas le « script » défini par le prestataire.
Dans un environnement de service traditionnel, la participation du client se concrétise par les interactions entre le support physique et le personnel en contact. Le client doit fournir de linformation et utiliser les différents éléments de la servuction. Cest pourquoi, il doit être formé et informé de façon à améliorer sa participation au processus de prestation de services. Un client qui sait formuler sa demande, en connaît et en comprend les implications, sera mieux servi, plus rapidement.
La capacité relationnelle de lInternet en général et celle dun site Web en particulier modifient fondamentalement la conception traditionnelle de lexpérience de service. Linternaute participe plus quavec tout autre média de distribution à la rencontre de service. Cest lui qui entre en relation avec lentreprise. Il décide du moment et du lieu de la relation. De plus, il contrôle lexpérience de service en organisant par lui-même sa navigation selon ses attentes et son degré dexpertise. Le site Web est linterface qui permet de soutenir la coproduction du service. Le rôle du concepteur est dutiliser le potentiel relationnel que lui offre la technologie afin de permettre la participation du client en lui proposant une interface facile à utiliser, efficace, conviviale et un contenu qui corresponde à ses attentes. Labsence de contact avec les employés nécessite que le site soit suffisamment avancé techniquement et facile à utiliser pour le client. Le client doit acquérir les connaissances et les compétences pour naviguer et utiliser le site Web. Le prestataire peut également proposer des outils daide en ligne qui se substitue au contact interpersonnel. Un examen du modèle dimmersion (« flow ») proposé par Hoffman et Novak (1996) montre que la plupart des variables trouvent leur origine dans le concept dinteractions entre le site et le consommateur. Par exemple, lors dune visite de découverte dun site, linternaute tend à adopter un comportement de nature expérientielle : les interactions doivent lui faciliter lapprentissage, puis la maîtrise du site, de façon à fournir une carte du service quil pourra mobiliser ultérieurement. Une bonne organisation du site (arborescence, ergonomie, attractivité, lisibilité) devrait augmenter la quantité des interactions entre lhomme et la machine (nombre de pages vues, durée de visite), mais aussi la qualité des interactions (attention, réactivité, exploration plus profonde), ce qui favorise limmersion de linternaute.
De surcroît, le potentiel interactif dun site permet un échange bi-directionnel et un fort degré de contrôle des clients (Costes, 1999). La variable de contrôle est particulièrement importante dans le contexte dune technologie de self-service (Dabholkar 1996 ; Eastlick, 1996 ; Meuter et al., 2000 ; Zeithaml et al., 2001). Elle influencerait positivement les évaluations de la qualité des services. Eastlick (1996) montre que le contrôle de linternaute sur le magasinage et la personnalisation sont des éléments clés de lintention dutiliser le télé-shopping interactif. La perte de contrôle constitue également une source de frustration (Helme-Guizon, 2002). Par exemple, léchec dune recherche dinformation, ou lobligation de téléphoner à un conseiller pour obtenir un renseignement peuvent être vécus comme des éléments très négatifs. La spécificité de lInternet en tant que media dinformation (Ladwein, 2001) fait que les internautes ont des attentes élevées quant à la largeur de lassortiment de produits/services, la qualité des informations sur loffre et la facilité daccès à ces informations. La perte de contrôle induit des coûts psychologiques, financiers et temporels.
Parasuraman (2000) suggère de segmenter les clients selon leur prédisposition à adopter des nouvelles technologies au travers de concept de « Technology Readness Index », cest-à-dire la propension des consommateurs à adopter et à utiliser une nouvelle technologie pour atteindre un but professionnel ou privé. La recherche de Eastlick (1996) montre que lattitude ou les croyances des individus par rapport au magasinage en ligne sont de bons prédicteurs de leur propension à adopter ce mode dachat. De la même manière, le rôle des clients via Internet doit être congruent avec leurs capacités, leurs connaissances et leur familiarité avec ce média (Kolesar et Galbraith, 2000).
Dimension sociale
La présence dautres consommateurs durant le processus de production est une des conséquences les plus importantes de linséparabilité. Le plus fréquemment, dans les services traditionnels, la présence dautres clients est perçue négativement car elle constitue une gêne, une entrave à la disponibilité des locaux et du personnel, une attente supplémentaire. On remarquera cependant que, dans dautres cas, la présence dautrui est souhaitée : comme preuve du succès du prestataire, elle rassure ; en tant quélément de convivialité, de partage dune expérience.
Internet permet de créer et de soutenir une relation interactive entre les différents utilisateurs du site Web, mais celle-ci sera dune autre nature que celle proposée par les services classiques (cf. annexe 4). La dimension communautaire dun site Web repose sur lintensité des relations qui sétablissent entre les internautes se connectant (Hendon et Hendon, 1998). On peut distinguer un continuum sur lequel ces relations peuvent constituer un élément clé de loffre de service (les sites de ventes aux enchères ou dachats groupés), apporter une valeur ajoutée (forums de discussion dinternautes experts dun domaine), ou rassurer les clients (consultation des critiques des acheteurs).
1-3 Hétérogénéité
La nature systémique de la production dun service explique lhétérogénéité possible de la prestation rendue. Toute modification de la performance dun des éléments de la servuction peut influencer son résultat (Bateson, 1977 ; Zeithaml et al., 1985). Théoriquement chaque expérience est unique. Lhétérogénéité des services pose le problème de la standardisation de loffre ou de son individualisation (cf. tableau 3).
Tableau 3 - Lhétérogénéité de la servuction traditionnelle versus électronique
Servuction
TraditionnelleServuction
Electronique
Standardisation
ou
Personnalisation
Standardisation
et
Personnalisation
Dans la servuction traditionnelle, linterface fournisseur-client peut être utilisée pour mieux connaître les besoins spécifiques de chaque client et apporter un service qui pourra être perçu comme « sur mesure ». Au contraire, la standardisation cherche à homogénéiser les prestations, à diminuer les coûts et à augmenter la rapidité du service.
Les problèmes liés à lhétérogénéité sont moins évidents sur Internet en raison de luniformisation des transactions médiatisées par un ordinateur. Les avantages de la technologie peuvent reposer sur la standardisation des services, la diminution des coûts administratifs reliés à chaque transaction et la réduction du nombre de contacts entre les employés et les clients. Ainsi, la principale cause de lhétérogénéité, la relation de contact avec les employés, est supprimée. Néanmoins, de nombreux éléments sont difficiles à contrôler, dans le cas où cest client qui construit lui-même la servuction.
La personnalisation est également le principal argument pour introduire la technologie (Bitner et al., 2000). Traditionnellement, le succès dune rencontre de service repose sur la capacité du personnel en contact à sadapter aux attentes des clients par son écoute, sa disponibilité et ses compétences. Dans un environnement électronique, la personnalisation de la relation repose sur les fonctions interactives du site Web. La création et lexploitation de bases de données informationnelles permettent aux employés et/ou au site Web de proposer des services adaptés aux profils des clients (cf. annexe 5). Chaque visiteur, en fonction des caractéristiques individuelles déclarées, volontairement ou enregistrées à son insu par le site Web (les « cookies ») peut se voir proposer un contenu et une structure de site spécifique (Alba et al., 1997 ; Korgaonkar et Wolin, 1999). La relation de service médiatisée par un site Web trouve son aboutissement logique lorsque le consommateur créé le service par lui-même en définissant les caractéristiques du produit et/ou les conditions de vente quil recherche. Ainsi, le succès de Dell sexplique au moins autant, sinon plus, par la possibilité dun service interactif de construction sur-mesure de « son » micro-ordinateur, que par les qualités intrinsèques du produit.
II - LA SERVUCTION ELECTRONIQUE : IMPLICATIONS SPECIFIQUES ET VOIES DE RECHERCHE
Nous avons montré dans le paragraphe précédent que le concept classique de servuction, offre une bonne approche du marketing électronique, en considérant le site Web comme une expérience de service. Nous allons maintenant prolonger ces réflexions, en envisageant quelques implications managériales qui, bien que sappuyant sur les principes de la servuction classique, révèlent aussi des spécificités propres à la servuction électronique. Dans un second temps, nous dégagerons les voies de recherche qui nous semblent nécessaires dans le domaine de la servuction « on line ».
2-1 Quelques implications managériales
Primauté de la qualité des interactions électroniques
Traditionnellement, la relation entre le personnel en contact et les clients est considérée comme lélément contribuant le plus à la qualité dune expérience de service. En transposant ce principe au service électronique, on constate que ce sont les capacités interactives dun site Web qui se substituent au personnel en contact, et deviennent de ce fait le cur stratégique la servuction électronique. En élargissant ce principe à celui des interactions entre les clients, Wolfinbarger et Gilly (2000) considèrent que, dans le cadre dun objectif expérientiel de visite dun site, cette possibilité dinteractions avec dautres acheteurs (recommandations, évaluations par les clients des services, etc.) constitue une attente déterminante des internautes.
Ainsi, toute entreprise qui souhaite « basculer » un service traditionnel vers le média électronique doit au minimum concevoir une interactivité capable doffrir une valeur au client comparable à celle offerte par le personnel en contact dont le rôle est, dans la servuction classique, notamment dadapter loffre aux attentes des clients et de les rassurer quant à la qualité de loffre. Par exemple, une servuction bancaire électronique peut ne pas créer, voire détruire, de la valeur par rapport à une relation au guichet (cf. tableau 4). En effet, certains clients attribuent une valeur spécifique à la relation interpersonnelle (Benamour et Prim, 2000). Le client ne dispose que de très peu de possibilité dinteractions dans la relation médiatisée avec un distributeur de billets ou un automate de dépôt de chèque, notamment en cas dincident (carte bancaire avalée, virement erroné, contestation sur les montants, etc.) ; à linverse, le face à face avec un personnel en contact réduit ce risque et permet de résoudre en tant réel la quasi-totalité des incidents.
Tableau 4 - Comparaison des servuctions pour une opération bancaire courante
Caractéristiques de la servuction
« virement bancaire »Servuction classique
(Face à face au guichet)Servuction électronique
(site web ou automate bancaire)Temps dattente
du serviceVariable
- encombrement du guichet
(en général de 0 à 20 minutes)Variable
- encombrement du réseau,
- performance du matériel de linternaute
- temps de chargement des pages daccueil, arborescence du site
(en général de 5 à 10 minutes)Durée de réalisation du service Très court
(1 à 2 minutes)Court à long
-expertise de linternaute
-ergonomie du site
(2 à 5 minutes)Participation du client à la servuctionRéduiteTotaleRisque assuré par le client en cas de réclamationNul ou réduit :
-responsabilité de lagent engagée
- remise dun bordereau, signature, date dopération
Fort
-responsabilité de linternaute en cas derreur de saisie
- signature électronique peu fréquente
- possibilité de virus ou de « chevaux de Troie » sur lordinateur
On pourrait de la même façon sinterroger sur le bénéfice retiré par lutilisateur dun site Web bancaire, en comparant le degré de participation exigé pour la production du service électronique par rapport à celui requit pour lexécution du service traditionnel. A priori, il est surprenant de faire payer un service électronique qui exigerait plus de participation du client que le service traditionnel, surtout si ce dernier est gratuit et ne demande aucune participation au client. Le tableau 4 montre que la valeur de la servuction électronique existe, mais pour certains segments et seulement dans certaines situations dachat : par exemple, dans les cas de fermeture des guichets ou de domiciliation éloignée du client par rapport à lagence.
Une implication managériale majeure qui découle de cette comparaison est que les servuctions classiques et électroniques pourraient être perçues par les clients comme complémentaires et pas forcément substituables. Le relatif échec de la « banque à domicile » sexpliquerait, pour partie, par une lecture stratégique ambiguë de ces attentes contrastées. En effet, remplacer souvent pour des raisons déconomie de coût une servuction par lautre, en occultant les exigences requises en matière de participation du client, peut engendrer une insatisfaction de nombreux segments de clientèle. Une solution marketing serait doffrir une gamme de services comportant un bas de gamme standardisé et gratuit (la servuction électronique sans contacts interpersonnels) et un haut de gamme personnalisé payant (la servuction électronique avec contacts interpersonnels). Force est de constater que les positionnements bancaires actuels en matière de services et de prix sont souvent orthogonaux avec cette recommandation.
De façon symétrique, on peut expliquer le succès de site comme Boursorama par leur interactivité totale et une participation réduite du client, combinées à un service gratuit. Par exemple, la servuction « Suivi de la valeur de mon portefeuille de titres » classique, lorsquelle est opérée par lagence bancaire, nécessite souvent diverses opérations (recherche des codes des valeurs, connexion sur différentes bases, temps dattente au guichet, etc.). En contrepartie, le service électronique est fondée sur une interactivité totale (modification du contenu de portefeuille, suivi à la minute près de la valorisation) et une participation faible, dès lors que le client a réalisé la contrainte de linvestissement initial en temps (saisie des lignes de son portefeuille, inscription sur le site).
2-2 Pistes de recherche
Une première voie de recherche serait de définir des normes de qualité de loffre Internet des entreprises. Corrélativement, on peut envisager de développer un instrument standard de mesure de la satisfaction de lutilisateur dun site Web. Zeithaml et al. (2001) définissent la qualité perçue électronique (« e-quality ») comme la mesure dans laquelle un site Web facilite de façon efficiente et efficace la visite, lachat et la livraison. Si le site Web constitue linterface qui soutient la rencontre de service, il faut se poser la question de l'évaluation de ces services et donc de l'efficacité du site du point de vue de sa capacité à médiatiser l'expérience de service vécue par les utilisateurs.
Grönroos (1984, 1993) et Parasuraman et al. (1985, 1988, 1991) expliquent lévaluation du client par la décomposition de lexpérience de service en grandes dimensions. Grönroos (1984, 1993) souligne limportance de la façon avec laquelle le service est délivré. Cette évaluation distingue les dimensions technique et fonctionnelle de la qualité. La première est relative au résultat du processus de servuction, cest à dire ce que le client a obtenu une fois lexpérience de service terminée. La seconde fait référence au processus en lui-même, à la façon dont lexpérience se déroule et à lenvironnement de lexpérience de service (Bitner, 1992).
Il nexiste pas de consensus sur la nature des dimensions de la qualité perçue dun site Web et leur contribution au jugement des clients (Dubois et Vernette, 2001). Selon Filser (2001), le jugement des clients se fonde sur les caractéristiques du site, loffre produit/service et la logistique. Les travaux sur la qualité perçue des services soulignent notamment l'importance du contact entre les clients et le personnel. Le rôle de la technologie sur la nature de la relation de service est un champ de recherche qui reste à explorer (Dabholkar, 1996, 2000 ; Parasuraman, 2000 ; Meuter et al., 2000 ; Bitner et al., 2000). En effet, le site Web est défini comme linterface technologique qui soutient la relation de service entre lentreprise et ses clients. La qualité de cette interface est étroitement liée au jugement des internautes quant à leur expérience de consommation : les couleurs et les graphiques sont-ils attractifs ? Les liens sont-ils logiques ? La vitesse du serveur est-elle suffisante ? C'est pourquoi, des recherches récentes tentent de préciser les dimensions dévaluation de l'expérience de service médiatisée par une interface technologique (Bitner et al., 2000 ; Dabholkar, 2000 ; Grönroos et al., 2000 ; Meuter et al., 2000 ; Zeithaml et al., 2001 ; Galan et Sabadie, 2001, 2002).
De nombreux auteurs proposent de distinguer les valorisations utilitaire ou hédonique de la visite (Hoffman et Novak, 1996 ; Muylle et al., 1999 ; Dandouau, 2001 ; Gonzales, 2001 ; Helme-Guizon, 2001). Les motivations utilitaires et/ou hédonistes induiraient des attentes variées et des modes de comportements soit dirigés vers un but, soit expérientiels. Hoffman et Novak (1996) ont noté que les besoins des visiteurs engagés dans un comportement fonctionnel, dirigé vers un but étaient différents de ceux engagés dans un comportement hédonique de « surf ». Les premiers visitent le site afin daccomplir un but donné alors que les autres veulent passer du temps ou être distraits par le site. Bensadoun-Medioni et Gonzales (1999) et Gonzales (2001) ont montré que la valorisation de la visite pouvait avoir une influence sur la satisfaction de linternaute. Ceci suggère que limportance relative des dimensions définies ici pourrait varier selon le but de la visite. Cette idée semble trouver un appui dans les résultats de Muylle et al. (1999). Ils suggèrent que dans le cadre dune visite utilitaire, ce sont tous les éléments liés à linformation (complétude, pertinence, compréhensibilité
) et son accessibilité qui sont prépondérants dans la satisfaction de linternaute. Helme-Guizon (2002) souligne que le consommateur en ligne engagé dans une navigation utilitaire est surtout irrité par le temps de transfert et lergonomie qui lempêchent daccéder rapidement à linformation voulue.
Par ailleurs, la qualité de service globale dun service on-line ne peut être dissociée des actions entreprises avec les autres média. Lexpérience de service résulte de la combinaison des moyens de communication habituels (téléphone, courrier, face à face). Zeithaml et al. (2001) soulignent que les consommateurs ne souhaitent pas utiliser Internet lorsquils éprouvent le besoin de voir ou de tester certains types de produits ou services. Une voie de recherche consisterait à étudier le ou les médias privilégiés selon le profil des clients et les situations dachat ou de consommation
Une seconde voie de recherche soriente vers la mise à jour des déterminants de la satisfaction des clients au terme de lexpérience de « service on line ». Aujourdhui, un consensus semble sétablir selon lequel la satisfaction serait un jugement subjectif résultant de deux processus, l'un affectif et l'autre cognitif, qui pourraient interagir (Hunt, 1977 ; Oliver, 1993, 1994, 1997 ; Ngobo, 1997 ; Aurier et Evrard, 1998 ; Plichon, 1999 ; Fournier et Glen Mick, 1999). Ces travaux sont établis sur une conception traditionnelle de l'expérience de service. Cependant, dautres chercheurs (Alba et al., 1997 ; Burke, 1997 ; Volle, 1999 ; Meuter et al., 2000) proposent une troisième dimension de la satisfaction liée à la valeur ajoutée du site Internet par rapport aux autres média de la servuction ; une étude empirique (Galan et Sabadie, 2001, 2002) va dans le même sens (cf. figure 1). Cette dernière dimension est liée à lutilisation dune innovation technologique et à ses potentialités. Un site Web est susceptible de proposer et de supporter la vente et la distribution du service, 24h/24 toute lannée sans avoir à passer par une autre interface (« je peux consulter mes comptes directement », « cela mévite un contact avec un employé trop pressé »). Il doit permettre de minimiser les efforts et le temps utilisé par le consommateur, de réduire le risque dune insatisfaction post achat en les aidant à rechercher et à comparer les offres.
Figure 1 - La satisfaction vis-à-vis de lexpérience de service électronique
(Galan et Sabadie, 2002)
Une troisième voie de recherche sinscrit dans la quête des déterminants de la fidélité de linternaute à un site. Peu de travaux existent sur cette question. Bergeron (2001) montre que la fidélité des consommateurs qui achètent en ligne dépend principalement de loffre de produits/services du prestataire, de la qualité des services, de sa fiabilité ainsi que de sa capacité à faire gagner du temps à ses clients.
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ANNEXE 1
ANNEXE 2
ANNEXE 3
ANNEXE 4
ANNEXE 5
PAGE 4
PAGE 10
Hédonique
Satisfaction
Utilitaire
Valeur Ajoutée du canal Electronique
Exemple de visite virtuelle sur le site Web
du Parc Astérix
Exemples de réducteurs de risques sur les sites Web
de La Redoute et de la Fnac
Exemple de contact interpersonnel sur
le site Web du Crédit Mutuel
Exemple de simulation dun prêt sur le site Web
de la Société Générale
Exemple de communauté de clients :
le Club dInvestissement de Self Trade
Exemple doutil dassistance aux utilisateurs sur le site Web de la Société Générale
Exemple de crédibilisation de loffre par les clients
sur le site Web de vente aux enchères Ebay
Exemples de création dun espace personnalisé sur les sites Web
dAir France et du Crédit Mutuel