Td corrigé IEUE Cleo 50.doc - Incroyants, encore un effort? - Free pdf

IEUE Cleo 50.doc - Incroyants, encore un effort? - Free

Des éléments flous qui empêcheront sans doute la CIF ?être une référence .... da ns un perspective historique trois sortes de logique éducative concourant au ...... et dont les neurones corticaux montraient des lésions caractéristiques que Fischer ..... Appareillage n. m. Tous les dispositifs utilisés pour prévenir, corriger ou ...




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Norbert Croûton










INCROYANTS,
ENCORE UN EFFORT…







Nouvelle édition
Mai 2014



SOMMAIRE

 TOC \o "1-2" 1. AVANT PROPOS  PAGEREF _Toc381799322 \h 4
2. ENTRETIEN D’UN PHILOSOPHE AVEC LA MARECHALE DE ***  PAGEREF _Toc381799323 \h 14
3. LA CONSCIENCE  PAGEREF _Toc381799324 \h 26
Première tentative d’explication  PAGEREF _Toc381799325 \h 26
Deuxième tentative  PAGEREF _Toc381799326 \h 39
Résultats et dernière tentative  PAGEREF _Toc381799327 \h 48
4. PREAMBULE  PAGEREF _Toc381799328 \h 67
5. ETHIQUES  PAGEREF _Toc381799329 \h 71
6. RAISONS D’ETRE DES RELIGIONS  PAGEREF _Toc381799330 \h 83
Raisons pratiques  PAGEREF _Toc381799331 \h 84
Les premières religions  PAGEREF _Toc381799332 \h 107
La religion chrétienne  PAGEREF _Toc381799333 \h 112
7. DIEU, QUELLE IDEE !  PAGEREF _Toc381799334 \h 152
8. SERMON SUR LA MONTAGNE  PAGEREF _Toc381799335 \h 169
9. RELIGION, ETHIQUE ET POLITIQUE  PAGEREF _Toc381799336 \h 176
10. DU CATECHISME  PAGEREF _Toc381799337 \h 190
11. LES DERNIERS MOMENTS  PAGEREF _Toc381799338 \h 201
12. MULTIPLICITE DES RELIGIONS  PAGEREF _Toc381799340 \h 213
13. SORTIR DES RELIGIONS  PAGEREF _Toc381799341 \h 222
14. UN MONDE EN CRISE  PAGEREF _Toc381799342 \h 228
Crise environnementale  PAGEREF _Toc381799343 \h 229
Crise énergétique  PAGEREF _Toc381799344 \h 234
Crise de la sélection naturelle  PAGEREF _Toc381799345 \h 251
Crise de l’intelligence  PAGEREF _Toc381799346 \h 253
Crise du sens moral  PAGEREF _Toc381799347 \h 273
Crise économique et sociale  PAGEREF _Toc381799348 \h 283
Crise institutionnelle  PAGEREF _Toc381799349 \h 320
Crise de la politique internationale  PAGEREF _Toc381799350 \h 342
15. EPILOGUE  PAGEREF _Toc381799351 \h 353



Nota 1 : le texte ci-après est un hypertexte qui permet de consulter des sites Internet ou de lire des bulles précisant le sens et le contexte des mots soulignés

Nota 2 : la version anglaise du texte est accessible en cliquant sur le drapeau britannique situé en haut et à droite de la page d’accueil

Israël

1. AVANT PROPOS PRIVATE TC \l 1 ""

Incroyants, encore un effort si vous ne voulez pas voir se réaliser cette prédiction de Malraux qui vous met mal à l’aise :  HYPERLINK "http://www.andremalraux.com/index.php?option=com_content&view=article&id=188%3Alle-xxie-siecle-sera-religieux-ou-ne-sera-pasr&catid=1%3Ails-ont-ecrit&Itemid=35&lang=fr" “ le 21ème siècle sera religieux ou ne sera pas ”.PRIVATE 
Vous avez pu croire jusqu’à une époque récente que la cause était entendue, que le doute ou au moins la prudence à l’égard des religions s’étaient établis dans tous les esprits et que la laïcité allait irrésistiblement s’imposer dans la vie publique sur tous les continents. Depuis la fin de l’empire soviétique, il semble que ce ne soit plus le cas. En Russie même  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Vladimir_Poutine" Poutine, le czar élu, un ancien du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/KGB" KGB, se réfère à Dieu dans ses discours et prie pour que la pluie éteigne les incendies qui ravagent la forêt russe ! Toutes les républiques et tous les satellites de l’ex Union Soviétique ont retrouvé leurs divinités favorites. En Turquie un régime fondé naguère sur la laïcité tend désormais à s’en écarter. En Irak ce serait une bonne surprise que feu le régime baasiste, d’essence laïque, ne soit pas remplacé par un régime théocratique assaisonné d’une guerre de religion. L’Afghanistan fragile n’est pas à l’abri d’une rechute. L’Iran a basculé il y a déjà un moment. Les conflits au Rwanda, au Soudan, dans l’ex Yougoslavie, en Irlande du Nord, en  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Palestine" Palestine, à Chypre, à Ceylan, entre l’Inde et le Pakistan, et dans de nombreux autres pays d’Asie et d’Afrique ont une origine religieuse, même si ce n’est pas leur seul aspect. Beaucoup d’états privilégient une religion et lui donnent un statut officiel. Aujourd’hui les partisans de la neutralité de la puissance publique en matière religieuse ont à faire face à une triple agression due aux  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Int%C3%A9grisme" intégrismes musulman, israélite et chrétien. Or il faut bien voir que l’intégrisme est une conséquence logique de la religion. Qu’est-ce en effet que l’intégrisme, sinon la croyance religieuse prise au sérieux ? Si vous avez l’intime et absolue conviction, et le but de la pratique religieuse est de vous la faire acquérir, que votre voisin se voue à la damnation éternelle en ne partageant pas la croyance qui vous anime, ce serait une véritable non-assistance à personne en danger que de ne pas lui imposer votre croyance par tous les moyens. De fait, lorsque les religions ont été en position de le faire, elles n’ont pas hésité à forcer les consciences par les moyens les plus extrêmes. Les croyants qui acceptent le pluralisme religieux ou l’irréligion sont des tièdes et Dieu a paraît-il horreur des tièdes !
Les Français qui l’ont vécue ont gardé de la deuxième guerre mondiale le souvenir d’un clergé catholique tout gonflé d’une importance retrouvée, porté qu’il était par le désarroi général et par la “ Révolution Nationale ” du HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Philippe_P%C3%A9tain"Maréchal Pétain. Qu’en serait-il advenu si cette situation avait perduré ? Ce clergé aurait-il retrouvé, quelque peu atténuées, ses vieilles habitudes inquisitrices et contraignantes ? Poser la question, c’est presque déjà donner la réponse. Que l’épiscopat français n’ait pas fermement attiré l’attention du vieux Maréchal, de qui il n’avait à coup sûr rien à craindre, sur le caractère totalement scandaleux des lois anti-juives, mais qu’il en ait au contraire accepté le principe ne peut être attribué qu’à un vieux fond récurrent d’antisémitisme. Il est difficile de croire qu’il ait agi ainsi sans l’aval du Vatican. Tous ces braves gens, anesthésiés comme tant d’autres par la propagande nazie, attendaient de connaître le sort des armes pour se découvrir, conformément à une vieille tradition de l’Eglise. Les religions réformées ne se sont pas montrées plus vigilantes, ni en France ni ailleurs. Les autorités religieuses étaient pourtant les seules à pouvoir s’opposer efficacement à ces monstruosités lorsque les hommes politiques de gauche étaient emprisonnés et que ceux de droite étaient prêts à trahir. Et ce sont ces gens-là qui prétendent nous donner aujourd’hui des leçons de morale ! On imagine aisément les  HYPERLINK "http://www.fordham.edu/halsall/french/tedeum.htm" Te Deum fervents qui auraient salué une victoire de l’Axe du Pire. Risquons-nous d’assister aujourd’hui à pareil réveil à la suite d’une défaite non plus militaire mais politique, économique et culturelle ? Sommes-nous menacés d’un nouveau Moyen-âge qui suivrait une troisième guerre mondiale ?
Des trois intégrismes, le musulman, l’israélite et le chrétien, le dernier est le plus insupportable parce qu’il paraît le moins nécessaire. L’intégrisme musulman peut se comprendre en raison de la situation des pays islamiques qui ne cessent d’être humiliés depuis plus d’un siècle et qui ne parviennent pas à se débarrasser de cette écharde qu’ils portent en leur flanc et qui s’appelle Israël. Même si leur dieu les aide bien peu en la circonstance, leur religion leur sert à maintenir leur identité et à leur faire espérer que leurs malheurs finiront un jour... Les Israélites ont été, ô combien, martyrisés par l’histoire. La conviction de faire partie du peuple élu leur a certainement donné cette formidable détermination qui a permis à quelques uns de survivre et de surmonter toutes les épreuves. Victimes comme tous leurs coreligionnaires de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Shoah" la plus monstrueuse des injustices, ceux qui ont choisi de s’installer en Palestine ne s’aperçoivent pas qu’ils sont en train d’en commettre une autre qui n’est pas négligeable non plus. Ils sont pourtant bien placés pour savoir ce que c’est que de se retrouver étranger dans son propre pays. On pourrait croire que cette installation a été imaginée par un esprit pervers déterminé à faire en sorte que le peuple juif ne connaisse jamais le repos. Il est bien évident que celui qui s’empare progressivement mais inexorablement, par de menues acquisitions, par la ruse et par la violence de toutes les pièces d’un appartement en prétextant que c’est Dieu qui les lui a attribuées et que ses arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-grands-parents y ont peut-être habité ne doit pas s’attendre à de grandes démonstrations d’amitié de la part de son occupant légitime ! Même si, grâce à son entregent et à l’appui d’un puissant protecteur, il fait taire les protestations des voisins et les fait se dresser les uns contre les autres en leur tendant des pièges dans lesquels ils se font prendre à tous les coups. Même s’il entretient la confusion entre  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Antisionisme" antisionisme et  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Antis%C3%A9mitisme" antisémitisme. Même si, à la suite de deux millénaires passés au milieu de populations étrangères, son sang ne contient plus que quelques gouttes du sang originel. Un juif polonais ressemble à un polonais et un juif marocain ressemble à un marocain. Grâces soient rendues aux parents compréhensifs, aux filles séduites ou violées, aux femmes forcées ou adultères ! N’importe quel peuple peut invoquer une divinité imaginaire qui, par une décision tout aussi imaginaire, lui attribue la possession du territoire bien réel qu’il convoite. Imaginez un instant (que nos amis québécois me pardonnent cette hypothèse saugrenue) que des canadiens français lassés de leurs difficultés avec leurs compatriotes anglophones décident de revenir au pays. Ils y sont d’abord bien accueillis, achètent quelques fermes, en Bretagne par exemple puis, de plus en plus nombreux, s’attaquent par des actions terroristes aux structures politiques en place et les supplantent. Imaginez que les Bretons se révoltent, qu’ils soient vaincus, que certains perdent leurs biens, qu’ils soient relégués sur les terres les moins fertiles ou internés dans des camps, qu’ils soient contraints dans leurs activités quotidiennes, rendus dépendants de la charité internationale et soumis continuellement à des bombardements et à des incursions armées. Qui ne comprendrait l’énorme frustration des Bretons placés dans ces conditions ? Pourtant ces Canadiens ont quitté la France beaucoup plus récemment que les Juifs n’ont quitté la Palestine. Chacun peut constater que la protestation internationale contre le sort réservé aux palestiniens reste sans effet. Les palestiniens ont raison sur le fond car il est naturel et légitime de repousser des intrus qui cherchent à s’imposer par la force. Les israéliens de leur côté disposent d’une force supérieure et peuvent ainsi se permettre d’ignorer délibérément les résolutions des Nations Unies quand d’autres, pour des violations moindres, voient leurs infrastructures non seulement militaires mais également économiques, administratives et culturelles, pulvérisées par des bombardements.  HYPERLINK "http://www.lafontaine.net/lesFables/afficheFable.php?id=129" Selon que vous serez puissant ou misérable… Y a-t-il la moindre chance de faire accepter cette situation du fond de leur cœur par le peuple palestinien et plus généralement par le monde arabe et par l’opinion internationale? Evidemment non !
Il peut paraître “ ringard ” de s’attaquer aux religions en ressuscitant des querelles que l’on croyait dépassées, et j’en veux à ceux qui par une remise en cause de la laïcité plus ou moins voilée, plus ou moins hypocrite, poussent à pratiquer ce jeu de massacre. Dans une assemblée il y a souvent un rigolo pour dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas mais taisent par crainte ou par bienséance. J’accepte pour un moment de jouer ce rôle, ayant le sentiment de participer ainsi à une œuvre de salut public aujourd’hui indispensable. Il s’agit d’éviter un retour en force de l’obscurantisme qui n’est d’ailleurs souhaité ni par la plupart des chrétiens et des adeptes des religions orientales, ni par bon nombre de juifs et de musulmans. Vient un moment où il faut dire les choses telles qu’elles sont même si ce n’est agréable ni pour celui qui les dit ni, le cas échéant, pour celui qui les écoute. Il est nécessaire à cette fin d’oublier la « pensée unique », le « politiquement correct », de briser le carcan d’un certain nombre d’idées reçues, de tabous, d’intérêts et de non-dits. C’est évidemment prendre le risque de dire quelques sottises, mais l’alternative est de ne rien dire du tout ou de se cantonner dans sa spécialité et finalement de laisser le champ libre à des forces obscures que nul ne maîtrise et qui nous entraînent presque à coup sûr vers l’abîme. Les religions sont l’espoir et la consolation de beaucoup. Pourquoi les attaquer ? Pourquoi vouloir, selon la formule consacrée, tirer sur des ambulances ? La raison en est que certains ambulanciers recommencent maintenant à tirer sur nous ! Un détail qui peut sembler mineur, mais qui est révélateur de l’évolution actuelle : certains athlètes ou joueurs se signent à la suite d’un exploit personnel ou avant d’entrer sur le terrain et portent autour de leur cou croix et médailles pieuses, toutes choses qui ne se voyaient pas auparavant, et les caméras s’attardent complaisamment sur ces manifestations fétichistes. Souhaitons-nous voir des athlètes de confession musulmane inspirés par cet exemple, se prosterner en direction de la Mecque avant et après chaque épreuve ? Si ces rites et ces talismans ont une efficacité quelconque, ne doivent-ils pas être assimilés à des produits dopants ? Les instances sportives devraient se prononcer à ce sujet, avant que ces pratiques ne s’étendent à toutes les religions. Sans aller peut-être jusqu’à les interdire, elles devraient les déconseiller comme contraires à l’esprit olympique qui s’efforce de gommer toutes les différences de race, de culture ou de croyance entre les athlètes. Les autorités religieuses de leur côté devraient prodiguer discrètement le conseil de ne pas mêler leur Dieu à ces rites profanes, ne serait-ce que pour ne pas voir sa représentation associée à de possibles défaites. J’ai vu récemment un athlète qui  cachait subrepticement une croix sous son maillot après avoir échoué à son dernier essai ! Un athlète est prêt à tout, même à mourir prématurément, en échange d’un titre olympique. Porter un gri-gri ne lui coûte guère. Je n’ai pas remarqué cependant que les tout meilleurs recourent habituellement à ces pratiques. Ils ne comptent avec raison que sur leur talent. Ces manifestations ostentatoires de chauvinisme religieux sont en tout cas un mauvais signal adressé à tous les ramollis du bulbe qui multiplient dans les tribunes jets d’objets divers, saluts fascistes et cris d’animaux. D’autant qu’une croix, instrument de supplice, constitue un signe ambigu. On peut voir de nos jours de plus en plus de croix se glisser entre de jolis seins ou s’exposer sur des poitrails musculeux ! Devrons-nous un jour, nous les incroyants, nous les agnostiques, arborer au revers de notre veste un point d’interrogation pour ne pas laisser s’afficher seules les convictions à caractère religieux ?
C’est bien sûr aux Etats-Unis que le phénomène est le plus préoccupant. Chacun peut s’étonner de ce que le pays le plus avancé scientifiquement et industriellement donne l’exemple de cette régression. L’esprit religieux le plus rétrograde, profitant de la paranoïa ambiante et y participant prend le convoi de l’anti-terrorisme. Le terrorisme, qu’on ne saurait bien entendu négliger, est devenu l’alpha et l’oméga de la politique américaine. Or, ce n’est qu’une infime partie des dangers qui nous menacent. La destruction des tours jumelles du Centre Mondial du Commerce à Manhattan a été sans nul doute très spectaculaire et elle a frappé les imaginations mais l’ampleur des dégâts a probablement dépassé les attentes des auteurs des attentats eux-mêmes. Ne commence-t-on pas à dire en effet que la ruine totale des deux ouvrages s’expliquerait par des  HYPERLINK "http://www.newscientist.com/article.ns?id=dn3354" choix discutables dans la conception des planchers des différents étages et par des malfaçons dans la protection au feu des dits planchers ? Pourquoi les deux tours se sont-elles écroulées tout droit, comme foudroyées par des professionnels de la démolition ? Pourquoi des immeubles voisins non affectés par l’impact direct des avions se sont-ils eux aussi écroulés ? Quoiqu’il en soit les quelques milliers de victimes du terrorisme répertoriées depuis le matin du 11 septembre 2001, sont malheureusement presque dérisoires par rapport aux dizaines de millions d’autres victimes à déplorer durant la même période , victimes de maladies aisément évitables, victimes de maladies aisément curables, victimes de la malnutrition, du manque d’eau potable, de conditions sanitaires déplorables, victimes de guerres d’agression, victimes de guerres ethniques ou religieuses, victimes de guerres pour le pouvoir ou la richesse, victimes de guerres de libération, victimes de la drogue, de l’alcoolisme, du tabagisme, du crime crapuleux ou organisé, de la pollution de l’air et des eaux, victimes de catastrophes naturelles prévisibles, victimes d’accidents dus à la sottise, à l’ignorance, à l’étourderie, à la négligence, à la présomption. Et ces dizaines de millions de victimes seront peut-être considérées par l’histoire comme anecdotiques par rapport aux dangers que représentent le réchauffement climatique, l’épuisement des ressources naturelles ou un conflit généralisé à propos du Moyen-Orient et de son pétrole. Aux yeux de certains spécialistes la peur du terrorisme est plus dangereuse pour les populations par ses conséquences psychosomatiques que le terrorisme lui-même. Elle l’est aussi et surtout en fournissant un prétexte à la mise en place d’une législation d’exception qui, pour un gain d’efficacité discutable, restreint les garanties auxquelles tout citoyen a droit. Même sans lois d’exception il est interdit de poser des bombes dans les lieux publics ou de faire un carton sur les enfants des écoles. Si l’on met à part les dérives de quelques irréductibles défendant des droits plus ou moins folkloriques et les menées de quelques mafieux aux intentions inavouables, le terrorisme n’a qu’une seule cause directe qui est le mépris du droit des gens et le désespoir que ce mépris engendre chez ceux qui en sont les victimes. Désespoir qui peut conduire à des actes aussi contre nature que de s’attacher autour de la taille une ceinture d’explosifs et d’en déclencher la mise à feu au milieu de la foule. L’éradication du terrorisme passe d’abord par le respect du droit des peuples aujourd’hui maltraités et, à titre de précaution complémentaire, par la prise en charge des jeunes désespérés, par une bonne police et la suppression des paradis fiscaux propices aux financements criminels. Il est nécessaire d’y ajouter un contrôle efficace des matériaux, des outillages et des technologies susceptibles d’être utilisés pour la fabrication des engins nucléaires et autres armes de destruction massive. Faut-il encore faire en sorte que les moyens mis en œuvre à cet effet ne soient pas hors de proportion avec le but poursuivi. La disproportion de ces moyens, les contraintes qui en résultent pour tous les citoyens et l’occultation des vrais problèmes constituent en effet la première et probablement la seule victoire que les terroristes peuvent ambitionner. Une bonne pratique serait de parler le moins possible du terrorisme, sauf pour appeler à la vigilance et à la prudence, car la publicité accordée à ce phénomène par les pouvoirs publics et par les différents moyens d’information ne peut qu’encourager les vocations existantes et en susciter de nouvelles chez ceux qui n’ont plus rien à perdre. Pourquoi le terrorisme a-t-il été ainsi monté en épingle aux Etats-Unis et, par contagion, dans le reste du monde ? La réponse est à peu près évidente : après le cataclysme qu’a représenté pour les lobbies politico-militaro-industriels, américains en particulier, la fin de la guerre froide, l’avènement du terrorisme a constitué une divine surprise en fournissant un prétexte à la poursuite et à l’intensification de l’effort militaire et à la remise en cause de certaines libertés fondamentales. Il est assez invraisemblable que Ben Laden n’ait jamais été trahi par un des siens pendant les dix ans où il a défié les Etats-Unis, qu’il n’ait pas été localisé par ceux-là même qui disposaient de moyens de renseignement et d’action sans équivalents dans le monde. Les terroristes sont devenus en fait si rares dans le monde développé que, lorsqu’on a la chance d’en avoir un sous la main, on le conserve soigneusement au chaud pour être sûr de pouvoir le servir au bon moment ! Demandez-vous pourquoi une nouvelle cassette de ce croquemitaine a fait son apparition chaque fois que la crainte du terrorisme islamique semblait quelque peu s’estomper. Demandez-vous aussi pourquoi il a été choisi de le faire taire définitivement plutôt que de le prendre vivant. La même question peut se poser à propos de Kadhafi.
Car le surarmement offensif et défensif auquel se livre la puissance américaine a aussi de quoi inquiéter. Protégée à l’est et à l’ouest par deux larges océans redoute-t-elle d’être envahie du sud par le Mexique ou du nord par le Canada ? Les ressources quasi illimitées dont bénéficie son armée sont dues à la convergence d’un patriotisme assez largement répandu et de la nécessité ressentie par les grandes fortunes qui bien souvent n’ont pas de patrie de protéger le système capitaliste. Est-ce qu’on lutte contre le terrorisme en préparant la guerre des étoiles ? Qui ne se demande avec inquiétude si ce surarmement n’est pas destiné à lui assurer la possibilité d’imposer impunément sa volonté, présentée quasiment comme la volonté du Dieu de la Bible, à tous les peuples de la terre, amis comme ennemis ? L’expression « In God we trust », est-elle en passe d’être remplacée sur les billets verts par « In Gun we trust  » ? Dans leurs déclarations publiques les représentants américains font profession de protéger leurs intérêts nationaux et restent muets sur ceux des autres nations. Le décompte des victimes de leurs agissements n’a pas l’air de les préoccuper particulièrement. Ils s’inquiètent des états d’âme de leurs soldats qui sont au départ des coups mais se désintéressent du massacre de ceux qui sont à l’arrivée. Quatre mille soldats américains tués, c’est une tragédie épouvantable, mais  HYPERLINK "http://www.indymedia.org.uk/en/2006/10/353252.html" six cents mille irakiens au tapis, chiffre annoncé par la seule étude un peu scientifique effectuée sur le sujet, c’est un détail de l’histoire ! Les irakiens ne sont pourtant pas des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Untermensch" untermensch, pas plus que les palestiniens et tant d’autres ! Pour chaque victime des tours jumelles de Manhattan il faut compter un soldat américain tué et cent cinquante irakiens occis dont la plupart sont innocents ou seulement coupables de patriotisme. Le “ God bless America ” sortant de la bouche d’un président des Etats-Unis (on ne sait si c’est une supplique ou un souhait car la langue anglaise permet cette ambiguïté ; d’aucuns y voient un simple constat) et le “  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20au.doc" \o "Dieu avec nous" Gott mit uns ” qui était gravé sur le ceinturon des soldats du troisième Reich sont des formules qui sortent du même tonneau. C’est, chez ceux qui ne se connaissent plus de rival, l’expression orgueilleuse de la force, et de la conviction que tout doit céder devant la force.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Paul_II" Jean-Paul II avait bien compris le danger pour les chrétiens de cet abus de position dominante. Il s’est certainement dit  HYPERLINK "http://www.abnihilo.com/" in petto en faisant ses HYPERLINK "http://www.africatime.com/Benin/nouv_pana.asp?no_nouvelle=123374&no_categorie=1"  remontrances : “ Mon Dieu, protégez-moi de mes amis, mes ennemis, je m’en charge ! ». Aucun religieux digne de ce nom ne souhaite voir sa croyance instrumentalisée par le pouvoir politique. Que des personnalités officielles utilisent les religions comme références culturelles ou morales est une chose. Qu’elles les présentent comme des vérités historiques ou scientifiques opposables à tous en est une autre. Il existe une ligne jaune à ne pas franchir. Jamais je ne mettrai les pieds dans un pays gouverné par des intégristes, quelque soit leur obédience, et je ne dois pas être le seul.
« Qui n’est pas avec moi est contre moi " et “ les Etats-Unis ne cherchent pas à être aimés mais à être craints ” ont été encore récemment deux échantillons de la pensée de l’administration américaine. La menace d’une rechute est permanente. Presque deux mille ans après, la “ pax americana ” a voulu prendre le relais de la “ pax romana ” dont on sait qu‘elle a été chaque fois imposée sans douceur. Pour la première fois depuis la fondation de l’ONU des démocraties ont pris l’initiative de déclencher une guerre non indispensable, pour des raisons alléguées qui se sont avérées fausses; fausses parce que résultant d’une manipulation. Qui veut noyer son chien l’accuse de la rage ! Pour la première fois un  HYPERLINK "http://permanent.nouvelobs.com/etranger/20050909.OBS8727.html" éminent représentant du gouvernement des Etats-Unis est venu sur ordre, parce que c’est un soldat discipliné, débiter des calembredaines devant les nations assemblées. Américains aux cervelles lessivées par un demi-siècle de publicité télévisée et intoxiquées par la Bible, on vous a bourré le mou ! Les nostalgiques de cette violence politique se retrouvent encore à l’heure du thé. De quels appuis a bénéficié Georges Bush pour parvenir au pouvoir et pouvait-il se montrer ingrat à leur égard ? Le renchérissement extraordinaire du pétrole durant ses deux mandats montre qu’il leur a témoigné amplement sa reconnaissance. Au delà du besoin qu’il pouvait éprouver de passer ses nerfs sur un plus petit que lui après le traumatisme du 11 septembre, il est évident que la raison principale de cette guerre d’agression doit être recherchée du côté de ce qui fait rouler les autos et voler les avions et dont certains entendent se réserver les dernières gouttes. Ce but de guerre est désormais atteint. Il ne faut donc pas parler à ce propos d’un échec. Les désordres persistants au Moyen-Orient, en fournissant un prétexte pour y maintenir des troupes, donnent tout le temps nécessaire à la puissance américaine pour consolider sa position et s’établir durablement au centre de gravité de la zone pétrolifère. Aurait-elle quitté le Vietnam si ce pays avait été aussi stratégique de ce point de vue ? Selon toute vraisemblance, les américains conserveront en Irak une présence militaire et installeront au pouvoir un clone de Saddam Hussein. Les grandes compagnies pétrolières anglo-saxonnes seront alors en mesure de conclure avec lui des contrats juteux pour l’exploitation de ses gisements d’hydrocarbures. Le contribuable américain pourra se réjouir que ses sacrifices aient contribué à la prospérité de compagnies qui ne manqueront pas de rétrocéder une partie de la manne céleste aux mouvements religieux obscurantistes qui ont permis la réussite de ce hold-up ! Les pays riches en pétrole qui refusent de faire allégeance à la puissance américaine prennent le risque de subir, un jour ou l’autre, le sort de l’Irak. Voyez les menaces qui pèsent sur l’Iran. La promotion de la démocratie dans les pays pauvres, prétexte aujourd’hui invoqué, est en tout cas une réelle nouveauté pour la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Realpolitik" politique américaine qui s’est toujours fort bien accommodée de régimes dictatoriaux amis ou clients, quand elle n’a pas favorisé leur installation. Son intervention n’a fait qu’empirer pour beaucoup de ces pays une situation déjà détestable. Avec le soutien des milieux religieux et financiers, elle a eu raison de l’expérience communiste en Union Soviétique et plus généralement de toutes les tentatives de répartition plus égalitaire des richesses. Avec sa bénédiction le Liban ami a été écrasé sous les bombes. Quelle tristesse pour tous ceux qui, ayant vécu l’occupation nazie, se rappellent la fascination qu’ils éprouvaient pour les avions alliés qui traversaient le ciel au dessus de leur tête, poursuivis par les flocons de fumée noire de la  HYPERLINK "http://genso.9online.fr/Flak.htm" flak, ou la joie intense qu’ils ont ressentie quand les premiers véhicules blindés libérateurs ont parcouru sous les acclamations la grand-rue de leur village ! Je n’oublierai jamais non plus les visages de mon père et de mon grand-père au moment où ils apprenaient à la radio de Londres, au matin du 6 juin 1944, la nouvelle du débarquement en Normandie.
Le monde paraît aujourd’hui assez largement pacifié par l’esprit des lumières, par les facilités de communication et donc de dialogue entre les hommes et surtout par la menace nucléaire. Considérant toutefois les conséquences potentiellement funestes de l’intégrisme religieux le présent essai a pour objet de faire prendre conscience aux croyants de la fragilité de leurs convictions ou au moins de les aider à comprendre le doute qu’elles peuvent susciter chez d’autres et de les inciter ainsi à mettre plus de retenue dans l’expression publique de ces convictions. Il est aussi d’inciter les incroyants à se manifester, non de façon agressive mais de façon que l’accord si nécessaire entre les hommes cesse d’être entravé par des croyances religieuses inconciliables, dont personne ne sait d’ailleurs si elles sont sincères ou si elles sont le fait de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Tartuffe_ou_l'Imposteur" Tartuffes ambitieux, manipulateurs et cyniques, mais puisse s’établir au contraire sur des bases naturelles, rationnelles, durables et acceptées par tous.
Cette querelle qu’on dirait d’un autre âge a des antécédents fameux. Les mêmes questions se sont posées de tout temps, et avec une particulière acuité à l’âge classique. Elles ont été alors débattues dans les cercles les plus élégants et les plus savants. Elles ont agité les meilleurs esprits de l’époque. Parmi ceux-ci, celui dont l’œuvre a le mieux résisté au temps parce qu’il est probablement l’un des esprits les plus profonds, les plus brillants et les plus honnêtes que la terre ait porté est  HYPERLINK "http://www.chez.com/ottaviani/diderot.htm" Denis Diderot. Je dis honnête car il fit sien ce précepte de  HYPERLINK "http://pages.globetrotter.net/pcbcr/montaigne.html" Montaigne qu’on doit rendre les armes à la vérité du plus loin qu’on l’aperçoit. Diderot est doté d’un esprit prolétaire, au sens que le philosophe  HYPERLINK "http://alinalia.free.fr/" Alain donnait à ce terme, c’est à dire d’un esprit propre à affronter des réalités têtues comme les propriétés de la matière ou les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Concept" concepts mathématiques, car il est guidé avant tout par la logique. Il a le goût des sciences dures et des tâches manuelles comme en témoigne la part prépondérante qu’il a prise dans l’élaboration de la  HYPERLINK "http://www.sigu7.jussieu.fr/diderot/" Grande Encyclopédie. Il n’est pas loin de trouver immoral l’esprit bourgeois qui sait manier la pâte humaine avec une habileté suspecte. Si l’esprit populaire est le plus attachant et si l’esprit aristocratique est le plus pittoresque, l’esprit bourgeois qui se hausse du col et demande toujours plus que sa part appelle les plus grandes réserves. Montaigne, Diderot et Alain font partie de ces hommes qui sont modérés avec la dernière énergie. Si  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Jacques_Rousseau" Rousseau est à gauche selon les atlas politiques actuels et  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Voltaire" Voltaire au centre droit Diderot est lui au centre gauche, là où s’élaborent la plupart des progrès. Diderot a exprimé sa pensée sur la religion dans un court essai en forme de dialogue intitulé “  Entretien d’un philosophe avec la Maréchale de *** ”. Diderot a donné au philosophe de l’Entretien le nom de Crudeli. C’est celui d’un homme de lettres italien des débuts du 18ème siècle, incrédule comme son nom ne l’indique pas et franc-maçon, qui avait été arrêté et longuement torturé par l’Inquisition et qui ne s’en était jamais remis. Le décor est ainsi planté. Cet essai qui met à mal bien des dogmes est paru après la mort de Diderot, ce qui lui a épargné un sort atroce, car le fanatisme a toujours sévi sur ces questions. Il n’a jamais été réfuté car, lorsqu’un homme de religion rencontre sur son chemin un raisonneur de la trempe de Diderot il ne s’arrête pas pour discuter, il change de trottoir ! Si habile soit-elle la « science » d’un théologien a tout de même des limites ! Obligé par les circonstances de solliciter un entretien, l’homme de religion prendra rapidement congé sous prétexte que «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bm.doc" \o "allusion au bucher à quoi étaient condamnés les hérétiques" ça sent le fagot », comme je l’ai entendu dire naguère par le curé de la paroisse ! Vous perdez tout intérêt pour un commerçant à l’instant même où il a abandonné l’espoir de vous faire signer un bon de commande ! Presque trois siècles après sa rédaction, cet essai n’a rien perdu de sa modernité ni de sa force explosive. Il présente de plus le très grand avantage de traiter avec clarté, esprit et légèreté d’un sujet grave et même tragique. Cette grâce du corps et de l’esprit qui a marqué le sommet de la civilisation occidentale a disparu dans les tourmentes révolutionnaires et napoléoniennes et je ne prétends pas la ressusciter. Diderot a eu l’élégance de faire défendre des thèses opposées aux siennes par une personne en tous points sympathique et séduisante et pour laquelle il semblait éprouver un peu plus que de l’amitié ; ce qui montre bien que l’unité de la famille humaine figurait au premier rang de ses préoccupations.
L’entretien de Diderot avec cette aristocrate de la naissance et du cœur qu’est la Maréchale de ***  traite d’un sujet qui touche l’homme au plus profond de lui-même puisqu’il s’agît du sort de son « âme » après la mort. Le phénomène de la conscience, équivalent « laïque » de l’âme, et la physique qui le sous-tend, seront donc assez longuement évoqués par le présent essai à la lumière des nombreuses études et spéculations qui leur ont été récemment consacrées. Je propose donc à l’honorable lecteur de se régaler à nouveau à la lecture du texte de Diderot s’il l’a oublié et de l’utiliser comme base de sa réflexion. S’il n’y a rien à retrancher aux idées qui y sont exprimées, il y a bien peu à leur ajouter. J’essaierai cependant d’enrichir les thèmes abordés des remarques que le progrès général des connaissances, l’élargissement des points de vue, l’expérience accumulée depuis sa parution, les progrès de la recherche historique et l’application des théories de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Darwin" Darwin pourraient suggérer. Pour bien goûter ce texte il faut le lire d’une traite. Il figure donc in extenso ci-après, en conformité avec l’édition Assézat-Tourneux de 1877. Il sera ensuite découpé en quelques sections accompagnées des remarques que chacune de ces sections inspire à votre serviteur. Chaque lecteur est invité à critiquer ces remarques et à y ajouter les siennes, éventuellement à rédiger pour son propre compte l’un ou l’autre de ses chapitres. Peut-être retirera-t-il de cet exercice un bénéfice comparable à celui d’une  HYPERLINK "http://www.psychanalyste-paris.com/L-Auto-analyse-de-Freud.html" auto-analyse. Puisse-t-il à cette occasion se laisser guider par les lumières de la sagesse et par la sagesse des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Lumi%C3%A8res_(philosophie)" Lumières. C’est du moins la grâce que je lui souhaite. Voici donc tout d’abord le texte de Diderot dans son intégralité :
2. ENTRETIEN D’UN PHILOSOPHE AVEC LA MARECHALE DE ***


PRIVATE TC \l 1 ""PRIVATE TC \l 1 "2. ENTRETIEN D’UN PHILOSOPHE AVEC LA MARECHALE DE ***"
J'avais je ne sais quelle affaire à traiter avec le maréchal de *** ; j'allais à son hôtel un matin ; il était absent ; je me fis annoncer à madame la maréchale. C'est une femme charmante ; elle est belle et dévote comme un ange ; elle a la douceur peinte sur son visage ; et puis un son de voix et une naïveté de discours tout à fait avenants à sa physionomie. Elle était à sa toilette. On m'approche un fauteuil ; je m'assieds, et nous causons. Sur quelques propos de ma part, qui l'édifièrent et qui la surprirent (car elle était dans l'opinion que celui qui nie la très sainte Trinité est un homme de sac et de corde, qui finira par être pendu), elle me dit :
La Maréchale. - N'êtes-vous pas monsieur Crudeli ?
Crudeli. - Oui, madame.
La Maréchale. - C'est donc vous qui ne croyez à rien ?
Crudeli. - Moi-même.
La Maréchale. - Cependant votre morale est celle d'un croyant.
Crudeli. - Pourquoi non, quand il est honnête homme.
La Maréchale. - Et cette morale, vous la pratiquez ?
Crudeli. - De mon mieux.
La Maréchale. - Quoi ! Vous ne volez point, vous ne tuez point, vous ne pillez point ?
Crudeli. - Très rarement.
La Maréchale. - Que gagnez-vous à ne pas croire ?
Crudeli. - Rien du tout, madame la maréchale. Est-ce qu'on croit parce qu'il y a quelque chose à gagner ?
La Maréchale. - Je ne sais ; mais la raison d'intérêt ne gâte rien aux affaires de ce monde ni de l'autre.
Crudeli. - J'en suis un peu fâché pour notre pauvre espèce humaine. Nous n'en valons pas mieux.
La Maréchale. - Quoi ! vous ne volez point ?
Crudeli. - Non, d'honneur.
La Maréchale. - Si vous n'êtes ni voleur ni assassin, convenez du moins que vous n'êtes pas conséquent.
Crudeli. - Pourquoi donc ?
La Maréchale. - C'est qu'il me semble que si je n'avais rien à espérer ni à craindre quand je n'y serais plus, il y a bien des petites douceurs dont je ne me sèvrerais pas, à présent que j'y suis. J'avoue que je prête à Dieu à la petite semaine.
Crudeli. - Vous l'imaginez ?
La Maréchale. - Ce n'est point une imagination, c'est un fait.
Crudeli. - Et pourrait-on vous demander quelles sont ces choses que vous vous permettriez si vous étiez incrédule ?
La Maréchale. - Non pas, s'il vous plaît ; c'est un article de ma confession.
Crudeli. - Pour moi, je mets à fonds perdu.
La Maréchale. - C'est la ressource des gueux.
Crudeli. - M'aimeriez-vous mieux usurier ?
La Maréchale. - Mais oui : on peut faire de l'usure avec Dieu tant qu'on veut ; on ne le ruine pas. Je sais bien que cela n'est pas délicat, mais qu'importe ? Comme le point est d'attraper le ciel, ou d'adresse ou de force, il faut tout porter en ligne de compte, ne négliger aucun profit. Hélas ! Nous aurons beau faire, notre mise sera toujours bien mesquine en comparaison de la rentrée que nous attendons. Et vous n'attendez rien, vous ?
Crudeli. - Rien.
La Maréchale. - Cela est triste. Convenez donc que vous êtes méchant ou bien fou !
Crudeli. - En vérité, je ne saurais, madame la maréchale.
La Maréchale. - Quel motif peut avoir un incrédule d'être bon, s'il n'est pas fou ? Je voudrais bien le savoir.
Crudeli. - Et je vais vous le dire.
La Maréchale. - Vous m'obligerez.
Crudeli. - Ne pensez-vous pas qu'on peut être si heureusement né qu'on trouve un grand plaisir à faire le bien ?
La Maréchale. - Je le pense.
Crudeli. - Qu'on peut avoir reçu une excellente éducation qui fortifie le penchant naturel à la bienfaisance ?
La Maréchale. - Assurément.
Crudeli. - Et que, dans un âge plus avancé, l'expérience nous ait convaincu qu'à tout prendre il vaut mieux, pour son bonheur dans ce monde, être un honnête homme qu'un coquin ?
La Maréchale. - Oui-da ; mais comment est-on un honnête homme, lorsque de mauvais principes se joignent aux passions pour entraîner au mal ?
Crudeli. - On est inconséquent ; et y a-t-il rien de plus commun que d'être inconséquent ?
La Maréchale. - Hélas ! Malheureusement non ; on croit, et tous les jours, on se conduit comme si l'on ne croyait pas.
Crudeli. - Et sans croire, on se conduit à peu près comme si l'on croyait.
La Maréchale. - A la bonne heure ; mais quel inconvénient y aurait-il à avoir une raison de plus, la religion, pour faire le bien, et une raison de moins, l'incrédulité, pour mal faire.
Crudeli. - Aucun, si la religion était un motif de faire le bien, et l'incrédulité un moyen de faire le mal.
La Maréchale. - Est-ce qu'il y a quelque doute là-dessus ? Est-ce que l'esprit de religion n'est pas de contrarier cette vilaine nature corrompue, et celui de l'incrédulité, de l'abandonner à sa malice, en l'affranchissant de la crainte ?
Crudeli. - Ceci, madame la maréchale, va nous jeter dans une longue discussion ;
La Maréchale. - Qu'est-ce que cela fait ? Le maréchal ne rentrera pas sitôt ; et il vaut mieux que nous parlions raison, que de médire de notre prochain.
Crudeli. - Il faudra que je reprenne les choses d'un peu plus haut.
La Maréchale. - De si haut que vous voudrez, pourvu que je vous entende.
Crudeli. - Si vous ne m'entendiez pas, ce serait bien ma faute.
La Maréchale. - Cela est poli ; mais il faut que vous sachiez que je n'ai jamais lu que mes Heures, et que je ne suis guère occupée qu'à pratiquer l'Évangile et à faire des enfants.
Crudeli. - Ce sont deux devoirs dont vous vous êtes bien acquittée.
La Maréchale. - Oui, pour les enfants. J'en ai six tout venus et un septième qui frappe à la porte ; mais commencez.
Crudeli. - Madame la maréchale, y a-t-il quelque bien, dans ce monde-ci, qui soit sans inconvénient ?
La Maréchale. - Aucun.
Crudeli. - Et quelque mal qui soit sans avantage ?
La Maréchale. - Aucun.
Crudeli. - Qu'appelez-vous donc mal ou bien ?
La Maréchale. - Le mal, ce sera ce qui a le plus d'inconvénients que d'avantages ; et le bien, au contraire, ce qui a plus d'avantages que d'inconvénients.
Crudeli. - Madame la maréchale aura-t-elle la bonté de se souvenir de sa définition du bien et du mal ?
La Maréchale. - Je m'en souviendrai. Appelez-vous cela une définition ?
Crudeli. - Oui.
La Maréchale. - C'est donc de la philosophie ?
Crudeli. - Excellente.
La Maréchale. - Et j'ai fait de la philosophie !
Crudeli. - Ainsi, vous êtes persuadée que la religion a plus d'avantages que d'inconvénients ; et c'est pour cela que vous l'appelez un bien ?
La Maréchale. - Oui.
Crudeli. - Pour moi, je ne doute point que votre intendant ne vous vole un peu moins la veille de Pâques que le lendemain des fêtes, et que de temps en temps la religion n'empêche nombre de petits maux et ne produise nombre de petits biens.
La Maréchale. - Petit à petit, cela fait somme.
Crudeli. - Mais croyez-vous que les terribles ravages qu'elle a causés dans les temps passés, et qu'elle causera dans les temps à venir, soient suffisamment compensés par ces guenilleux avantages-là ? Songez qu'elle a créé et qu'elle perpétue la plus violente antipathie entre les nations. Il n'y a pas un musulman qui n'imaginât faire une action agréable à Dieu et au saint Prophète, en exterminant tous les chrétiens, qui, de leur côté, ne sont guère plus tolérants. Songez qu'elle a créé et qu'elle perpétue, dans la même contrée, des divisions qui se sont rarement éteintes sans effusion de sang. Notre histoire ne nous en offre que de trop récents et de trop funestes exemples. Songez qu'elle a créé et qu'elle perpétue, dans la société entre les citoyens, et dans la famille entre les proches, les haines les plus fortes et les plus constantes. Le Christ a dit qu'il était venu pour séparer l'époux de la femme, la mère de ses enfants, le frère de la sœur, l'ami de l'ami ; et sa prédiction ne s'est que trop fidèlement accomplie.
La Maréchale. - Voilà bien les abus ; mais ce n'est pas la chose.
Crudeli. - C'est la chose, si les abus en sont inséparables.
La Maréchale. - Et comment me montrerez-vous que les abus de la religion sont inséparables de la religion ?
Crudeli. - Très aisément ; dites-moi, si un misanthrope s'était proposé de faire le malheur du genre humain, qu'aurait-il pu inventer de mieux que la croyance en un être incompréhensible sur lequel les hommes n'auraient jamais pu s'entendre, et auquel ils auraient attaché plus d'importance qu'à leur vie ? Or, est-il possible de séparer de la notion d'une divinité l'incompréhensibilité la plus profonde et l'importance la plus grande ?
La Maréchale. - Non.
Crudeli. - Concluez donc.
La Maréchale. - Je conclus que c'est une idée qui n'est pas sans conséquence dans la tête des fous.
Crudeli. - Et ajoutez que les fous ont toujours été et seront toujours le plus grand nombre ; et que les plus dangereux sont ceux que la religion fait, et dont les perturbateurs de la société savent tirer bon parti dans l'occasion.
La Maréchale. - Mais il faut quelque chose qui effraie les hommes sur les mauvaises actions qui échappent à la sévérité des lois ; et si vous détruisez la religion, que lui substituerez-vous ?
Crudeli. - Quand je n'aurais rien à mettre à la place, ce serait toujours un terrible préjugé de moins ; sans compter que, dans aucun siècle et chez aucune nation, les opinions religieuses n'ont servi de base aux mœurs nationales. Les dieux qu'adoraient ces vieux Grecs et ces vieux Romains, les plus honnêtes gens de la terre, étaient la canaille la plus dissolue : un Jupiter, à brûler tout vif ; une Vénus, à enfermer à l'Hôpital ; un Mercure, à mettre à Bicêtre.
La Maréchale. - Et vous pensez qu'il est tout à fait indifférent que nous soyons chrétiens ou païens ; que païens nous n'en vaudrions pas moins ; et que chrétiens nous n'en valons pas mieux.
Crudeli. - Ma foi, j'en suis convaincu, à cela près que nous serions un peu plus gais.
La Maréchale. - Cela ne se peut.
Crudeli. - Mais, madame la maréchale, est-ce qu'il y a des chrétiens ? Je n'en ai jamais vu.
La Maréchale. - Et c'est à moi que vous dites cela, à moi ?
Crudeli. - Non, madame, ce n'est pas à vous ; c'est à une de mes voisines qui est honnête et pieuse comme vous l'êtes, et qui se croyait chrétienne de la meilleure foi du monde, comme vous le croyez.
La Maréchale. - Et vous lui fîtes voir qu'elle avait tort ?
Crudeli. - En un instant.
La Maréchale. - Comment vous y prîtes-vous ?
Crudeli. - J'ouvris un Nouveau Testament, dont elle s'était beaucoup servie, car il était fort usé. Je lui lus le sermon sur la montagne, et à chaque article je lui demandai : “Faites-vous cela ? et cela donc ? et cela encore ?” J'allai plus loin. Elle est belle, et quoiqu'elle soit très sage et très dévote, elle ne l'ignore pas ; elle a la peau très blanche, et quoiqu'elle n'attache pas un grand prix à ce frêle avantage, elle n'est pas fâchée qu'on en fasse l'éloge ; elle a la gorge aussi bien qu'il est possible de l'avoir, et, quoiqu'elle soit très modeste, elle trouve bon qu'on s'en aperçoive.
La Maréchale. - Pourvu qu'il n'y ait qu'elle et son mari qui le sachent.
Crudeli. - Je crois que son mari le sait mieux qu'un autre ; mais pour une femme qui se pique de grand christianisme, cela ne suffit pas. Je lui dis : “N'est-il pas écrit dans l'Évangile que celui qui a convoité la femme de son prochain a commis l'adultère dans son cœur ?”
La Maréchale. - Elle vous répondit qu'oui ?
Crudeli. - Je lui dis : “Et l'adultère commis dans le cœur ne damne-t-il pas aussi sûrement que l'adultère le mieux conditionné ?”
La Maréchale. - Elle vous répondit qu'oui ?
Crudeli. - Je lui dis : “Et si l'homme est damné pour l'adultère qu'il a commis dans son cœur, quel sera le sort de la femme qui invite tous ceux qui l'approchent à commettre ce crime ?” Cette dernière question l'embarrassa.
La Maréchale. - Je comprends ; c'est qu'elle ne voilait pas fort exactement cette gorge, qu'elle avait aussi bien qu'il est possible de l'avoir.
Crudeli. - Il est vrai. Elle me répondit que c'était une chose d'usage ; comme si rien n'était plus d'usage que de s'appeler chrétien et de ne l'être pas ; qu'il ne fallait pas se vêtir ridiculement, comme s'il y avait quelque comparaison à faire entre un misérable petit ridicule, sa damnation éternelle et celle de son prochain ; qu'elle se laissait habiller par sa couturière, comme s'il ne valait pas mieux changer de couturière que renoncer à sa religion ; que c'était la fantaisie de son mari, comme si un époux était assez insensé pour exiger de sa femme l'oubli de la décence et de ses devoirs, et qu'une véritable chrétienne dût pousser l'obéissance pour un époux extravagant, jusqu'au sacrifice de la volonté de son Dieu et au mépris des menaces de son rédempteur.
La Maréchale. - Je savais d'avance toutes ces puérilités-là ; je vous les aurais peut-être dites comme votre voisine ; mais elle et moi aurions été toutes deux de mauvaise foi. Mais quel parti prit-elle d'après votre remontrance ?
Crudeli. - Le lendemain de cette conversation (c'était un jour de fête), je remontais chez moi, et ma dévote et belle voisine descendait de chez elle pour aller à la messe.
La Maréchale. - Vêtue comme de coutume ?
Crudeli. - Vêtue comme de coutume. Je souris, elle sourit ; et nous passâmes l'un à côté de l'autre sans nous parler. Madame la maréchale, une honnête femme ! une chrétienne ! une dévote ! Après cet exemple, et cent mille autres de la même espèce, quelle influence réelle puis-je accorder à la religion sur les mœurs ? Presque aucune, et tant mieux.
La Maréchale. - Comment, tant mieux ?
Crudeli. - Oui, madame : s'il prenait fantaisie à vingt mille habitants de Paris de conformer strictement leur conduite au sermon sur la montagne...
La Maréchale. - Eh bien ! il y aurait quelques belles gorges plus couvertes.
Crudeli. - Et tant de fous que le lieutenant de police ne saurait qu'en faire ; car nos petites-maisons n'y suffiraient pas. Il y a dans les livres inspirés deux morales : l'une générale et commune à toutes les nations, à tous les cultes, et qu'on suit à peu près ; une autre, propre à chaque nation et à chaque culte, à laquelle on croit, qu'on prêche dans les temples, qu'on préconise dans les maisons, et qu'on ne suit point du tout.
La Maréchale. - Et d'où vient cette bizarrerie ?
Crudeli. - De ce qu'il est impossible d'assujettir un peuple à une règle qui ne convient qu'à quelques hommes mélancoliques, qui l'ont calquée sur leur caractère. Il en est des religions comme des constitutions monastiques, qui toutes se relâchent avec le temps. Ce sont des folies qui ne peuvent tenir contre l'impulsion constante de la nature, qui nous ramène sous sa loi ; Et faites que le bien des particuliers soit si étroitement lié avec le bien général, qu'un citoyen ne puisse presque pas nuire à la société sans se nuire à lui-même ; assurez à la vertu sa récompense, comme vous avez assuré à la méchanceté son châtiment ; que sans aucune distinction de culte, dans quelque condition que le mérite se trouve, il conduise aux grandes places de l'État ; et ne comptez plus sur d'autres méchants que sur un petit nombre d'hommes, qu'une nature perverse que rien ne peut corriger entraîne au vice. Madame la maréchale, la tentation est trop proche ; et l'enfer est trop loin ; n'attendez rien qui vaille la peine qu'un sage législateur s'en occupe, d'un système d'opinions bizarres qui n'en impose qu'aux enfants ; qui encourage au crime par la commodité des expiations ; qui envoie le coupable demander pardon à Dieu de l'injure faite à l'homme, et qui avilit l'ordre des devoirs naturels et moraux, en le subordonnant à un ordre de devoirs chimériques.
La Maréchale. - Je ne vous comprends pas.
Crudeli. - Je m'explique ; mais il me semble que voilà le carrosse de M. le maréchal, qui rentre fort à propos pour m'empêcher de dire des sottises.
La Maréchale. - Dites, dites votre sottise, je ne l'entendrai pas ; je suis accoutumée à n'entendre que ce qui me plaît.
Je m'approchai de son oreille et je lui dis tout bas :
Crudeli. - Madame la maréchale, demandez au vicaire de votre paroisse, de ces deux crimes, pisser dans un vase sacré, ou noircir la réputation d'une femme honnête, quel est le plus atroce ? Il frémira d'horreur au premier, criera au sacrilège ; et la loi civile, qui prend à peine connaissance de la calomnie, tandis qu'elle punit le sacrilège par le feu, achèvera de brouiller les idées et de corrompre les esprits.
La Maréchale. - Je connais plus d'une femme qui se ferait un scrupule de manger gras le vendredi, et qui... j'allais dire aussi ma sottise. Continuez.
Crudeli. - Mais, madame, il faut absolument que je parle à M. le maréchal.
La Maréchale. - Encore un moment, et puis nous l'irons voir ensemble. Je ne sais trop que vous répondre, et cependant vous ne me persuadez pas.
Crudeli. - Je ne me suis pas proposé de vous persuader. Il en est de la religion comme du mariage. Le mariage, qui fait le malheur de tant d'autres, a fait votre bonheur et celui de M. le maréchal ; vous avez bien fait de vous marier tous les deux. La religion, qui a fait, qui fait et qui fera tant de méchants, vous a rendue meilleure encore ; vous faites bien de la garder. Il vous est doux d'imaginer à côté de vous, au-dessus de votre tête, un être grand et puissant, qui vous voit marcher sur la terre, et cette idée affermit vos pas. Continuez, madame, à jouir de ce garant auguste de vos pensées, de ce spectateur, de ce modèle sublime de vos actions.
La Maréchale. - Vous n'avez pas, à ce que je vois, la manie du prosélytisme.
Crudeli. - Aucunement.
La Maréchale. - Je vous en estime davantage.
Crudeli. - Je permets à chacun de penser à sa manière, pourvu qu'on me laisse penser à la mienne ; et puis, ceux qui sont faits pour se délivrer de ces préjugés n'ont guère besoin qu'on les catéchise.
La Maréchale. - Croyez-vous que l'homme puisse se passer de superstition ?
Crudeli. - Non, tant qu'il restera ignorant et peureux.
La Maréchale. - Eh bien ! superstition pour superstition, autant la nôtre qu'une autre.
Crudeli. - Je ne le pense pas.
La Maréchale. - Parlez-moi vrai, ne vous répugne-t-il point de n'être plus rien après votre mort ?
Crudeli. - J'aimerais mieux exister, bien que je ne sache pas pourquoi un être, qui a pu me rendre malheureux sans raison, ne s'en amuserait pas deux fois.
La Maréchale. - Si, malgré cet inconvénient, l'espoir d'une vie à venir vous paraît consolant et doux, pourquoi vous l'arracher ?
Crudeli. - Je n'ai pas cet espoir, parce que le désir ne m'en a point dérobé la vanité ; mais je ne l'ôte à personne. Si l'on peut croire qu'on verra, quand on n'aura plus d'yeux ; qu'on entendra, quand on n'aura plus d'oreilles ; qu'on pensera, quand on n'aura plus de tête ; qu'on sentira, quand on n'aura plus de sens ; qu'on aimera, quand on n'aura plus de cœur ; qu'on existera, quand on sera nulle part ; qu'on sera quelque chose, sans étendue et sans lieu, j'y consens.
La Maréchale. - Mais ce monde-ci, qui l'a fait ?
Crudeli. - Je vous le demande.
La Maréchale. - C'est Dieu.
Crudeli. - Et qu'est-ce que Dieu ?
La Maréchale. - Un esprit.
Crudeli. - Si un esprit fait de la matière, pourquoi de la matière ne ferait-elle pas un esprit ?
La Maréchale. - Et pourquoi le ferait-elle ?
Crudeli. - C'est que je lui en vois faire tous les jours. Croyez-vous que les bêtes aient des âmes ?
La Maréchale. - Certainement, je le crois.
Crudeli. - Et pourriez-vous me dire ce que devient, par exemple, l'âme du serpent du Pérou, pendant qu'il se dessèche, suspendu à une cheminée, et exposé à la fumée un ou deux ans de suite ?
La Maréchale. - Qu'elle devienne ce qu'elle voudra, qu'est-ce que cela me fait ?
Crudeli. - C'est que madame la maréchale ne sait pas que ce serpent enfumé, desséché, ressuscite et renaît.
La Maréchale. - Je n'en crois rien.
Crudeli. - C'est pourtant un habile homme, c'est Bouguer qui l'assure.
La Maréchale. - Votre habile homme en a menti.
Crudeli. - S'il avait dit vrai ?
La Maréchale. - J'en serais quitte pour croire que les animaux sont des machines.
Crudeli. - Et l'homme qui n'est qu'un animal un peu plus parfait qu'un autre... Mais, M. le maréchal...
La Maréchale. - Encore une question, et c'est la dernière. Etes-vous bien tranquille dans votre incrédulité ?
Crudeli. - On ne saurait davantage.
La Maréchale. - Pourtant, si vous vous trompiez ?
Crudeli. - Quand je me tromperais ?
La Maréchale. - Tout ce que vous croyez faux serait vrai, et vous seriez damné. Monsieur Crudeli, c'est une terrible chose que d'être damné ; brûler toute une éternité, c'est bien long.
Crudeli. - La Fontaine croyait que nous y serions comme le poisson dans l'eau.
La Maréchale. - Oui, oui ; mais votre La Fontaine devint bien sérieux au dernier moment ; et c'est là que je vous attends.
Crudeli. - Je ne réponds de rien, quand ma tête n'y sera plus ; mais si je finis par une de ces maladies qui laissent à l'homme agonisant toute sa raison, je ne serai pas plus troublé au moment où vous m'attendez qu'au moment où vous me voyez.
La Maréchale. - Cette intrépidité me confond.
Crudeli. - J'en trouve bien davantage au moribond qui croit en un juge sévère qui pèse jusqu'à nos plus secrètes pensées, et dans la balance duquel l'homme le plus juste se perdrait par sa vanité, s'il ne tremblait de se trouver trop léger ; si ce moribond avait alors à son choix, ou d'être anéanti, ou de se présenter à ce tribunal, son intrépidité me confondrait bien autrement, s'il balançait à prendre le premier parti, à moins qu'il ne fût plus insensé que le compagnon de saint Bruno ou plus ivre de son mérite que Bohola.
La Maréchale. - J'ai lu l'histoire de l'associé de saint Bruno ; mais je n'ai jamais entendu parler de votre Bohola.
Crudeli. - C'est un jésuite du collège de Pinsk, en Lithuanie, qui laissa en mourant une cassette pleine d'argent, avec un billet écrit et signé de sa main.
La Maréchale. - Et ce billet ?
Crudeli. - Était conçu en ces termes : “ Je prie mon cher confrère, dépositaire de cette cassette, de l'ouvrir quand j'aurai fait des miracles. L'argent qu'elle contient servira aux frais du procès de ma béatification. J'y ai ajouté quelques mémoires authentiques pour la confirmation de mes vertus, et qui pourront servir utilement à ceux qui entreprendront d'écrire ma vie.”
La Maréchale. - Cela est à mourir de rire.
Crudeli. - Pour moi, madame la maréchale ; mais pour vous, votre Dieu n'entend pas raillerie.
La Maréchale. - Vous avez raison.
Crudeli. - Madame la maréchale, il est bien facile de pécher grièvement contre votre loi.
La Maréchale. - J'en conviens.
Crudeli. - La justice qui décidera de votre sort est bien rigoureuse.
La Maréchale. - Il est vrai.
Crudeli. - Et si vous en croyez les oracles de votre religion sur le nombre des élus, il est bien petit.
La Maréchale. - Oh ! C’est que je ne suis pas janséniste ; je ne vois la médaille que par son revers consolant ; le sang de Jésus-Christ couvre un grand espace à mes yeux ; et il me semblerait très singulier que le diable, qui n'a pas livré son fils à la mort, eût pourtant la meilleure part.
Crudeli. - Damnez-vous Socrate, Phocion, Aristide, Caton, Trajan, Marc-Aurèle ?
La Maréchale. - Fi donc ! Il n'y a que les bêtes féroces qui puissent le penser. Saint Paul a dit que chacun sera jugé par la loi qu'il a connue ; et saint Paul a raison.
Crudeli. - Et par quelle loi l'incrédule sera-t-il jugé ?
La Maréchale. - Votre cas est un peu différent. Vous êtes un de ces habitants maudits de Corozaïn et de Betzaïda, qui fermèrent leurs yeux à la lumière qui les éclairait, et qui étoupèrent leurs oreilles pour ne pas entendre la voix de la vérité qui leur parlait.
Crudeli. - Madame la maréchale,, ces Corozaïnois et ces Betzaïdains furent des hommes comme il n'y en eut jamais que là, s'ils furent maîtres de croire ou de ne pas croire.
La Maréchale. - Ils virent des prodiges qui auraient mis l'enchère aux sacs et à la cendre, s'ils avaient été faits à Tyr et à Sidon.
Crudeli. - C'est que les habitants de Tyr et de Sidon étaient des gens d'esprit, et que ceux de Corozaïn et de Betzaïda n'étaient que des sots. Mais, est-ce que celui qui fit les sots les punira pour avoir été sots ? Je vous ai fait tout à l'heure une histoire, et il me prend envie de vous faire un conte. Un jeune Mexicain... Mais, M. le maréchal ?
La Maréchale. - Je vais envoyer savoir s'il est visible. Eh bien ! Votre jeune Mexicain ?
Crudeli. - Las de son travail, se promenait un jour au bord de la mer. Il voit une planche qui trempait d'un bout dans les eaux, et qui de l'autre posait sur le rivage. Il s'assied sur cette planche, et là, prolongeant ses regards sur la vaste étendue qui se déployait devant lui, il se disait : rien n'est plus vrai que ma grand'mère radote avec son histoire de je ne sais quels habitants qui, dans je ne sais quel temps, abordèrent ici de je ne sais où, d'une contrée au-delà de nos mers. Il n'y a pas le sens commun : ne vois-je pas la mer confiner avec le ciel ? Et puis-je croire, contre le témoignage de mes sens, une vieille fable dont on ignore la date, que chacun arrange à sa manière, et qui n'est qu'un tissu de circonstances absurdes, sur lesquelles ils se mangent le cœur et s'arrachent le blanc des yeux ? Tandis qu'il raisonnait ainsi, les eaux agitées le berçaient sur sa planche, et il s'endormit. Pendant qu'il dort, le vent s'accroît, le flot soulève la planche sur laquelle il est étendu, et voilà notre jeune raisonneur embarqué.
La Maréchale. - Hélas ! C’est bien là notre image : nous sommes chacun sur notre planche ; le vent souffle, et le flot nous emporte.
Crudeli. - Il était déjà loin du continent lorsqu'il s'éveilla. Qui fut bien surpris de se trouver en pleine mer ? Ce fut notre Mexicain. Qui le fut encore bien davantage ? Ce fut encore lui, lorsqu'ayant perdu de vue le rivage sur lequel il se promenait il n'y a pas un instant, la mer lui parut confiner avec le ciel de tous côtés. Alors il soupçonna qu'il pouvait bien s'être trompé ; et que, si le vent restait au même point, peut-être serait-il porté sur la rive, et parmi ces habitants dont sa grand'mère l'avait si souvent entretenu.
La Maréchale. - Et de son souci, vous ne m'en dites mot.
Crudeli. - Il n'en eut point. Il se dit : Qu'est-ce que cela me fait, pourvu que j'aborde ? J'ai raisonné comme un étourdi, soit ; mais j'ai été sincère avec moi-même ; et c'est tout ce qu'on peut exiger de moi. Si ce n'est pas une vertu que d'avoir de l'esprit, ce n'est pas un crime que d'en manquer. Cependant le vent continuait, l'homme et la planche voguaient, et la rive inconnue commençait à paraître : il y touche, et l'y voilà.
La Maréchale. - Nous nous y reverrons un jour, monsieur Crudeli.
Crudeli. - Je le souhaite, madame la maréchale ; en quelque endroit que ce soit, je serai toujours très flatté de vous faire ma cour. A peine eut-il quitté sa planche, et mis le pied sur le sable, qu'il aperçut un vieillard vénérable, debout à ses côtés. Il lui demanda où il était, et à qui il avait l'honneur de parler. “Je suis le souverain de la contrée,” lui répondit le vieillard. A l'instant le jeune homme se prosterne. “Relevez-vous, lui dit le vieillard. Vous avez nié mon existence ? Il est vrai. Et celle de mon empire ? Il est vrai. Je vous pardonne, parce que je suis celui qui voit au fond des cœurs, et que j'ai lu au fond du vôtre que vous étiez de bonne foi ; mais le reste de vos pensées et de vos actions n'est pas également innocent.” Alors le vieillard, qui le tenait par l'oreille, lui rappelait toutes les erreurs de sa vie ; et, à chaque article, le jeune Mexicain s'inclinait, se frappait la poitrine, et demandait pardon... Là, madame la maréchale, mettez-vous pour un moment à la place du vieillard, et dites-moi ce que vous auriez fait ? Auriez-vous pris ce jeune insensé par les cheveux ; et vous seriez-vous complu à le traîner à toute éternité sur le rivage ?
La Maréchale. - En vérité, non.
Crudeli. - Si un de ces six jolis enfants que vous avez, après s'être échappé de la maison paternelle et avoir fait force sottises, y revenait bien repentant ?
La Maréchale. - Moi, je courrais à sa rencontre ; je le serrerais entre mes bras, et je l'arroserais de mes larmes ; mais M. le maréchal son père ne prendrait pas la chose si doucement.
Crudeli. - M. le maréchal n'est pas un tigre.
La Maréchale. - Il s'en faut bien.
Crudeli. - Il se ferait peut-être un peu tirailler, mais il pardonnerait.
La Maréchale. - Certainement.
Crudeli. - Surtout s'il venait à considérer qu'avant de donner la naissance à cet enfant, il en savait toute la vie, et que le châtiment de ses fautes serait sans aucune utilité ni pour lui-même, ni pour le coupable, ni pour ses frères.
La Maréchale. - Le vieillard et M. le maréchal sont deux.
Crudeli. - Voulez-vous dire que M. le maréchal est meilleur que le vieillard ?
La Maréchale. - Dieu m'en garde ! Je veux dire que, si ma justice n'est pas celle de M. le maréchal, la justice de M. le maréchal pourrait bien n'être pas celle du vieillard.
Crudeli. - Ah ! Madame ! Vous ne sentez pas les suites de cette réponse. Ou la définition générale convient également à vous, à M. le maréchal, à moi, au jeune Mexicain et au vieillard ; ou je ne sais plus ce que c'est, et j'ignore comment on plaît ou l'on déplaît à ce dernier.
Nous en étions là lorsqu'on nous avertit que M. le maréchal nous attendait. Je donnai la main à Mme la maréchale, qui me disait : “ C'est à faire tourner la tête, n'est-ce pas ?”
Crudeli. –Pourquoi donc quand on l’a bonne ?
La Maréchale. - Après tout, le plus court est de se conduire comme si le vieillard existait...
Crudeli. - Même quand on n'y croit pas.
La Maréchale. - Et quand on y croit, de ne pas compter sur sa bonté.
Crudeli. – Si ce n’est pas le plus poli, c'est du moins le plus sûr...
La Maréchale. - A propos, si vous aviez à rendre compte de vos principes à nos magistrats, les avoueriez-vous ?
Crudeli. - Je ferais de mon mieux pour leur épargner une action atroce.
La Maréchale. - Ah ! Le lâche ! Et si vous touchiez à votre dernière heure, vous soumettriez-vous aux cérémonies de l'Église ?
Crudeli. - Je n'y manquerais pas.
La Maréchale. - Fi ! Le vilain hypocrite.
3. LA CONSCIENCE

« Juger, décider, agir, voilà la fonction de l’âme ». Alain, Propos

« Un point vivant… Non, je me trompe. Rien d’abord, puis un point vivant… A ce point vivant, il s’en applique un autre, encore un autre ; et par ces applications successives il résulte un être un, car je suis bien un, je n’en saurais douter… Mais comment cette unité s’est-elle faite ? Tenez, philosophe, je vois bien un agrégat, un tissu de petits êtres sensibles, mais un animal !... un tout ! Un système un, lui, ayant la conscience de son unité ! Je ne le vois pas, non, je ne le vois pas… » Diderot,  HYPERLINK "http://perso.orange.fr/destin/textes/d_alembert_2_reve.pdf" Rêve de d’Alembert.

Une noix Qu'y a-t-il à l'intérieur d'une noix? Qu'est-ce qu'on y voit Quand elle est ouverte ?
 HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_Trenet" Charles Trenet

« N'est-ce pas une chose extrêmement plaisante que de voir les philosophes les plus sérieux, si sévères et péremptoires qu'ils soient le reste du temps, en appeler sans cesse à des sentences de poètes pour assurer force et crédibilité à leur pensée ? »  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Friedrich_Nietzsche" Frédéric Nietzsche


Même s’il adopte le ton de la comédie -  HYPERLINK "http://www.membres.lycos.fr/moliere/" Molière et  HYPERLINK "http://www.alalettre.com/marivaux-intro.htm" Marivaux ne sont pas loin – le dialogue que vous venez de lire traite du sujet réputé le plus grave et le plus tragique qui soit puisqu’il s’agit du sort de notre  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%82me" âme après la mort. Qu’est-il possible de dire de plus au sujet de l’âme que ce que les auteurs classiques nous en ont dit, à la lumière des progrès scientifiques récents ?

Première tentative d’explication

Revenant à l’origine du  HYPERLINK "http://www.heraclitea.com/dualisme1.htm" concept d’âme il faut remarquer qu’en français et dans d’autres langues latines le mot animal et le mot animé, c’est à dire doué de mouvement, sont issus de la même racine : anima : l’âme. Dans la conception populaire, l’animal est donc doué d’une âme, ce qui lui permet d’avoir un comportement autonome se traduisant en particulier par le fait qu’il est capable de se mouvoir, qu’il est animé. La loi reconnaît une âme aux animaux, au moins à certains d’entre eux, puisqu’il est fort heureusement interdit de les  HYPERLINK "http://www.league-animal-rights.org/duda.html" maltraiter. Dans la conception traditionnelle qui est celle de la plupart des philosophies classiques et celle de presque toutes les religions l’âme, en particulier l’âme humaine, et le corps sont de natures différentes. L’âme appartient à un monde spirituel, éternel et immuable, situé en dehors de l’espace matériel dans lequel les corps évoluent. Les corps appartiennent eux, sans ambiguïté à l’espace matériel, périssable et changeant. D’une manière générale les hommes de science rejettent cette conception “  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Dualisme" dualiste ” qui impose une barrière infranchissable à leurs investigations. Ils ne comprennent pas comment deux domaines étrangers l’un à l’autre peuvent mutuellement s’influencer. Malgré tous les moyens techniques dont ils disposent, ils ne trouvent pas trace de manière évidente, dans le cerveau ou ailleurs, d’une antenne émettrice et réceptrice qui permettrait de faire communiquer ces deux espaces qui ne s’intersectent pas et qui, pourtant, si l’on inclut le contenu changeant de l’âme, partagent le temps comme dimension commune. Consciente de cette difficulté, la doctrine chrétienne, pour rendre plausible la survie éternelle de l’âme, parle d’une “ résurrection de la chair ”. Le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Bouddhisme" bouddhisme qui est une philosophie proche de la sagesse antique associée à des rites et à une pratique spirituelle ne reconnaît pas de divinités mais parle de réincarnations successives de la même âme. Mon père qui n’avait évidemment aucune espèce d’accointance avec le bouddhisme et qui était un être tout à fait rationnel disait se souvenir de vies passées. Je suppose qu’il s’agissait dans son cas de souvenirs d’existences vécues en rêve. Le Dalaï-lama lui-même éprouve quelques difficultés pour justifier le dogme de la réincarnation. Ceux qui ont établi la religion bouddhiste ont sans doute estimé qu’il n’était pas possible de priver ceux qu’ils cherchaient à convertir de tout espoir de vie future alors que les religions concurrentes offraient cet espoir. Les musulmans vivent dans l’espoir de se reposer un jour dans les jardins d’Allah ou les plus valeureux d’entre eux se verront attribuer la jouissance de soixante dix vierges. Les traditions religieuses incapables de se rattacher ni à l’expérience quotidienne ni aux phénomènes que l’on peut rencontrer dans le monde des sciences et des techniques, abandonnent à la pure spéculation le détail des processus qu’elles postulent. Quant à nos contemporains, ils ne semblent pas particulièrement frappés par l’extrême étrangeté du phénomène de l’âme qui ne se rattache pourtant à rien de connu. La conscience est le dernier bastion de la métaphysique. Sera-t-elle emportée comme le reste par les progrès de la physique ?
Plutôt que d’âme les hommes de science préfèrent parler de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Conscience" conscience, monde intérieur propre à chacun vers lequel convergent les informations principales fournies par les sens et où paraissent s’effectuer les choix stratégiques entre les diverses actions physiquement possibles. Ils peinent cependant à expliquer le rapport qui peut exister entre le monde extérieur sur lequel leurs différents sens leur transmettent des informations, sur lequel il leur est possible d’agir par l’intermédiaire de leur corps, et leur propre monde intérieur dont ils supposent assez raisonnablement qu’il est plus ou moins identique à celui des autres représentants de leur espèce. Sur la question du rapport entre le corps et l’âme, les hommes de religion ne s’aventurent guère, mais font comme s’ils savaient. Les hommes de science confessent pour la plupart leurs incertitudes ou leur ignorance, dans l’incapacité où ils se trouvent actuellement de transformer ce problème de métaphysique en problème de physique. Les plus osés avancent que la conscience « émerge » de la complexité mais se taisent sur le mécanisme correspondant. Des auteurs respectables traitent avec sérieux et minutie des conditions d’apparition de la conscience mais sur ce qu’elle est au juste, ils restent muets. En vérité l’âme d’un trépassé peut-elle être autre chose que le souvenir que l’on a gardé d’une conscience défunte ? L’âme est, d’après la tradition spiritualiste, invariante et éternelle. La conscience est changeante et périssable comme nous le constatons et l’éprouvons. Les deux notions ne peuvent donc être équivalentes, même si elles ne sont pas sans rapports. Ces rapports n’ont pas beaucoup inspiré les philosophes, ni les théologiens, c’est le moins qu’on puisse dire. Comprendre le fonctionnement du cerveau,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Automate_Programmable_Industriel" automate de chair autoprogrammé, est concevable en dépit de sa folle complexité tant dans ses structures que dans son fonctionnement. Mais qui va attribuer spontanément une conscience à un automate ? Comprendre le phénomène de la conscience comporte une difficulté conceptuelle que la science n’a pas encore surmontée. La tentation est alors grande de renvoyer dos à dos religieux et savants sur cette question fondamentale. Chacun est libre dés lors de choisir à sa guise l’explication qui lui paraît la plus plausible, la plus confortable, la plus rassurante ou bien encore de se reposer sur le mol oreiller du doute. Pour aller dans le sens de mon propos je vais, après avoir tenté de résumer l’état actuel de la réflexion scientifique, proposer avec d’ HYPERLINK "http://www.wired.com/news/technology/0,1282,52674,00.html" autres une solution à cette difficulté réputée insurmontable, solution dont il me semble qu’elle est logique et cohérente, même si elle n’est pas exempte d’hypothèses et d’extrapolations que certains trouveront certainement discutables.
La conscience a un aspect objectif, observable par tous avec les moyens usuels de la science et de la technologie, et un aspect subjectif et personnel auquel seule l’ HYPERLINK "http://www.philagora.net/medecine/corps-emotions5.htm" introspection donne accès. Les techniques modernes d’imagerie médicale appliquées à l’encéphale permettent d’établir une corrélation entre l’aspect objectif (les circuits neuronaux dont l’excitation est révélée par les images) et l’aspect subjectif qui est rapporté verbalement par les sujets soumis à l’expérimentation. Des hommes de science comme  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Pierre_Changeux" Jean-Pierre Changeux en France,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Francis_Crick" Francis Crick ou  HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/wiki/Christof_Koch" Christoff Koch aux Etats-Unis, donnent du phénomène objectif une description que je m’autorise à résumer ainsi :
La fonction de la conscience est d’assurer la survie de l’individu et de l’espèce à laquelle il appartient en exerçant les meilleurs choix possibles, et en déclenchant leur mise en œuvre. La sélection naturelle éliminerait en effet l’individu dépourvu de conscience, garante de l’unité d’action de l’individu, pour les mêmes raisons qu’une armée sans commandant en chef ne saurait remporter durablement de victoires. Cette image guerrière traduit la situation de l’homme ou de l’animal dans la nature, placés constamment en situation d’agresseur ou d’agressé. La sélection naturelle éliminerait également les espèces où les individus qui la composent seraient incapables de faire au profit de cette espèce les sacrifices nécessaires. Pourquoi avons-nous subjectivement conscience des états successifs de notre conscience objective ? L’origine de cette particularité est mystérieuse au point qu’on a pu l’attribuer à une péripétie non nécessaire de l’évolution, à une facétie du Créateur ou à son désir de compagnie. Il est plausible que le comportement d’un automate inconscient suffisamment perfectionné ne puisse être distingué de celui d’un être conscient. Pour jouer aux échecs, pour calculer, pour effectuer des opérations logiques ou pour réaliser certaines tâches matérielles très précises et très rapides, c’est déjà le cas. D’où le terme d’épiphénomène, phénomène surajouté, presque superfétatoire, souvent associé à celui de conscience.
. Comme chacun peut l’observer pour son propre compte, les représentations mentales qui se succèdent dans la conscience peuvent correspondre aux données fournies par les différents sens, vue, ouie, odorat, goût, toucher, sensibilité interne, après un traitement de ces données qui en précise la signification. Une autre représentation correspond à nos souvenirs et à nos pensées, étape finale du traitement global des données effectué par notre cerveau. La faculté que nous avons de parcourir les divers registres de notre mémoire pourrait être assimilée à un sens particulier. Lorsqu’une table est visuellement perçue par l’esprit conscient, sa forme et sa couleur sont en effet interprétées et associées au concept de table avant que l’ensemble de ces éléments n’accède à la conscience. Le lien existant entre ces éléments hétérogènes est matérialisé par la synchronisation et le renforcement des oscillations électriques des différents groupements neuronaux qui représentent dans le cerveau chacun de ces éléments de façon explicite. Notons au passage que ce phénomène donne une base physique sérieuse à la distinction introduite par la psychanalyse entre les processus mentaux conscients et les processus mentaux inconscients. Le renforcement des oscillations obtenu par effet feed-back entre neurones (l’augmentation progressive du niveau sonore d’une discussion entre deux personnes de caractère difficile donne une image de l’effet feed-back), et cette synchronisation prennent un certain temps pour s’établir, de l’ordre de la demi-seconde. Pour cette raison, toute action nécessitant que la conscience joue un rôle actif est nécessairement ralentie. Le cerveau réalise ainsi à chaque instant une véritable modélisation d’une fraction du monde extérieur, ce monde extérieur incluant du reste le corps de l’individu qui est cette partie du monde extérieur qu’il traine toujours avec lui. Le processus est inchangé, que le pinceau lumineux de la conscience éclaire le monde intérieur des souvenirs ou qu’il éclaire le monde extérieur tant ces deux mondes sont étroitement associés dans les processus mentaux. Le même spectacle vous fait frémir d’horreur que vous en preniez conscience par vos sens ordinaires ou par ce sens si particulier qui explore votre mémoire. C’est de la même façon qu’un ordinateur programmé à cet effet modélise un processus physique quelconque lorsqu’il est relié à des capteurs mesurant les propriétés physiques pertinentes. Tous les habitants de la planète auraient un neurone dédié à Georges Bush et un autre dédié à Barak Obama qui s’illuminent chaque fois qu’il est question de ces présidents. Le langage humain associe des phonèmes à chacun de ces groupements neuronaux et permet les échanges verbaux d’informations entre individus. Utilisé dans le monologue intérieur, il permet de suivre à la trace sa propre pensée. Cependant toutes les pensées ne sont pas verbalisées. Il n’est pas nécessaire de faire un discours pour porter à ses lèvres un verre de vin !
Le renforcement et la synchronisation des oscillations (d’une fréquence d’environ 40 cycles par seconde) des liaisons nerveuses entre le concept de table et les différents concepts auxquels il est rattaché sont provoqués, selon des mécanismes à élucider, par l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Attention" attention que l’esprit porte à cet instant à cette fraction du monde extérieur que constitue la table. Des substances chimiques produites par l’organisme, ou introduites par diverses voies influencent tous ces processus, pour les exciter ou les modérer. Admirons au passage la prescience du langage populaire qui parle depuis toujours de bonne ou de mauvaise humeur. Conviendrait-il mieux de dire de bonne ou de mauvaise hormone ? On peut parler de chimie amoureuse au sens littéral puisqu’il est acquis que le sentiment amoureux est provoqué par la dispersion dans l’organisme de composés chimiques proches de certaines drogues. L’effet le plus habituel du sentiment amoureux est la naissance d’un enfant. Au bout de trois ans environ la concentration de ces composés chimiques commence à diminuer, ce qui n’est pas trop grave dans la mesure où la phase la plus critique de la vie de l’enfant est terminée, où son besoin de soins et de protection est moindre. Comme on dit, la nature est bien faite ! Ce sentiment ou ces drogues ont d’autres heureux effets. C’est ainsi que la présence de la Maréchale maintirent le niveau hormonal de Maître Denis à un niveau propre à exciter sa verve.
D’autres circuits nerveux situés dans l’inconscient, ceux de la mémoire en particulier, bénéficient de l’information prioritaire que contient la modélisation. Rien ne serait dans la mémoire explicite, celle dont peuvent être extraits des souvenirs conscients, qui n’ait été dans la conscience au moment où ces souvenirs ont été enregistrés. La perception de la réalité résulte de l’intégration des sensations représentant le monde extérieur avec les souvenirs provenant des différentes mémoires. La conscience est un reflet de cette perception. La mémoire implicite ou mémoire procédurale est celle qui enregistre les automatismes inconscients. La mémoire explicite à long terme ou mémoire anecdotique est absente durant nos premières années puisque nous ne conservons aucun souvenir précis de cette période de notre vie. A l’âge adulte les deux mémoires coexistent, mais tel mémorisera facilement des mécanismes qui sera amnésique pour les détails de sa propre vie et vice versa. On peut penser qu’un grand nombre de neurones ont été modifiés par les multiples allers et retours de l’effet feed-back lié à la conscience, ce qui facilite par la suite l’évocation du souvenir. Une légère brèche dans une digue en terre laisse passer un filet d’eau, mais l’érosion agrandit la brèche et le filet d’eau devient torrent. Quand la crue est terminée, le lit du torrent en perpétue la mémoire et reste disponible un certain temps pour faciliter de nouveaux écoulements. A l’arrière plan, toutes les idées, souvenirs et sensations qui peuvent être associés à la table modélisée sont pour ainsi dire présélectionnés de façon à pouvoir être utilisés rapidement si nécessaire. Lorsque l’esprit est invité à participer à une action sur réception d’un signal, les circuits nerveux sont mis en alerte de façon à ce que l’action soit la plus pertinente et la plus rapide possible. Figureraient également de manière permanente à cet arrière plan les données les plus importantes pour la survie de l’individu et celle de son espèce, celles qui proviennent de sa sensibilité interne. C’est là que naissent les sentiments primordiaux. L’homme est heureux quand il est à l’aise avec ses propres viscères. Ce n’est pas parce qu’il se sent malheureux que son cœur est serré, sa gorge sèche, sa poitrine oppressée, ses mains tremblantes, son estomac noué et son ventre coliqueux ; c’est parce qu’il perçoit ces signaux de détresse qu’il se sent malheureux. Ce n’est pas parce qu’il est content que le chien remue la queue ; c’est parce qu’il remue la queue que le chien est content. Par le fait ces différentes manifestations représentent différents aspects des mêmes processus neuronaux.
Tout concept est représenté par un neurone ou plutôt un groupe plus robuste de plusieurs neurones rendus solidaires par des liaisons internes à ce groupe. Le nombre de neurones constituant un concept est compris selon les estimations entre 10.000 et 1.000.000. Le cerveau crée un concept pour chaque nouvelle rencontre qu’il s’agisse d’un être, d’une chose, d’une sensation, d’une action, d’une abstraction, etc.… et l’utilise dans son fonctionnement ultérieur. Dans le détail le processus pourrait être imaginé de la façon suivante. Un concept B nouvellement créé est doté d’un certain nombre d’attributs qui sont eux-mêmes des concepts préexistants. Soit A un de ces concepts préexistants. Les concepts A et B sont reliés entre eux par des chaînes neuronales établies lors de la création du concept B. L’excitation simultanée des concepts A et B crée entre eux une liaison à double sens. Si en effet le concept A est par exemple un être humain que vous connaissez et que le concept B est le fait d’avoir les yeux bleus, vous retrouverez la personne A quand vous chercherez qui parmi vos connaissances a les yeux bleus. Lors de leur création due au fait que les deux concepts sont excités simultanément chacune de ces deux liaisons trouverait un chemin dans le tissu neuronal comme l’éclair qui soudain zèbre un ciel d’été. Il en résulte la création d’un effet feed-back assez puissant pour modifier les propriétés des synapses concernées par ces liaisons. Contrairement à un GPS qui évalue successivement toutes les routes possibles entre deux points pour choisir la meilleure, le cerveau lancerait la recherche sur toutes les routes simultanément et c’est la première qui réussit la liaison qui serait sélectionnée. Ces liaisons peuvent être directes s’il existe dans chacun des concepts un neurone au moins dont l’axone soit en contact synaptique direct avec un neurone de l’autre concept. Si ce n’est pas le cas, il faut imaginer un ou plusieurs neurones relais. Une liaison directe est à priori plus rapide qu’une liaison comportant des relais. Pour que ces liaisons deviennent des liaisons préférentielles matérialisant un souvenir il faut que les modifications apportées aux synapses concernées persistent, que ces synapses aient été en quelque sorte sensibilisées. Intelligence et sensibilité vont souvent de pair. La création du nouveau concept, la sensation éprouvée par la conscience, le souvenir aussitôt créé ainsi que les voies pour y accéder sont donc des aspects distincts du même processus neuronal. A partir d’un tissu neuronal non sncore structuré le processus qui vient d’être décrit crée en uns seule opération tout le software nécessaire enrichissant le cerveau ordinateur préexistant et parfaitement intégré à celui-ci. Il s’agit donc d’un procédé à la fois très simple et très puissant. C’est pourquoi il aurait été retenu par la sélection naturelle. Lorsqu’il s’agit de mettre en relation deux concepts préexistants, chacun des deux concepts excite ses propres axones jusqu’à ce qu’une rencontre se produise, avec ou sans neurones intermédiaires, créant une ou plusieurs liaisons qui se perpétuent par sensibilisation des synapses présents sur ces liaisons. La création de routes privilégiées dans le tissu neuronal engendre nos habitudes et nos préjugés. Les concepts résident dans une zone du cerveau appelée  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Hippocampe_(cerveau)" hippocampe. Il existe une telle zone dans chaque hémisphère cérébral. Pour éviter que l’ »vocation d’un concept ne sollicite tous les concepts auxquels il est lié par un souvenir et, de proche en proche, la totalité des concepts il faut imaginer quelque mécanisme bloquant ce phénomène qui serait une forme d’épilepsie. Il arrive que la liaison entre deux concepts soit si forte qu’on ne peut évoquer l’un sans évoquer l’autre. Dans les autres cas il faut qu’un autre mécanisme intervienne qui est celui de l’attention. Ce mécanisme n’est pas pour le moment parfaitement élucidé. On pourrait donner du cerveau en action l’image d’un billard électrique où la pensée matérialisée par une multitude de billes rebondit sur une multitude de plots représentant chacun un concept. La conscience suit la partie à l’oreille, sensible au bruit particulier que font les billes qui rebondissent de manière répétée et extrêmement rapide entre deux plots. Ce bruit particulier a une fréquence. C’est l’équivalent d’une note de musique.
Parmi les attributs d’un concept figure son nom, au moins dans l’espèce humaine. Les règles de grammaire des différentes langues respectent les propriétés des liaisons nerveuses entre concepts. C’est ce qui permet la traduction d’une langue dans une autre. Les liaisons entre concepts représentés par des neurones ou groupes de neurones constituent la véritable pensée universelle qui est commune à toutes les espèces supérieures. Le nombre de concepts présents dans la mémoire d’un représentant de notre espèce est du même ordre de grandeur que le nombre de mots qu’il utilise. Le cerveau du nouveau-né est un tissu neuronal presque vierge qui sera façonné par l’usage. Il comporte cependant déjà une structure et quelques liaisons qui seront à la base de ses différents instincts. Dans les premières années, l’activité du cerveau est entièrement consacrée à l’acquisition de nouveaux concepts. Cette acquisition devient plus problématique dans un âge avancé, peut-être parce qu’il n’y a plus assez de neurones disponibles pour créer des groupes robustes susceptibles de les représenter. Je me souviens encore du numéro d’immatriculation de la Peugeot paternelle datant de la fin des années trente mais j’ai beaucoup de mal à retenir celui de la voiture que j’utilise tous les jours. Si la liaison entre un concept et son nom s’efface à cause de l’âge, de la maladie ou d’une utilisation insuffisante, le concept peut persister mais il n’est plus accessible. Vous cherchez un nom parce que le concept correspondant réside encore dans votre esprit mais vous n’êtes plus capable de le retrouver. Les performances intellectuelles d’un individu sont certainement grandement liées au nombre de concepts enregistrés dans sa mémoire, en même temps qu’à la richesse et la rapidité des liaisons neuronales permanentes établies entre ces concepts. Diderot, faisant preuve d’une remarquable capacité d’introspection  et d’une intuition extraordinairement extraordinaire, écrivait déjà: « Je le pense; ce qui m´a fait quelquefois comparer les fibres de nos organes à des cordes vibrantes sensibles. La corde vibrante sensible oscille, résonne longtemps encore après qu´on l´a pincée. C´est cette oscillation, cette espèce de résonance nécessaire qui tient l´objet présent, tandis que l´entendement s´occupe de la qualité qui lui convient. Mais les cordes vibrantes ont encore une autre propriété, c´est d´en faire frémir d´autres; et c´est ainsi qu´une première idée en rappelle une seconde, ces deux-là une troisième, toutes les trois une quatrième, et ainsi de suite, sans qu´on puisse fixer la limite des idées réveillées, enchaînées, du philosophe qui médite ou qui s´écoute dans le silence et l´obscurité. Cet instrument a des sauts étonnants, et une idée réveillée va faire quelquefois frémir une harmonique qui en est à un intervalle incompréhensible. Si le phénomène s´observe entre des cordes sonores, inertes et séparées, comment n´aurait-il pas lieu entre des points vivants et liés, entre des fibres continues et sensibles ? » (Entretien entre d’Alembert et Diderot).
Ces associations peuvent demeurer longtemps ignorées et se manifester de manière soudaine et inattendue comme l’atteste l’exemple célèbre de la madeleine de Proust,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Marcel_Proust" Proust dont les phrases interminables constituent une sorte de compensation à un souffle rendu court par un asthme lourd et chronique. Ce qui pour moi a joué le rôle de cette madeleine, c’est un fromage fabriqué avec le lait de ses quelques vaches par une grand-tante chez qui l’exode de 1940 nous avait fait nous réfugier. J’ai retrouvé ce goût, aussi délectable que rustique, cinquante années plus tard me souvenant du même coup de l’humble ferme, de ses occupants et de leurs travaux. Croquez une châtaigne et vous convoquez du même coup la forêt, l’automne, la rentrée des classes, l’odeur d’un cartable neuf, et toute votre enfance. Les bouddhistes donnent comme image de l’esprit celle d’un singe qui s’ébat dans la forêt en sautant de branche en branche… Une bonne poésie enfile adroitement des mots simples et des locutions usuelles, car, représentés par des groupements neuronaux richement connectés, ceux-ci vont pouvoir activer une grande partie du cerveau. Il y a ainsi une poésie des lieux sublimes comme il y a une poésie des faubourgs misérables. Un «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A8me" meme » exprime une liaison permanente entre quelques concepts. C’est la brique élémentaire de toute culture. Il se transmet d’individu à individu comme une maladie infectieuse. Cette notion de meme n’a de réel intérêt que s’il est possible de montrer qu’un meme correspond à un groupement neuronal figurant dans un des registres de la mémoire et qu’il est lié à un certain nombre de groupes neuronaux similaires. Ces liaisons qui constituent en quelque sorte son adresse se renforceraient au fur et à mesure de leur utilisation. Le secret d’un style fluide est peut-être celui de se laisser guider par ces liaisons. Si elles s’effacent, le souvenir s’efface avec elles. Ce qu’on appelle un « cliché » est la structure formée par quelques concepts bien choisis, premier cristal autour duquel la troupe nombreuse des autres concepts peut commencer à s’organiser. On peut citer comme exemples les dictons et proverbes, les mots d’esprits et les mots d’auteur, les slogans et les « petites phrases ». Un cliché repose l’esprit de l’auditeur. C’est comme une bonne prise dans une ascension difficile. Des mots plus recherchés et des locutions rares peuvent être utilisés pour obtenir un effet de contraste, de la même manière que, dans les contes et les histoires saintes, des évènements prodigieux peuvent alterner avec les faits les plus prosaïques.
Si les circuits neuronaux d’un individu se mettent à osciller de manière incontrôlée, c’est que ce malheureux est en proie à une crise d’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89pilepsie" épilepsie. Quand des chirurgiens, pour des raisons thérapeutiques, ont sectionné par le milieu le cerveau de patients épileptiques, ils ont constaté un dédoublement de la conscience des patients, seule celle correspondant au demi-cerveau dominant ( le gauche chez les droitiers) ayant droit à la parole, car c’est dans cet hémisphère que se situe  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Aire_de_Broca" l’aire du langage (beaucoup plus étendue chez la femme que chez l’homme… soit dit sans misogynie aucune).  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Descartes" Descartes situait l’âme dans la « glande pinéale », car il n’y en a qu’une seule située à la base du cerveau, comme il n’y a généralement qu’une seule conscience, et non pas une dans la moitié gauche et une autre dans la moitié droite. Son intuition n’était apparemment pas la bonne, ou du moins n’était-elle pas suffisamment précise. Dr Jeckill et Mr Hide sont peut-être représentatifs d’une lutte indécise des deux hémisphères pour le pouvoir. Chez un individu normal les deux consciences doivent se synchroniser et se confondre.
En plus des modélisations déduites des données fournies par les différents sens les représentations mentales peuvent correspondre à des modélisations élaborées à partir des données stockées en mémoire. Elles peuvent correspondre également, au moins dans notre espèce, à des fragments de discours, intérieur ou prononcé. Dans ce cas, la conscience à accès à la tonalité générale du discours, mais en aucune manière aux processus d’élaboration de ce discours. Comment pourrait-elle suivre pas à pas et en temps réel l’épouvantable complexité d’un processus qui consiste à aller chercher dans un vaste dictionnaire les mots qui conviennent à l’idée, de les assembler suivant les règles de la grammaire et de la syntaxe, et de transformer le tout en mouvements coordonnés de la mâchoire, des lèvres, de la langue, des poumons, du larynx ? Et je ne parle pas de l’élaboration de l’idée elle-même, tâche d’une difficulté qui dépasserait l’imagination si nous devions l’effectuer avec des machines. Les difficultés que connaît le développement de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Intelligence_artificielle" l’intelligence artificielle montrent bien toute la complexité de ces processus. Si je vous pose une question et que vous y répondiez, pendant le temps qui peut être assez bref qui s’écoule entre la fin de ma question et le début de votre réponse, des millions de neurones vont être activés dans votre cerveau sans que vous ayez la moindre perception de leur travail. Vous n’êtes pas plus conscient du détail de ce qui se passe dans votre cerveau que du détail de ce qui se passe dans votre ordinateur. Comme les représentations mentales d’origine visuelle paraissent chez l’homme les plus omniprésentes, on peut donner le nom d’image à toutes les représentations mentales conscientes quelle que soit la catégorie à laquelle ces représentations appartiennent. Ces images sont fixes et se succèdent à une cadence élevée, voisine de la cadence des images du cinématographe. Les mouvements font l’objet d’indications portées lorsqu’il y a lieu sur ces images fixes (un peu à la manière des bandes dessinées). Les zones de couleurs ou de luminosités différentes font l’objet d’un traitement particulier qui identifie le dessin des lignes séparant ces différentes zones. C’est probablement pourquoi les dessins et les caricatures sont si évocateurs pour nous. Une figure trop parfaite telle qu’un cercle tracé au compas ne saurait être belle car elle prive l’esprit du plaisir de reconnaître dans un tracé imparfait la figure parfaite qui lui est sous-jacente. L’ennui naît lorsque les images se répètent trop souvent identiques à elles-mêmes. Ces images sont en  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Conception_assist%C3%A9e_par_ordinateur" 2D1/2 au moins puisque nous percevons la profondeur de champ. Elles ne semblent pas être en 3D puisque nous sommes obligés de faire un effort de réflexion pour faire tourner mentalement une figure géométrique dans l’espace. Essayez simplement d’imaginer la représentation neuronale d’un concept aussi simple qu’un trièdre trirectangle et de ses déplacements dans l’espace. La succession cadencée des images explique sans doute le rythme de la musique et la gamme discontinue des fréquences utilisées. Dans un glissando l’oreille ne peut reconnaître chaque note car une image devrait alors contenir plusieurs notes.
Le travail d’introspection est difficile car, comme dans d’autres domaines de la science, l’observation modifie la chose observée. Il semble portant qu’à un instant donné une image ne puisse contenir simultanément plus de deux catégories de représentations mentales, peut-être trois (perception visuelle ou sonore ou olfactive, discours, etc.(), l’une dans la zone ou se concentre l’attention, l’autre ou les deux autres à l’arrière plan. Les autres catégories sont exclues, provisoirement. Pendant que vous lisez vous ne vous rendez pas compte de la pression que votre main exerce sur votre livre ou sur votre souris. N’est-il pas exact que vous venez juste d’en prendre conscience ? Une fugue comprend le plus souvent deux ou trois voix. Au-delà, il est difficile pour la plupart des auditeurs de distinguer les différentes lignes mélodiques. Si cette fugue est jouée par un seul instrument l’esprit à même tendance à les recoudre ensemble. C’est le même écran, comportant donc deux ou trois zones, qui reçoit toutes les informations dont l’individu est conscient à l’instant t. Chaque zone est susceptible de recevoir toutes les catégories de représentations mentales qui se trouvent ainsi placées dans une situation permanente de compétition. Les images qui sortent victorieuses de la compétition, celles qui montent sur le podium de la conscience, sont normalement désignées par l’inconscient, à moins qu’une variation rapide des données fournies par l’un ou l’autre des sens n’appelle l’attention sur le phénomène responsable de cette variation. Les images conscientes qui ne sont pas fréquemment sur la première marche du podium sont des images d’humeur ou d’ambiance. Elles ne participent pas directement aux décisions. Se concentrer, c’est refuser de voir les images qui ne sont pas sur la marche la plus élevée.
Observez par exemple un virtuose : si vous vous intéressez à l’alliance qu’il porte au doigt, la ligne mélodique s’estompe et si vous vous intéressez à la ligne mélodique, l’image du musicien devient floue (ce qui est la façon normale d’écouter de la musique). Si vous avez trop chaud ou si vous étés mal assis, vous oubliez la musique le temps de cette constatation. Un mathématicien ami de Diderot pris de maux d’oreille épouvantables s’abîma pour oublier la douleur dans un difficile problème. Le problème résolu sa douleur le rattrapa avec une violence redoublée. Installez-vous près d’un torrent : le roulement de l’eau sur les cailloux, pourtant parfaitement audible, disparaîtra rapidement de votre conscience au bénéfice de vos fantaisies et vous vous endormirez comme jamais. On peut multiplier les exemples de ce type.
Une image peut également contenir une proposition d’action, une volition, formulée par l’inconscient, associée à des grandeurs positives traduisant les différents désirs qu’elle inspire et des grandeurs négatives traduisant les différentes répulsions qu’elle suscite. Ne sont retenues et mises en œuvre que les volitions ou la grandeur résultante est suffisamment positive. Lorsqu’elle est voisine de zéro, il faut prévoir de nombreux et pénibles allers et retours entre conscient et inconscient. Lorsque la décision prise modifie la grandeur résultante dans le mauvais sens le système devient instable. L’homme est un irrésolu. La conscience n’a cependant aucun accès au processus d’élaboration de la notation et prend sa décision de confiance.
Suivant cette description il apparaît que la conscience est essentiellement passive et que le gros du travail s’effectue dans l’inconscient. Prenons trois exemples, du reste fort éloignés les uns des autres, pour illustrer ce propos :
Quand un joueur de tennis de haut niveau vient au filet et tente d’intercepter le passing-shot de son adversaire, il dispose d’environ une demie seconde pour (a) reconstituer la trajectoire de la balle qui vient vers lui en utilisant les informations données par sa vision binoculaire et les informations spatiales concernant la position et l’orientation de sa propre tète, pour (b) déterminer la trajectoire qu’il veut donner à cette balle, pour (c) se déplacer et placer sa raquette au bon endroit en bonne position et au bon moment en agissant (d) sur un système compliqué de leviers osseux et de vérins musculaires, tout en tenant compte (e) de la position initiale de ses principaux segments, en maintenant si possible (f) l’équilibre de l’ensemble et en anticipant le coup suivant. La puissance de calcul nécessaire pour mener cette tâche à bien est tout à fait impressionnante et serait très difficile à égaler par les meilleurs automates actuels, pourtant spécialisés, qui ont du mal à aller cueillir des fruits dans un arbre. Or ce calcul désigné du nom de réflexe se déroule principalement en dehors de la conscience du joueur qui ne fait qu’observer le résultat de sa mise en œuvre. Pour le joueur débutant qui essaie de “ réfléchir ”, la balle est passée depuis longtemps avant que sa raquette ait esquissé le moindre déplacement. Il apparaît donc sur cet exemple que les tâches requérant une grande habileté ou une grande célérité d’exécution sont déléguées à des automatismes acquis par l’entraînement. Ces automatismes sont, dans une large mesure, inconscients. Ils ne nécessitent pas, et c’est un de leurs intérêts, d’effort de volonté. Lorsqu’une automobile que vous dépassez sur l’autoroute fait un écart imprévu, vous vous retrouvez frôlant la glissière de sécurité, avec le pied sur le frein, avant de réaliser exactement ce qui s’est passé. Cette réaction réflexe a consommé paradoxalement beaucoup de votre énergie mentale, et il peut ne plus vous en rester suffisamment pour faire connaître votre façon de penser au conducteur fautif. L’analyse de la succession de nos actions journalières montre que notre corps est le plus souvent en pilotage automatique sous le contrôle de la conscience prête à reprendre les commandes en cas de problème. La conscience hérite ainsi de tous les problèmes qui n’ont pu être traités efficacement par les automatismes existants. Même lorsqu’un mouvement est volontaire, la volonté consciente n’agit pas sur chaque muscle individuellement, mais les commande par l’intermédiaire d’un système d’interprétation et de coordination inconscient.
Si vous n’arrivez pas à retrouver un nom, ce qui avec l’age vous arrivera de plus en plus fréquemment, le processus selon lequel s’effectue la recherche, quelquefois fructueuse, vous échappe complètement. S’il vous vient spontanément à l’esprit, vous n’en savez d’ailleurs pas davantage la raison. Les mécanismes de recherche et de reconnaissance sont très largement, sinon totalement, inconscients.
La plupart des récits de découvertes font état d’un long et pénible travail de rassemblement des données et de tentatives d’explication avortées. Un jour la solution surgit de façon tout à fait inopinée et comme miraculeuse. Pendant toute cette période d’incubation où des myriades de signaux ont été échangés entre neurones l’inconscient a tourné et retourné le problème dans tous les sens jusqu’à ce que les données pertinentes se raccrochent entre elles et avec les structures d’explication existantes de façon à constituer une extension logique et cohérente de ces structures. Archimède a pu pousser son fameux eurêka à propos de la poussée hydrostatique parce que les notions géométriques concernant les volumes, les notions physiques concernant le poids et la densité avaient été préalablement éclaircies. Il apparaît donc sur cet exemple que les tâches requérant le plus haut niveau d’abstraction, les opérations logiques les plus compliquées peuvent se dérouler sans que la conscience soit tenue au courant en temps réel. L’inconscient, c’est l’état-major auquel la conscience - commandant en chef fait passer toutes les informations dont elle dispose. L’inconscient- état-major (et non pas l’état-major inconscient) réalise toutes les simulations nécessaires à la préparation des décisions. C’est également lui qui écrit les discours du commandant en chef qui se surprend ensuite à les prononcer comme une bande perforée sort d’un vieil ordinateur. La conscience ignore tout du détail du travail de son état-major et n’a accès qu’aux résultats de ses analyses. Le travail de fermentation de l’inconscient produit pour ainsi dire les bulles de pensée qui éclatent de temps en temps à la surface de la conscience. Si vous ne notez pas les plus intéressantes d’entre elles vous risquez fort de ne jamais les revoir tant elles sont fugaces ! Comme la plupart de vos rêves. Des idées peuvent ainsi disparaître qui ont paru sur le moment géniales à leur auteur (même pour la chouette, ses petits sont les plus beaux du monde). S’il arrive que l’une se soit égarée, votre seule chance de la retrouver est de cesser de la chercher. Elle se situe en effet trop loin dans la file d’attente des idées qui veulent accéder à votre conscience. Il faut attendre que celles qui crient plus fort qu’elle soient passées. La chercher en essayant de retrouver les chemins qui vous y ont conduit ne fait généralement qu’immobiliser la file. Je ne fais ainsi que reprendre une observation de Montaigne qui avait déjà signalé le même phénomène : « Il m’en advient comme de mes songes : en songeant je les recommande à ma mémoire (car je songe volontiers que je songe), mais le lendemain je me représente bien leur couleur comme elle était, ou gaie, ou triste, ou étrange ; mais ce qu’ils étaient au juste, plus je peine à le trouver, plus je l’enfonce dans l’oubli ». Montaigne a mémorisé la couleur ou peut-être la musique de son rêve, non pas son détail. De toute évidence il manque une salle d’attente où ces idées pourraient séjourner avant d’être appelées. J’ai pour ma part la nette impression que mon inconscient est plus intelligent que moi, qu’il galope plus vite et plus loin quand il a la bride sur le cou que lorsque ma conscience reprend les rênes. Ce n’est probablement pas un hasard si Marcel Proust commence La Recherche du Temps Perdu, une des plus belles créations de l’esprit humain, par une longue description des pensées qui l’agitent lorsqu’il les laisse vagabonder dans le demi-sommeil qui précède ou suit le vrai sommeil. Dans la journée l’esprit est mobilisé par l’action et ne peut qu’engranger les données qui demandent un traitement plus long. Ce dernier sera effectué chez le sujet endormi au cours de la nuit suivante. Les idées qui résultent de ce processus, jamais plus de trois à la fois me semble-t-il, se récoltent au petit matin, comme les œufs des poules ! J’imagine que l’usage de drogues permet à certains artistes de conserver durant la journée cette créativité nocturne. Qui ne s’est endormi avec un problème et réveillé avec une solution ? La nuit, comme on dit, porte conseil. C’est ainsi que les employeurs peuvent bénéficier d’un travail directement productif effectué en heures supplémentaires de nuit non rémunérées !

Deuxième tentative

« Et le monde intérieur dans tout ça, me direz-vous, il n’en a pas été question ! Vous n’avez encore rien dit de l’aspect subjectif de la conscience ! Pourtant c’est lui que vous avez, avec beaucoup de présomption, proposé d’expliquer ». J’y viens, mais pour essayer de tenir cette gageure il est nécessaire de quitter le domaine de la science respectable et d’entrer dans le royaume de la spéculation. Avant d’entrer dans ce royaume il faut rappeler les postulats suivants :
L’état du cerveau est une image significative de l’état d’une fraction du monde extérieur
L’état de la conscience est une image significative de l’état d’une partie du cerveau
Il existe une  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Solipsisme" pluralité de consciences indépendantes
Le même monde extérieur est commun à toutes les consciences
La vision qui est proposée est suggérée par le fait que le cerveau, contrairement aux autres organes, est le siège d’une intense activité électrique dont témoignent entre autres les électroencéphalogrammes enregistrant les différences de potentiel à l’extérieur de la boite crânienne. Le tracé de ces électroencéphalogrammes dépend en effet très directement de l’état de veille ou de sommeil du sujet, donc de l’état de sa conscience. Un électroencéphalogramme plat signe la mort de la conscience. Certains chercheurs ont entrepris de déchiffrer les signaux électromagnétiques émis par le cerveau pour en déduire les mots de son discours intérieur. J’augure qu’ils pourront peut-être avoir accès à la musique de l’opéra comique ou tragique qui se déroule dans la tête du sujet examiné mais qu’ils ne pourront pas avoir accès aux paroles par les mêmes moyens. D’autres utilisent déjà ces signaux pour que les handicapés moteurs puissent commander de façon autonome certains dispositifs facilitant leur vie quotidienne. Il faut y ajouter le fait que des excitations électriques ou magnétiques appliquées au cortex ou même à l’ensemble du cerveau peuvent induire des sensations conscientes, alors que le cerveau est dépourvu de récepteurs sensoriels. Cette vision est la suivante : la conscience subjective, entité essentiellement passive semble assister à un spectacle. La salle de spectacle, c’est l’écran où défilent les images, un espace particulier situé à un instant donné dans une certaine partie de mon cerveau, celle où se situent les circuits neuronaux oscillants dont il a été question plus haut. Dans cet espace des particules électrisées en mouvement engendrent un champ électromagnétique qui contient des signaux selon un code déterminé. Ce dont je suis conscient à un instant donné est, selon la vision proposée, en rapport direct avec l’état à cet instant du champ électromagnétique diffusé à partir de l’écran. On ne voit pas bien la nécessité qu’il y aurait de renforcer les signaux correspondant aux sensations conscientes si les traitements effectués sur ces signaux étaient de logique pure. Ce renforcement et cette synchronisation prennent un sens si ces signaux doivent provoquer l’émission d’un champ électromagnétique. Les différentes catégories de perception sont différenciées sans ambiguïté par les codes utilisés pour les représenter. Une dérive dans cette codification peut produire la confusion des sens qui est parfois observée. Certains voient un son comme une couleur : « A noir, E blanc, I rouge, U vert, O bleu » ( HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/wiki/Arthur_Rimbaud" Arthur Rimbaud, « Voyelles »). De nombreuses objections peuvent être formulées à l’encontre de cette hypothèse : le transformateur d’un poste électrique a-t-il conscience de tous les défauts qui se produisent sur les réseaux auxquels il est connecté, même s’il n’a bien entendu aucun moyen de faire part de ses impressions ? Un court-circuit, ça doit faire mal ! 400.000 Volts, est-ce que ça procure un sentiment de puissance hautement jouissif ? Il manque toutefois dans ce cas un élément essentiel à une véritable conscience qui est son étroite relation avec la mémoire, soit qui’il s’agisse de l’alimenter, soit qu’il s’agisse d’en extraire des données utiles. Comment le champ électromagnétique émis par le cerveau n’est-il pas noyé dans d’autres champs beaucoup plus puissants que lui ? Remarquez cependant que votre téléphone portable est dans le même cas et que ça ne l’empêche pas de fonctionner car il sait filtrer les signaux parasites. Le champ qu’il émet est le reflet de l’état de ses organes internes, et le champ qu’il reçoit agit sur ses organes internes. Le cerveau serait un automate auto programmé doublé d’un téléphone portable capable de se parler à lui-même. L’hypothèse rend compte en tout cas de cette constatation essentielle qu’est l’unicité du flot de la conscience, car manifestement les états successifs de la conscience, les différentes sensations et images passent dans deux ou trois canaux au plus dont l’imagerie cérébrale n’a révélé jusqu’à présent ni l’existence ni l’emplacement même si certaines zones paraissent dotées d’un statut privilégié. Il s’agit en l’occurrence du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cortex_c%C3%A9r%C3%A9bral" cortex, du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Thalamus_humain" thalamus et du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Bulbe_rachidien" bulbe rachidien. En particulier, c’est au niveau du bulbe rachidien, celle de ces zones qui est au plus prés du corps, que naissent les sentiments et les émotions. Sauf lorsqu’une douleur ou un plaisir particuliers se manifestent ces sentiments et émotions se situent pour l’être humain sur la dernière marche du podium. On peut par contre se souvenir toute sa vie d’un bon plat ou d’une bonne bouteille ! Les animaux qui ont un bulbe rachidien ont aussi des émotions comme le suggère l’observation directe. La conscience est un phénomène trop universellement répandu pour ne pas être un phénomène tout aussi naturel que les autres.
Le champ électromagnétique émis par le cerveau a aussi la propriété d’être quasi insensible à l’emplacement des différents circuits élémentaires qui le génèrent, les distances séparant ces différents circuits (quelques centimètres) ne pouvant créer de décalages temporels importants eu égard à la vitesse de propagation de 300.000 kilomètres par seconde du champ électromagnétique. L’information portée par le champ est indépendante de la distance à la source, sans aucun décalage temporel, pour un observateur se déplaçant à la même vitesse que les ondes. La montre au poignet de cet observateur marque en effet la même heure au moment où l’onde est émise et au moment où elle est absorbée, quelle que soit la distance entre les points où ces évènements se sont produits. Le champ électromagnétique constitue donc une entité authentiquement indivisible. Ainsi est préservée l’unité de la conscience, somme de plusieurs fonctions périodiques qui ne dépendent que du temps, C=C(t), tout comme la musique qui est la même en tous les points de la salle de concert. Si vous avez des doutes sur la possibilité pour une telle fonction de représenter toute la gamme des sentiments humains considérez quelles sont les possibilités de la musique. De la musique nous percevons distinctement la note fondamentale et quelques harmoniques. Il en va semble-il de même pour la conscience. Si vous avez des doutes sur la possibilité de lier une telle fonction a un organe comme le cerveau de la même manière que la musique est liée à l’orchestre considérez que les ondes électromagnétiques sont un million de fois plus rapides que les ondes sonores et que le cerveau est cent fois plus petit qu’un orchestre de dimensions moyennes. Cette conception préserve également le caractère traditionnellement immatériel de “ l’âme ”, car les champs ne sont que des modifications des propriétés d’un espace qui pourrait être vide. Vu de l’extérieur, ce champ possède toutes les propriétés usuelles d’un champ électromagnétique. Eprouvé pour ainsi dire de l’intérieur, c’est ce dont j’ai conscience à cet instant. Au départ, la conscience était sans doute un pur épiphénomène mais la nature qui fait feu de tout bois a trouvé le moyen de la rendre utile et même indispensable à toutes les espèces évoluées. Ma douleur et mon plaisir sont des états particuliers du champ en question que l’évolution poursuivie pendant quelques milliards d’années a rendus tels que les sensations plaisantes ou douloureuses correspondent respectivement à des situations favorables ou défavorables à ma personne ou à l’espèce à laquelle j’appartiens. Il est en effet assez naturel de penser que l’ajustement entre l’état de la conscience et celui de l’organisme qui la supporte a demandé un temps considérable, du même ordre de grandeur que celui qui a été nécessaire à l’établissement des processus physiologiques eux-mêmes. L’aventure de la conscience aurait commencé dans cette hypothèse à l’aube de la vie. Un ordinateur est un cerveau sans conscience, du moins pour le moment. Conscience et pensée sont des processus liés mais fondamentalement distincts si on entend par pensée l’ensemble des échanges de signaux électriques entre neurones. Pour que naisse la conscience il faut que des collections de neurones commencent à échanger des signaux sur un mode vibratoire. La fréquence des ondes cérébrales parait trop faible pour porter sans artifices une information complexe. Il faudrait donc imaginer que les sentiments et les sensations sont traduits sous forme de modulation de fréquence ou d’amplitude. C’est ainsi qu’on peut donner comme image du cerveau celle d’un orchestre à cordes dont la musique s’appellerait conscience. Chaque sensation communiquée par le bulbe correspond à une certaine séquence vibratoire. Le cortex va chercher dans la mémoire des sensations qui sont codées de la même façon. Lorsqu’il s’agit de réflexions purement abstraites comme dans les raisonnements mathématiques, la conscience s’évanouit presque ; il y a un blanc. Chaque accord correspond à un sentiment. Un accord mineur traduit un sentiment négatif comme la tristesse sur l’échelle du « satisfactionomètre » tandis qu’un accord majeur traduit un sentiment positif comme la joie ou l’enthousiasme. Avec l’apparition du langage la musique est devenue chanson laquelle n’est pas un art mineur puisqu’elle unit deux arts majeurs se confortant mutuellement : la musique et la poésie, Une bonne chanson parle à tout le monde, jeunes et vieux, riches et pauvres. Le monde vit au rythme des chansons. Le plaisir peut être vu comme une harmonie de la variation du champ électromagnétique et la douleur comme une dissonance. D’ailleurs l’homme, le plus souvent, ne recherche pas vraiment le plaisir, mais un état neutre, un état d’équilibre. Tout être vivant est la somme d’une myriade d’équilibres physiques, physiologiques et psychiques. Tout déséquilibre doit être corrigé pour que cet être se maintienne en vie. D’un homme au comportement aberrant on dit fort bien que c’est un déséquilibré. Le plaisir n’est que la disparition d’une douleur ou d’une tension. Le plaisir de manger est celui de faire cesser la faim et celui de se gratter, de supprimer la démangeaison. De même l’amour est un besoin avant d’être un plaisir. Le plaisir nait du retour à l’équilibre. Cet état d’équilibre s’appelle le bonheur, sentiment équidistant du plaisir et de la douleur. Il signifie que, toutes les douleurs et tensions étant supprimées, les fonctions physiques et mentales s’effectuent harmonieusement sous le contrôle de la conscience. C’est  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Ataraxie" l’ataraxie des philosophes antiques. Les applaudissements nourris et prolongés à la fin de l’exécution d’une pièce musicale témoignent de l’émotion ressentie par les auditeurs mais aussi de leur soulagement de pouvoir rompre un silence longtemps imposé. Des chercheurs pensent avoir identifié et localisé dans le cerveau un système qui gouverne le fonctionnement du cerveau lorsque ce dernier n’effectue aucune tâche consciente et ils l’ont baptisé Réseau du Mode Défaut. Il semble que le même système joue encore un rôle lorsque le cerveau effectue une tâche consciente. Ce serait l’équivalent du leader d’un orchestre de jazz qui indiquerait le thème et le tempo sur lesquels les musiciens improvisent et qui présiderait également à l’entretien des instruments et au classement des enregistrements lorsque le concert est terminé. Lorsque ce leader cesse d’exercer ses fonctions le sujet s’endort, s’évanouit ou meurt. Il faut admettre que ce système indispensable au fonctionnement du cerveau est de l’ordre de l’instinct. Il fait partie du système d’exploitation livré avec l’automate. Le cerveau sait penser comme le tube digestif sait digérer préalablement à toute expérience. La part de la consommation d’énergie directement imputable à une tâche consciente ne dépasse pas 5% de la consommation totale d’énergie du cerveau. Il semble donc que les bavardages ou les soliloques se poursuivent au sein de l’orchestre car la tâche consciente est loin de mobiliser tous les musiciens. Ce qui laisse également supposer que ces différentes activités qui pourraient sembler oiseuses correspondent en fait au maintien de l’orchestre en bonne condition. Les récompenses et les punitions liées à des sensations plaisantes ou douloureuses incitent l’individu porteur de la conscience à se maintenir dans des conditions qui préservent son intégrité. C’est la seconde vertu de la conscience qui s’ajoute à celle de fournir une synthèse des sensations de l’individu. L’aspect subjectif de la conscience doit donc avoir des conséquences objectives. Il suffit pour cela que les variations du champ émis caractéristiques du plaisir ou de la douleur soient détectées par des récepteurs appropriés, genre  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Ampoules_de_Lorenzini" ampoules de Lorenzini ou analogues aux récepteurs sensoriels sensibles au champ magnétique terrestre utilisés pour s’orienter par certains oiseaux et poissons, et que ces signaux soient amplifiés pour que ces informations soient réintégrées dans l’ensemble des circuits neuronaux, de la même façon qu’un capteur détecte le rayonnement d’une commande à distance et déverrouille des portières. Une autre possibilité d’interaction entre champ et circuits neuronaux est que ce qui exprime la force de ma volonté, quand elle s’exerce, soit l’intensité d’une certaine fraction de ce champ engendrée par les charges électriques matérialisant les volitions de l’inconscient. Cette fraction du champ agirait sur d’autres charges électriques qui initient les actions du système neuromusculaire, traduisant ainsi les volitions en actions. L’intensité de cette fraction du champ pourrait être ressentie comme douloureuse quand ma volonté est tendue à l’extrême. Considérez cependant le cas où j’ai à déplacer une grosse pierre. Pour une raison ou pour une autre cette idée de la déplacer s’est imposée à mon esprit mais n’a au départ mobilisé que quelques neurones ce qui correspond à un niveau d’énergie extrêmement bas. Il faudra donc un coefficient d’amplification très important avant que la pierre ne commence à bouger. Les derniers étages d’amplification sont assez bien connus et se situent à l’interface entre fibres nerveuses et fibres musculaires. Le premier étage d’amplification résulte de l’association de plusieurs neurones collaborant à la même tâche. Le second étage se situe au niveau de la volonté consciente qui mobilise les circuits nerveux résonnants. L’interposition d’un étage (émetteur / champ) suivi d’un étage (champ / détecteur) se traduirait très vraisemblablement par un coefficient d’amplification très inférieur à 1 ce qui ne va pas dans le sens recherché. Il faut croire qu’une meilleure adéquation compense, et au delà, cette erreur apparente de conception. La même ligne de raisonnement conduit à attribuer un rôle fonctionnel et non de pur spectacle à la conscience. La multiplication des neurones actifs quand s’exerce une action volontaire pourrait aussi s’interpréter par la nécessité qu’ils soient nombreux pour arracher la décision devant le Tribunal de la Conscience Objective et fournir ensuite un signal de commande suffisamment énergique. Ceci n’explique pas toutefois le caractère ondulatoire de leur activité. La conscience n’est pas qu’un sous-produit du fonctionnement du cerveau. Le cerveau consomme environ 20% de l’énergie totale requise par un individu et une partie appréciable de l’énergie consommée par le cerveau doit être utilisée pour générer la conscience. Comment un procédé consommant autant d’énergie pour engendrer les ondes cérébrales aurait-il pu résister à la pression de la sélection naturelle s’il était sans aucune utilité ? Si la douleur et le plaisir ne sont que l’excitation de circuits nerveux spécialisés prenant leur origine dans les diverses parties du corps, comment expliquer la douleur morale ou le plaisir intellectuel ? Comment expliquer que le plaisir donné soit souvent plus gratifiant que le plaisir reçu ? Si les arguments précédents ne sont pas à l’abri de la critique il me semble qu’on ne peut pas les écarter d’un revers de main en l’absence d’explication plus convaincante. Au-delà des interactions qu’occasionnent douleur et volonté, certains ont proposé que les populations neuronales vivent dans une sorte de symbiose avec le champ électromagnétique qu’elles émettent. Il est concevable de réaliser avec des composants électroniques reliés entre eux la réplique d’un cerveau humain. On sait depuis peu fabriquer des puces en silicium qui imitent les propriétés des neurones de chair. Suffirait-il d’en rassembler un nombre suffisant et de compter sur les propriétés d’auto organisation des systèmes complexes ? La Communauté Européenne s’apprête du reste à financer à hauteur d’un milliard d’Euros le « Human Brain Project » qui a pour ambition de créer des cerveaux artificiels imitant du mieux possible le comportement des cerveaux humains. La durée de réalisation prévue serait d’une dizaine d’années. La puissance électrique consommée par un de ces cerveaux en silicium serait de l’ordre de 20 mégawatts, soit un million de fois plus que le cerveau humain qui lui a servi de modèle, ce qui illustre bien le retard de la technique sur la nature. Est-ce que cette réplique serait dotée de quoi que ce soit qui ressemble à une conscience si ses composants électroniques et leurs liaisons filaires étaient soustraits par un blindage à l’influence des champs électromagnétiques développés par les autres ? Aurait-t-elle les mêmes performances que le cerveau qui lui a servi de modèle ? La théorie du  HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/wiki/Electromagnetic_theories_of_consciousness" \l "Cemi_theory" « cemi field » professe que les automates fabriqués par l’homme seront toujours beaucoup moins performants que les cerveaux des êtres vivants car il leur manque une conscience capable de faire la synthèse de leur activité continue de traitement de l’information et, à l’aide de cette synthèse, orienter l’activité elle-même. Il est frappant de constater que, si le concept de conscience est bien cité dans la présentation du Human Brain Project, il ne fait l’objet d’aucune étude spécifique. Le rôle de la conscience dans le fonctionnement du cerveau serait pourtant un beau sujet d’étude !!! Dans une Europe encore largement imprégnée de « spiritualité », l’étude de la conscience est encore taboue, comme s‘il s’agissait d’un phénomène de l’ordre du divin.
Remarquons que le double aspect qu’il a fallu attribuer au champ électromagnétique, selon qu’on le considère de l’extérieur ou de l’intérieur constitue une sorte de dualisme dont il paraît impossible de faire l’économie. Ce dualisme matérialiste, ou pour mieux dire naturaliste ou physicaliste, consiste à attribuer une dimension supplémentaire, la sensibilité, à des entités physiques, les champs ou à la modulation de ces champs. Le dualisme de l’esprit et de la matière des philosophes serait donc en relation directe avec le dualisme des champs et des particules des physiciens. Cependant, les champs n’ont pas moins de réalité physique que les particules qui constituent la matière. Dame Nature qui n’en est pas avare aurait ainsi un tour de plus dans son sac. Chassez le dualisme par la porte, il revient par la fenêtre… Comment pourrait-il en être autrement ? Nul ne peut nier l’existence de sa propre conscience, et l’existence d’un monde extérieur indépendant de la conscience subjective que l’on en a semble par ailleurs un pari raisonnable. Nier ce dernier conduit en tout cas à bien des déboires. Diderot a eu nettement l’intuition d’une explication de cette nature (Si un esprit fait de la matière, pourquoi de la matière ne ferait-elle pas un esprit ?), mais les connaissances disponibles à son époque ne lui ont pas permis d’expliciter davantage sa pensée. Dans ces conditions la conscience, dans son aspect subjectif est bien, pour l’essentiel, un épiphénomène, encore que la détection de la douleur et du plaisir éprouvés ou l’action de la volonté ou l’alimentation de la mémoire par exemple puissent lui conférer un rôle actif, mais cet épiphénomène est la conséquence nécessaire de l’utilisation de processus de nature électrique ou électromagnétique dans le fonctionnement du cerveau, à la façon dont le bruit d’un moteur accompagne nécessairement son fonctionnement (c’est dans ce sens qu’on peut dire de la conscience qu’elle est une propriété émergente). Une oreille un tant soit peu exercée y décèle aisément un bruit anormal s’il y a quelque chose qui cloche... C’est donc la musique électromagnétique émanant du cerveau qui constituerait le support matériel de la conscience plutôt qu’un circuit neuronal spécialisé qui n’a pas plus de raison d’être conscient que n’importe quel autre.
Quant à la conscience dans son aspect objectif, elle peut être considérée comme étroitement associée au système d’exploitation de l’automate très particulier que constitue un cerveau. Ce système composite met de l’ordre, lorsque le sujet est éveillé, dans le fonctionnement des cent milliards de neurones qui le composent, sachant que chaque  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Neurone" neurone entretient des liaisons avec des milliers d’autres neurones proches ou lointains par l’intermédiaire d’axones et de synapses selon une structure de communication hiérarchisée et modulaire. Cet automate de chair comporte donc comme un ordinateur une unité centrale, la conscience objective, et un écran de visualisation, la conscience subjective. Bien que cet automate fonctionne par pas successifs, au rythme des ondes qui le parcourent, il est organisé de façon très différente de celle des ordinateurs de silicium fabriqués par l’ingénieux bipède. Il a été modelé par la sélection naturelle pour prendre des décisions rapides et salvatrices alors que l’autre a été conçu four effectuer des calculs longs et compliqués. C’est un automate qu’on peut dire analogique, c'est-à-dire manipulant des quantités exprimées physiquement en vraie grandeur et non issues d’une combinatoire d’unités. L’intensité d’une sensation ou d’un sentiment serait représentée par le nombre de neurones qui y participent et non par un nombre en numération binaire ou similaire. Pour les opérations logiques, il est très lent et facilement fautif, mais il excelle par contre dans les jugements synthétiques et intuitifs, les raisonnements flous, le sens des ordres de grandeur. Son rythme de travail semble être de quarante hertz quand celui d’un microprocesseur courant est de plusieurs milliards. Chaque mot d’un ordinateur contient seulement quelques dizaines de bits alors que chaque image cérébrale en contient probablement plusieurs milliers. Chaque cellule photosensible de la rétine est prise en compte au départ des images visuelles, même si ces informations sont compressées en cours de traitement. Une image auditive contient une multitude d’harmoniques ainsi que les intensités qui leur correspondent. La peau et les viscères contiennent de très nombreuses cellules sensibles. Chaque image visuelle, sonore ou tactile correspond à une matrice, c’est à dire un tableau à deux entrées. Cette structure matricielle se conserve tout au long de la chaine de traitement et jusqu’au cortex qui a lui-même une structure en feuillets, chaque feuillet constituant lui-même une matrice. Nous pouvons supposer que la conscience est aussi une fonction matricielle ou fonction complexe du temps M=M(t), tout comme la musique. Si le cerveau est plus lent, il est par contre capable de prendre en compte simultanément un nombre très considérable de données sans même que la conscience en soit avertie. Pensez simplement à la difficulté de réaliser une tâche aussi simple que de se déplacer sur un terrain accidenté en évitant les arbres, les ronces et les faux-pas. Ordinateur de chair et ordinateur de silicium se complètent donc admirablement. La Nature n’a pas jugé bon d’inventer l’ordinateur de silicium ni la roue. Sur une autre planète, peut-être…  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Natura_non_facit_saltus" Natura non facit saltus, ou plutôt elle ne fait pas de grands sauts. Une modification importante d’un programme réalisée au hasard a toutes les chances de le rendre inutilisable. Alors que le terrain est déjà occupé par d’autres, la probabilité pour qu’un programme génétique modifié sans dessin précis engendre un individu compétitif est excessivement faible. Une fois que la nature a emprunté un chemin, elle est obligée de s’y tenir d’assez près.
Le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sommeil" sommeil est réservé à la maintenance du système. Le cerveau réorganiserait et classerait les souvenirs durant les périodes de sommeil profond et vérifierait son propre fonctionnement après cette réorganisation durant les périodes du sommeil dit paradoxal qui correspond aux rêves. Les bouddhistes apprennent à atteindre l’ “  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89veil_Spirituel" \l "La_notion_d.27.C3.A9veil_spirituel_dans_les_traditions_religieuses" éveil ”, c’est à dire à être conscients sans aucune pensée discursive ou négative, exercice particulièrement difficile et qui réclame un long apprentissage. Ils en retirent un bénéfice thérapeutique, un peu comme s’il s’agissait d’un électrochoc. De façon analogue une remise à zéro guérit souvent les maux d’un ordinateur. Elle peut être obtenue en éteignant et en rallumant l’appareil. Selon les spécialistes le Bouddhisme est d’abord une science de l’esprit. Il semble que les grands Maîtres bouddhistes en mobilisant leur attention sur des vertus positives arrivent à modifier la structure de leur esprit, et donc leur personnalité dans un sens qui leur confère une aura particulière. Leurs élèves prennent cependant le risque d’enregistrer une copie fidèle de la structure mentale de leur maître sans que leur raison ait été forcément utilisée comme filtre. L’extraordinaire plasticité du cerveau permet d’y implanter les idées les plus saugrenues lesquelles, s’étayant mutuellement, peuvent s’avérer aussi difficiles à extirper que des chardons. L’état de méditation est identifiable grâce aux moyens modernes d’exploration de l’activité cérébrale. La spiritualité sous sa forme extrême est une gymnastique de l’esprit consistant à le faire fonctionner en circuit fermé sur des phénomènes inaccessibles à l’expérience. Cette brève folie contrôlée peut à la rigueur renseigner sur le fonctionnement et les aberrations de l’esprit, mais sûrement pas sur la « nature profonde » du monde extérieur, à supposer que cette formule ait un sens. Les fadaises qu’elle prodigue sur l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Ontologie_%28philosophie%29" Etre n’ont jamais rien apporté d’utile ni même de compréhensible. « La métaphysique est le roman de l’esprit » (Voltaire). Finalement, le grand avantage de tous ces exercices de méditation est de ne plus avoir à craindre les insomnies car celles-ci sont facilement meublées et rendues ainsi plus tolérables. Je conseillerais plutôt une lecture stimulante jusqu’à rencontrer une idée avec laquelle l’esprit prenne plaisir à batifoler ce qui permet de refermer le livre et de se rendormir. « Mes idées, ce sont mes catins » écrivait Diderot qui jouait avec ses pensées comme les enfants jouent avec leurs poupées. Cette activité favorise un sommeil riche en rêves lequel est absolument essentiel pour que le cerveau se libère des tensions accumulées, classe les souvenirs marquants, estompe ou élimine les autres et effectue cette remise à zéro et cette  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9fragmentation" défragmentation qui permettent d’aborder la journée suivante dans de bonnes conditions. Si j’ai bien dormi et suffisamment rêvé j’ai la sensation de me réveiller avec un cerveau tout neuf. Durant la nuit mon cerveau n’est pas resté inactif mais a veillé à son propre entretien. Ce n’est qu’au réveil que les différentes fonctions qui le constituent se placent sous la baguette d’un chef unique qui met cet orchestre au service de mes intérêts vitaux. Comme un marchand avisé, la mémoire réorganise les souvenirs et expose les plus heureux en devanture. La privation de sommeil est un traitement inhumain et dégradant.
La conscience subjective aurait un statut analogue à celui d’une émission de télévision (« enrichie » toutefois au point de vue sensoriel et conceptuel), qui serait émise dans la boite crânienne comme dans une cavité résonnante et qui diffuserait le reportage des évènements les plus importants, les plus significatifs et les plus vitaux pour l’individu. A l’intérieur de cette boite les neurones constituent une foule dans laquelle circulent des mots d’ordre et qui est influencée par sa propre rumeur. La conscience serait à la fois le champ c.h.a.m.p. et le chant c.h.a.n.t. des neurones. Y aurait-il là le moyen de savoir ce qui se passe dans l’esprit d’un individu en installant des détecteurs appropriés ? D’avoir sur l’écran d’un ordinateur l’image irréfutable de la duplicité d’un discours politique ? Il doit être possible, à partir de l’examen des ondes cérébrales, d’inférer ce que peuvent être les sensations ou les sentiments du sujet soumis à l’expérience. Il est douteux qu’elles permettent de reconstituer le cours de ses pensées, la mélodie probablement oui, la mécanique qui a servi à la produire, probablement non. Différentes émissions peuvent coexister sans s’influencer mutuellement, dans la mesure où leurs codifications sont suffisamment distinctes. Des exceptions peuvent exister dans les cas de transmission de pensée, très rares assurément, mais peut-être possibles selon mon expérience, entre personnes très proches génétiquement ou affectivement. Ayant une mélodie en tête, il m’est arrivé à plusieurs reprises d’entendre la personne qui se trouvait avec moi se mettre à la fredonner. Ne dit on pas de deux personnes qui s’entendent bien qu’elles sont sur la même longueur d’onde ? N’est-ce pas ce même phénomène qui se produit chez les couples dits fusionnels ? Un signal même très faible peut être détecté si le récepteur est accordé sur la même fréquence que l’émetteur. Ne parle-t-on pas du « rayonnement » de la pensée. Une foule fanatisée par un orateur charismatique ou victime d’une hallucination collective manifeste-t elle la fusion-synchronisation des champs émis par tant de cerveaux concentrés sur la même pensée en un même lieu ? En est-il de même d’une assemblée de croyants sincères assistant à une cérémonie religieuse particulièrement émouvante ? Ne peut-il se produire des phénomènes analogues dans un essaim d’abeilles, une fourmilière, un vol de sauterelles, un banc de poissons ? J’ai cru déceler certaines connivences que j’aurais avec mon téléphone portable utilisé comme réveille-matin ! J’ai cru également ressentir l’inadéquation de certaines instructions que je m’apprêtais à donner à mon PC en dehors de tout raisonnement conscient préalable qui aurait pu conduire à cette conclusion. On peut bien sûr imaginer d’autres explications de ces phénomènes. Le seul véritable téléspectateur, le seul conscient en tout cas, serait cependant l’émission elle-même. La musique qui peut faire rire ou pleurer, aimer ou combattre a, dit-on, des vertus curatives, elle « adoucit les mœurs ». Elle peut exprimer des sentiments simples ou sublimes mais semble incapable d’exprimer des sentiments bas, ce qui est assez réconfortant. Elle serait le plus émouvant de tous les arts et le plus fréquemment mis à contribution, en dépit de son caractère éminemment abstrait, parce que sa codification serait pour ainsi dire en prise directe avec la codification des sentiments et des émotions utilisée par l’esprit conscient (Cf. l’importance des chants et de la musique dans les cérémonies religieuses, Cf. également la place de la musique de film, rarement sur la première marche du podium, parfois ignorée, mais pourtant indispensable).
Résultats et dernière tentative

La conscience dans ses aspects subjectifs et objectifs serait ainsi expliquée avec des notions de la physique du 19éme siècle (plus une once de métaphysique). D’autres comme l’Anglais  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Roger_Penrose" Roger Penrose qui a renouvelé l’intérêt pour le sujet l’ont expliquée avec des notions de la physique du 20éme siècle. L’explication définitive résidera peut-être dans la physique du 21éme siècle. Les théories physiques actuelles, pour être formulées avec simplicité, font appel aux nombres complexes comportant une partie réelle et une partie imaginaire et suggèrent ainsi que quelque chose qui aujourd’hui nous échappe, se passe derrière le rideau, dans une autre dimension, et dont nous devons nous contenter de mesurer les effets. C’est ainsi également que les destinées de deux photons d’origine commune demeurent indissolublement liées alors que leur distance mutuelle peut se compter en années-lumière (c’est l’intrigant phénomène d’ HYPERLINK "http://www.automatesintelligents.com/echanges/2004/avr/intrication.html" intrication). Il paraît raisonnable d’en conclure que le monde physique comporte plus de dimensions que les dimensions usuelles de l’espace et du temps et que c’est dans une ou plusieurs de ces dimensions échappant à nos sens et à nos instruments que les deux photons sont restés liés. S’il existe un mur dans ces dimensions cachées, les deux photons s’y heurtent simultanément. Certaines de ces dimensions pourraient-elles être spirituelles, de sorte qu’on pourrait dire, sans que ce soit un abus de langage que tel objet, tel lieu, tel événement, ont une dimension spirituelle ? Ce que nous ressentons, ce que nous appelons notre conscience ou notre moi résiderait dans d’autres dimensions qui, bien qu’inaccessibles à nos sens, n’en seraient pas moins des dimensions physiques. C’est dans ces différentes dimensions que notre état mental instantané pourrait être cartographié. Existerait-t-il parmi tous les univers possibles un univers  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Platon" platonicien où les sensations et les sentiments susceptibles de faire vibrer les esprits à l’unisson se promèneraient dans des Idées de rues en se tenant par des Idées de main ?

Si nostre vie est moins qu'une journée En l'eternel, si l'an qui faict le tour Chasse nos jours sans espoir de retour, Si périssable est toute chose née, Que songes-tu, mon ame emprisonnée ? Pourquoy te plaist l'obscur de nostre jour, Si pour voler en un plus cler sejour, Tu as au dos l'aele bien empennée ? La, est le bien que tout esprit desire, La, le repos où tout le monde aspire, La, est l'amour, la, le plaisir encore. La, ô mon ame au plus hault ciel guidée ! Tu y pouras recongnoistre l'Idée De la beauté, qu'en ce monde j'adore.
(Joachim du Bellay)

Si l’existence de tels univers pouvait être prouvée, les esprits religieux y trouveraient certainement une forme de revanche ! Si l’idée religieuse consiste à dire que les choses sont plus compliquées qu’il n’y paraît, que la réalité a plus d’épaisseurs que ce dont les sens témoignent directement, alors l’idée religieuse est probablement vraie. « Je crois aux forces de l’esprit » a été l’ultime adresse de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Fran%C3%A7ois_Mitterrand" \l "Biographie" François Mitterrand à ses concitoyens. La théorie du tout à laquelle travaillent les physiciens avec tant d’ardeur et qui doit rendre compte de tous les aspects de la réalité observée, se doit d’expliquer aussi le phénomène de la conscience, ou bien démontrer qu’il est à jamais inexplicable. Les bonnes idées sont rares, malheureusement et difficilement reconnues. Ce ne sont pas des chiennes bien dressées qui viennent quand on les siffle ! L’explication attendue, quelle qu’elle soit, ne devra-t-elle pas suivre un cheminement voisin de celui qu’après d’autres je viens d’esquisser ? Ne devra-t-elle pas identifier le contenu de la conscience tel que chacun peut l’éprouver pour son propre compte avec un phénomène physique déterminé vu de l’intérieur, quelle que soit la nature de ce phénomène ?
Si la réponse est oui, cette vision des choses a de nombreuses conséquences :
Du point de vue de la logique, rien ne s’oppose à ce que deux personnes se mettent d’accord pour dire que telle étoffe est rouge même si les sensations subjectives qu’elles ont l’une et l’autre de cette couleur sont totalement différentes. Telle qu’elle a été décrite, la manière dont ces sensations sont élaborées par des processus universels et invariants à partir d’une même réalité physique objective écarte cette éventualité, sauf dysfonctionnement toujours possible. La communication entre les personnes présente de ce fait une certaine garantie d’authenticité. Un philosophe a cru bon de forger le terme de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Qualia" « qualia » pour désigner l’aspect subjectif sous lequel nous apparaissent nos diverses sensations et émotions. Le choix même de ce terme dont la signification latine est « qu’est-ce que c’est » en dit long sur la perplexité de son inventeur à propos de ce concept insaisissable. On lui donne une signification plus facile à saisir si on désigne par ce mot un mode vibratoire particulier du champ neuronal.
La conscience subjective est en rapport direct avec la conscience objective (les circuits neuronaux oscillants). Elle évolue donc comme elle au fil du temps et elle est malheureusement soumise aux mêmes vicissitudes.
La pondération associée aux différentes volitions acheminées jusqu’à la conscience constitue une sorte de monnaie de la conscience puisqu’elle permet de rendre comparables des motivations complètement hétérogènes, de la même façon que la monnaie usuelle permet d’acheter toute espèce de bien ou de service. De sérieuses difficultés éthiques surviennent quand on commence à confondre les deux monnaies, quand on achète les consciences ou quand on vend son âme ! A titre d’illustration, voyez comment se décide la part de vos revenus que vous choisissez d’affecter à des œuvres caritatives. Aucun raisonnement ne conduit à la fixer. Elle résulte d’un équilibre entre votre désir d’aider et celui de ne pas vous appauvrir. La façon dont s’effectue cet arbitrage vous échappe entièrement, ou plutôt vous percevez qu’il dépend d’un raisonnement parfaitement flou. Les critères sous-jacents sont trop imprécis pour faire l’objet d’un raisonnement déductif. Si vous donnez la pièce à une pauvre vieille qui tend sa sébile, c’est que ce petit effort vous est moins pénible que de mettre votre conscience au supplice en feignant de ne pas la voir. On n’est généreux que par égoïsme. Tel juge qu’une balle est bonne ou mauvaise en partie amicale sans se préoccuper de savoir si ce jugement est ou non en sa faveur qui jugerait différemment si l’enjeu était d’un million de dollars. Une fois que la pesée des différentes motivations a été faite, la motivation gagnante, même d’une courte tête, rafle toute la mise. De la même manière, lorsqu’un essaim d’abeilles cherche un nouvel endroit pour s’établir il envoie un certain nombre d’ouvrières explorer les alentours et c’est à la suite des « délibérations » entre les ouvrières revenues de cette exploration que la décision est prise et suivie par l’essaim tout entier. Ceci démontre que la démocratie représentative et le scrutin majoritaire sont des mécanismes extraordinairement efficaces, puisqu’ils ont été retenus par la sélection naturelle ! Les populations neuronales votent en quelque sorte au scrutin majoritaire uninominal à un tour (poursuivi par un carnivore ou poursuivant un herbivore le temps manque pour organiser un scrutin à plusieurs tours !). Un neurone, une voix, peut-on dire schématiquement. Des recherches récentes ont montré qu’il existe des groupuscules de neurones, des «  HYPERLINK "http://www.sciam.com/article.cfm?articleID=2B01392B-E7F2-99DF-33EA093AFDA271B1" cliques », dont tous les membres réagissent de façon identique aux différents stimuli comme s’ils étaient les adhérents d’un même parti. Ceci soustrait le fonctionnement du cerveau aux caprices d’un seul neurone. La proposition victorieuse est renforcée par effet feed-back et c’est à ce moment qu’elle devient décision consciente. La Nature a reconnu bien longtemps avant le vieux HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Winston_Churchill" \l "Citations"  Winston que ce mécanisme était le pire à l’exclusion de tous les autres et ce n’est probablement pas un hasard si l’esprit scientifique est né dans les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sciences_grecques" premières cités à avoir adopté un régime s’inspirant de principes authentiquement démocratiques et où les premiers doutes sont apparus concernant l’existence des dieux. Les idées fleurissent dés que les mâles dominants cessent d’exercer leur tyrannie, par les armes ou par l’argent. Quand la démocratie est bannie de l’espace public, on peut encore se consoler en pensant qu’elle persiste dans l’esprit du dictateur.
Une monnaie analogue permet de sélectionner les données accédant à la conscience parmi un nombre quasi infini de possibilités. C’est l’idée qui a crié le plus fort qui s’empare du micro. La valeur dans cette monnaie d’un sujet qui a capté l’attention à un certain moment s’érode au fil du temps. Une idée positive qui appelle automatiquement une idée négative plus forte qu’elle ne peut jamais accéder à la conscience. Elle est « refoulée ». Elle n’en continue pas moins son travail souterrain, soit qu’elle opère directement sans passer par la conscience, soit qu’elle subisse une mutation qui la rende méconnaissable.
Le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Libre_arbitre" libre-arbitre est une illusion puisque la conscience n’intervient pas dans le processus qui fixe la valeur des différentes motivations, mais se borne à faire les additions et entérine leurs résultats. Il a d’ailleurs été prouvé expérimentalement (expériences de  HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/wiki/Benjamin_Libet" Benjamin Libet) que les décisions ne sont pas initiées par la conscience subjective. La décision objective précède de quelques dixièmes de seconde la prise de conscience subjective de cette décision. Des études plus récentes semblent montrer que ce délai peut même atteindre dans certains cas quelques secondes. La décision a donc été prise au niveau de l’inconscient. Comme la prise de décision a mobilisé, pour ou contre, un grand nombre de circuits nerveux, il est tout à fait naturel que le champ électromagnétique émis à cette occasion soit puissant et que, par conséquent, la conscience en soit affectée. La science semble ainsi donner raison aux  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jans%C3%A9nisme" jansénistes tenants de la prédestination, c’est à dire au fond du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9terminisme" déterminisme de nos pensées et de nos conduites, contre les jésuites tenants du libre-arbitre. La prédestination est une variante du déterminisme selon laquelle l’avenir détermine le passé. Cependant elle inverse ainsi la flèche du temps ce que la physique en général et la thermodynamique en particulier interdisent. Les Jésuites, hommes de bon sens, n’ont pas fait cette erreur mais sont tombés comme la plupart des gens dans la contradiction interne du libre-arbitre. Un chat choisit d’aller vers son coussin ou vers son écuelle. S’il a plus faim que sommeil il ira vers l’écuelle et vers le coussin dans le cas contraire. Au nom de quel libre-arbitre irait-il ce vers quoi il a le moins d’inclination ? Certes il peut calculer que, bien qu’ayant plus sommeil que faim, il pourrait rapidement manger un morceau pour être débarrassé de sa faim avant d’aller dormir. Dans ce cas son inclination prépondérante est la combinaison casse-croûte rapide et sommeil. Ce calcul d’optimisation a-t-il un rapport quelconque avec le libre-arbitre ? Le cortex qui opère ce calcul apparaît dans ce cas particulier comme un outil de prospective au service des sensations transitant par le bulbe. Bien sûr, dans sa fierté de chat, ce dernier peut proclamer qu’il est lui aussi doté de libre-arbitre et, pour le prouver, faire un choix apparemment contraire à son inclination la plus immédiate, mais c’est qu’alors son inclination à la fierté se sera révélée plus forte qu’aucune des deux autres. Il n’y a pas d’effet sans cause… On peut regretter après coup un pas de clerc, un geste déplacé ou une parole malheureuse mais, au moment où ces actes inappropriés ont été commis, ils étaient ressentis comme s’imposant majoritairement, c'est-à-dire absolument selon le mode de fonctionnement du cerveau. La liberté d’un individu, c’est autre chose. Elle consiste pour lui dans la possibilité de satisfaire ses aspirations les plus profondes sans avoir à souffrir de contraintes inutiles ou arbitraires. Mon professeur de philosophie, homme excellent et qui se disait bon catholique, augurait déjà au début des années 1950 que l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Existentialisme" existentialisme alors à la mode, qui proclame que l’homme construit librement son destin, se casserait les dents sur les enseignements de la science… C’est le même qui demandait à ses élèves pourquoi il était très invraisemblable qu’il assassinat tel ou tel d’entre eux et ses élèves répliquaient en invoquant la crainte du gendarme, celle d’un châtiment éternel, l’opprobre publique, ou le remords. Il leur faisait voir qu’ils étaient dans l’erreur la plus complète et que leur principale garantie résidait dans son sens moral à lui, caractéristique intangible de sa propre personnalité. L’existentialisme n’a rien apporté de véritablement nouveau. Je suppose que Sartre avait pris lui-même conscience des faiblesses de sa philosophie puisqu’il a interrompu très tôt son œuvre dans ce domaine pour se consacrer à la littérature et à une action politique inspirée par le marxisme qui est l’exact opposé de l’existentialisme. C’est probablement pour ça qu’il a refusé un prix Nobel que ses talents multiples justifiaient amplement. De fait, l’idée que je pourrais prendre une décision qui ne découle pas de ma propre personnalité et des circonstances dans lesquelles je dois la prendre ne parvient pas jusqu’à mon cortex. « Madame la maréchale, ces Corozaïnois et ces Betzaïdains furent des hommes comme il n'y en eut jamais que là, s'ils furent maîtres de croire ou de ne pas croire ». On pourrait tout aussi bien dire de faire ou de ne pas faire. On ne se refait pas comme le dit la sagesse populaire. Je ne me suis pas choisi, comme vous vous en doutiez peut-être, pas plus que je n’ai choisi les circonstances dans lesquelles j’ai à prendre telle ou telle décision. Même si, pure hypothèse, le moi d’aujourd’hui choisit le moi de demain, qui choisit le moi d’après demain etc.… le dernier moi de la série dépendra encore des inclinations du moi d’aujourd’hui et de circonstances fortuites. Penser autrement est faire fi du principe de causalité. Bien entendu, parmi mes motivations, certaines sont altruistes et d’autres sont égoïstes, mais leurs forces relatives sont inscrites dans les replis de mon cerveau au moment où j’ai à décider, et vais-je décider contre la motivation la plus forte, que celle-ci soit égoïste ou altruiste, peureuse ou courageuse, prudente ou audacieuse, morale ou immorale, louable ou condamnable, raisonnable ou déraisonnable ? Chez un homme équilibré le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Surmoi" surmoi et les pulsions telles que la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Libido" libido exercent des forces comparables, ce qui le place à égale distance du saint et du sybarite. La conscience qui est en première ligne assiste à toutes les phases du combat en tant qu’observateur. Elle ne décide pas plus du sort de la bataille qu’un arbitre impartial ne décide du sort d’un match, même si elle est la première à être affectée par son résultat. Il ne faut pas confondre le sentiment de liberté absolue que chacun peut éprouver avec la réalité neuronale du processus de décision. Un sentiment, pas plus qu’un mot ne créent une réalité autre que le mot ou le sentiment eux-mêmes. Le vrai de l’existentialisme est que la personnalité d’un individu se construit progressivement par ces choix successifs apparemment libres mais en fait contraints et qu’un souffle peut faire pencher la balance dans un sens ou dans l’autre. La société toute entière connaît ce genre de choix cruciaux : la condamnation à mort de Louis XVI ou l’instauration de la 3ème république ont été votées à de très courtes majorités. Un homme frais et un homme fatigué ne prendront pas forcément la même décision. L’un commettra l’irréparable et l’autre non. Tel apparaîtra fort et courageux quand il est en bonne santé qui passera pour faible et pusillanime s’il est atteint de quelque maladie. Ceci montre bien la vacuité de tous les jugements moraux. Rien ne distingue les neurones qui matérialisent des motivations bénignes des neurones qui matérialisent des motivations malignes. Peut-être sont-ce les mêmes différemment connectés. Une décision a des conséquences immédiates, mais aussi des conséquences à long terme en modifiant la réponse future de l’instrument. C’est en ce sens que « l’existence précède l’essence ». Une décision difficile et courageuse en rend possibles d’autres encore plus difficiles et plus courageuses. On entraîne son cerveau comme on entraîne son corps. L’homme est un système physique compliqué dont le comportement est quelquefois imprévisible mais qui est le plus souvent gouverné par l’habitude. Chaque événement laisse une trace, un chemin préférentiel pour l’influx nerveux invitant à la répétition des mêmes comportements. Si je creuse un sillon dans le sable, les écoulements futurs en seront influencés dans le sens de leur répétition. Le bouddhiste parle d’impermanence et le sage antique assure qu’on ne se baigne pas deux fois dans le même fleuve, ce qui est vrai aussi. Le seul correctif concevable à ce déterminisme strict serait l’introduction dans le circuit de ma décision d’un élément aléatoire, mais ceci est fort éloigné de ce que l’on veut signifier quand on parle de libre-arbitre. Il y a d’ailleurs contradiction entre les deux vocables ainsi associés : un arbitre n’est pas libre ; il rend son arbitrage en fonction de règles et non en fonction de sa propre fantaisie. Ce n’est pas lui qui décide du sort d’une partie, ou alors c’est un très mauvais arbitre. Le vocable anglo-saxon de free will, libre volonté, présente la même difficulté car il faut préciser de quoi dépend cette volonté, ce qui ramène au problème précédent. Le terme de libre-arbitre, quelle que soit la langue utilisée est un oxymore. Nous sommes ce que nous mangeons. Le fait pour un atome ou une molécule d’être incorporé au système nerveux d’un organisme vivant ne le fait pas échapper à un strict déterminisme physico-chimique qu’aucune expérience n’a jamais remis en cause. Certains ont imaginé que le caractère aléatoire de la physique quantique pouvait introduire, sinon le libre-arbitre du moins une indétermination dans le processus de décision. Ils pensent que les  HYPERLINK "http://membres.lycos.fr/pierreyvesmorvan/quantique.htm" fluctuations quantiques feraient que l’âne de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Buridan" Buridan choisirait de manière aléatoire tantôt un sac de son, tantôt l’autre mais ceci entrainerait l’irresponsabilité de l’âne plutôt que l’inverse. Un tel processus ne peut être à priori que très marginal compte tenu que les processus mentaux semblent mettre en œuvre des collections importantes d’atomes et non des atomes individuels. Deux coups tirés avec la même bouche à feu, la même munition, la même charge de poudre et les mêmes angles ne font pas le même trou près de l’objectif visé. Parlera-t-on pour autant du libre-arbitre du canon ? Un obus de mortier a explosé au dessus de la porte du local où se tenait le « philosophe ». Sa trajectoire eut-elle été plus courte de quelques décimètres qu’il entrait directement dans la pièce et que c’en était fait du philosophe et de sa philosophie. Le philosophe sait cependant que l’exacte trajectoire du projectile a été déterminée par une myriade de facteurs physiques tels que la température de la poudre, la densité de l’air, la direction et la force du vent aux différentes altitudes, etc. Ces différents facteurs n’avaient aucune intention bonne ou mauvaise à son égard. Il se trouve qu’à la fin du processus le philosophe est toujours vivant, ce qui doit lui suffire et ne mérite pas d’autres commentaires de sa part. Placé dans les mêmes circonstances un esprit religieux remercierait les dieux d’avoir été épargné et le philosophe a quelque difficulté à se défendre contre cette même pensée. C’est pendant l’été 1944 dans un village d’Ile de France. L’occupant qui se replie a été rendu fou-furieux parce que des partisans mal inspirés ont kidnappé quelques uns de ses soldats. Il ordonne que personne dans le village ne sorte de sa maison. Ceux qui le peuvent courent se cacher. Le philosophe en herbe, inconscient du danger, joue dans le jardin de ses parents avec une bicyclette empruntée à sa grande sœur. Il aperçoit à moins de cent mètres deux silhouettes qui gesticulent de façon menaçante. Inquiet, il fait demi-tour. Un coup de feu se fait entendre, ou peut-être une très courte rafale, et des feuilles tombent du pommier qui se trouve à quelques mètres de lui. D’un coup de guidon le garçonnet s’engouffre dans le sous-sol de sa maison sans demander son reste. Les deux soldats poursuivent leur chemin. Quelques temps après on peut voir l’instituteur, le visage cramoisi, courir en tous sens pour tenter d’éviter le pire à ses concitoyens. Finalement c’est une femme dont il se murmurait qu’elle avait eu des bontés pour l’occupant qui s’entremet et, possiblement, sauve le village. Quelques semaines plus tard, elle sera tondue. On se venge toujours d’avoir eu bien peur.

Quand, pire qu'une brosse, elle eut été tondue J'ai dit : " C'est malheureux, ces accroche-cçur perdus Et, ramassant l'un d'eux qui traînait dans l'ornière Je l'ai, comme une fleur, mis à ma boutonnière
( HYPERLINK "http://www.parolesmania.com/paroles_georges_brassens_9624/paroles_la_tondue_334633.html" Georges Brassens. La Tondue)

On la vit encore quelque temps faire ses courses avec un fichu sur la tête, puis on ne la vit plus et c’est la fin de cette regrettable histoire. L’héritier de ces deux anecdotes préfère croire aujourd’hui qu’il ne doit pas la vie à la maladresse du soldat qui a tiré depuis la rue mais plutôt à un sentiment humain et responsable de sa part qui aurait pris le pas sur la consigne militaire. L’obus et le soldat ont tous deux épargné le « philosophe » (Alléluia !) mais, contrairement aux apparences, le soldat n’en pensait pas plus long que l’obus. Il n’avait que quelques secondes pour se décider, peut-être moins. La machinerie de son cerveau s’est mise en route et sa conscience objective a rendu son verdict : « vise un peu à gauche ! ». Ceux qui affirment mordicus l’existence du libre-arbitre s’expriment rarement par écrit de nos jours car ils devraient commencer par dire exactement ce que recouvre pour eux cette notion. S’ils ne le font pas c’est parce que le concept de libre-arbitre leur file entre les doigts. Quand ils s’expriment oralement, ils sont obligés d’entretenir la confusion pour donner une apparence de raison à leurs arguments. Il est compréhensible qu’il soit difficile à la plupart des gens d’abandonner la fiction du libre-arbitre puisqu’elle donne son apparence de légitimité à toute l’organisation sociale. Aussi longtemps que les hommes ont crû à l’existence de divinités multiples et se sont crus tiraillés entre leurs différentes influences ils ont pu croire que leur destinée n’était pas irrévocablement fixée. L’avènement du monothéisme selon lequel rien n’échappe à la volonté d’un dieu unique a porté un coup potentiellement fatal à cette opinion. Le monothéisme ouvre la voie au déterminisme  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Augustin_d'Hippone" St Augustin lui-même était bien conscient qu’il n’y a pas place pour le libre-arbitre si l’on s’en tient aux raisons naturelles. Il a été obligé pour faire une place au libre-arbitre d’invoquer l’arbitraire d’une grâce divine, moyen réservé ordinairement aux causes désespérées. Le mécanisme selon lequel peut s’exercer cette grâce est loin d’être clair comme nous le verrons plus loin. Toutes les créatures ne bénéficient pas de cette grâce de la même façon. Dieu a ses têtes, il faut le savoir ! Il s’est déplacé en personne pour le petit peuple juif mais il a abandonné à des imposteurs la multitude innombrable des autres peuples d’Europe, d’Asie, d’Afrique, d’Amérique et d’Océanie !! « HYPERLINK "http://www.chez.com/ottaviani/diderot/dneveu.htm"Cornet de rois, cornet de catins », les sorts sont distribués selon sa fantaisie. Remplacer l’incompris par l’incompréhensible et l’arbitraire comme le fait St Augustin est toutefois le contraire d’un progrès du point de vue de la connaissance et de l’éthique. Comme beaucoup de philosophes St Augustin a supposé le problème résolu et il en a conclu que le problème était résolu ! Or, le problème ne sera jamais résolu car c’est typiquement un faux problème. Comme un juge du siège, la conscience se détermine en fonction des dossiers qu’on lui présente et de son humeur du moment. Cette humeur est liée à la concentration de différentes hormones et autres substances actives contenues dans le sang qui irrigue son cerveau. Il y a de bonnes et de méchantes gens (bonnes gens ayant cédé à des passions mauvaises) comme il y a de bonnes et de mauvaises voitures (bonnes voitures ayant un défaut de fabrication, ou accidentées ou usées à l’excès), ni plus, ni moins. Tous les travaux psychologiques et psychanalytiques sont implicitement fondés sur l’hypothèse d’un déterminisme de nos conduites. Le perspicace  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Thomas_d%27Aquin" \l "De_la_libert.C3.A9_et_du_libre_arbitre" Thomas d’Acquin observe que l’homme est en but à deux types de sollicitations. Les premières sont celles qui proviennent du corps. Les secondes proviennent de l’esprit. Nous dirions aujourd’hui que les unes passent par le bulbe rachidien tandis que les autres proviennent du cortex. Les unes expriment des besoins immédiats tandis que les autres tiennent compte des conséquences lointaines. La conscience est assise sur la chaise d’arbitre, elle observe le combat et enregistre le score. En cas de conflit entre bulbe et cortex le cortex prend aisément l’avantage, mais son action est limitée dans le temps contrairement à celle du bulbe qui, situé à l’arrière-plan, a une action sourde mais permanente. Dés que le cortex change de préoccupation, c’est le bulbe qui reprend la main. C’est la raison pour laquelle nous résistons si mal à toutes les formes d’addiction, qu’il s’agisse de drogue, de nourriture ou de sexe. C’est aussi la raison pour laquelle sermons et admonestations sont généralement sans effet durable sur nous. « Madame la maréchale, la tentation est trop proche ; et l’enfer est trop loin »  Les grands auteurs de leur côté ont toujours invoqué ou illustré la force du destin, leurs héros allant irrésistiblement vers leur salut ou vers leur perte selon leurs ressorts intérieurs et les circonstances qu’ils rencontraient. Les moralistes croient dur comme fer au libre-arbitre ; ils n’ont d’ailleurs pas le choix s’ils veulent que leur activité ait un sens quelconque. Les artistes décrivent le monde tel qu’il est, c’est à dire corseté par le déterminisme. Le titre d’un des romans de Diderot n’est-il pas «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_le_Fataliste" Jacques le Fataliste » ? Même ceux qui refusent cette forme extrême de déterminisme s’y rallient en fait dans leur pratique quotidienne, souvent même de façon caricaturale quand ils attachent des caractères invariables à l’origine géographique, ethnique ou sociale des individus oubliant les effets de la variabilité naturelle et des métissages. L’homme est, comme on dit, le jouet de ses passions. Il apprend à composer avec elles au nom d’une préoccupation plus haute qui peut être la préservation de son espèce, de son clan, ou sa propre préservation, mais ceci n’implique pas l’existence d’un libre-arbitre venu d’on ne sait où. Il n’y a pas d’angelot appelé libre-arbitre qui appuierait discrètement sur le fléau de la balance de la conscience pour la faire pencher à gauche ou à droite. S’il existait, il faudrait au surplus qu’il soit lui-même doté d’un libre-arbitre. La Justice estime qu’un prévenu est pénalement responsable s’il dispose effectivement de cette balance, ce qui pourrait se concevoir mais c’est abusivement qu’elle le tient pour responsable de ce qui est déposé sur ses plateaux, c'est-à-dire de sa personnalité, de son environnement et de son histoire personnelle. La conscience n’est pas libre. Ses décisions sont très directement déterminées par le vote des populations neuronales. On dit parfois avec étonnement qu’untel est imprévisible, ce qui implique que dans la plupart des cas le comportement des individus est plus ou moins prévisible, qu’on en connaît, même de façon approximative, les règles de fonctionnement. On ne doit donc pas dire d’un homme qu’il est imprévisible, on doit dire que la météorologie de son cerveau a encore des progrès à faire. L’avenir est à la fois rigoureusement déterminé et rigoureusement imprévisible à cause de la complexité des phénomènes en cause. Le hasard n’existe pas. Notre ignorance nous l’appelons hasard. Nous verrons plus loin qu’elle peut aussi s’appeler Dieu. Je me souviens d’avoir été interrogé sur le hasard à l’oral du baccalauréat. Une appréciation exagérément élogieuse avait fait croire abusivement à l’examinateur qu’il avait affaire à un sujet d’élite et il avait choisi de l’interroger sur cette question qui lui tenait visiblement à cœur. J’avoue humblement qu’à l’époque je n’avais jamais sérieusement réfléchi à la question du hasard. Comme je restai coi après quelques considérations embarrassées sur un dé lancé en l’air l’examinateur me demanda à brûle pourpoint si j’avais lu un petit livre intitulé « le problème du hasard ». Comme je répondais par la négative il m’acheva d’un « eh bien, jeune homme, c’est moi qui l’ai écrit ! » Qu’on ne me dise plus jamais que le hasard fait toujours bien les choses !
Par certains aspects le fonctionnement du cerveau, parcouru par les courants cheminant dans une multitude de canaux neuronaux, paraît relever de la mécanique des fluides.

Tout est changeant dans les esprits
Les consciences voyagent
Comme des nuages poussés par le vent.
Virgile.

C’est peut-être plus qu’une simple métaphore quand on parle de tempête sous un crâne à l’occasion de sentiments extrêmes de peur, de colère ou de désir. De la sensation physique à l’action physique, en passant par le traitement de l’information dans le cerveau, aucun hiatus ne semble exister par lequel pourrait s’introduire quoi que ce soit qui ressemble de près ou de loin au libre-arbitre. Si un tel hiatus existait néanmoins, à qui ou à quoi le processus neuronal passerait-t-il la main et comment la reprendrait-t-il ? La réponse à cette question cruciale que nous tenterons de fournir ne mettra pas en cause le strict déterminisme de cette chaine d’évènements. Il est assez frappant de constater que les religions traditionnelles, qu’il s’agisse du christianisme ou de l’Islam, sont des tenants fervents du déterminisme. « Tout est écrit » dit le Coran, plus clair en cela que les pères de l’Eglise qui n’ont jamais adopté une position unanime même si pour eux l’avenir, étant connu de Dieu, est comme tel irrévocablement déterminé. Si l’homme est un roseau pensant comme le lui dit Pascal pour lui rabaisser son caquet, il faut reconnaître avec la même humilité qu’il est avant tout un robot conscient. La contradiction entre ce fatalisme affiché et le volontarisme qu’exprime le titre du présent essai n’est qu’apparente, comme le montreront des développements ultérieurs selon lesquels, étant programmé par la sélection naturelle pour se préoccuper du sort de son espèce, l’être humain déroule son programme et s’en préoccupe effectivement. Tous les animaux font de même depuis toujours.
Il est absurde en soi de faire souffrir un délinquant; on ne fait qu’ajouter un nouveau malheur au malheur existant. Le responsable n’est pas le corps du délinquant ; il n’a été que l’instrument du forfait ; inutile de lui couper la main. C’est la conscience du délinquant qui souffre du châtiment. Or, elle n’a fait qu’apprécier correctement les sollicitations auxquelles elle était soumise, elle n’est qu’un instrument de mesure. Va-t-on punir un thermomètre pour avoir indiqué la bonne température ? Le responsable, car il en faut bien un, c’est l’inconscient qui a pondéré les volitions. Or l’inconscient lui-même résulte de l’interaction d’un système génétiquement programmé avec un environnement physique, économique et social déterminé, toutes données sur lesquelles l’inconscient est évidemment dépourvu de moyens d’action. Il parait évident que des circonstances différentes n’auraient pas conduit au crime qui a été commis. Va-t-on condamner des circonstances à vingt ans de réclusion criminelle ? L’inconscient est donc responsable mais pas coupable. L’acceptation de ce mécanisme exclut toute condamnation morale. L’homme n’est pas plus responsable du fonctionnement de son cerveau que de celui de ses autres organes. Le criminel n’est pas plus responsable de son crime que le malade de sa maladie. D’ailleurs l’imagerie médicale a permis d’identifier beaucoup de dysfonctionnements physiologiques qui sont à l’origine de certains désordres mentaux susceptibles de provoquer des comportements criminels. Je parie assez tranquillement qu’il en sera de même dans un avenir plus ou moins proche de tous les comportements criminels au fur et à mesure des progrès des sciences neurologique et criminologique. Dés aujourd’hui on a pu mettre en évidence qu’une lésion du cortex préfrontal handicapait le contrôle des pulsions violentes. Entre comprendre et condamner, il faut donc choisir. C’est la conclusion à laquelle était parvenu un de mes amis, après qu’il eut été juré dans un procès d’Assises. Le criminel le plus endurci se comporte comme vous et moi la plupart du temps : il laisse passer les dames et dit bonjour à sa concierge.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Landru_(film,_1963)" Landru, bon époux et bon père, intelligent, courageux, sympathique comme la plupart des escrocs, méthodique, spirituel, bon amant et même capable d’amour sincère était, paraît-il, d’une exquise urbanité. Poussé au meurtre par la nécessité impérieuse de nourrir sa famille et cédant à l’apparente facilité due à une période troublée il est devenu l’archétype des criminels inexcusables. Il n’était cependant pas plus responsable de l’insuffisance de son sens moral et de l’intensité de ses passions que de sa taille ou de la couleur de ses yeux. La soi-disant responsabilité du délinquant n’est pas autre chose que le prétexte commode invoqué pour exercer sur lui, en toute bonne conscience, une vengeance, en contradiction flagrante avec l’esprit du christianisme (pardonnez-nous nos offenses comme nous pardonnons à ceux qui nous ont offensé…). Curieusement dans cette prière, il est conseillé à Dieu de prendre exemple sur l’homme ! Ne serait-il pas aussi bon que certains le prétendent ? La seule question sérieuse à se poser concerne les moyens à employer pour que ces trois livres de masse gélatineuse qui constituent le cerveau du prévenu cessent de répondre par le crime à certaines sollicitations, des moyens qui, autant que faire se peut, n’ajoutent pas le malheur au malheur. Les raisons objectives des châtiments infligés sont la protection de la société par mise à l’écart du délinquant, l’effet dissuasif sur lui-même et sur ses émules, si possible le traitement et la guérison (?) de son inconscient malade avant qu’il ne sorte de prison et, ce n’est pas le plus joli, la satisfaction donnée à la victime, à ses proches et à la société toute entière d’avoir été vengés. Pourquoi dés lors me direz-vous changer notre manière de voir les choses si c’est pour aboutir aux mêmes conclusions pratiques ? C’est selon moi que l’exacte appréhension des problèmes augmente les chances de trouver les bonnes solutions. Il est rare que la victime demande elle-même une punition exemplaire pour son agresseur. Tous deux sont devenus en quelque sorte intimes…C’est donc le Ministère Public qui requiert. La suppression de la peine de mort est un premier pas très important vers la reconnaissance de cette réalité. Lorsque cette forme extrême de punition est encore pratiquée il est généralement admis dans les sociétés avancées que la mise à mort du condamné doit être la moins douloureuse possible, et elle se pratique loin des regards du public. Ajoutons que la suppression de la peine de mort s’impose d’autant plus que des tests ADN récemment pratiqués dans les prisons américaines ont montré que plusieurs de ceux qui attendaient leur « châtiment » dans une angoisse qu’on ne peut même pas imaginer étaient en réalité innocents des crimes pour lesquels ils avaient été condamnés. Il y a tout lieu de penser que la justice américaine n’est pas une exception. Très souvent, le condamné a été lui-même dans son enfance la victime d’une injustice qu’il a douloureusement ressentie et dont l’auteur n’a jamais été puni. Tout crime est la manifestation d’un désordre mental qui peut être selon les cas durable ou momentané et je ne voudrais pas être à la place des experts qui ont à décider de la catégorie à laquelle appartient un désordre particulier. Il peut d’ailleurs paraître curieux que la démence soit une cause d’irresponsabilité pénale : la justice punit celui qui a des crises passagères et elle épargne celui chez qui ces crises sont permanentes... J’ai entendu récemment un procureur donner pour preuve de la bonne santé mentale d’un forcené le fait qu’assiégé dans sa maison il avait tiré systématiquement sur tous les gendarmes qui se présentaient! La chose prêterait à sourire si un des gendarmes n’en était mort. Les sommes consacrées à traiter tous les délinquants comme des malades ou des accidentés et non comme des coupables afin de ne pas les laisser dans une désespérance amère et revancharde ne seraient-elles pas inférieures aux coûts de toute nature des récidives et du renforcement sans limites des systèmes policier, judiciaire et carcéral ? Une conclusion qui se dégagerait d’une telle entreprise serait probablement qu’il faut commencer par soigner la société. Les investissements à réaliser dans cette hypothèse en matière de répartition des richesses et d’éducation sont-ils hors de portée d’une société moderne ? Il est certain que les investissements les plus rentables dans ce domaine sont ceux qui sont effectués très tôt. C’est avec une fermeté empreinte de douceur et d’affection que les enfants doivent être maintenus sur le bon chemin. Il faut bien entendu ne leur fournir que de bons principes et de bons exemples. Il faut leur apprendre non la peur, mais la prudence qui évite la peur. Le rôle des parents, des grands-parents et des éducateurs est à cet égard essentiel. Dans un age plus avancé ce rôle incombera aux dirigeants…C’est pourquoi l’amoralité voire l’immoralité des leaders politiques ont des répercussions si funestes sur l’ensemble de la société.
La conscience est apparue chez les êtres vivants comme avantage évolutif dés que ceux-ci ont bénéficié d’un certain choix des actions qu’ils pouvaient exercer sur leur environnement. Il est néanmoins naturel de penser que la conscience d’un mammifère évolué est plus riche en harmoniques que celle d’un vermisseau,
La conscience d’un chien ou celle d’un cheval ne doivent pas être fondamentalement différentes de celle d’un représentant de l’espèce humaine, pas plus que ne le sont par exemple leurs sens visuels ou auditifs respectifs car, sur l’arbre de l’évolution, les branches sur lesquelles ces différents êtres vivants sont perchés sont voisines. On reconnaît trop bien chez un chien la faim, la soif, le froid, le chaud, la peur, la douleur, la colère, la honte mais aussi la joie, l’affection, le désir, le sens du jeu pour qu’il n’en soit pas ainsi. Chaque animal a sa propre personnalité. Que dites-vous d’un chien qui s’installe sur le canapé auprès de ses maîtres pour regarder la télévision et qui réclame qu’on lui mette sa ceinture de sécurité chaque fois qu’on l’emmène en voiture sinon que, selon toutes les apparences, il se prend pour un homme ! Les émotions, ces sentiments primordiaux qui colorent toute la vie mentale sont donc apparus assez tôt dans l’évolution. Quand le lion s’approche de la lionne, les coups de patte et les feulements de cette dernière ne signifient-ils pas clairement à son compagnon : “ Dis donc, grand fainéant, tu crois que je n’ai que ça à faire ? On voit bien que ça n’est pas toi qui es chargé de nourrir la famille et d’éduquer les enfants ! ”. Ce qui distingue la conscience d’un homme qui discourre de celle d’un âne, c’est ce qui la traverse et qui dépend de ce qui se situe en amont, dans son inconscient. La conscience d’un âne associée à un inconscient d’homme pourrait se mettre à parler, justifiant ainsi les inventions des fabulistes. Verrait-t-on même la différence ? Est-ce que le cri nocturne de la chouette ne s’adresse pas à l’homme également ? Il devrait être interdit de tuer quelque animal que ce soit en l’ébouillantant ou en l’asphyxiant. La conscience est un phénomène si largement répandu dans la nature qu’il ne peut rien avoir de surnaturel. Aucune étude sérieuse ne semble pourtant avoir été entreprise pour distinguer les espèces qui ont une conscience de celles qui en sont dépourvues comme c’est le cas suppose-t-on des végétaux. L’homme, la nuit, redevient un végétal. Mort, il retourne au minéral. Quand il rêvasse le ventre plein, n’éprouvant ni besoin ni douleur, il est probablement proche d’un animal au repos. Selon les circonstances un virus passe de l’état d’être vivant à celui de cristal ce qui montre que les frontières peuvent être brouillées entre les catégories. Le chien n’ignore pas le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Concept" concept de chat puisqu’il poursuit indifféremment chat persan et chat de gouttière. L’aboiement qui traduit son état émotionnel est une forme élémentaire de langage. Le chat dispose du concept « eau » car il la fuit sous toutes ses formes. Je ne crois pas que la poule se méprenne sur les intentions du coq. Elle se fie en effet au langage du corps qui est universel, qu’il s’agisse de rites pré copulatoires, ou d’attitudes d’intimidation ou de soumission. Ce qui se passe dans le cerveau d’un lion poursuivant une antilope ne doit pas être très différent de ce qui se passe dans le cerveau d’un joueur de rugby essayant de rattraper et de plaquer au sol son adversaire. Dans les deux cas, il s’agit d’un comportement non verbalisé. N’est-ce pas d’ailleurs la caractéristique de tout sport de reposer le pratiquant d’une verbalisation envahissante qui ne pourrait que nuire à la qualité de son jeu? Les évènements se succèdent d’ailleurs trop rapidement dans les activités sportives pour faire l’objet d’un discours. Le sportif en action fait ainsi avec bonheur l’impasse sur quelques millions d’années d’évolution ! Je soupçonne que les pensées de l’homme de science, du peintre ou du musicien sont principalement non verbales quand ils exercent leurs activités à leur plus haut niveau. Si leur monologue intérieur s’enclenche, je crois que c’est plus celui du commentateur que celui du créateur. Il n’est pas rare d’éprouver de l’affection pour un animal domestique qui est très généralement un mammifère. C’est beaucoup plus inhabituel à l’égard d’un insecte. Pourtant, de la matière inanimée à l’homme, la mouche a peut-être déjà, en matière « d’inventions », effectué 90% du chemin. Le programme de fabrication d’un homme est très proche de celui d’un rat d’égout et c’est pourquoi les rongeurs sont les vedettes de nos laboratoires. Tous les mammifères, dont nous-mêmes bien évidemment, descendraient d’une souricette mesurant dix centimètres de la tête à la queue et qui vivait en Chine il y a cent soixante millions d’années. Quel est l’homme contemporain qui serait capable de survivre dans la jungle ? Pourtant le chimpanzé y vit à l’aise sachant s’y défendre, s’y nourrir et s’y soigner. La différenciation de l’homme actuel par rapport aux autres primates n’a pris que quelques millièmes de la durée totale qui s’est écoulée depuis l’apparition de la vie. Il n’est donc pas étonnant que ces espèces soient encore si proches. L’homme préhistorique, commensal des loups et des ours, se considérait sans doute comme un animal parmi d’autres. L’homme contemporain, avec l’arrogance des nouveaux riches, refuse le plus souvent de reconnaître l’animal comme son semblable et encore moins l’animal qui est en lui-même. Ceci n’a rien de surprenant si l’on songe qu’il a souvent la même attitude à l’égard de ses propres congénères, qu’il s’agisse d’ennemis, d’esclaves, de représentants de races ou de classes sociales supposées inférieures, voire de la gent féminine ou des représentants d’un autre parti. Les films animaliers ont fait beaucoup pour alerter l’opinion publique et rendre à l’animal une dignité qu’il semblait avoir perdue depuis quelques millénaires. Les divinités ont en effet longtemps affecté des formes animales avant de les perdre au bénéfice de formes humaines. A supposer que tous les « brevets » concernant la fabrication des animaux soient tombés dans le domaine public, quel est celui que l’inventeur supposé de l’être humain pourrait déposer qui ne puisse être contesté ? Un tel brevet ne pourrait couvrir ni l’outillage ni le langage, ni le symbolisme si on se réfère aux dernières expérimentations effectuées sur les animaux les plus évolués. Le cerveau humain a sensiblement la même structure et les mêmes aires spécialisées que celles des autres mammifères supérieurs. L’augmentation de la masse du cerveau à elle seule ne saurait faire l’objet d’un brevet car l’idée est à la portée de n’importe quel ingénieur. A un moment de son histoire l’homme a été victime d’une hypertrophie de son cerveau. Ses conditions d’existence ont fait que ce handicap est devenu un atout. La raison en est que chez l’homme, comme chez les autres primates et contrairement à ce qui se passe avec les autres grands mammifères, les neurones ont conservé la même taille, ce qui a permis d’en augmenter considérablement le nombre, donc la complexité du traitement des informations, sans allonger à l’excès la longueur des liaisons entre neurones, donc sans diminuer la vitesse de ce traitement. De fait la miniaturisation des neurones humains parait avoir atteint la limite « technologique » de ce type de composant. La consommation d’énergie du cerveau humain reste également de ce fait à un niveau raisonnable. Il n’y a donc aucune discontinuité de l’animal à l’homme, à ceci près qu’un beau jour la masse du cerveau de ce dernier a atteint la valeur critique et que la divergence des savoirs et des savoir-faire commencée à petit bruit, mais de caractère exponentiel, continue de se produire actuellement à une vitesse accélérée. Une telle  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9action_en_cha%C3%AEne" réaction en chaîne ne s’achève que par l’épuisement du combustible (le connaissable et le faisable) ou sa dispersion par suite d’une explosion. L’option entre ces deux futurs reste aujourd’hui ouverte. Laissez à certaines espèces le temps et l’espace vital nécessaires et elles pourront éventuellement s’aventurer sur le même chemin, au cas où l’humanité disparaîtrait. Sélectionnez une race canine sur des critères d’intelligence et vous obtiendrez dans un million d’années une race de chiens à grosse tête dont les femelles auront nécessairement un bassin élargi, ce qui les rendra plus sexy aux yeux des autres toutous. Le poulpe avec ses grands yeux et ses nombreux tentacules, mais lent et sans protections, passe pour particulièrement intelligent. Certains mammifères marins semblent disposer de moyens intellectuels comparables à ceux de l’homme, mais la vie des habitants des eaux est trop facile. A la différence des animaux terrestres et des oiseaux ils n’ont pas d’énergie supplémentaire à fournir pour prendre de l’altitude, ils n’ont pas besoin de membres pour lutter contre la pesanteur, ni de mains pour grimper aux arbres et se défendre des prédateurs. Les plus favorisés d’entre eux entretiennent de longues conversations avec leurs congénères et jouissent tranquillement de l’existence sans donner un coup de nageoire de trop. Quand pourrons-nous entendre l’histoire de Jonas racontée par des baleines ?
La conscience ne comprend pas, elle n’a que le sentiment d’avoir compris. La compréhension consiste dans l’établissement de liaisons nouvelles et permanentes entre certains neurones libres, de façon à créer de nouveaux concepts et de relier ces concepts avec les concepts préexistants. Sa nature physique implique que les mêmes causes produisent les mêmes effets. Où se situe le mécanisme neuronal qui préside à la mise en œuvre d’un  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Syllogisme" syllogisme et comment fonctionne-t-il ? Telle est la question. Mon hypothèse est que le mécanisme existe au niveau de l’inconscient, qu’il n’est pas nécessairement ni même le plus souvent verbalisé et que les autres processus logiques sont dans le même cas. Les animaux qui ne disposent pas de la parole ont des comportements logiques ; ils sentent, pensent et raisonnent. Les fonctions conjonctions (ET, OU, SI, MAIS, NI etc.…) nécessaires à l’élaboration d’un raisonnement doivent correspondre à des concepts particuliers réalisant les liaisons neuronales nécessaires à la réalisation des fonctions logiques correspondantes. Seule l’espèce humaine leur a donné un nom. La pensée inconsciente précède l’expression consciente de la pensée. Dans le processus de compréhension, le seul rôle de la conscience est de valider la proposition de l’inconscient de se mettre au travail et de le stimuler tant que le sentiment d’avoir compris n’est pas atteint.
La conscience subjective ou l’âme si vous préférez n’est pas immortelle. Comment survivrait-elle à la disparition totale du processus matériel qui l’engendre, l’oscillation des circuits neuronaux, alors que le sommeil, diverses substances chimiques, une vive douleur, une vive émotion, un malaise ou un coup sur la tête un peu appuyé suffisent à la faire disparaître ? N’est-il pas naturel de penser que l’émission disparaît avec l’émetteur, la musique avec l’instrument ? Dans quel conservatoire pourrait séjourner l’âme du reptile ou celle du poisson qui ont laissé leur empreinte dans la roche ? Où résident maintenant les instincts, les souvenirs et les automatismes qui étaient codés par leurs neurones ? Le mythe chrétien de la résurrection de la chair ou le mythe bouddhiste de la transmigration des âmes d’un corps dans un autre montrent que ces traditions religieuses ont intégré le fait que l’âme ne peut exister sans le corps dont elle est une émanation.
Les bonnes âmes voudraient que la vie humaine soit considérée comme une valeur absolue. C’est louable, mais inapplicable dans la pratique, car les sommes à dépenser pour la préserver n’auraient pas de limite. Un chant naît, se prolonge un moment et s’éteint. Seule la musique est éternelle. Qu’importe qu’une mémoire soit détruite s’il en existe une copie. La nature est particulièrement libérale en matière de copie. Il n’est que de comparer dans n’importe quelle espèce le nombre de graines et le nombre d’individus formés. A la grande loterie génétique, il y a beaucoup d’appelés et peu d’élus. Compte tenu de la relative facilité avec laquelle on peut le fabriquer, l’être humain n’a que la valeur qu’on veut bien lui reconnaître par contrat. D’où, pour les individus et pour la société toute entière, l’extraordinaire importance que de tels contrats existent et qu’ils soient respectés scrupuleusement. Ces contrats devraient stipuler que tout homme a droit au bonheur et qu’il a le devoir de concourir au bonheur de ses semblables. Ils devraient être signés lors des principales étapes de la vie d’un individu ainsi que lors de l’acceptation de certaines fonctions, et préciser à chaque fois les nouveaux droits et les nouveaux devoirs, les récompenses et les sanctions prévues qui s’y attachent. Il s’agit au fond de l’application à la vie des citoyens des principes de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Assurance_qualit%C3%A9" l’Assurance Qualité. Chacun devrait s’engager par serment lorsqu’il atteint sa majorité à dire la vérité, rien que la vérité et, dans la mesure du possible, toute la vérité. Dire toute la vérité en toutes circonstances fâcherait les meilleurs amis du monde et rendrait impossible la vie en société. Cependant, si l’individu n’a qu’une valeur contractuelle, l’espèce humaine doit avoir pour nous une valeur intrinsèque supérieure à toute autre tant que n’aura pas été décelée dans l’univers la trace d’une espèce équivalente. Préserver la vie quoi qu’il arrive est une responsabilité cosmique qu’on aimerait pouvoir partager, mais ça n’est pas d’actualité.
Nous pourrions imaginer que, profitant de la présence simultanée en un même lieu des informations et des décisions, un système voisin de l’écran dont nous avons parlé tout à l’heure exerce un contrôle sommaire de cohérence, comme le fait un commandant en chef sur les propositions de son état-major et qu’un contrôle satisfaisant suscite le sentiment d’évidence, mais c’est une pure hypothèse
Certains objecteront que l’utilisation de l’expression « vu de l’intérieur » ne constitue pas une explication satisfaisante dans la mesure où elle ne fait que déplacer le problème si la signification physique de cette expression n’est pas précisée. L’ « intériorité » ne correspond à aucune propriété physique connue. C’est donc encore de la métaphysique. Quel est l’œil qui regarde l’image de l’œil qui regarde l’image de l’œil qui regarde …? Cette suite n’a pas de fin. Cette difficulté apparemment insurmontable constitue ce que les anglo-saxons appellent le « hard problem ». Bien peu de gens semblent vraiment conscients de l’étrangeté fondamentale du phénomène de la conscience pourtant si répandu. L’identification de l’entité physique qui est vue de l’intérieur permet toutefois de franchir une étape importante. Certains comme le professeur Koch déjà nommé soupçonnent qu’il ne sera pas possible d’aller plus loin. De façon analogue, on peut observer que Newton explique la pesanteur par une force d’attraction dont il ignore le mécanisme. Einstein fait un pas de plus en l’expliquant par une déformation de l’espace-temps due aux masses qui y sont présentes, mais sait on vraiment ce que sont et l’espace et la masse et le temps ? Malgré les efforts des physiciens ces notions font encore l’objet de débats. Hors la pratique courante ce sont toujours des notions insaisissables. Le phénomène d’intrication ne les a-t-il pas remis en cause au point que certains pensent qu’une refondation de la physique est nécessaire ? Comprend-on vraiment comment un champ agit sur une particule ? A un moment ou à un autre, on bute sur un constat qu’il est impossible de dépasser. Rien ne prouve que le cerveau humain soit apte à tout comprendre et nul n’a jamais vu sans artifices le fond de son œil, ni un contenu contenir son contenant. La compréhension est un processus logique qui peut être modélisé informatiquement. Or il existe des programmes informatiques dont on constate que l’exécution, qui est un processus physique,  HYPERLINK "http://cs.umaine.edu/~chaitin/" ne se termine jamais sans qu’on soit capable de le prévoir avec certitude. La raison raisonnante comporte donc des limitations. Il n’est pas impossible que l’homme, par construction, soit pour toujours dans l’incapacité de se comprendre lui-même et de comprendre la raison ultime de ce qui l’entoure.
Il est cependant possible d’entrevoir une issue plus favorable à ces interrogations. Adoptons la thèse selon laquelle la conscience n’est pas un phénomène surnaturel et revenons au champ électromagnétique engendré par l’activité électrique ondulatoire des neurones et à sa liaison supposée avec la conscience. On peut observer que la composante magnétique et la composante électrique de ce champ sont inextricablement mêlées au point qu’elles peuvent être représentées par un être mathématique unique : le tenseur électromagnétique. Toute variation du champ électrique induit une variation du champ magnétique et réciproquement. Cette interaction se manifeste tout particulièrement dans le phénomène de la lumière et des autres rayonnements électromagnétiques. Faut-il voir dans ce jeu de miroirs qui se répondent à l’infini l’origine de la propriété qu’a la conscience de connaître son propre état, d’avoir ainsi le sentiment de sa propre existence ? Faut-il y voir la solution de la difficulté précédemment soulevée (Quel est l’œil qui regarde l’image de l’œil qui regarde l’image de l’œil qui regarde …?). La conscience d’un individu serait ainsi le tenseur électromagnétique correspondant aux courants électriques ondulatoires qui parcourent son cerveau. Que voulez-vous que ce soit d’autre ? Cette conclusion de notre enquête me rappelle la phrase prononcée par Louis Jouvet, inspecteur de police, à la fin du film « Quai des Orfèvres » quand il découvre que ce qu’il prenait pour un drame passionnel n'était finalement qu'un crime crapuleux ; « on croit que ça va être une belle affaire et ça finit comme toujours : en pipi de chat ! » Après cette belle explication de l’aspect subjectif du phénomène de la conscience dont le seul but était de montrer qu’une telle explication dans un cadre rationnel n’est pas plus impossible par principe que celle d’autres phénomènes considérés comme élucidés, nous pouvons entreprendre l’examen du texte de Diderot, section par section.

4. PREAMBULE

J'avais je ne sais quelle affaire à traiter avec le maréchal de *** ; j'allais à son hôtel un matin ; il était absent ; je me fis annoncer à madame la maréchale. C'est une femme charmante ; elle est belle et dévote comme un ange ; elle a la douceur peinte sur son visage ; et puis un son de voix et une naïveté de discours tout à fait avenants à sa physionomie. Elle était à sa toilette. On m'approche un fauteuil ; je m'assieds, et nous causons. Sur quelques propos de ma part, qui l'édifièrent et qui la surprirent (car elle était dans l'opinion que celui qui nie la très sainte Trinité est un homme de sac et de corde, qui finira par être pendu), elle me dit :

La Maréchale. - N'êtes-vous pas monsieur Crudeli ?
Crudeli. - Oui, madame.
La Maréchale. - C'est donc vous qui ne croyez à rien ?
Crudeli. - Moi-même.

Il convient d’admirer la concision de ce préambule qui campe en quelques phrases courtes la situation et les personnages. Diderot est impatient d’entamer son propos, les mots lui brûlent les lèvres. Pourquoi évoque-t-il d’emblée le sujet de la  HYPERLINK "http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/augustin/trinite/" Trinité  ? C’est probablement parce que c’est un des premiers sujets abordés par la doctrine et qu’à ses yeux le fait d’obliger tous les croyants à confesser que un égale trois et que trois égalent un est la meilleure illustration de l’abandon de tout esprit critique qu’exige l’adhésion sans réserves aux thèses de la doctrine catholique. On comprend que les docteurs de la foi aient cherché à se débarrasser le plus rapidement possible de l’obligation d’exposer un dogme aussi abscons. Voici en effet comment les docteurs de la foi s'expriment au sujet de la Trinité : 
" Dieu le Père, étant l'Être infiniment intelligent et actif, n'a jamais été un seul instant sans se connaître. Or cette connaissance infinie, parfaite, égale à Dieu, quoique distincte de lui, c'est sa Sagesse ou son Verbe, qui, possédant nécessairement une réalité à part, s'appelle le Fils. Mais Dieu le Père se connaissant tel qu'il est, et connaissant son Fils, qui est l'image de sa personne, avec ses infinies perfections ne peut ne pas l'aimer. Et ce Fils, pareillement connaissant son Père, ne peut non plus ne le point aimer d'un amour éternel et infini, or cet amour réciproque du Père et du Fils, réalité nécessairement subsistante (????), s'appelle la troisième personne, ou le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Saint-Esprit" Saint-Esprit. Il procède à la fois du Père et du Fils, et il est Dieu aussi, étant infini et éternel comme eux ».
Une fois qu’il a avalisé l’existence du syndicat d’admiration mutuelle décrit par ce galimatias le croyant est en situation de tout avaler. Cette difficulté gratuite vient du fait que les initiateurs du dogme trinitaire en ont rajouté en voulant faire du Christ un dieu, ce qu’il n’a jamais revendiqué expressément lui-même, si l’on en croit les évangélistes. Quand ils disent « Notre Père », les chrétiens se considèrent-ils comme engendrés par Dieu au sens le plus physique du terme et dieux eux-mêmes ?
Notre Père qui êtes aux cieux Restez-y Et nous nous resterons sur la terre Qui est quelquefois si jolie
(Jacques  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Pr%C3%A9vert" Prévert. Paroles)

Platon qualifiait  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Socrate" Socrate d’homme divin. Est-ce que ceci en faisait un dieu pour autant ? Pour faire bonne mesure, ces fondateurs ont inventé la théorie du «  HYPERLINK "http://www.sspx.ca/Communicantes/Apr2002/French/Le_Sacrifice_redempteur.htm" Rachat » qui dispute à la Trinité la palme de l’absurdité. De quoi l’enfant qui vient de naître peut-il bien être coupable, lui qui est l’image même de l’innocence ? Quelle est la caisse de compensation qui établit un ratio entre les douleurs des hommes et celles des divinités ? Entre celles des victimes et celles des coupables ? Que dire également de la double nature du Christ, à la fois humaine et divine ? Par ces défis au bon sens, et au-delà d’objectifs politiques qui seront examinés plus loin, les premiers théologiens chrétiens entendaient administrer la preuve de leur aptitude à faire surgir par la magie des mots une pseudo réalité. L’effet principal obtenu en promulguant ces dogmes et quelques autres de même farine était de désorienter, culpabiliser et terroriser les catéchumènes afin de les rendre plus malléables et de leur faire croire que des intercesseurs, c'est-à-dire eux-mêmes, étaient indispensables à leur salut. Il s’agit bel et bien d’un lavage de cerveau, d’un labourage de crâne destiné à permettre la germination de nouvelles graines. C’est le pendant des cérémonies d’initiation pour les adolescents des sociétés primitives, des bizutages pour les étudiants des écoles et des classes d’instruction pour les conscrits. Il s’agit d’établir une connivence entre des initiés au détriment de ceux qui ne le sont pas. C’est pourquoi ces cérémonies sont souvent occultes et renvoient aux «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Myst%C3%A8res_d'%C3%89leusis" mystères » dont l’époque était friande. Une table à deux pieds est par nature instable, une table à quatre pieds est souvent boiteuse, seul un trépied est parfaitement stable en toutes circonstances, vertu enviable et enviée. Le dogme trinitaire est ainsi un bel hommage rendu par le christianisme et par d’autres religions qui l’ont précédé à la statique des corps indéformables.
Et puis, sous couvert de Trinité, quelle image donne-t-il de la famille ce père qui engrosse la femme d’un de ses plus fidèles serviteurs et envoie au casse-pipe le fils issu de cette coupable union ? Et ce fils bien-aimé il omet de le secourir, on ne sait trop pourquoi, alors qu’il est dans la plus extrême détresse. Depuis, sans doute fatigué par la Création et perturbé par toute cette histoire, il fait faire tout le boulot par le Saint-Esprit ! Notons au passage que la doctrine chrétienne récupère à son profit l’une des recettes les plus éculées de la mythologie classique : la naissance d’un héros comme résultat des amours d’un dieu et d’une mortelle. Avec cette particularité, qui n’est pas rare dans la mythologie, que ces amours ont un caractère incestueux, le Fils étant inséparable dans la Trinité du Père et du Saint-Esprit fécondateur. Le Fils est ainsi l’amant de sa mère et de ce fait son propre père… Bien des filles ont du prendre pour prétexte la visite d’un dieu pendant leur sommeil pour expliquer leur soudain embonpoint. Quand le dieu avait les traits d’un frère, d’un oncle ou d’un père, toute la famille avait intérêt à prendre cette explication pour argent comptant ! On trouve déjà de tels récits dans la mythologie égyptienne, (naissance mythique d’ HYPERLINK "http://www.stellarhousepublishing.com/luxor.html" Horus) ou dans l’hindouisme. J’avoue avoir confondu un certain temps, ayant sans doute raté quelque cours de catéchisme, la Sainte Mère et le Saint-Esprit. Toujours est-il que cette confusion conférait à la Sainte Famille ainsi recomposée un caractère plus conventionnel, j’oserais dire plus moral, fondait à mon seul usage une théologie qui n’est pas sans mérites et anticipait peut-être sur l’évolution naturelle du culte marial…On ne se débarrasse pas aisément du culte de la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9esse_m%C3%A8re" Déesse-Mère si ancien et si répandu.
Je prie les chrétiens sincères d’excuser ces propos qui ne cherchent nullement à les choquer ou les offenser, mais seulement à leur faire toucher du doigt ce que leur théologie peut avoir d’absurde pour un esprit indépendant et épris de logique. Je leur accorde bien volontiers toute licence de brocarder en retour l’incroyance et les incroyants. Si la caricature est réussie, je rirai de bon cœur avec eux. Tout ce qui provoque le rire est bon à prendre. A ceux qui feraient mine de se fâcher, je dirai que leur susceptibilité ne fait que souligner la fragilité de leurs convictions, et qu’ils n’ont pas vraiment confiance dans leurs raisons puisqu’ils ne trouvent pas d’autre argument pour les soutenir que la violence, verbale dans le meilleur des cas, le plus souvent, hélas, physique. Les religions n’ont jamais manqué lorsqu’elles en avaient le pouvoir, de faire écorcher vifs, empaler ou ébouillanter tous ceux qui refusaient de se soumettre. N’ayant pas le courage de faire elle-même cette sale besogne elles s’en déchargeaient sur le pouvoir civil. Je leur rappellerai également que les malheureuses femmes accusées naguère de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Chasse_aux_sorci%C3%A8res" sorcellerie auraient bien aimé que les sévices exercés sur elles, sévices que l’Eglise a suscités et cautionnés, se limitent à d’innocentes plaisanteries. L’inquisition a fait estime-t-on neuf millions de victimes qui ont été arrachées à leur famille, emprisonnées, torturées jusqu’à ce qu’elles avouent des crimes imaginaires ou dénoncent des innocents, puis brûlées vives et dépouillées de leurs biens au profit de l’Eglise, un vol qui constitue la raison ultime de ce processus. Chacun peut se demander quelle est la valeur d’un enseignement qui a conduit à pareilles abominations. Avec des antécédents aussi flamboyants et aussi fumants, il ne sied guère à l’Eglise de jouer les vierges effarouchées à la première égratignure. Fort heureusement, si la liste de ses méfaits paraît close, c’est que l’Eglise a fait retour à des sources qu’il lui était naguère arrivé d’oublier. Elle est ainsi en harmonie avec la morale naturelle, avec la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Si%C3%A8cle_des_Lumi%C3%A8res" philosophie des Lumières et avec les choix de vie des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Hippie" hippies. C’est dans l’encyclique «   HYPERLINK "http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/encyclicals/documents/hf_ben-xvi_enc_20051225_deus-caritas-est_fr.html" Love and Peace », la première de son pontificat, que Benoît XVI établit la distinction qui s’impose entre deux mots grecs que nous traduisons par le même mot : amour, à savoir Agapè (aimez-vous les uns les autres) et Eros (aimez-vous les uns sur les autres). Si l’Eglise se contente de dire que ces propos iconoclastes l’attristent, mais ne met nullement en cause le droit, pour tout un chacun, de les tenir, je suis persuadé que les anticléricaux les plus virulents sauront mettre une sourdine à leurs persiflages. Bien entendu, si Jésus ou Mahomet, Allah ou Jéhovah venaient se plaindre en personne, il faudrait faire cesser immédiatement tout blasphème les concernant.
5. ETHIQUES


La Maréchale. - Cependant votre morale est celle d'un croyant.
Crudeli. - Pourquoi non, quand il est honnête homme.
La Maréchale. - Et cette morale, vous la pratiquez ?
Crudeli. - De mon mieux.
La Maréchale. - Quoi ! Vous ne volez point, vous ne tuez point, vous ne pillez point ?
Crudeli. - Très rarement.
La Maréchale. - Que gagnez-vous à ne pas croire ?
Crudeli. - Rien du tout, madame la maréchale. Est-ce qu'on croit parce qu'il y a quelque chose à gagner ?
La Maréchale. - Je ne sais ; mais la raison d'intérêt ne gâte rien aux affaires de ce monde ni de l'autre.
Crudeli. - J'en suis un peu fâché pour notre pauvre espèce humaine. Nous n'en valons pas mieux.
La Maréchale. - Quoi ! Vous ne volez point ?
Crudeli. - Non, d'honneur.
La Maréchale. - Si vous n'êtes ni voleur ni assassin, convenez du moins que vous n'êtes pas conséquent.
Crudeli. - Pourquoi donc ?
La Maréchale. - C'est qu'il me semble que si je n'avais rien à espérer ni à craindre quand je n'y serais plus, il y a bien des petites douceurs dont je ne me sèvrerais pas, à présent que j'y suis. J'avoue que je prête à Dieu à la petite semaine.
Crudeli. - Vous l'imaginez ?
La Maréchale. - Ce n'est point une imagination, c'est un fait.
Crudeli. - Et pourrait-on vous demander quelles sont ces choses que vous vous permettriez si vous étiez incrédule ?
La Maréchale. - Non pas, s'il vous plaît ; c'est un article de ma confession.
Crudeli. - Pour moi, je mets à fonds perdu.
La Maréchale. - C'est la ressource des gueux.
Crudeli. - M'aimeriez-vous mieux usurier ?
La Maréchale. - Mais oui : on peut faire de l'usure avec Dieu tant qu'on veut ; on ne le ruine pas. Je sais bien que cela n'est pas délicat, mais qu'importe ? Comme le point est d'attraper le ciel, ou d'adresse ou de force, il faut tout porter en ligne de compte, ne négliger aucun profit. Hélas ! Nous aurons beau faire, notre mise sera toujours bien mesquine en comparaison de la rentrée que nous attendons. Et vous n'attendez rien, vous ?
Crudeli. - Rien.
La Maréchale. - Cela est triste. Convenez donc que vous êtes méchant ou bien fou !
Crudeli. - En vérité, je ne saurais, madame la maréchale.
La Maréchale. - Quel motif peut avoir un incrédule d'être bon, s'il n'est pas fou ? Je voudrais bien le savoir.
Crudeli. - Et je vais vous le dire.
La Maréchale. - Vous m'obligerez.
Crudeli. - Ne pensez-vous pas qu'on peut être si heureusement né qu'on trouve un grand plaisir à faire le bien ?
La Maréchale. - Je le pense.
Crudeli. - Qu'on peut avoir reçu une excellente éducation qui fortifie le penchant naturel à la bienfaisance ?
La Maréchale. - Assurément.
Crudeli. - Et que, dans un âge plus avancé, l'expérience nous ait convaincu qu'à tout prendre il vaut mieux, pour son bonheur dans ce monde, être un honnête homme qu'un coquin ?
La Maréchale. - Oui-da ; mais comment est-on un honnête homme, lorsque de mauvais principes se joignent aux passions pour entraîner au mal ?
Crudeli. - On est inconséquent ; et y a-t-il rien de plus commun que d'être inconséquent ?
La Maréchale. - Hélas ! Malheureusement non ; on croit, et tous les jours, on se conduit comme si l'on ne croyait pas.
Crudeli. - Et sans croire, on se conduit à peu près comme si l'on croyait.
La Maréchale. - A la bonne heure ; mais quel inconvénient y aurait-il à avoir une raison de plus, la religion, pour faire le bien, et une raison de moins, l'incrédulité, pour mal faire.
Crudeli. - Aucun, si la religion était un motif de faire le bien, et l'incrédulité un moyen de faire le mal.
La Maréchale. - Est-ce qu'il y a quelque doute là-dessus ? Est-ce que l'esprit de religion n'est pas de contrarier cette vilaine nature corrompue, et celui de l'incrédulité, de l'abandonner à sa malice, en l'affranchissant de la crainte ?
Crudeli. - Ceci, madame la maréchale, va nous jeter dans une longue discussion ;
La Maréchale. - Qu'est-ce que cela fait ? Le maréchal ne rentrera pas sitôt ; et il vaut mieux que nous parlions raison, que de médire de notre prochain.
Crudeli. - Il faudra que je reprenne les choses d'un peu plus haut.
La Maréchale. - De si haut que vous voudrez, pourvu que je vous entende.
Crudeli. - Si vous ne m'entendiez pas, ce serait bien ma faute.
La Maréchale. - Cela est poli ; mais il faut que vous sachiez que je n'ai jamais lu que mes Heures, et que je ne suis guère occupée qu'à pratiquer l'Évangile et à faire des enfants.
Crudeli. - Ce sont deux devoirs dont vous vous êtes bien acquittée.
La Maréchale. - Oui, pour les enfants. J'en ai six tout venus et un septième qui frappe à la porte ; mais commencez.
Crudeli. - Madame la maréchale, y a-t-il quelque bien, dans ce monde-ci, qui soit sans inconvénient ?
La Maréchale. - Aucun.
Crudeli. - Et quelque mal qui soit sans avantage ?
La Maréchale. - Aucun.
Crudeli. - Qu'appelez-vous donc mal ou bien ?
La Maréchale. - Le mal, ce sera ce qui a .plus d'inconvénients que d'avantages ; et le bien, au contraire, ce qui a plus d'avantages que d'inconvénients.
Crudeli. - Madame la maréchale aura-t-elle la bonté de se souvenir de sa définition du bien et du mal ?
La Maréchale. - Je m'en souviendrai. Appelez-vous cela une définition ?
Crudeli. - Oui.
La Maréchale. - C'est donc de la philosophie ?
Crudeli. - Excellente.
La Maréchale. - Et j'ai fait de la philosophie !

La Maréchale et le philosophe viennent de donner l’un et l’autre les raisons qu’ils ont de faire le bien et de se refuser à faire le mal. Quand le philosophe lui demande d’expliciter ce qu’elle entend par bien et par mal la Maréchale ne se réfère pas à la doctrine catholique. La définition utilitariste à laquelle elle se rallie montre qu’elle est déjà contaminée par les idées nouvelles. Un certain flou néanmoins subsiste dans la mesure où elle n’indique pas en quoi consistent au juste avantages et inconvénients et qui en est affecté. Si, pour ce qui est des motivations, le philosophe se fait le porte-parole d’une morale fondée sur la nature et la raison, la Maréchale proclame avec innocence qu’elle ne fait le bien que par intérêt personnel ! La naïveté réelle ou feinte de la Maréchale est d’une grande cocasserie, car une telle motivation est évidemment aux antipodes de ce qu’on considère généralement comme une motivation d’ordre moral ! Nous sommes pourtant là au cœur de la contradiction interne de la doctrine catholique relative au Salut qui ravale la générosité au rang de l’intérêt bien compris et les braves gens au rang de rentiers prévoyants. De ce point de vue, une doctrine qui propose de vous emprunter une somme relativement modique, dont elle assure qu’elle ne vous appauvrit pas car il y a des compensations, et promet de vous servir des intérêts extraordinairement élevés et qui courent éternellement a sur toutes les autres un avantage évident. Tel de mes proches me disait un jour n’avoir eu dans sa vie que des avantages à pratiquer la religion. Je n’ai pas eu l’esprit de lui répondre que je me serais très bien accommodé qu’il n’y eut que des inconvénients si j’y avais reconnu l’amorce d’un chemin vers la vérité. Il serait beau d’être vertueux ici-bas si dans l’au-delà les bons étaient punis et les méchants récompensés ! Pourquoi d’ailleurs n’en irait-il pas ainsi, si la terre et le Ciel ont quelque cousinage ? Les tortionnaires, le plus souvent, meurent dans leur lit. Sans adopter cette hypothèse extrême certains bouddhistes vont jusqu’à céder à autrui les mérites que leurs bonnes actions ont pu leur valoir (par quel mécanisme, c’est une autre histoire). Ils assurent ne pas compter sur la reconnaissance que ce don pourrait leur valoir, ce qui est assez prudent car chacun sait, comme l’a dit Voltaire, que la reconnaissance est un fardeau et que tout fardeau est fait pour être secoué ! Les généreux ne tirent aucun profit direct de leur conduite altruiste. Ils jugent qu’ils sont assez récompensés par la joie que leur procure le bonheur de l’autre et par le progrès personnel qui résulte d’une conduite vertueuse. Il ne peut donc y avoir d’action totalement désintéressée, quoi qu’on fasse. Cette voie est sans issue. Une bonne action se suffit à elle-même ; c’est comme le dit Diderot une mise à fonds perdus, On n’attend pas une récompense venant de l’extérieur mais on évite l’inconfort personnel résultant d’une mauvaise conscience. L’altruisme est une forme particulière d’égoïsme. Chacun pourrait dresser un catalogue avec, dans une colonne, une liste de mauvaises actions et dans l’autre les sommes d’argent correspondantes qui nous inciteraient à passer outre. C’est le thème du film  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Proposition_ind%C3%A9cente" « proposition indécente ».
Pour en revenir à la Maréchale, je ne la blâme pas pour autant, car je sais bien que c’est une excellente femme qui ne fait qu’obéir à son cœur qui est bon et que sa tête lui fournit le prétexte et non la vraie raison de sa conduite. C’est qu’en effet l’homme et la femme sont naturellement bons et pourquoi le sont-ils ? Il ne faut pas chercher la raison dans un commandement divin, ou alors seulement de façon allégorique, car le sens moral vient de la nature et d’elle seule. Une société sans éthique n’est tout simplement pas viable. Aucun groupe humain, famille, clan, tribu, entreprise ou nation ne peut survivre si ses membres ne respectent pas entre eux certaines règles éthiques. Lorsque les membres qui ne se sont pas conformés à ces règles n’ont pas été redressés ou éliminés du groupe, c’est le groupe lui-même qui a été éliminé par la sélection naturelle. Aussi, avec le temps, le sens moral est-il devenu aussi commun parmi les hommes que le sens de l’orientation chez les oiseaux migrateurs dont les performances athlétiques semblent par ailleurs défier les lois de la physique. Les oiseaux dépourvus de ce sens se sont perdus et ont été perdus pour leur espèce. Ne dit-on pas d’un homme dépourvu de sens moral qu’il n’a plus de repères, que c’est un homme perdu ? S’il n’a rien à craindre, l’homme est naturellement bienveillant. Voyez son attitude à l’égard des enfants, des vieillards ou des animaux familiers qui ne sauraient le menacer ni entrer en concurrence avec lui. La générosité est de premier mouvement. C’est par réflexion que parfois on s’en exonère. Celui qui, en bonne santé, ne s’offre pas spontanément à pousser une automobile en panne appartient à une petite minorité composée sans doute de gens esquintés par la vie. C’est également une minorité apparentée à la précédente qui commet des actes de vandalisme. Rare est celui qui débouche ses meilleures bouteilles pour les boire en tête-à-tête avec lui-même. Des amis se disputent pour payer la tournée. Les actes d’altruisme héroïque se multiplient quand les circonstances l’exigent et ils sont accomplis par des gens ordinaires, par des « HYPERLINK "http://aphgcaen.free.fr/cercle/justes.htm"  justes ». Arrêtons-nous un instant sur la notion d’ordre moral contre lequel des justes se sont souvent élevés. Qui est contre l’ordre ? Qui est contre la morale ? Pourquoi l’association de ces deux mots provoque-t-elle un mouvement de rejet ? C’est qu’elle nie la liberté des individus et les assujettit à un système de valeurs choisi par d’autres. Le sens moral n’est pas propre à la seule espèce humaine, mais il intervient dans toutes les espèces où la mère et souvent le père s’occupent d’élever et de nourrir leurs petits. Le soin des petits, avec le désintéressement qu’il suppose, est le prototype et le fondement de toute conduite morale. Des parents qui oublient cette obligation fondamentale on dit fort bien qu’ils sont dénaturés, c'est-à-dire qu’ils contreviennent à cette loi de nature qui vise à la conservation des espèces. Le sens moral est un instinct qu’on peut considérer comme une généralisation ou une extension de l’instinct parental. Toute femme est sainte qui a mis au monde et élevé ses enfants de son mieux. Il faudrait honorer la mère anonyme comme on honore le soldat inconnu. Morale et éthique sont des noms du genre féminin dans beaucoup de langues. Les animaux qui vivent en groupes comme les loups ou les éléphants savent à l’occasion faire preuve de solidarité à l’égard de leurs congénères. C’est le même sens moral qui pousse les pères et les mères à se saigner aux quatre veines pour élever leur progéniture et qui pousse les saumons à remonter les rivières et les torrents au prix d’efforts sursaumoniens, à la recherche d’une eau parfaitement pure pour leurs fragiles rejetons. Arrivés aux zones de frai, ils accomplissent leur petite affaire et meurent d’épuisement. Leurs dépouilles peuvent servir alors de nourriture aux futurs alevins. On peut en dire autant des tortues marines qui s’imposent de longs voyages pour venir abriter leurs œufs sous le sable d’une plage supposée sûre. Vous direz qu’il s’agit là de comportements instinctifs et vous avez raison. Le sens moral est un instinct qui vise à préserver l’individu et l’espèce ; mais l’espèce est prioritaire. L’orgueil, péché mortel, consiste à ignorer cette priorité. Pour ce qui est des vertus morales telles que le courage, le dévouement, la fidélité, le loup ou le chien l’emportent aisément sur la plupart des êtres humains. La morale universelle qui transcende les pays, les civilisations et les époques transcende également les espèces. Les comportements immoraux s’éliminent d’eux-mêmes car ils sont un handicap pour la survie et la perpétuation du groupe tout entier. La réussite des sociétés humaines se joue en grande partie au niveau de l’éthique qui les anime. La remarque est souvent faite que la réussite des Etats-Unis d’Amérique est due pour une bonne part à l’éthique exigeante de ses Pères Fondateurs. De la même façon l’éthique chrétienne enfin digérée à la fin du Moyen-Âge peut, parmi d’autres facteurs, expliquer le succès de la civilisation européenne. Les truands et les maffieux ont été dévoyés dans leur enfance d’une manière ou d’une autre, mais ils ont leur propre code d’honneur. Tout manquement à ce code est par eux cruellement sanctionné, grâce à quoi ces espèces parasites que sont truanderies et maffias peuvent perdurer…Une poignée de mains suffit à sceller un accord si chacun des partenaires cache un pistolet dans sa poche ! Les militaires revendiquent l’esprit de corps indispensable à la réussite de leur mission mais qui ne les empêche pas de commettre les pires atrocités. L’éthique nazie elle-même se définit à partir d’un critère biologique fantasmé: la « pureté de la race aryenne », à cause de sa supériorité supposée sur les autres races. Les spécialistes de l’évolution ont une règle simple que leurs observations ont commencé à confirmer. Cette règle, qui ressemble assez à une remarque de bon sens comme tout ce qui touche au darwinisme, est la suivante : l’égoïsme est favorable au niveau de l’individu, l’altruisme au niveau du groupe. Plus l’environnement est contraignant pour un groupe et plus le niveau éthique des individus qui le composent doit s’élever. Les populations nordiques ont suffisamment à faire pour lutter contre le froid et contre la faim. Elles recherchent donc la coopération et non l’affrontement. Il n’y a pas de guerre que je sache chez les Inuit. Pour éviter tout conflit ces derniers vont jusqu’à prêter leurs femmes ! Si l’épopée des Vikings parait un contre-exemple, l faut remarquer qu’elle a coïncidé avec une période de réchauffement climatique. Le surcroît d’énergie disponible qui en résultait a été dissipé en expéditions lointaines plutôt qu’en luttes intestines contraires à leurs traditions. C’est le sport qui consomme aujourd’hui l’excèdent d’énergie des jeunes gens. Du fait du climat, un habitant des îles britanniques a en moyenne une éthique plus robuste que celle d’un français, mais moins que celle d’un suédois. En Italie les industriels industrieux sont au nord, la maffia, la camorra et la ndrangeta au sud. Est-ce si différent en France ? Le niveau d’immoralité varie en raison inverse de la latitude. Il varie également en raison inverse de l’altitude. C’est pourquoi la Suisse constitue un modèle d’esprit civique et pacifique. Plus les temps sont durs et plus les groupements humains possédant une éthique exigeante sont favorisés par la sélection naturelle. A la fin des temps préhistoriques le niveau éthique moyen des populations devait être élevé. La vie ètant devenue aujourd’hui plus facile on peut craindre un affaiblissement du sens moral des populations. La morale est l’ensemble des règles de comportement que doivent respecter les membres d’une espèce pour que celle-ci se perpétue et prolifère. C’est la raison pour laquelle celles de ces règles qui se rapportent à la perpétuation de l’espèce ont toujours eu une importance centrale. Ces règles sont similaires quels que soient les fondements religieux, philosophiques ou contractuels qu’on leur suppose. Si vous avez quelques doutes sur la faisabilité de ce processus, posez-vous la question suivante : qu’y a-t-il de plus difficile pour le hasard (où la nature si vous préférez), créer un progiciel neuronal qui facilite l’implantation de réflexes éthiques ou bien construire un œil et ses liaisons avec le cerveau ? Les espèces sans yeux ou sans éthique n’ont aucune chance de survie dans un monde concurrentiel.
C’est semble-t-il ce que les moralistes de l’antiquité n’avaient pas suffisamment compris. Leur morale est celle du bonheur personnel, épicurienne pour les temps ordinaires où le plaisir doit être gardé sous contrôle, hédoniste lorsque le très beau temps permet de se relâcher quelque peu, stoïque par mauvais temps lorsqu’il faut garder le cap sans mollir. Il lui manquait ce souci altruiste de conservation de l’espèce que le christianisme allait apporter. Débarrassée de ses oripeaux métaphysiques, la morale chrétienne n’est pas différente sur ce point de la morale naturelle. Avec les progrès de la civilisation les règles de bonne conduite de la morale naturelle deviennent des mythes avant d’évoluer en lois et règlements.
Aux petits et aux grands on dit « faites ceci, faites cela » mais on ne leur communique jamais la raison immédiate et évidente que je viens de dire, de peur de déplaire à tous les charlatans qui vendent de la vertu à la foire à l’encan. C’est cette raison qui fonde la morale laïque et républicaine que doivent pratiquer tous ceux qui souhaitent vivre en paix avec eux-mêmes et avec les autres. Remplacer cette raison naturelle par des raisons chimériques telles que les religions en proposent ne peut que jeter le trouble dans les esprits. Sans religion, la morale est arbitraire, subjective, répètent avec insistance toutes les autorités religieuses, comme si elles avaient besoin de s’en persuader elles-mêmes. Ce qui est sous-entendu par cette assertion parfaitement gratuite est que ceux qui n’ont pas de religion n’ont pas de morale non plus. Ces autorités sont ainsi en flagrante contradiction avec ce que dit Saint Paul lui même dans l’épitre aux romains : Quand les païens, qui n'ont point la loi, font naturellement ce que prescrit la loi, ils sont, eux qui n'ont point la loi, une loi pour eux-mêmes; ils montrent que l'œuvre de la loi est écrite dans leurs cœurs, leur conscience en rendant témoignage Ce n’est pas pour s’affranchir de contraintes morales que certains renoncent à la foi qu’ils avaient pu accorder à une doctrine religieuse particulière. C’est au contraire parce que cette doctrine religieuse leur est apparue en contradiction avec leur instinct moral qu’ils ont renoncé à leur foi. Comment prendre pour fondement assuré d’une morale valable pour tous une doctrine religieuse particulière parmi des doctrines aussi nombreuses, arbitraires et contradictoires que le sont les doctrines religieuses ? Il est absolument nécessaire de fonder l’éthique sur un terrain plus solide qui est, comme nous venons de le voir, la grande loi de la sélection naturelle. Les autorités religieuses se sont approprié une éthique qui appartient à tous et, en se livrant à la diffamation de la concurrence, ont entrepris de la vendre aux plus crédules. C’est ce qu’en bon français on appelle une escroquerie, une escroquerie particulièrement habile dans la mesure où les victimes sont consentantes et se disent même comblées.
L’éthique se transmet génétiquement et culturellement. Génétiquement parce qu’en partie innée et parce qu’une personne bien disposée à l’égard d’autrui a plus de chances de trouver une âme sœur avec laquelle perpétuer l’espèce. Culturellement parce que les enfants apprennent des parents la façon de se comporter en société. Pourquoi ces idées de simple bon sens, on pourrait presque dire triviales, n’ont-elles pas été émises plus tôt et universellement acceptées depuis ? C’est que trop d’habitudes et d’intérêts sont liés à ces visions surannées nées du désir de trouver une explication immédiate aux sentiments que chacun éprouve. Comme dit Alain : « Il n’y a rien de difficile en la morale, si ce n’est de la pratiquer ». Quand la raison naturelle n’est pas évidente on fantasme une apparence de raison, une raison divine. C’est le même désir forcené d’explication qui a conduit aux mythes concernant les phénomènes célestes ou météorologiques. À de rares exceptions près, les grands penseurs de l’antiquité et de l’âge classique croyaient aux dieux et si  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9mocrite_d%27Abd%C3%A8re" Démocrite, une des exceptions, a bien eu l’intuition de l’évolution, il n’en a pas, faute des connaissances nécessaires, pressenti le moteur qu’est la sélection naturelle. Leurs éthiques ne pouvaient être dans ces conditions qu’une recherche du bonheur personnel. Mieux vaut dans ces conditions un dieu imaginaire qui exige l’altruisme qu’un athéisme dénué du souci de conserver l’espèce. Démocrite déconseillait d’avoir des enfants.
L’instinct moral a commencé par régir la cellule familiale et le clan puis, à mesure que les pouvoirs de l’homme s’accroissaient et que la société se compliquait, il s’est étendu à la tribu, à la nation, à l’humanité toute entière. Avec l’écologie il s’étend désormais à l’ensemble du monde vivant et à ses conditions d’existence. L’instinct moral et l’instinct sexuel que l’on a tendance à opposer sont peut-être au contraire étroitement associés dans les structures les plus archaïques du cerveau des êtres évolués. Je serais prêt à parier que les dinosaures il y a cent millions d’années avaient déjà une conscience et une morale, peut-être légèrement fascisantes l’une et l’autre ! L’instinct moral protège tous les individus appartenant à un même bassin de population, je serais tenté de dire à un même bassin de copulation. Un chef d’entreprise limite sa sollicitude aux cadres qui pourraient devenir leur gendre. De la même façon la notion du beau a probablement pour origine la nécessité de choisir le ou la meilleur(e) partenaire possible pour procréer. La langue, dans sa grande clairvoyance, fait appel à la notion physiologique de « sens » pour rappeler les origines biologiques du sens moral et du sens esthétique ce qui en fait des instincts. De l’orient à l’occident et de la plus haute antiquité à nos jours tous les grands penseurs ont plébiscité la morale naturelle. Grâce à Darwin cette morale repose désormais sur des fondations solides.
Si Dieu n’existe pas, tout est permis, y compris de suivre spontanément son inclination au bien. N’ayez donc pas honte d’être bons, vous ne faites que vous conformer à l’ordre naturel des choses. Peut-on dire anormal celui qui n’a jamais éprouvé le désir, même en rêve, de tuer son père ou d’épouser sa mère ? Ne perçoit-il que la moitié du paysage mental ordinaire ? N’est-ce pas plutôt que ces désirs ne naissent que lorsque le père est tyrannique ou que la mère est le seul objet sexuel à portée de regard ? Le péché originel n’existe que dans l’esprit d’individus perturbés. Si la Maréchale choisit de faire le bien, ce n’est pas en considération de récompenses ou de châtiments futurs, c’est parce qu’il lui est viscéralement insupportable de faire le mal, et qu’elle n’est pas masochiste ! Finalement elle ne fait le bien que dans le souci égoïste d’être à l’aise avec sa conscience. Toutes les décisions d’un individu, même celles qui sont en apparence les plus généreuses, sont fondamentalement égoïstes car elles ne visent qu’à équilibrer le plus confortablement possible les diverses tendances qui se disputent le contrôle de sa conscience. De plus, comme l’indique Diderot, les raisons objectives d’être vertueux ne manquent pas. L’homme prudent gravit une pente raide et glissante en faisant des lacets et en assurant chacun de ses pas. Le voyou veut gagner du temps en montant tout droit sans se préoccuper des autres, mais il trébuche, dérape et se retrouve plus bas que l’endroit d’où il était parti.
On peut s’étonner que dans cette partie de l’Entretien, Diderot ne prenne pas la peine de réfuter le «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Pari_de_Pascal#Critique_du_pari" pari de Pascal » alors que la Maréchale, sans toutefois le citer expressément, en reprend l’argumentation. Ce pari consiste à dire que la somme d’efforts de toute nature dont vous faites l’avance en adorant Dieu et en respectant ses prescriptions est finie, alors que le rendement espéré de ce placement est infini, que vous avez donc intérêt à croire selon le plus élémentaire des calculs de probabilité. C’est une  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Martingale" martingale infaillible qui vous est proposée. Argument apparemment irréfutable. Tentons pourtant d’énumérer les différentes formes de réfutation possibles :
Mon professeur de littérature, homme aussi éminent que libertin, objectait que sa vie présente étant tout ce dont il disposait, il était obligé d’y attacher une importance tout aussi infinie que celle qu’il attachait à une éternité sujette à caution.
Si les dogmes sur lesquels ce pari est fondé sont infiniment improbables le produit de leur probabilité zéro par l’infinité du gain attendu reste indéterminé. Les amateurs de loto prennent des billets qui ont une chance sur cent millions de gagner. Si ces joueurs ne vont pas à la messe c’est qu’ils estiment que leur chance de gagner le pari de Pascal est inférieure à un pour cent millions.
« Ou la définition générale (de la justice) convient également à vous, à M. le maréchal, à moi, au jeune Mexicain et au vieillard ; ou je ne sais plus ce que c'est, et j'ignore comment on plaît ou l'on déplaît à ce dernier ». Il ne suffit pas en effet que Dieu existe pour que le croyant soit récompensé, il faut en plus que les différents dogmes enseignés par l’Eglise se révèlent exacts... Pourquoi d’autres dogmes tout aussi arbitraires mais ayant des implications tout autres n’auraient-ils pas force de loi ? Ceux-ci par exemple :
Le dieu que l’Eglise propose à votre adoration n’est pas le bon. Le dieu véritable peut se sentir offensé que vous lui ayez préféré un imposteur et vous en tenir rigueur.
Ce dieu est bien le bon, mais il déteste la flagornerie et les faux-semblants. Il tient pour contre-productive toute démarche dictée par l’intérêt. A un homme pieux mais intéressé il préfère un brave type, indifférent en matière de religion, mais qui essaie avec abnégation, à la place qui est la sienne, de faire fonctionner le système, et il se soucie comme d’une guigne de son adoration.
A vouloir punir avec une cruauté inouïe des méchants que Dieu engendra lui-même les doctrines monothéistes en général et le Christianisme en particulier poussent le cynisme, le sadisme et l’hypocrisie de Dieu jusqu’à leurs plus extrêmes limites. Comment imaginer qu’un dieu bon ressuscite la chair des méchants à seule fin de la faire griller éternellement? Aucun savant fou n’a jamais fait l’objet d’une pareille accusation.
Dieu n’a ni mauvaise ni bonne intention à notre égard, seulement de la curiosité. Il nous considère comme des animaux de laboratoire qui ont le grand avantage de ne rien coûter et se reproduire facilement.
Dieu est prêt à pardonner à tous, sauf à ceux qui se parent de son autorité, parlent en son nom ou jugent à sa place, surtout si c’est dans le dessin de faire avancer leurs affaires
Contrairement à ce qu’un vain peuple pense, ce sont dans l’au-delà les bons qui sont punis et les méchants qui sont récompensés. Dieu a bien jadis professé le contraire, mais il n’y a que les imbéciles qui ne changent pas d’avis. Voilà une solution que les docteurs de la foi n’ont pas envisagée, eux qui se débattent depuis toujours avec les problèmes insolubles posés à leur doctrine par l’existence du mal. Le mal existe pour que la plupart d’entre nous puissent jouir d’un bonheur éternel ! Rappelez-vous ce poème de Prévert intitulé « Les paris stupides » et qui comporte ce seul hémistiche : « Un certain Blaise Pascal … ».
Je serais toutefois disposé à accepter une forme atténuée du pari de Pascal qui serait la suivante :
S’il y a un au-delà, les croyants sauront un jour qu’ils ont eu raison et les incroyants qui se sont aventurés à nier la possibilité d’un au-delà sauront un jour qu’ils ont eu tort.
S’il n’y a pas d’au-delà, les incroyants ignoreront pour toujours qu’ils ont eu raison et les croyants ignoreront pour toujours qu’ils ont eu tort.
Cette inégalité de traitement serait le prix à payer par l’incroyant attaché avant tout à la vérité, la rançon de sa lucidité en quelque sorte. A moins que l’au-delà, enfin dévoilé, ne stupéfie tout autant le croyant que l’incroyant ! Ne nous privons pas du plaisir de cette surprise. Choisissez vous un Dieu selon votre cœur et croyez en lui tant qu’il vous plaira, mais ne vous en servez jamais pour justifier quoi que ce soit qui soit contraire à la morale commune sur laquelle l’accord de tous se fait aisément et qui est institutionnalisée par un certain nombre de textes fondamentaux. « Sur les raisons d’être vertueux, les hommes disputent, mais sur la vertu elle-même, non » (Alain). Qu’importent au reste les raisons de faire le bien pourvu qu’on le fasse ! Les lois morales ne sont pas plus contestées que les lois physiques car toutes viennent de la nature et d’elle seule. Il peut toutefois y avoir un conflit entre les diverses lois morales comme il peut y avoir un conflit entre les vents et les marées. Le progrès et la mort d’une espèce représentent les formes extrêmes du bien et du mal.
Les hommes sont naturellement bons, mais ils ont des passions dangereuses : amour de l’argent, du pouvoir, de la renommée, du sexe, du jeu, des drogues, haine et jalousie, orgueil aveugle et vanité. Ces passions ne peuvent jamais être assouvies chez un individu de tempérament passionné (celui qui aime l’argent ne s’arrête pas au premier million), et ceci pour une raison quasi mécanique. Considérons que le degré de satisfaction d’une passion va du déplaisir au plaisir en passant par zéro. Heureux celui dont le salaire mensuel est passé de 1000 à 1100 Euros, malheureux celui pour lequel il a été ramené de 10000 à 9000 ! Lorsque le degré de satisfaction d’un individu s’est établi durablement à une valeur positive ou négative, et sous réserve que les altérations subies ne soient pas irréversibles, l’étalonnage de son “ satisfactionomètre ” est automatiquement modifié, comme c’est le cas pour une quelconque addiction, de telle façon que son indication revienne à zéro. L’étendue de mesure de cet instrument est beaucoup plus grande au dessous de zéro qu’au dessus, comme nous l’expérimentons encore trop souvent. La défaite fait plus de mal que la victoire ne fait de bien comme l’a assuré ce grand philosophe méconnu qui s’appelle  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Andre_Agassi" André Agassi. Le zéro correspond au maximum de réactivité de l’individu, ce qu’à part quelques pervers tout un chacun inconsciemment recherche. Un deuil envoie l’aiguille vers la gauche mais l’action du régulateur de l’humeur la ramènera progressivement vers le zéro. Le bonheur ne règne pas lorsque l’aiguille reste toujours sur le zéro, il suffit de dormir ou de mourir pour cela, mais lorsqu’elle oscille faiblement autour de cette valeur. Sachant cela, le point est de rendre les passions suffisamment maniables par gymnastique du corps et de l’esprit.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Adolf_Hitler#Hitler_.C3.A9tait-il_socialiste_.3F" Hitler était un être acceptable pour ses proches et un bon maître pour son chien, mais il n’a pas suffisamment pratiqué cette gymnastique-là. Il faut dire qu’il était atteint au dernier degré d’une passion maladive fort répandue en Europe à l’époque : l’antisémitisme motivé par la jalousie qui s’exerce à l’encontre de ceux qui s’enrichissent grâce à leur travail et à leur talent.
On ne peut conclure cette courte réflexion sur les fondements de l’éthique sans relever dans la pratique quotidienne le caractère éminemment relatif de ses prescriptions : le résistant héroïque est aisément affublé du nom de terroriste… La jeune  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Kamikaze" kamikaze est une sainte pour ses frères opprimés, et une terroriste abominable pour ses oppresseurs…Un homicide volontaire vous vaut selon les circonstances décoration ou cour d’assises…Un magistrat qui évite d’avoir la main trop lourde à l’égard des plus faibles est aisément qualifié de juge rouge. Les homosexuels étaient naguère pourchassés et mis à mort. Aujourd’hui, même s’ils nous mettent encore souvent mal à l’aise, ils paradent fièrement dans les rues …L’onanisme jadis maudit est en passe d’être considéré par beaucoup de sexologues comme une activité éducative à part entière…Les choses s’arrangent comme elles le peuvent, par l’enchaînement des causes et des effets. Selon le point de vue de la Maréchale, avec lequel Diderot était à l’évidence d’accord, il n’y a ni bien ni mal en soi, mais seulement des causes ayant des conséquences que nous jugeons favorables ou défavorables. Bien que ni elle ni Diderot ne l’explicitent ainsi, il est à penser qu’ils avaient tous deux l’intuition que ces conséquences favorables ou défavorables concernaient non seulement l’individu mais aussi ses proches parents,ses amis, son espèce selon des cercles concentriques. Ce sont nos gènes qui sont affectés par les avantages et les inconvénients évoqués par la Maréchale. Le bien est pour nous ce qui les favorise et le mal ce qui leur nuit. L’altruisme dicté par notre instinct moral ne traduit pas autre chose que l’appétit de nos gènes à nous survivre, gènes que nous partageons avec les autres êtres vivants dans des proportions d’autant plus importantes que ces êtres appartiennent à des lignées plus proches de la notre. L’action de l’instinct moral qui nous engage envers une personne ou un groupe est d’autant plus intense que la proportion de gènes que nous partageons est plus importante. Deux êtres humains pris au hasard ont en commun 99,9 % de leurs gènes. Il ne faut pas voir dans cette expression d’appétit de survivre de nos gènes une quelconque résurgence des doctrines vitalistes mais une métaphore qui désigne l’effet mécanique de l’instinct moral et de la sélection naturelle. Le terme de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_G%C3%A8ne_%C3%A9go%C3%AFste" gène égoïste a été forgé pour décrire ce phénomène.
La femme qui commet un larcin pour nourrir ses enfants est coupable aux yeux de la loi, mais le seul châtiment qu’elle mérite est d’être aidée et secourue car, en toutes choses, il faut considérer la fin. Pour surmonter ces contradictions il faut reprendre les choses de plus haut et considérer l’intérêt du monde vivant dans son ensemble. Il ne faut pas se cacher cependant que certains choix sont délicats et que l’arbitraire de certaines décisions est difficile à éviter. On excuse le chasseur qui tue un animal pour se nourrir ou le paysan qui protège son champ avec son fusil. On admet la validité du principe : « c’est lui ou c’est moi ». On comprend moins bien celui qui tue par simple amusement, ou même celui qui relâche les poissons qu’il a pêchés après les avoir blessés avec son hameçon. La lionne qui chasse est une bonne mère pour ses lionceaux et un monstre assoiffé de sang pour les malheureux herbivores qui en sont les victimes. Seuls les progrès techniques en modifiant fondamentalement les conditions d’existence des êtres vivants permettront d’échapper à ces pièges que nous tend depuis toujours la morale. Il y a aujourd’hui dans toute société humaine des herbivores et des carnivores. Les ouvriers du bas de l’échelle, les paysans pauvres, les techniciens obscurs et les savants modestes comptent parmi les herbivores. Ceux qu’on appelle des « tueurs » en politique ou dans les affaires, les dictateurs et les escrocs sont des carnivores. Les carnivores vivent exclusivement d’accaparer sans contrepartie la personne, les biens, le travail ou les idées des herbivores d’où leur réussite, notamment financière. S’ils échangent quelquefois coups de dents et coups de griffes, les carnivores se dévorent rarement entre eux. Situés à l’extrémité de la chaîne alimentaire ils concentrent d’ailleurs dans leur chair tous les produits dangereux. L’homme public habile est un carnivore qui sait se déguiser en herbivore le temps d’une élection. Dans les positions intermédiaires, on rencontre surtout beaucoup d’omnivores. L’enseignement attribué au Christ voudrait faire de nous tous des herbivores, les seuls carnivores demeurant dans ce cas Dieu, le Prince, et ceux qui les servent.

6. RAISONS D’ETRE DES RELIGIONS

Crudeli. – Ainsi, vous êtes persuadée que la religion a plus d’avantages que d’inconvénients ; et c’est pour cela que vous l’appelez un bien ?
La Maréchale. – Oui.
Crudeli. – Pour moi, je ne doute point que votre intendant ne vous vole un peu moins la veille de Pâques que le lendemain des fêtes, et que de temps en temps la religion n’empêche nombre de petits maux et ne produise nombre de petits biens.
La Maréchale. – Petit à petit, cela fait somme.
Crudeli. – Mais croyez-vous que les terribles ravages qu’elle a causés dans les temps passés, et qu’elle causera dans les temps à venir, soient suffisamment compensés par ces guenilleux avantages-là ? Songez qu’elle a créé et qu’elle perpétue la plus violente antipathie entre les nations. Il n’y a pas un musulman qui n’imaginât faire une action agréable à Dieu et au saint Prophète, en exterminant tous les chrétiens, qui, de leur côté, ne sont guère plus tolérants. Songez qu’elle a créé et qu’elle perpétue, dans la même contrée, des divisions qui se sont rarement éteintes sans effusion de sang. Notre histoire ne nous en offre que de trop récents et de trop funestes exemples. Songez qu’elle a créé et qu’elle perpétue, dans la société entre les citoyens, et dans la famille entre les proches, les haines les plus fortes et les plus constantes. Le Christ a dit qu’il était venu pour séparer l’époux de la femme, la mère de ses enfants, le frère de la sœur, l’ami de l’ami ; et sa prédiction ne s’est que trop fidèlement accomplie.
La Maréchale. – Voilà bien les abus ; mais ce n’est pas la chose.
Crudeli. – C’est la chose, si les abus en sont inséparables.

La Maréchale et le philosophe viennent d’exprimer leurs points de vue respectifs sur les avantages et les inconvénients des religions. Pour la Maréchale, elles sont garantes de la moralité publique et produisent nombre de petits biens qui à la fin font somme. Pour le philosophe elles entraînent à cause de leurs conflits des drames effroyables, entre les nations comme entre les individus. Le croyant se sent agressé par une croyance différente de la sienne, ou par l’incroyance, et réagit d’autant plus violemment qu’il n’est pas vraiment en mesure de justifier son parti pris. Quand il a fini d’épuiser ses mauvaises raisons, il en vient facilement à la colère, ayant le sentiment qu’on l’a offensé en refusant d’adhérer à ce qu’il a de plus sacré. Ces querelles sont du même ordre que les querelles politiques : c’est intuition contre intuition, préjugé contre préjugé. Cependant, la Maréchale et le philosophe ne se sont pas interrogés sur  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sociologie_des_religions" l’origine et les raisons d’être des religions. Essayons de réparer cet oubli, sachant que l’inventaire qui va suivre peut être complété à l’initiative de chacun.

Raisons pratiques

Qu’est-ce qui peut bien expliquer la fortune de l’idée religieuse, que l’on dit présente en tous pays et à toutes les époques ? La réponse usuelle est que l’homme est un animal religieux. Il est vrai que l’homme a tout adoré, le soleil, la lune, la vache, le taureau et jusqu’à l’escargot. Comment ne pas adorer un soleil qui vous réchauffe de ses rayons quand vous vous réveillez frigorifié ? Comment ne pas être reconnaissant à la lune de veiller maternellement sur votre sommeil et de faire office de lampe de chevet ou de fanal vous permettant de vous déplacer la nuit avec discrétion ? Encore aujourd’hui, si vous vous amusez à comparer les prévisions de différents horoscopes avec ce qui advient véritablement, vous en conclurez que de telles prévisions sont invendables puis, renseignements pris, que la crédulité n’a pas de limites. L’homme est ainsi fait qu’une affirmation douteuse est plus facile à lui vendre qu’une bonne question. Il est tellement friand d’explications qu’un mythe improbable sera toujours mieux accepté qu’un aveu d’ignorance. On peut en conclure que son ennemi le plus redoutable, c’est l’indécision. Quand on hésite entre l’affrontement et la fuite un moment d’hésitation peut en effet être fatal, d’où les présages et les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Augure" augures chargés de les interpréter. Chez les Anciens les augures utilisaient souvent le vol des oiseaux pour effectuer leurs prédictions, sans doute parce qu’un oiseau qui s’envole avertit le chasseur de l’approche d’un danger et, sans doute aussi, parce qu’ils ont la vue perçante, qu’ils annoncent par leur comportement le temps qu’il fera et qu’ils sont capables de parcourir de longues distances sans s’égarer. Prétendre lire l’avenir dans leurs entrailles ou dans le marc de café montre à quel point cet avenir est obscur et incertain. Les augures s’abritaient derrière le rite divinatoire comme les magistrats s’abritent derrière les jurés. Aucun augure n’ayant le privilège de se tromper constamment leurs rares succès ont été utilisés avec enthousiasme par la cohorte des esprits avides d’irrationnel. De la même manière aucun croyant priant pour être délivré de sa maladie n’est à l’abri d’une guérison naturelle. Dans les temps anciens deux augures qui se rencontraient étaient obligés dit-on de se cacher pour rire à leur aise. Et quand deux cardinaux aujourd’hui se rencontrent ? Des personnes aussi intelligentes peuvent-elles être imperméables au doute, même si elles n’ont aucun doute sur la grandeur de leur fonction ? Ce ne serait pas leur faire injure que de supposer qu’ils sont comme vous et moi à la recherche de la vérité. Les astrologues, les gourous fondateurs de sectes, les hommes d’église couvrant sciemment des supercheries, les publicitaires sans scrupules, les organisateurs de jeux de hasard, les escrocs et les démagogues exploitent sans vergogne le filon jamais épuisé de la crédulité humaine. Celui qui se voit déjà riche à millions achète un billet de loterie. Il y a des religions parce que la crédulité et le désir d’échapper à la dure réalité créent un marché pour les idées religieuses. On peut ajouter qu’il est commode d’invoquer des superstitions à propos de certaines décisions, que cela évite d’indiquer ses véritables motivations et même de les chercher. Il est plus facile de reprocher au candidat à tel ou tel poste un thème astral défavorable que de lui avouer que sa tête ne vous revient pas !
Pour essayer d’aller plus loin, il faut observer tout d’abord que les hommes occupent dans la nature un domaine restreint où s’exercent leurs activités quotidiennes, où le comportement immédiat de ce qui les entoure est dans une large mesure explicable et prévisible. Aux frontières de ce domaine se tiennent trois types de personnages :
Les hommes de science qui travaillent à agrandir le domaine
Les philosophes qui, regardant par-dessus l’épaule des savants, font l’inventaire des parcelles récemment conquises, essaient d’en extraire une sagesse utile pour la compréhension du monde, la conduite de la vie ou l’organisation de la société et tentent de deviner ce qui peut se situer encore au-delà. N’ayant pas comme les savants « le nez dans le guidon », ils sont éventuellement mieux à même de tirer parti de ces nouveaux territoires. Epris de certitudes les savants ne voient pas toujours l’intérêt de s’aventurer dans des domaines controversés mais, quand ils consentent à se distraire de leur tâche immédiate, ils font souvent d’excellents philosophes.
Les hommes de religion qui se font les propagateurs de diverses traditions mythiques décrivant ce qui est censé exister au-delà de la frontière. Ce sont eux qui déroulent devant leurs fidèles des toiles sur lesquelles ils ont peint les paysages lointains et embrumés imaginés par leurs traditions. Protégés de l’angoisse de l’inconnu par ces rideaux aux couleurs apaisantes (les enfers sont cachés opportunément aujourd’hui par un pli du rideau), les fidèles peuvent vaquer tranquillement à leurs occupations.
Les religions auraient donc d’abord un intérêt utilitaire en dissuadant les hommes de perdre leur temps à ratiociner sur ce qui se situe en dehors de leur domaine normal d’activité et en les invitant à se concentrer ce sur quoi ils peuvent effectivement agir. Puisque le fin mot de toutes choses doit leur échapper de toute façon, il vaut mieux qu’ils entretiennent l’illusion de savoir plutôt que de se disputer à propos d’une vérité inaccessible. Les religions les aideraient également à faire preuve d’audace en leur fournissant une sorte d’assurance tous risques sur l’éternité. Promettre la vie éternelle, c’est encourager les jeunes hommes à aller au combat sans crainte. Le truc a déjà beaucoup servi et peut encore servir. Les religions seraient aussi un refuge pour les individus qui se sentent mal à l’aise dans un monde gouverné par la science et la technologie.

« Est-il en notre temps
Rien de plus odieux
De plus désespérant
Que de n’pas croire en Dieu »
(Georges Brassens, Le Mécréant)

Dans les situations désespérées elles offriraient le refuge de l’imaginaire, d’où le réveil de la foi dans ces circonstances. Entre les pattes du lion la gazelle doit recommander son âme au dieu des gazelles. Croire qu’il est encore possible de faire quelque chose lorsque tout est perdu permet d’alléger quelque peu une angoisse bien compréhensible. C’est par le même réflexe qu’on détourne le regard d’un spectacle insupportable. L’homme emprisonné dans sa condition mortelle comme une guêpe dans un bocal est prêt à suivre quiconque se flatte de connaître la sortie. Il est possible que la croyance en l’au-delà soit pour certains la seule façon de rendre tolérable la perspective de leur inéluctable anéantissement. C’est le remède empirique, trouvé par l’homme pour calmer son angoisse. C’est le bandeau placé sur les yeux du condamné pour qu’il ne puisse voir en face le visage de la mort. C’est une couche de logiciel ajoutée dans son cerveau pour masquer les réalités les plus désagréables. C’est le territoire de l’esprit humain où les consciences se réfugient lorsque l’existence devient insupportable, lorsque le déni de réalité s’impose comme s’impose l’anesthésie durant une opération exagérément douloureuse. Quand il ne parvient plus à accepter les informations extérieures, le cortex se résout à fonctionner en circuit fermé, se soustrayant ainsi à la trop pénible réalité. A propos des croyants, Alain risquait cette comparaison dont je lui laisse la paternité : « J’y vois cette différence avec les fous à proprement parler, c’est que les fous ne veulent pas y aller voir, et règlent dans leur pensée les questions de fait, au lieu que les croyants ne peuvent pas y aller voir, vivant sur des faits qui ne sont point des faits ». Les amours contrariées ne suscitent-elles pas spontanément le désir d’une éternité compensatoire ? Une religion consiste par essence à prendre ses désirs pour des réalités et permet de croire dans les situations les plus éprouvantes qu’à la fin des fins Dieu viendra botter les fesses de tous les salopards qui nous oppriment. Se considérer comme n’étant plus comporte d’ailleurs une sorte de contradiction interne qui met mal à l’aise et qu’il faut surmonter d’une manière ou d’une autre pour échapper au désespoir et à une folie qui peut devenir contagieuse. En d’autres termes les hommes épousent une croyance religieuse non pas parce qu’elle est vraie, mais parce qu’elle leur est utile. Compte tenu de la précarité de leur situation, comment pourrait-on leur en vouloir ? Un autre moyen de se libérer de l’angoisse de la mort est la philosophie qui semble réservée à ceux dont l’esprit est suffisamment fort et libre. J’aime bien cette image de Socrate faisant retraite avec l’armée athénienne après un engagement malheureux et réussissant à tenir en respect ses poursuivants par son seul regard.
Les religions fourniraient par ailleurs aux hommes un horizon commun et des valeurs communes contribuant ainsi à la cohésion sociale. La religion est d’après l’étymologie ce qui relie les hommes entre eux, et pour les relier, il faut d’abord les rallier. D’où la nécessité, pour des raisons pratiques, d’appliquer l’adage à chaque région sa religion “ cujus regio, ejus religio ”. Le bon sens ne trouve pas son compte dans cette régionalisation de la vérité. La paix non plus. C’est une forme de sagesse qu’il ne faut pas trop mépriser que de se réfugier dans le rêve lorsque la vie devient trop dure. Certains vont jusqu’à considérer que les religions sont des fictions commodes destinées à faire en sorte que le bon peuple se tienne tranquille, c’est le fameux « opium du peuple », drogue qui l’euphorise et l’aide à supporter ses malheurs. De ce point de vue les religions monothéistes seraient plutôt des drogues dures tandis que les religions polythéistes comme les religions antiques ou les religions orientales seraient plutôt des drogues douces. Dans tous les cas le pouvoir politique protège la religion qui renvoie l’ascenseur en rassurant le peuple sur ses fins dernières et en prêchant la soumission. Aujourd’hui on vous dore la pilule. Demain, on vous rasera gratis ! Tous racontent au peuple de belles histoires comme on en raconte aux enfants pour qu’ils se tiennent tranquilles ou pour qu’ils s’endorment. Je soupçonne que beaucoup de paroissiens sont modérément convaincus de ce qui se prêche dans les églises mais jugent que cela contribue à maintenir l’ordre social dont ils profitent. L’homme politique a besoin de l’homme d’église pour veiller au respect de l’éthique nécessaire au succès de la communauté alors que lui-même s’en exonère pour écarter des rivaux potentiels. Il attend également de l’homme d’église qu’il contienne autant que faire se peut les désordres de la vie privée qui pourraient nuire à l’intérêt général. Politiciens et religieux ont en commun la nécessité de convaincre ce qui les oblige à dissimuler leurs doutes, s’ils en ont. Ils sont de fait complices du même mensonge, et comme ce mensonge est animé à leurs yeux des meilleures intentions, ces deux corporations le ressentent comme un pieux mensonge. La guerre et la religion sont la poursuite de la politique par d’autres moyens visant pour l’une à gouverner les corps et pour l’autre à gouverner les esprits. Les gendarmes vont toujours par deux.

« Vous recevrez des coups de pied au cul
Vous ferez des heures supplémentaires
Qui vous seront comptées dans le royaume de mon Père »
(Jacques Prévert, Paroles)

Dieu, être essentiellement libre, est-il tenu de tenir les promesses des autres ? Les Eglises prêchent le rassemblement des consciences et des volontés, obsession de tous les hommes publics. C’est, en temps de paix, une sorte de préparation à la mobilisation générale. Ce rôle ne peut rester vacant. Les Eglises n’ont aucune légitimité historique ou scientifique, mais elles ont une légitimité pratique. Un totem signifie : « ce mat dressé est l’image de notre tribu, nos ancêtres se sont établi ici, et nous entendons nous y maintenir, et nous y multiplier». Imaginez l’embarras d’un même dieu sollicité par des clans opposés. Or ceci est devenu habituel depuis que le monothéisme judéo-christiano-musulman s’est répandu sur une bonne partie du monde. Un dieu est aussi l’emblème et le ciment du pool génétique constitué par ses fidèles, le masque et le symbole de l’égoïsme d’un clan, de sa volonté d’hégémonie. Il définit une sorte de sous-espèce à l’intérieur de laquelle les mariages sont autorisés et les prescriptions éthiques intégralement applicables. Toute tentative de s’approprier les femelles d’une autre sous-espèce engendre des conflits sanglants. Les sous-espèces vaincues et asservies au cours d’un conflit doivent adopter le dieu de leur vainqueur pour participer à ce pool. Est  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sacr%C3%A9" sacré, dans toutes les cultures, ce qui concourre à assurer la pérennité de ce pool génétique ainsi que les symboles qui y sont attachés. Si le vainqueur adopte le dieu des vaincus comme cela s’est vu quelquefois on dit fort bien qu’il a été vaincu par sa conquête. Les femmes qui s’accouplent avec les vainqueurs donnent une descendance, métissée il est vrai, à leurs compagnons morts puisqu’elles faisaient partie du même pool génétique qu’eux-mêmes. Les mégalithes constituent une autre manifestation du même phénomène. Sous un prétexte religieux visant sans doute à justifier aux yeux de leurs épouses des efforts sans utilité immédiate, ils étaient une démonstration de force destinée à impressionner les amis comme les ennemis et à évacuer un trop-plein d’énergie qui n’aurait pas trouvé à s’employer ailleurs sans dommages. Clochers des églises générateurs de « l’esprit de clocher » et tours de bureaux des grandes sociétés, orgueil de leurs dirigeants, remplissent la même fonction. Dieu est d’abord ce qui justifie « l’égoïsme sacré ». Aussi l’agite-t-on comme un étendard. Intégrisme religieux et nationalisme marchent main dans la main. Les religions servent ainsi de cache-sexe à l’égoïsme le plus affirmé. Un égoïsme partagé par quarante millions d’individus, est-ce encore de l’égoïsme,  s’interrogeait mon professeur de philosophie à une époque où le souvenir des guerres était encore bien présent. Je crois qu’on peut répondre aujourd’hui par l’affirmative et que, au temps de la bombe atomique, l’aveuglement nationaliste sera encore plus durement sanctionné. Avoir la foi et l’espérance, c’est prendre en considération, au delà de sa propre existence, le sort des générations futures. L’écologie qui a les mêmes préoccupations est de ce point de vue la forme moderne et scientifique des religions. Elle constitue donc une réelle nouveauté. La meilleure preuve qu’il s’agit bien d’une religion c’est qu’elle est encore trop souvent dogmatique et sectaire et qu’elle engendre bon nombre d’intégristes ! Les esprits sectaires ne cherchent pas la vérité, ils cherchent seulement à imposer leur croyance aux autres par tous les moyens. L’espèce humaine a été sélectionnée par la vie en petites hordes, d’où son inadaptation actuelle. Un chef s’imposait car il était plus fort ou plus résistant que les autres. Il restait capable de penser quand la fatigue et l’adversité avaient affaibli les capacités de réaction de ses compagnons. Quand ces hordes se sont rassemblées du fait de la sédentarisation, le lien qui unissait chaque individu à un chef naturel est devenu vacant. Je fais l’hypothèse que ce lien s’est recyclé sous forme d’attachement à une divinité.
Les hommes d’église se présentent comme des pasteurs, des bergers. C’est dire en quelle estime ils tiennent le troupeau de leurs fidèles, et on sait bien quel est le sort final réservé aux moutons : au mieux la tonte, au pis l’abattoir ! Les hommes d’église ne sont pas d’ailleurs les bergers qu’ils prétendent être mais plutôt les chiens de berger du Prince qui conduit effectivement le troupeau. Les rois-très-chrétiens ont eu leurs prêtres comme d’autres après eux auront leurs commissaires politiques. Quand le premier des citoyens d’un grand pays prête serment sur un recueil de contes et légendes, ce n’est pas l’homme d’état qui est sacralisé, c’est le Livre ! Si la religion a été sans nul doute instrumentalisée par les princes et à ce titre a bénéficié de leur appui, ceci n’explique pas complètement sa création ni sa réussite.
Il faut également reconnaître que les rites auxquels sont assujettis les fidèles présentent des vertus que l’on peut dire paramédicales ou thérapeutiques. Ce n’est pas une allure naturelle que de tendre le poing lorsqu’on est à genoux, ni de crier lorsqu’on a les mains jointes. L’immobilité forcée et les chants liturgiques apaisent les passions comme une berceuse aide le petit enfant à s’endormir. Des ablutions rituelles peuvent aider à se purifier aussi mentalement. A un aumônier militaire qui, profitant de circonstances particulières, essayait de ranimer la flamme de ma croyance défunte, je fis la réflexion que ses paroles faisaient une bien jolie musique. Sur quoi, citant les propos d’un Père de l’Eglise dont j’ai oublié le nom, il me répondit qu’il ne fallait pas avoir peur de la musique… Des gosiers incertains, se calant les uns sur les autres et se synchronisant, produisent un beau chant et font prendre conscience aux fidèles de l’intérêt d’appartenir à une même communauté. Enfermés dans cette communauté comme dans un cocon douillet les fidèles s’abritent des idéologies concurrentes, comme d’autres ferment portes et fenêtres aux courants d’air.
J’envie les croyants qui ont, comme la Maréchale, le privilège inouï de pouvoir s’entretenir en particulier et sans rendez-vous avec le Grand Patron de l’Univers. Il doit être particulièrement gratifiant de pouvoir lui raconter toutes ses petites affaires, toutes ses petites misères, toutes ses petites joies, toutes ses petites ambitions, de trouver chez lui une oreille attentive et d’obtenir son intervention. Joie ! Joie ! Pleurs de joie ! disait Blaise Pascal. Le même se disait effrayé par le silence des espaces infinis, faisant ainsi bon marché des propos du sage antique selon lesquels une pinte d’eau suffit à se noyer. Pour un peu les croyants en arriveraient à oublier qu’ils parlent à un juge qui connaît mieux qu’eux-mêmes tous les moments de leur existence, un juge qui est capable de faire pour chacun d’eux, après consultation des autorités ecclésiastiques, la grande addition de leurs bonnes et mauvaises actions et qu’il les obligera ensuite à la régler, aussi douloureuse soit-elle. Ces croyants se font-ils cependant une juste idée de la place véritable qu’ils occupent dans le cosmos ? Ne craignent-ils pas que ce dialogue avec la puissance suprême ne soit qu’un monologue déguisé, une sorte d’autoanalyse, peut-être un traitement contre la déprime ? Peu importe au fond me direz-vous si cet exercice les aide à vivre. C’est toujours beaucoup moins cher qu’un passage sur le divan. Prier est également une façon de garder bonne conscience pour un coût minimum. Prier pour que la pluie tombe est moins fatigant que de creuser un puits, un canal d’irrigation ou un  HYPERLINK "http://www.acamino.com/topo_bisses_du_valais.htm" bisse. Prier pour la paix est moins dangereux que de séparer des belligérants. La compassion est le degré zéro de l’aide, si elle ne se traduit pas en actes. Lorsqu’un président des Etats-Unis dit aux rescapés d’un cyclone : « Nous allons prier pour vous », ou lorsqu’un de ses prédécesseurs leur offre une Bible, c’est une façon assez inélégante de leur dire : « débrouillez-vous comme vous pouvez ». Avant de s’asseoir devant une table bien garnie les pieux convives demandent au Seigneur de « procurer du pain à ceux qui n’en ont pas ». La bonne conscience favorise la bonne digestion.
Quel est selon vous le moyen le plus efficace pour se prémunir contre les ravages des tsunamis : offrir sur la plage des sacrifices aux dieux de la mer et des enfers ou bien installer un système d’alerte veillant sur toutes les zones exposées à ce type de cataclysme ? Vaut-il mieux implorer la guérison des victimes d’une épidémie ou vacciner préventivement les populations, prier pour la paix ou tenter de s’entendre avec ses voisins ? Je crois en l’occurrence que celui qui se contente de prier en aura pour son argent. A la suite de fortes pluies un village mexicain était menacé par un glissement de terrain. Pris de panique les fidèles se réfugient dans l’église où, peu de temps après, une coulée de boue les engloutit tous. Espérons qu’ils n’ont pas eu le temps de douter de la bonté divine ce qui pourrait leur fermer les portes du paradis. L’ermite au cœur des montagnes ou du désert fuit ses contemporains et ne prie que pour lui-même. Si les prières peuvent être bénéfiques pour celui qui prie en lui permettant à peu de frais d’avoir la conscience tranquille, elles ne semblent pas l’être pour ceux pour lesquels on prie. Des expériences récentes ont montré que les prières sont sans aucun effet, positif ou négatif, sur les malades lorsque ceux-ci n’ont pas été tenus au courant des prières dites à leur intention – ce qui ne surprendra pas les mécréants et peut aussi s’interpréter comme un silence vexé de la divinité. Ce qui est plus inattendu, c’est que ces prières ont un impact négatif lorsque ces malades ont été informés du fait qu’on priait pour eux ! L’explication fournie par les auteurs de l’expérience est que cette information aurait déclenché chez eux une anxiété pathogène ! Ils ne se croyaient pas malades au point qu’on soit obligé de dire des prières pour leur guérison.
En incitant les croyants à avoir beaucoup d’enfants, l’Eglise augmente le réservoir potentiel de ses fidèles car elle a observé qu’on passe plus fréquemment dans une lignée familiale de la croyance à l’incroyance que l’inverse. En France, selon certaines statistiques, 50% seulement des enfants d’une famille catholique conservent activement cette croyance. Pour que cette croyance ne dépérisse pas très rapidement il est donc impératif que le croyant soit plus prolifique que l’incroyant. Des préoccupations boutiquières  ne seraient donc pas étrangères à cette incitation à croître et se multiplier dont l’effet sur la fécondité des bien-pensants explique selon moi la dérive conservatrice de l’opinion française ! Curieusement le monde ecclésiastique ne s’applique pas à lui-même cette prescription. N’euthanasie-t-il pas d’une certaine manière tous les rejetons qu’il se refuse à engendrer ? Qu’il s’agisse de chaste célibat, de contraception, ou d’avortement, le résultat démographique est pourtant toujours le même.
La sélection naturelle a jusqu’à une époque récente éliminé les sociétés, peu nombreuses au demeurant, qui n’ont pas eu recours à l’artifice de la religion. Des spécialistes ont relevé que la durée d’une civilisation dépourvue de religion ne dépassait pas deux ou trois générations. Quel est donc l’avantage apporté par les religions du point de vue de la survie des groupements humains ? C’est selon moi que les droits de la famille, du groupe, de la nation et, de façon ultime, les droits de l’espèce parlent par la bouche du prêtre, interprète autoproclamé de la volonté divine, mais d’abord interprète efficace des intérêts collectifs. « Qui donc dit que le riche ne peut entrer au royaume de Dieu ? C’est le petit prêtre. Et que les humbles ont la meilleure part de l’esprit ? C’est encore le petit prêtre » (Alain). Les religions sont l’expression archaïque du sens moral qui assure la cohésion et la protection des groupes humains. Les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9calogue_(Bible)" Tables de la Loi sont des consignes données par son dieu au peuple juif afin qu’il puisse survivre. On peut en dire autant du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Coran" Coran ou des paroles du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Bouddha" Bouddha ou de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Confucius" Confucius pour leurs peuples respectifs, d’où le caractère sacré de ces différents textes ; sacré comme la vie elle-même des groupes qu’elles protègent. En prescrivant toutes sortes d’interdictions voire des mutilations, les religions font barrage à une omniprésence du sexe qui, depuis que l’espèce humaine a établi sa suprématie, va bien au delà des strictes nécessités de la reproduction. Il existe bien sûr depuis quelques temps des méthodes moins contraignantes pour s’en accommoder. Ajoutons que les religions sont souvent les seules à s’intéresser aux plus humbles, à chercher à les éduquer, même s’il s’agit plus d’un endoctrinement que d’une véritable éducation. Pendant longtemps elles ont constitué la seule forme disponible de sécurité sociale et de service hospitalier. Aujourd’hui encore elles constituent un réseau efficace d’influence et d’entraide.
La religion est également une forme de politesse. Par son adhésion à une doctrine bien identifiée, le croyant affiche le code moral auquel il se réfère et se rend ainsi plus prévisible, moins inquiétant que l’incroyant qui n’a pas de critères reconnus, qui ne peut dire ce qu’il pense de façon simple et concise, ou qui n’ose le faire de peur de choquer. Personne n’affiche volontiers son incroyance, comme s’il s’agissait d’une maladie honteuse, tant est forte la pression sociale. Si l’incroyant laisse transparaître ses véritables sentiments, c’est généralement sous forme de plaisanterie, car l’humour, lubrifiant indispensable à la mécanique sociale, facilite l’expression des opinions dérangeantes. C’est par ailleurs une constante que d’attribuer une motivation personnelle, égoïste, voire immorale a ce qui n’est qu’une tentative d’exprimer la vérité telle qu’elle est ressentie dés que cette vérité ne sort pas du moule habituel. Les américains sont indifférents à la religion que vous avez choisie, pourvu que vous en ayez une. A leurs yeux, votre religion vous confère un label de qualité, comme votre compte en banque ou votre statut socioprofessionnel. Vous devenez grâce à elle un interlocuteur respecté, au moins selon les apparences, car la réalité est souvent bien différente. Il ne faut pas se fier aux discours convenus dont la préoccupation est avant tout commerciale. Ceux qui sont allés aux Etats-Unis vêtus de leur seule candeur pour y faire des affaires se sont vus le plus souvent roulés dans la farine. Il ne faut pas oublier que les Etats-Unis sont aussi la patrie du gangstérisme et des coups tordus. Les mots Franc, français, franchise, ont la même racine. Franc veut aussi dire homme libre. Ainsi le français conforme à la tradition se sent suffisamment fort pour parler librement, ce qui peut être un handicap dans une vie sociale conflictuelle.
Les incroyants seront toujours en position d’infériorité vis-à-vis des croyants car ils n’ont rien à vendre si ce n’est peut-être l’honneur de l’esprit. De plus, pacifiques sinon pacifistes dans l’âme, ils se refusent à utiliser tout moyen de coercition ou même de propagande. Comme Diderot le faisait déjà remarquer, ils répugnent à tout prosélytisme, confiants, peut-être trop, dans le seul pouvoir de la raison. Or, toutes les enquêtes montrent qu’un bon produit sans publicité se vend moins bien qu’un produit médiocre qui fait l’objet d’un battage intensif. L’Eglise n’est plus en mesure de faire taire les sceptiques. Faisant confiance à sa puissance de feu médiatique, elle choisit de les ignorer. Il faut vraiment que son dossier soit très mauvais pour que 95% des français ne soient toujours pas convaincus après plus d’un millénaire de pilonnage propagandiste. Sans ce pilonnage le pourcentage serait évidemment proche de zéro. Les incroyants savent qu’ils ne peuvent compter que sur eux-mêmes. Les croyants sont persuadés que Dieu, fidèle spectateur et soutien, est de leur côté. Les incroyants sont dans une logique de recherche de la vérité et savent combien celle-ci est incertaine. Les croyants, persuadés de l’avoir trouvée, sont dans une logique de recherche de la puissance. Ils ne sauraient douter d’eux-mêmes sans se renier. “ Croyez et vous gagnerez davantage de dollars ”. Tel est, à peine caricaturé, le message des télé-évangélistes américains. Le pis est que ce message est exact comme ces révérends en sont souvent la vivante illustration. Débarrassé des préoccupations superflues, l’esprit serein, le croyant peut se concentrer sur la tâche qui lui est impartie et l’habitude qu’il a de s’incliner devant les puissances suprêmes rassure les gens en place. Par sa déférence envers la divinité il affiche son intention d’être toujours et quoi qu’il arrive du côté du manche. Faire acte d’allégeance et avaler si nécessaire quelques couleuvres n’est jamais pour lui un problème. Lécher la main qui tient la carotte ou le bâton est pour lui comme une seconde nature. Aussi la carrière des jeunes gens bien pensants est-elle toujours facilitée, car ceux qui décident des carrières se reconnaissent en eux. Le choix de certains dirigeants ne s’explique pas si l’on ignore qu’ils vont à la messe tous les dimanches. Ils viennent s’y entendre dire qu’ils sont les plus beaux et les meilleurs, qu’ils sont « le sel de la terre », qu’ils sont « à l’image de Dieu » et que par conséquent leur prospérité présente ou espérée n’est pas usurpée. Ils viennent y apprendre l’art de raconter de belles histoires, celui d’afficher une assurance tranquille teintée d’autosatisfaction et celui de faire des promesses non gagées, talents indispensables aux meneurs d’hommes et par lesquels ils se reconnaissent entre eux aussi sûrement que le font les francs-maçons par d’autres signes. Ces leaders naturels savent parer de nobles raisons les motivations les plus égoïstes, jouer des coudes pour se trouver au premier rang quand tout va bien et s’effacer quand ça va mal, annoncer les bonnes nouvelles et laisser à leurs adjoints le soin d’annoncer les mauvaises. Ils savent prendre un sac de blé sur la 99ème marche et le poser sur la centième en se flattant de l’avoir hissé plus haut que tous les autres. Ils se gardent bien de prendre le moindre risque sachant qu’on ne tiendra guère compte de leurs réussites mais qu’on ne manquera pas de leur reprocher leurs échecs. L’accroissement de leur pouvoir est leur motivation la plus essentielle. En conséquence de quoi ils ne manquent jamais de voler au secours de la victoire et ratent rarement une occasion de se payer sur la bête.
Si t’es l’plus fort
Vas-y Totor
Si t’as l’dessous
Plie le genou

Il ne leur est pas naturel de faire passer leur mission avant leur amour-propre ou leur carrière, aussi leur est-il difficile de s’attirer la confiance et l’adhésion de leurs subordonnés. S’intéressant à la chose publique ils sauront amorcer la pompe de la crédulité en proclamant solennellement des vérités d’évidence et en enfonçant des portes ouvertes. Ils assumeront la paternité des mesures populaires et feront porter par d’autres la responsabilité des décisions impopulaires ou compromettantes. Ils communiqueront toujours verbalement leurs instructions les plus scélérates et compromettront ainsi leurs malheureux subordonnés. Ils feront semblant de ne pas entendre les questions gênantes, ou bien répondront à côté. Ils auront appris, même inconsciemment, à tromper. Dissimuler de mauvaises intentions sous de belles apparences est bien signe qu’on appartient à la classe dirigeante. « Les premiers seront les derniers » est l’exemple même d’une promesse électorale. « Je suis la vérité et la vie » en est un autre exemple. La religion est l’école du pieux mensonge et quelquefois du mensonge tout court. Pendant longtemps l’Eglise n’a pas eu pour objectif prioritaire de manifester par l’exemple son message généreux, mais plutôt celui d’être un auxiliaire efficace du pouvoir politique. Elle en attendait en retour honneurs, richesses et influence. C’est encore un peu vrai et ceux qui, au sein de l’Eglise, l’oublient sont marginalisés. Observez que la proportion de pratiquants réguliers est de 5% chez les français et se réduit même à 1% chez les plus jeunes alors qu’elle atteint 71 % chez les présidents de leur cinquième république ! A l’élection présidentielle de 2007, trois des quatre principaux candidats se sont réclamé ouvertement de la religion catholique et la quatrième y a baigné pendant toute son enfance. Aucune activité politique, sportive ou culturelle ne peut se flatter de rassembler tous les dimanches trois ou quatre millions de français et de leur donner le sentiment d’appartenir à une même communauté. L’église catholique demeure bien le premier lobby de France, et elle n’est pas un cas isolé. Il est indispensable pour un candidat américain au poste suprême d’afficher de solides convictions religieuses. Le choix d’une religion traduit le désir d’être avec les plus forts ou les plus riches, et, pour une religion, bien plus que de soutenir une hypothétique vérité, l’important est de se retrouver du côté des vainqueurs. Les dieux des vaincus perdent leurs fidèles. Sans réussite matérielle, aux Etats-Unis, vous n’êtes rien. Celui qui sait que les représentants de la bonne société, y compris son propre patron, assistent aux offices se sent obligé de s’y faire voir également. C’est probablement une des causes principales de la persistante religiosité américaine.
La religion ne serait ainsi que l’idéologie professée par le mâle dominant. C’est l’habit que celui-ci revêt pour camoufler son appétit de puissance. Elle maintient la cohésion du groupe social dont chacun tire avantage, ce qui explique qu’elle soit tolérée. Le mâle dominant occupe jusqu’à l’obsession l’esprit du troupeau, et cet état de chose perdure après sa mort. Sa mémoire est donc évoquée chaque fois que le troupeau doit faire un choix. C’est devenu un dieu qui règne sur les vivants et les morts. Que le pouvoir échoie à un de ses fils et ce dernier sera le fils d’un dieu et dieu lui-même. C’est l’acte de naissance de la monarchie de droit divin. Le retour en force des religions auquel on assiste aujourd’hui a un rapport certain avec les sentiments personnels qu’affichaient le président Bush et ses émules. Ces sentiments sont d’ailleurs tout à fait à l’opposé de ceux de la communauté scientifique américaine, plus que circonspecte à l’égard de toutes les croyances mais qui doit dissimuler ses sentiments pour continuer à bénéficier de crédits de recherche. Ils ne sont pas davantage conformes aux intentions des pères fondateurs de la nation américaine inspirés avant tout par l’esprit des « Lumières ». Chez de nombreux américains cohabitent un certain égoïsme, une violence latente, l’activisme religieux et un recours au droit systématique, lequel est nécessaire pour faire respecter des règles que la pression d’une compétition sociale féroce conduit à transgresser. Collectivement les Etats-Unis ne font pas preuve en effet d’un zèle particulier, ni en faveur de l’aide humanitaire mondialiste, ni en faveur de la promotion ou même du respect de règles internationales contraignantes. Ils ne font pas montre de plus de compréhension à l’égard de leurs minorités défavorisées. Ils préfèrent souvent les emprisonner plutôt que les éduquer. Il est assez symptomatique que la politique extérieure des Etats-Unis soit devenue égoïste et brutale du jour où elle s’est réclamée expressément d’une foi religieuse. Ce « renouveau spirituel » n’est en réalité que le triomphe d’un matérialisme des plus résolus. Beaucoup pensent que le nombre de sceptiques est plus élevé aux Etats-Unis que ne l’indiquent les sondages (29 %) parce que les personnes interrogées cèdent à la pression sociale et taisent leurs véritables sentiments. Si la domination s’exerce par la force physique, le mâle dominant est roi ou empereur. Si c’est par la force de la pensée et de l’expression, le mâle dominant est prêtre dans les sociétés traditionnelles. Dans certaines de ces sociétés les deux fonctions ont été exercées par le même homme. Que l’on songe aux pharaons, aux empereurs romains, ou à l’Inca. C’était possible parce que dans les cas cités le pouvoir n’était contesté ni de façon interne ni de façon externe. Les fonctions sont exercées aujourd’hui le plus souvent par des individus différents. En effet, l’éthique indispensable au bon fonctionnement de la société est enseignée par un prêtre qui est tenu de se conformer, au moins selon les apparences, à son propre enseignement, tandis que le chef politique est obligé souvent de déroger à cet enseignement, d’abord pour rester le chef, ensuite pour traiter avec les chefs des autres nations. N’étant pas directement concurrentes mais au contraire s’épaulant mutuellement ces deux dominations s’entendent comme larrons en foire. De fait la religion qui présente comme réelles des histoires inventées prépare le terrain au politique qui lui aussi est tenu de déguiser la réalité pour maintenir son emprise sur les esprits. Une religion ne peut prospérer qu’en servant le pouvoir politique en place.
Les dieux païens sont des mâles dominants dans leurs domaines respectifs. Le dieu des monothéistes est le mâle dominant absolu devant lequel chacun doit faire acte de soumission et adopter la posture correspondante. Il me souvient d’une époque où beaucoup de bons jeunes gens qu’on sentait impatients d’aller à la soupe avaient adopté, inconsciemment je l’espère, ce tic de feu le président  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Pompidou" Pompidou qui consistait à se passer la langue sur les lèvres avant de prononcer la moindre parole. L’esprit d’imitation et de soumission atteint parfois des sommets de ridicule ! A la cour du roi boiteux, tous les courtisans claudiquaient ! De leur côté les princes ont toujours veillé à ce que leurs sujets partagent leurs croyances. Epouser les idées du Chef, partager sa façon de voir les choses, c’est ce qu’on appelle dans l’armée faire preuve de discipline intellectuelle. C’est probablement ce phénomène qui est à l’origine du comportement de beaucoup d’allemands pendant la deuxième guerre mondiale. Pour faire pardonner cette complaisance, les plus indulgents diront à la suite de Pascal qu’il est plus facile de rendre juste ce qui est fort que de rendre fort ce qui est juste, réflexion essentiellement politique. C’est pour cette raison que la force ne peut indéfiniment opprimer le droit, comme l’Histoire l’enseigne. Un roi peut devenir saint mais un saint ne devient jamais roi. Ceci étant, il apparaît un brin excessif que, dans un état laïque, une faction représentant cinq pour cent de la population cherche à monopoliser les moyens d’information et de décision et entende régenter les pensées et les actions des quatre vingt quinze pour cent qui restent. S’ils caressent cet espoir c’est que leur assise sociale, leur cohésion et la confiance ou même l’impudence qui vont avec, leur permettent de parler haut et fort, alors que leurs opposants ont souvent un bœuf sur la langue. En chaire un prédicateur peut développer sans crainte son argumentation : personne ne se lèvera pour la contester. Il a pris l’habitude que les autres se taisent pendant qu’il parle, ce qui ne peut que le renforcer dans ses certitudes. Il ne se rend pas compte que ses discours assurés bénéficient de l’indulgence qu’on réserve ordinairement aux malades en phase terminale ou à ceux dont la tête est perdue…Le corbeau se croit aimé plus que tous les autres volatiles parce qu’aucun chasseur ne lui tire dessus, mais c’est en réalité parce qu’il est immangeable ! Les incroyants et les sceptiques ont le sentiment quant à eux de jouer en permanence sur le terrain de l’adversaire.

« Dans les poulaillers d’acajou
Les belles basses-cours à bijoux
On entend la conversation
D’la volaille qui fait l’opinion
Qui dit
On peut pas être gentil tout l’temps
On peut pas aimer tous les gens
Y’a une sélection, c’est normal
On lit pas tous le même journal
Mais comprenez-moi, etc.… »
( HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Alain_Souchon" Alain Souchon)

Il n’est ni surprenant ni illégitime que ceux qui se sont promis de suivre en toutes circonstances la voix de leur conscience se regroupent dans un club pour cultiver ces bonnes dispositions, mais il est regrettable qu’ils le fassent autour de mythes sujets à caution et que la réputation du club soit instrumentalisée par certains. Les « people » qui font étalage de leur foi de façon souvent incongrue font l’âne pour avoir du son ! L’incroyant n’est pas ordinairement sectaire. Le croyant l’est assez naturellement. L’explication tient à mon avis à ce que le croyant est bien en peine de justifier rationnellement sa croyance et que, faute d’arguments, il ne lui reste que la fâcherie ou la colère. Le croyant se sent offensé par l’incroyant aux yeux duquel il craint de passer pour un archaïsme un peu ridicule et il se sent incapable de lui prouver le contraire. Il serait grand temps que la mauvaise conscience change de camp.


Genèse des croyances

Quelles sont les prédispositions qui conduisent un individu à épouser une croyance religieuse ou à la rejeter ? Essentiellement la tradition familiale et le milieu socioprofessionnel. Il existe peu ou pas d’études au sujet des prédispositions psychologiques qui pourraient jouer un rôle. Il est tentant pour l’incroyant de penser que la croyance religieuse varie en raison inverse de la formation intellectuelle, particulièrement scientifique. C’est ce qui semble résulter d’études statistiques effectuées aux Etats-Unis. Les religions sont mieux acceptées me semble-t-il par les « forts en thème », esprits aptes à mémoriser et appliquer sans erreur des règles qu’il n’y a pas lieu d’examiner. L’incroyance sied mieux à ceux qui se sentent plus à l’aise dans l’exercice de la version où il s’agit de comprendre la pensée de l’autre, sans y adhérer nécessairement. On peut hasarder qu’un facteur favorable à la croyance religieuse serait un terrain mental meuble dans lequel les premières idées reçues s’enracinent facilement et profondément et qui refuserait ensuite toute nouveauté. Certains se disent croyants mais sont incapables d’expliciter ce à quoi ils croient effectivement. Le terrain mental de l’incroyant est plus imperméable, les idées toutes faites glissent sur lui comme l’eau sur les plumes d’un canard. L’incroyant tient avant tout à conserver sa liberté d’appréciation. Il ne se complait pas dans la peur et il n’a pas le culte du chef. Il n’a pas non plus le sentiment d’être irremplaçable. Il sait bien qu’il a très peu de chances de laisser une trace identifiable dans le mouvement brownien des effets et des causes, à peine une ride vite effacée à la surface de l’étang.
Une autre explication réside dans le phénomène d’empreinte. En inculquant leurs croyances à des enfants dont chacun sait qu’ils croient au Père Noël sans aucune espèce de difficulté, qu’ils attribuent spontanément des qualités mentales aux êtres et aux objets les plus divers et qu’ils adorent les dessins animés où les lois de la physique ordinaire sont ignorées ou bafouées, les catéchistes obtiennent que ces croyances deviennent une partie intégrante et fondatrice de leurs structures mentales à l’âge où celles-ci se constituent. Ainsi les jeunes oies qui n’avaient jamais connu que lui suivaient-elles dans tous ses déplacements le bon professeur  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Konrad_Lorenz" Lorentz qu’elles prenaient pour leur mère ! Le but est d’imprimer dans les jeunes cervelles ce « système d’opinions bizarres qui n’en impose qu’aux enfants ». Aussi absurde que soit ce système ses fondations ne seront pas remises en cause puisqu’elles sont entièrement déconnectées des réalités constatables. Comment voulez-vous prouver que les anges n’existent pas ? Comment voulez-vous prouver qu’une HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9i%C3%A8re_de_Russell"théière en porcelaine n’est pas en train d’orbiter autour du soleil s’interrogeait Bertrand Russel ; d’où la permission de nier sans preuve ce qui a été avancé sans preuve. Les religions sont une survivance de la pensée enfantine et magique selon laquelle il suffit d’imaginer pour que le fruit de l’imagination devienne réalité. Un très jeune garçon refusait de s’approcher d’un tableau qui ornait le salon de sa grand-mère. Ce tableau bucolique représentait une bergère gardant ses moutons près d’une mare. " De quoi as-tu peur" lui demandait-on. « J’ai peur du loup » « Tu vois bien qu’il n’y a pas de loup ». «  Si, il est derrière l’arbre ! » Le loup était d’autant plus redoutable qu’il était caché. Un sentiment d’angoisse a besoin d’une explication, même fausse. C’est ce qu’on constate aussi chez certains malades.
L’Eglise recommande à ses représentants d’être tout à tous affichant ainsi son intention de ratisser le plus large possible, sans être trop regardant ni sur le contenu ni sur la sincérité de la foi nouvellement acquise. Il me souvient encore de jeunes condisciples élevés dans des familles bourgeoises des beaux quartiers qui parlaient avec horreur et mépris des « communards » à la suite de conversations entendues sans doute à la table familiale. Ils regrettaient ouvertement que les américains dés la fin de la 2ème guerre mondiale n’aient pas pris le parti d’envahir la Russie pour en extirper le communisme alors qu’ils étaient seuls possesseurs de l’arme atomique ; Je serais surpris que beaucoup de ces jeunes gens aient changé d’opinion en vieillissant. Il est vrai que Churchill, ce qui devrait faire hurler d’horreur, partageait le même point de vue. J’ai eu la chance pour ma part de ne jamais entendre de tels propos. L’hostilité résolue de mes parents à l’égard du fascisme s’est toujours exprimée de façon mesurée et sans haine. L’esprit de tolérance vient avec la maturité. Implantez une idée dans une jeune cervelle malléable et les faits ou les idées qui la confirment viendront s’y agglutiner et enrichir la mémoire tandis que ceux qui l’infirment ne trouveront pas de support où s’accrocher et seront perdus. Quand un lien existe, la mémorisation est considérablement facilitée. Ecoutez cette comptine entendue jadis en cour de récréation et que je peux encore restituer soixante dix ans plus tard : « j’en ai marre, marabout, bout de ficelle, selle de cheval, cheval de course, course à pied, pied de cochon, cochon de ferme, ferme ta boite, boite à pêche, pêche à la ligne, ligne de fond, fond de culotte, culotte de zouave, zouave d’Afrique, fricassée, c’est assez ».Ce phénomène d’association est à l’origine de tous les préjugés. Sous sa forme extrême il est à l’origine de tous les fanatismes. C’est pourquoi il est si important que les jeunes enfants soient élevés au lait de la morale laïque et républicaine qui interdit d’affirmer une opinion qui ne soit pas étayée par des faits matériels résistant à un examen critique et qui invite à toujours considérer avec une certaine prudence l’opinion qui résiste à cet examen.
La raison peut-être la plus fondamentale du succès qui ne se dément pas des idées religieuses, et là nous retrouvons les notions exposées plus haut concernant le fonctionnement de l’esprit, est qu’un vivant, un mort ou un être purement imaginaire sont codés dans cet incomparable ordinateur qu’est notre cerveau par les mêmes types de groupements neuronaux et manipulés selon les mêmes règles, comme c’est le cas dans les rêves ou les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9vrose" névroses obsessionnelles. D’où la facilité qu’il y a à confondre ces différentes catégories d’êtres et à trouver naturelles les idées d’immortalité et de divinité, alors qu’il n’en existe à l’évidence aucun exemple concret dans la nature. Divinité, frère ou cousin ont même réalité neuronale. Rien ne les distingue à l’autopsie. Dieu existe à coup sûr physiquement dans l’esprit des croyants, dans leur surmoi. Adorer un être divin, c’est adorer une pincée de ses propres neurones, en fait adorer son propre surmoi dilaté aux dimensions de l’univers et grâce à cette chimère, entreprendre de régenter le monde. La faiblesse de l’humaine nature laisse se multiplier les affirmations gratuites. Supprimez la force qui leur donne autorité et elles s’effondrent comme châteaux de cartes. Il n’est pour s’en convaincre que de visiter le cimetière des croyances défuntes.
Il pourrait exister dans le cerveau de tout individu, y compris chez l’incroyant qui doit lutter contre la pente naturelle de son esprit, une structure neuronale prête à accueillir toute idée d’être surnaturel qui passerait à portée et c’est sous le regard de cet être que l’individu en question devrait désormais vivre. C’est cette structure mentale que nous appelons dieu, au singulier ou au pluriel. L’existence de cette structure n’implique nullement l’existence d’une réalité extérieure qui lui corresponde. Dieu peut parfaitement exister dans l’esprit de chacun de nous et nulle part ailleurs. Ce peut n’être qu’un instinct parmi beaucoup d’autres. C’est le point de vue des bouddhistes. C’est le sens implicite de cette formule qui revient comme un leitmotiv pendant la messe :

 HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" Dominus vobiscum
Et spiritu tuo
Dieu soit avec vous
Et avec votre esprit

Un HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Richard_Dawkins"esprit ingénieux a rapproché cette structure d’accueil d’une autre structure similaire qui correspond chez l’enfant à l’ami imaginaire, cousin des héros de bandes dessinées et qui a été annexé par l’Eglise sous le nom d’Ange Gardien. Mon ami imaginaire s’appelait Jean. Il devait avoir une vingtaine d’années et portait casquette et culottes de golf selon la mode de l’époque. Sa présence coïncidait avec des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Fantasme" fantasmes d’activités SM aussi soft que saugrenues. Ces activités normalement interdites aux moins de 18 ans se déroulaient dans des locaux souterrains à l’ombre d’un petit bois au fond du jardin. Je suppose que ces tendances obscures venues du fond des âges existent à l’état latent chez la plupart des gens, même chez ceux qui ne feraient pas de mal à une mouche. Elles n’ont rien à voir avec le péché originel, mais constituent une sorte d’appel en faveur de la vie. Il ne s’agit pas en effet d’infliger une douleur, même légère, mais d’émoustiller. A peu près vers la même époque nous avions une maîtresse d’école qui avait l’habitude d’appeler au tableau le premier élève qui prétendait avoir la solution du probleme qu’elle venait de poser. Si l’élève s’était trompé elle lançait son cahier d’exercices au travers de la classe, puis le faisait mettre à plat ventre sur ses genoux et, pour punir son outrecuidance, appliquait sur son postérieur quelques coups de règle pas trop sévères. Le contact de ses cuisses au travers de la robe légère était quelque chose de mémorable ! Une punition peut parfois se transformer en récompense comme Rousseau l’a HYPERLINK "http://jacquesmottier.online.fr/pages/lambercier.html"illustré avec éclat… Hasardons ici quelques explications HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sigmund_Freud"freudiennes : les récompenses et les châtiments promis dans l’au-delà sont un écho lointain des promesses et des menaces proférées par les parents à l’égard de leurs remuants rejetons. Métaphoriquement, ils signifient que tout manquement à l’éthique est un tort fait à l’espèce et que ce tort se perpétue à travers les âges. Il subsiste dans les différents mythes relatifs à l’enfer et au paradis quelque chose des craintes et espoirs ancestraux ancrés dans notre inconscient. N’arrive-t-il pas encore que notre poil se hérisse quand un craquement se fait entendre la nuit dans la forêt ? Pour un primate, le bas, le sol où la chute peut le livrer aux griffes des fauves représentent la crainte d’être dévoré, tandis que le haut, le ciel aperçu au travers des branches représentent l’espoir du salut par la fuite. Tout individu aspire à retrouver le havre de paix dont jouissaient nos ancêtres au sommet des grands arbres. Certains attribuent à ces périodes de rêves ou de méditations tranquilles à l’abri du danger les progrès cognitifs qu’ils ont accomplis. La première phase de l’hominisation est liée au pouce opposable qui permet de grimper aux arbres et d’échapper aux prédateurs. Les oiseaux auraient pu devenir les rois de la création si la faible densité de l’air et les lois de la mécanique des fluides qui déterminent la portance ne les avaient obligés à limiter drastiquement le poids de leur cerveau. Dés que l’ancêtre de l’homme est descendu de son perchoir il a été soumis à une pression sélective extrême en raison des faibles moyens naturels dont il disposait. Gageons qu’il y est remonté plus d’une fois en catastrophe avant d’en redescendre définitivement ! Seuls ont pu survivre les plus dégourdis, ce qui a énormément accéléré l’émergence de l’homo sapiens, c’est à dire de nous-mêmes. Transpirer de fatigue ou d’effroi devint son lot quotidien. On peut attribuer sa condition de singe nu au fait que l’absence de pelage favorise l’évaporation de la transpiration et que des vêtements adaptés aux circonstances climatiques remplacent avantageusement le pelage octroyé par la nature qui est au mieux saisonnier. Peut-être nos ancêtres avaient-ils comme nous un goût affirmé pour la chair nue ce qui aurait pu constituer aussi un critère de sélection...
Une autre explication a été avancée selon laquelle des hominidés descendus de leurs cocotiers auraient longtemps complété leur alimentation grâce à la pêche à pied le long des plages ou en eau peu profonde et que l’absence de pelage aurait alors accéléré le séchage de leur peau et favorisé leurs évolutions dans l’eau (les nageurs de compétition se rasent). Ils auraient ainsi subi des mutations sous une pression sélective « sea, sex and sun » dont nous gardons encore la nostalgie. Vivant sur les plages ils pouvaient échapper aux prédateurs non plus en grimpant aux arbres mais en se jetant à l’eau en s’aidant éventuellement de quelque espar. Ainsi aurions-nous failli devenir cétacés, mais n’avons subi que la première phase de la transformation : la perte des poils! Ceux qui gardaient une partie de leur pelage sur le haut du crâne comme un képi sont devenus chefs, un bon moyen d’accroître sa descendance. De son côté une fille qui a les cheveux longs est plus facile à attraper, ce qui accroît ses chances de procréer…Les dessinateurs humoristiques inspirés par le thème de l’homme des cavernes se sont évertués à nous le rappeler. A quoi rêvent aujourd’hui les femmes qui ont les cheveux longs, de grandes boucles d’oreilles, des talons hauts et des jupes entravées ? Ce que nous avons gardé ailleurs de pilosité pourrait être lié à l’attractivité de ce qui demeure caché …Il paraît d’ailleurs absurde et semble relever d’une erreur de conception que la nature ait placé à l’extérieur et sans protection aucune un bien aussi précieux et aussi fragile que les humbles génitoires masculines. Il faut croire que la nature a estimé que ceux qui n’étaient pas capables de les défendre devaient être éliminés de la liste des reproducteurs potentiels ! Les oiseaux et les mammifères marins ne sont pas affligés de ces protubérances qui, en augmentant la traînée, réduiraient leurs performances aéro ou hydrodynamiques. Pour que ces diverses mutations adaptatives s’inscrivent définitivement dans la lignée humaine il a fallu que la situation décrite ci-dessus ait duré suffisamment longtemps. Or, à la pointe sud du continent africain, il a été découvert récemment la trace d’établissements humains très anciens (-200.000 à – 120.000 ans environ) qui se caractérisent par leur proximité de la mer et par des outillages et des parures témoignant d’un haut degré d’évolution. Il peut être imaginé que leurs habitants ont survécu grâce à la complémentarité de ressources terrestres et marines à un moment où les conditions climatiques étaient particulièrement défavorables. Ces conditions s’améliorant ils auraient par la suite sous l’effet de la pression démographique envahi l’Afrique toute entière puis le reste du monde. Chemin faisant ils ont rencontré au Moyen-Orient des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9andertal" Néanderthaliens plus robustes qu’eux-mêmes et qu’on peut supposer dotés d’un sens moral plus développé compte tenu des conditions encore plus difficiles dans lesquelles ils avaient vécu. Notre ancêtre plus roublard aurait fini par éliminer ces bons géants en leur soutirant au passage quelques gènes encore reconnaissables et qui distinguent les européens et les asiatiques d’aujourd’hui des africains restés sur place. Lestés de ces nouveaux gènes lors de leur passage au Moyen-Orient certains de ces hommes aventureux auraient envahi l’Europe, d’autres seraient retournés sur le continent africain pour peupler l’Afrique du Nord et la corne de l’Afrique, d’autres seraient allés jusqu’aux Indes, d’autres encore auraient emprunté à des populations sibériennes archaïques quelques gènes supplémentaires avant d’aller peupler l’Extrême Orient, Il se peut aussi que des Néanderthaliens réfractaires à l’assimilation aient reconnu d’emblée la supériorité de l’homme moderne et qu’ils se soient retirés devant lui sans combattre, qu’ils aient ainsi traversé l’Europe à reculons jusqu’à atteindre pour un ultime plongeon le rocher de Gibraltar au pied duquel on a retrouvé la trace de leurs derniers établissements.
Les mythes sont comme les réflexes instinctifs qui vous empêchent de passer sous une échelle, ou de vous réjouir d’une circonstance favorable sans toucher du bois, rappel de la branche à laquelle nos ancêtres se sont souvent raccrochés in extremis pour éviter la chute. On dit aussi d’un individu qui a échappé à une situation périlleuse qu’il s’est raccroché aux branches. De la même manière nous évitons de poser le pied sur l’interstice entre deux dalles, d’aborder l’inconnu avant d’en avoir fait le tour, ou de nous soulager au cours de nos promenades ailleurs qu’à l’endroit habituel. Freud a dit quelque part : « j’ai souvent eu l’impression que la psychologie des névroses est susceptible de nous renseigner plus et mieux que toutes les autres sources sur les phases primitives du développement humain ». Les dragons de Chine et d’ailleurs font ressurgir du tréfonds de l’inconscient le souvenir des dinosaures. Il me souvient d’une terreur enfantine, et qui dura assez longtemps, provoquée chez moi par la vue d’une photographie de fantaisie de l’animal fabuleux figurant dans les pages de  HYPERLINK "http://www.dicocitations.com/resultat.php?id=3091" l’almanach Vermot ! Les mythes fournissent des explications imaginaires, voire délirantes, mais ils traduisent une curiosité intellectuelle qui mènera un jour à la découverte d’explications mieux fondées. Les forces de la nature ne se manifestent pas par hasard, pensaient les anciens, car il y a derrière ces forces la volonté des dieux. Ces manifestations présentant certaines régularités, la volonté des dieux devint loi, et tout étant nombre comme s’en avisèrent des philosophes, ces lois prirent bientôt la forme mathématique que nous leur connaissons aujourd’hui. La religion n’est pas la science, c’en est le pressentiment. Les auteurs classiques sont à la jonction de ces deux mondes, d’où leur incomparable saveur.
A un être humain vivant correspond dans le cerveau de ceux qui le connaissent un groupement neuronal qui code les milliers d’informations qui lui sont associées. Lorsqu’il décède, un seul de ces attributs est modifié. En faire le deuil correspond à modifier progressivement les autres attributs, sans jamais les effacer complètement. Même décédés depuis longtemps, nos proches parents ne sont jamais tout à fait morts pour nous. Le culte des ancêtres est le plus naturel de tous les cultes. Les plus fieffés sceptiques fleurissent les tombes des êtres qui leur ont été chers. En vérité ils fleurissent le souvenir qu’ils en ont gardé. Les honneurs posthumes laissent les défunts complètement froids. Ces cérémonies sont faites par des vivants pour des vivants. Le décès d’un proche génère un traumatisme que le temps finit généralement par guérir. Un veuf inconsolable est un veuf qui n’a pas encore trouvé sa consolatrice. Seul le décès d’un enfant est sans remède. Ce qui se passe dans notre conscience lorsque nous sommes éveillés a le plus souvent un rapport direct avec la réalité observable par tous, mais pas toujours. Il n’est pas aisé pour une personne non avertie de faire la différence entre réalité et hallucination. « Dans le monde des névroses, c’est la réalité psychique qui joue le rôle dominant ». (Freud). Des études ont montré que les mêmes zones cérébrales étaient sollicitées qu’on effectue une action ou qu’on se contente seulement de l’imaginer. Les religions cherchent par des moyens quelquefois grossiers, quelquefois subtils, à susciter chez leurs fidèles l’état de transe qui provoque ces confusions, mais c’est proprement folie de croire qu’à une configuration particulière de notre cerveau neuronal correspond nécessairement une réalité extérieure et qu’un dérapage de l’esprit peut nous renseigner sur la nature profonde du cosmos. Estimons-nous heureux si ces dérèglements nous apportent quelque lumière sur le fonctionnement de l’esprit lui-même. Jeanne d’Arc a entendu des voix parce qu’elle était sans doute légèrement schizophrène. Il faut encourager l’Eglise à multiplier les exorcistes afin qu’ils puissent faire un tri préliminaire parmi les fidèles qui présentent ce genre de pathologie. A peine adolescent j’ai rêvé une symphonie qui m’a semblée plus belle que tout ce que j’avais pu entendre auparavant. Je ne me suis pas réveillé pour autant compositeur de génie ! Jeune encore j’ai vu défiler lentement dans le ciel des vaisseaux d’une extraordinaire beauté, style 2001 Odyssée de l’Espace. Je me souviens m’être interrogé sur le sens de ce spectacle jusqu’à ce que je réalise que la 3ème guerre mondiale venait de commencer ! Dans un autre rêve j’aperçois les premiers lacets d’un chemin scabreux descendant en pente raide vers le fond d’une vallée. Je m’y engage avec appréhension, suivi par une femme qui porte un bébé. A un moment la descente se raidit encore et devient une véritable désescalade. Forcément la maman glisse et son bébé lui échappe. Je parviens à bloquer le bébé avec le bras gauche, puis le maintiens comme je peux avec la jambe gauche. Cette position inconfortable me réveille. Récemment encore j’ai assisté à la scène suivante : de la boue plutôt sèche dans un caniveau, le long d’un trottoir ; un cycliste démarre et tombe ; il est rattrapé par la boue que pousse un engin mécanique, sorte d’hybride entre une balayeuse municipale et un  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" ratrack. Je comprends que le cycliste, disparu derrière l’engin, est poussé vers un mur, je m’attends à ce qu’il se soit réfugié dans quelque encoignure mais découvre, collée au mur, une galette de quelques centimètres d’épaisseur qui s’écroule dés que l’engin s’est éloigné. Fin du rêve. La nuit dernière j’assistais à une réunion animée quand une envie me prend d’aller me laver les mains. J’y vais en courant, je trébuche, me relève et m’approche du lavabo. Deux mains s’y livrent déjà à la même opération. Seulement, au bout des mains, il n’y a personne ! Les mains flottent librement dans l’air, comme en apesanteur. L’émotion soulevée par ce spectacle surréaliste me réveille. Par quel tour de magie mon esprit a-t-il pu engendrer ces mondes sans doute absurdes, mais presque aussi riches que le monde réel ? Songez à la complexité du mécanisme neuronal nécessaire pour fabriquer ces séquences filmées à partir de données disparates résidant dans la mémoire. Quel dommage que nous ne soyons pas aussi imaginatifs quand nous sommes éveillés ! Il me semble d’ailleurs qu’il s’agisse d’une intelligence non spécifiquement humaine car les rêves ne comportent pas de discours. Le cerveau est sans doute plus agile quand il n’a pas de mots à trimbaler. Les anciens attachaient une grande importance aux rêves, les jugeant étroitement associés à la réalité, ce qui est vrai mais pas forcément comme ils l’imaginaient. Un ascète au désert conditionné par de longues privations peut avoir une vision si précise et si belle qu’il ne peut l’attribuer qu’à une inspiration divine. S’il ne le fait pas lui-même ceux à qui il l’a racontée ne manqueront pas de le faire à sa place.
C’est une illusion fréquente chez les intellectuels (et les Pères de l’Eglise sont une quintessence d’intellectuels) qu’il suffit de nommer les choses pour qu’elles existent. Or il ne suffit pas de juxtaposer sujet, verbe et complément pour que la phrase correspondante ait du sens. Faut-il encore qu’elle renvoie à une réalité plus ou moins constatable, qu’elle ait une vertu plus ou moins opérationnelle et que les mots utilisés aient une signification claire, faute de quoi la phrase n’est qu’un jeu de mots stérile. Tant que le travail d’élucidation des concepts commencé par Platon n’aura pas été mené à bien, les hommes continueront de se parler sans se comprendre puisqu’ils ne donnent pas le même sens aux mêmes mots. Songez au concept de justice. Pour la plupart des gens un impôt juste est un impôt payé par le voisin et une subvention juste est une subvention dont ils peuvent bénéficier. Dans les faits impôts et subventions résultent d’un rapport de force plus ou moins adroitement déguisé. Une décision juste est une décision qui fait que, pour tous les intéressés, le rapport entre contrainte et résistance à cette contrainte est le même. Un tel ajustement ne peut être atteint que par la négociation entre personnes de bonne foi. Il serait intéressant et instructif de rechercher dans un dictionnaire quel est le nombre minimum de mots à partir desquels il est possible de définir tous les autres. L’établissement d’un tel dictionnaire serait une bonne occasion de finaliser la chasse aux concepts initiée par Platon. Un discours conforme à la réalité est nécessairement rationnel et cohérent, mais la réciproque n’est pas vraie. Le jeu de bridge ou le jeu d’échecs sont par eux-mêmes rationnels et cohérents. Dira-t-on pour autant qu’ils aident à décrypter la réalité ? Certainement pas car aucun phénomène naturel n’obéit aux règles de ces jeux de société. Il en est de même de la théologie, n’en déplaise à Benoît XVI. La théologie est la science de l’inobservable, de l’inexpérimentable, de l’invérifiable, de l’inquantifiable, de l’incommensurable, de l’inexprimable, de l’incompréhensible, de l’inconnaissable, de l’inconcevable, de l’incommunicable; autant dire qu’il s’agit d’une science impossible. Ceci ne veut pas dire que les théologiens soient toujours inintéressants, ceci veut dire que, lorsqu’ils sont intéressants, ce n’est pas de la théologie. Certains fidèles justifient leurs croyances religieuses par les insuffisances de la science. Imagine-t-on un scientifique qui entreprendrait de justifier son savoir par les insuffisances des religions ? Savoir, c’est avoir la possibilité de vérifier qu’une réalité physique extérieure correspond effectivement à une image mentale particulière. Cette possibilité est ouverte à tous ceux qui sont prêts à faire les efforts nécessaires. Croire, c’est admettre que cette correspondance existe sans avoir la possibilité de le vérifier. Nous pouvons croire en Dieu, jamais nous ne le saurons, du moins en ce monde. Un dieu créateur infiniment bon et tout puissant ne correspond pas à l’état du monde que nous avons sous les yeux. Ceci même, nous ne pouvons pas y croire. Croire est un mot redoutable. Au nom d’une croyance incertaine on va s’autoriser sans remords à commettre les pires atrocités. Dans la croyance, le cerveau est bouclé sur lui-même, sans passer par l’objet. Lorsque la même image est crue par les membres d’un même groupe humain, elle ne devient pas pour autant réalité physique, mais elle devient réalité culturelle et sociale. La science utilise également des représentations fictives (avez-vous déjà rencontré dans la nature un vecteur vitesse ?) à ceci près que ces fictions ont une efficacité prédictive directement opérationnelle dans l’univers des choses. Mais, après tout, les idées religieuses ont également une efficacité opérationnelle, par d’autres voies, dans l’univers des esprits. C’est l’efficacité de l’illusionniste.
L’incroyance commence lorsque la peur du noir a été dominée, lorsque les fantômes et autres visions cauchemardesques qu’il peut receler ont cessé d’être pris au sérieux. Que survienne d’ailleurs un danger bien réel et tous les fantômes s’évanouissent à l’instant. La guerre remet toutes les pendules à l’heure pendant le temps de l’action. Croyance et foi sont des ornières dont il est difficile de s’extraire une fois qu’on y a glissé. Chaque passage les creuse un peu plus. D’où l’expression approfondir sa foi et le moyen choisi qui est la répétition des mêmes rituels, procédé bien connu de tous les spécialistes de l’action psychologique.

Mon voisin du dessus
Un certain Blaise Pascal
M’a gentiment donné
Ce conseil amical
Mettez vous à genoux
Priez et implorez
Faites semblant de croire
Et bientôt vous croirez
(Georges Brassens, Le Mécréant)

Ces rituels compulsifs communs à toutes les religions sont les symptômes par lesquels se manifestent les névroses déclenchées chez beaucoup d’êtres vivants par la prise de conscience du fait indubitable qu’ils sont condamnés à mort et qu’il n’y a pas de grâce possible. La religion serait la névrose obsessionnelle universelle de l’humanité (Freud). Il me semble que Freud aurait pu faire l’économie du conditionnel. Les névroses qui résultent du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Refoulement" refoulement de cette pensée plus que dérangeante se traduisent par une régression vers l’âge magique dans lequel le petit d’homme a longtemps baigné. Les mythes sont le résultat du transfert des problèmes insolubles du monde réel vers un monde imaginaire où ils se trouvent miraculeusement résolus. C’est ainsi que la conscience qui s’éteint avec l’individu dans le monde réel devient dans un monde imaginaire une âme immortelle. C’est ainsi que les conséquences lointaines d’un acte moral ou immoral deviennent paradis et enfer. On ne pourrait soigner cette névrose qu’au moyen d’un traitement psychanalytique visant à débusquer les circonstances dans lesquelles le sujet a pris conscience de sa fin inéluctable. Inutile de dire que ce traitement n’est jamais entrepris. Le caractère universel de cette situation et la difficulté de la cure rendent compte de l’ubiquité du phénomène religieux dans le temps et dans l’espace. On peut d’ailleurs observer une relation directe entre l’intensité de la foi religieuse d’un individu ou d’une société et la profondeur de son mal-être. Ne cherchez pas ailleurs la raison de l’intégrisme musulman, ni pourquoi certains passent sans transition de la débauche la plus effrénée à la plus noire bigoterie. Carnavals et processions sont l’expression du même désir d’oubli du réel. Il y a une addiction aux religions comme il y a une addiction aux drogues. Les deux phénomènes traduisent le même désir de fuir une réalité trop dure. Il me parait probable qu’on constatera un jour que les circuits neuronaux dédiés à ces différents types d’addictions sont apparentés. L’intégrisme musulman et l’usage de drogues concernent les mêmes cités défavorisées. L’intégrisme chrétien concerne des milieux qui craignent un déclassement social. L’affaiblissement de la foi dans les sociétés occidentales est un des plus sûrs indices que les choses n’y vont pas si mal que ça. Il est d’ailleurs possible que les névroses relativement bénignes que constituent les religions évitent d’autres névroses plus graves. « La religion, qui a fait, qui fait et qui fera tant de méchants, vous a rendue meilleure encore ; vous faites bien de la garder» concède Diderot à la Maréchale. Cette pathologie s’est manifestée dans toute sa pureté et toute sa force à l’époque des premières religions historiques dont on connaît les mausolées gigantesques et les armées de terre cuite. Les rites funéraires ont été les premiers à apparaître et seront probablement les derniers à disparaître. Pour résumer la situation, disons que l’individu commence sa carrière de croyant en adoptant par un phénomène d’empreinte les croyances de son entourage ; il la poursuit du fait des contraintes sociales qui s’exercent sur lui de façon particulièrement vive quand il entreprend de faire sa place au soleil sous l’égide du mâle dominant gardien et bénéficiaire de ces croyances ; il la termine sous l’empire de la névrose d’angoisse provoquée, aux premiers signes certains de décrépitude, par la prise de conscience, non plus seulement intellectuelle mais physique, de la mortelle fragilité dont tout être vivant est affligé. Les croyants semblent avoir quelque difficulté à comprendre que les incroyants n’éprouvent pas cette angoisse au même degré. Ce que signalait déjà Diderot :
« Crudeli. – Je ne réponds de rien, quand ma tête n’y sera plus ; mais si je finis par une de ces maladies qui laissent à l’homme agonisant toute sa raison, je ne serai pas plus troublé au moment où vous m’attendez qu’au moment où vous me voyez.
La Maréchale. – Cette intrépidité me confond »

Pour s’habituer à l’idée de la mort, nos farouches ancêtres buvaient parfois leur vin dans le crâne de leurs ennemis, rappel sévère mais sain des réalités objectives. L’activité religieuse est une distraction destinée à masquer l’issue fatale, au même titre que les voyages, les spectacles ou les jeux de société. L’objet d’adoration qui fournit la distraction nécessaire est dans les sociétés contemporaines un être humain divinisé. Dans les sociétés plus proches de l’état de nature ce fut souvent un animal. Les éthologues pensent que certains animaux comme les éléphants ont pris conscience qu’ils sont mortels. Ils constatent que ces animaux ont développé des rites appropriés à cette situation. Le phénomène religieux est né à l’instant où un animal, qui n’était pas nécessairement un primate, s’est rendu compte le premier, il y a quelques millions d’années, qu’il était destiné à mourir un jour. Certains chercheurs ont noté des  HYPERLINK "http://alpy78.over-blog.com/article-origines-religiosite-38297092.html" comportements rituels de la part de chimpanzés de rang inférieur en hommage à des chimpanzés de rang supérieur dans la hiérarchie du groupe, comportements rituels qui rappellent étrangement celui des croyants envers les divinités, ce qui montre à quel point ces comportements sont anciens et profondément ancrés chez les primates.
Les rituels religieux précèdent les mythes qui visent à donner à ces rituels une signification symbolique, c’est à dire un semblant de justification rationnelle. Les rituels compulsifs constituent le trait caractéristique des névroses en général et des religions en particulier, leur dénominateur commun. A ce titre le bouddhisme qui, a la différence de son cousin l’hindouisme, ne postule pas l’existence de divinités, est bien néanmoins une religion. D’ailleurs il comporte aussi un mythe indémontré celui de la réincarnation. Il est vraisemblable qu’il s’agit là d’une concession faite à des populations que l’on ne pouvait priver de toute espérance post-mortem. Dans la vie monacale, qui ne peut convenir qu’aux sujets les plus atteints, le rituel dévore les jours et les nuits. Les chants si beaux qui l’accompagnent ne sont que la longue plainte de reclus que le monde extérieur effraie. Dieu cantonné dans le surmoi chez un homme équilibré a colonisé à cause de ce genre de vie l’ensemble du cerveau. L’être humain qui s’agenouille, ramène les bras sur sa poitrine, joint les mains ou se prosterne à la mode musulmane vise à retrouver la position fœtale et la sécurité du sein maternel. Il se laisse avec bonheur bercer par le rite, ses pensées retombent dans des ornières familières et sécurisantes, il en oublie son mal-être. L’action réalisée par le geste et l’exacte signification des paroles sont d’importance secondaire. La qualité du rituel a pour seul but d’aider à croire à la réalité de l’objet du rituel. Le croyant durant la prière n’est plus préoccupé que de son monde intérieur sanctuarisé par le rite. Il se met ainsi à l’abri des vicissitudes du monde et cesse de ruminer des pensées morbides. C’est la vertu thérapeutique de la croyance. Le mystique est celui qui se complait dans cet état au point de n’en plus sortir qu’occasionnellement. Par comparaison, l’incroyance est une ascèse qui vise à faire accepter de bon cœur le monde tel qu’il est. Jurer de conserver sa foi, c’est refuser d’examiner les preuves contraires. C’est ceindre son ego d’une triple muraille. C’est le chauvinisme de la pensée élevé au rang d’une vertu. C’est se priver par vanité de la possibilité d’être redressé par d’autres et remis sur le bon chemin. La véritable connaissance au contraire examine sans indulgence les propositions les mieux établies et accueille avec intérêt observations et critiques. On a longtemps accusé les incroyants d’être des «esprits forts », sous-entendant par la qu’ils se faisaient une trop haute idée d’eux-mêmes en s’écartant de la pensée commune. En réalité les incroyants, même s’il se sentent raisonnablement assurés de leur vision des choses, ne veulent en aucune manière l’imposer à d’autres. Une telle « conversion » ne doit pas résulter de la pression psychologique d’un magister, d’un directeur de conscience ou d’un gourou, comme c’est le cas pour les croyances religieuses mais être l’aboutissement d’une libre réflexion personnelle. Les défenseurs traditionnels de la religion aimeraient accréditer l’idée que c’est pour pouvoir laisser libre cours à leurs mauvais penchants que les hommes se délivrent de la croyance. C’est au contraire parce que les doctrines religieuses font de Dieu un être foncièrement immoral que l’homme épris de justice s’en détourne. Il admet à la rigueur que Dieu soit indifférent. Il ne tient pas pour vraisemblable le portrait de sadique vaniteux, jaloux et intolérant qu’en font la plupart des religions.

Les premières religions

Essayons de nous mettre à la place de l’homme d’il y a 100.000 ans. Ce dernier ne possède aucune arme naturelle performante. Sa peau est tendre et fragile, ses performances physiques médiocres, son enfance interminable. Pourtant, grâce aux armes de bois et de pierre qu’il a façonnées et grâce à son organisation collective, il a su se faire craindre et respecter du monde animal. Il reste toutefois désarmé devant les phénomènes naturels qui conditionnent la réussite de sa chasse ou de sa cueillette et menacent quelquefois sa vie. Il ne s’est pas totalement départi de la mentalité de l’animal traqué qu’il fut longtemps. Comme l’enfant qu’il se souvient encore d’avoir été il attribue une volonté bienveillante ou malveillante aux phénomènes qu’il ne comprend pas comme il le faisait enfant vis à vis des adultes tout-puissants. Il a encore besoin de la sécurité du giron maternel. Il cherche aide et protection auprès de Mère Nature. L’être humain, de tout temps a inventé un dieu, une déesse ou un démon pour chacune de ses interrogations ou de ses terreurs. Ce sont les patches qui bouchent les trous de son paysage mental. C’est le remède empirique grâce auquel il complète son réseau d’explications et calme ses angoisses. On observe le même phénomène chez certains patients Alzheimer qui inventent des difficultés pour justifier leur anxiété. Ses propres enfants lui posent des questions dérangeantes, souvent de caractère métaphysique. Pour ne pas avoir l’air ignorant ou pour que ses enfants le laissent en paix, il invente une explication dont il se trouve ensuite prisonnier. « Ta grand-mère est partie loin d’ici dans un pays d’où elle nous voit et nous protège». Endormis nous rêvons, à demi éveillés nous fantasmons, des situations conformes à nos désirs ou à nos craintes les plus secrets, situations qui sont à la base de ces inventions. L’explication des parents est d’autant plus facilement mémorisée qu’elle est saupoudrée d’évènements merveilleux qui servent de points d’ancrage au récit et valorisent le conteur. Comme les épices et les condiments, ces évènements qui dérogent à l’ordre naturel des choses ne doivent pas être présents en quantités excessives pour que le conte reste crédible. Il n’est pas exclu que certains de ces contes aient été l’œuvre de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Mythomane" mythomanes au sens clinique du terme qui, s’étant persuadés de la réalité de faits imaginaires, ont eu le talent d’en persuader leurs contemporains… Ces contes, amendés au contact de contes analogues dits à la veillée, sont repris par les enfants à destination des petits-enfants et, de génération en génération, les histoires ne cessent de s’enrichir et de s’embellir jusqu’à aboutir aux mythes que nous connaissons. Une interrogation que ces mythes ont cherché à satisfaire concerne le « hard problem ». Le mythe de l’esprit délié de la chair est leur réponse, réponse qui, malheureusement, comporte autant de difficultés que la question elle-même. Les premières sociétés furent matriarcales. La mère trônant au milieu de ses enfants régnait sans partage. Un mâle était bien accueilli dans cette communauté matriarcale s’il rapportait quelque chose de bon à manger. Une autre interrogation a concerné l’origine de tout ce qui existe et qui doit avoir été engendré d’une manière ou d’une autre. L’idée s’est imposée que le monde avait été engendré par une Déesse Mère. Ce n’est que bien plus tard, avec la domestication de races animales, que les hommes se sont rendus compte du rôle indispensable du père dans la procréation. L’agriculture nécessitait des bras vigoureux et a retenu près de leur foyer des hommes qui auparavant cherchaient au loin leur pitance. Cette sédentarisation et la croissance démographique résultant d’une nourriture plus abondante et plus régulière ont engendré des conflits de frontières qui ont valorisé la force virile des anciens chasseurs. La société toute entière est alors passée du matriarcat au patriarcat en adoptant les rites cruels hérités de la chasse et de la guerre. Dans le processus de création le sang de la Déesse Mère a été remplacé par le souffle d’un dieu créateur mâle, par sa parole, par son « Verbe ». Pourtant c’est sa mère que l’homme appelle à son secours quand il est atteint dans ses œuvres vives. Jéhovah et ses alter ego ne sont que d’affreux usurpateurs. Les êtres humains de l’époque n’avaient pas non plus compris pourquoi il leur arrivait d’être bons même quand ceci allait à l’encontre de leur intérêt immédiat. Ils ont alors inventé le mythe de commandements divins pour donner une explication rationnelle à ce comportement bizarre dont nous savons aujourd’hui qu’il est dicté par l’instinct moral présent dans toutes les espèces.
Des enfants se sont rendus compte qu’ils étaient capables de capter l’attention de leurs camarades de jeu en leur racontant les histoires que ces derniers avaient envie d’entendre. Devenus grands, ils ont entrepris d’utiliser ce don pour s’emparer de l’esprit des hommes de leur clan et en tirer prestige et avantages comme celui de pouvoir payer de quelques grimaces la nourriture nécessaire à leur subsistance. Ils ont accaparé à cet effet les divers mythes qui visaient à combattre les peurs et les angoisses. Ils les ont rassemblés, harmonisés et illustrés par des symboles et des cérémonies et sont ainsi devenus des professionnels du divin prenant en charge les angoisses existentielles de leurs contemporains provoquées par les difficultés de la vie et sa finitude. Ils prétendaient servir les dieux alors qu’en réalité c’est de la faiblesse des hommes qu’ils se servaient. Les promesses n’engagent que ceux qui y croient, les prières n’obligent que ceux qui les font, les fables ne persuadent que ceux qui les écoutent. Ce sont toutes de pieux mensonges destinés à apaiser les angoisses et assurer la cohésion du groupe social. D’autres moins anodines sont destinées à conforter l’emprise des organisations religieuses sur l’esprit des hommes ordinaires en les terrorisant. Ne pas accorder à leurs enseignements une confiance aveugle, assurent-elles, suscite la colère divine et entraîne les châtiments les plus extrêmes, dans ce monde comme dans l’autre. La croyance se trouve ainsi comme verrouillée car soustraite à toute réflexion critique publique ou privée. Certaines églises et non des moindres sont allées jusqu’à prétendre que leur intercession était indispensable pour que le soleil se lève chaque matin et pour que les saisons suivent leur cours. Ignorant les lois qui régissent la course des astres et les raisons des phénomènes météorologiques, elles feignaient d’en être les organisatrices. La volonté de leur église est conforme à la volonté divine, assuraient-elles, et réciproquement. Quand l’Eglise fait un saint, Dieu est prié de s’aligner ! Ces différents mythes ont cessé d’évoluer à partir du moment où ils ont été consignés par écrit et soumis à la critique. Et, à cause de la presse d’investigation, il ne peut plus guère en apparaître de nouveaux. Les sectes sont sous haute surveillance.
Un autre type d’explication a été avancé qui est que les dieux ont réellement existé, qu’ils ont un jour été parmi nous. De fait, dans les civilisations primitives proches de nous, nul ne semblait mettre en doute l’existence des dieux. Est-ce parce que les hommes de cette époque les avaient effectivement rencontrés ? Relisons à ce sujet ce passage  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Livre_d%27%C3%89z%C3%A9chiel" d’Ézéchiel :
“ Je vis et voici, un vent de tempête vint du Nord et une grande nuée et un feu tournoyant ; autour de celle-là, il y avait une splendeur et au milieu de celui-ci, il y avait comme l’éclat d’un métal brillant(
Et je regardais, et voici une roue en bas auprès des êtres vivants, auprès de tous les quatre. Et les roues avaient l’aspect comme l’éclat de la pierre de Tharsis et les quatre avaient la même forme et leur structure était comme si une roue était au milieu d’une autre roue. Elles pouvaient aller par leurs quatre cotés et elles ne tournaient que quand elles allaient. Et je vis qu’elles avaient des jantes, leurs jantes étaient pleines d’yeux tout autour auprès de toutes les quatre. Quand les êtres allaient, les roues allaient aussi à coté d’eux et quand les êtres s’élevaient du sol, les roues s’élevaient aussi ”
Remplacez la locution “ être vivant ” par “ sous-ensemble fonctionnel ” et vous obtenez la description de l’arrivée et des manœuvres d’un vaisseau spatial, sorte de super hélicoptère, faite par un contemporain essayant de rendre avec ses pauvres mots l’aspect stupéfiant de cet étrange objet technologique. Quand il en sort, Dieu est véritablement le «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "le Dieu qui sort de l'engin" deus ex machina ».  S’il s’est arrêté au Moyen-Orient, c’est pour refaire le plein avant de poursuivre sa pérégrination intra galactique ! Dans la même veine, ne peut-on identifier le buisson ardent qui brûle sans se consumer pendant que Moïse se voit confier les tables de la loi à une fusée au point fixe d’où sortent des gaz incandescents? Les chars ailés fendant le ciel sont présents dans beaucoup de mythes, sous toutes les latitudes. Aujourd’hui encore un traîneau glisse silencieusement dans la nuit de Noël en empruntant la voie lactée…Dans beaucoup de traditions les techniques agricoles et artisanales ont été enseignées aux hommes par des dieux.
Les dieux seraient donc des extraterrestres et les religions perpétueraient le souvenir magnifié de leur visite. L’existence d’extraterrestres n’aurait en soi rien de surprenant et, si nous avons une chance extrême d’habiter la planète terre, rien ne semble empêcher que d’autres aient eu encore plus de chance que nous, ou l’aient eu plus tôt. Il n’y a aucune raison évidente pour que nous soyons les premiers d’une classe qui compte potentiellement des milliards de milliards d’élèves, encore qu’il ne soit peut-être pas si commun que de bonnes conditions d’habitabilité persistent sur un corps céleste pendant plus de trois milliards d’années. (Craignons que cette époque bénie ne se termine bientôt). Au bout d’un an de fonctionnement du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Kepler_(t%C3%A9lescope_spatial)" télescope satellite Kepler, les résultats obtenus ont conduit à évaluer à 500 millions, dans notre seule galaxie, le nombre de planètes susceptibles d’abriter la vie telle que nous la connaissons sur terre, soit environ une planète habitable pour deux cents étoiles; et il y a cent milliards de galaxies dans notre univers ! Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, de nombreux observateurs ont relaté des phénomènes célestes inexpliqués. Ces observations ont récemment cessé. Les extraterrestres nous ont-ils quittés définitivement ? Nous ont-ils trouvés décidément infréquentables, nous ont-ils jugés condamnés et voulu se retirer avant l’explosion finale quand ils ont eu connaissance de la réélection de Georges W ? A l’encontre de cette thèse il faut évidemment prendre conscience de l’énormité des distances astronomiques. L’étoile la plus proche est deux cents soixante mille fois plus éloignée de la terre que ne l’est le soleil. Une  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Rencontres_du_troisi%C3%A8me_type" rencontre du troisième type aurait pu se situer à peu près au moment où l’agriculture et l’élevage ont commencé d’être pratiqués. Sur les peintures et les gravures qui ornent les parois des grottes préhistoriques, comme celle de  HYPERLINK "http://www.culture.gouv.fr/culture/arcnat/lascaux/fr/" Lascaux, ou  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Grotte_Chauvet" Chauvet je ne sens pas en effet, malgré l’avis des spécialistes, passer un souffle religieux. Les graffitis sur les murs des lieux publics et les barbecues dominicaux n’attestent pas de la persistance de cultes priapiques ou de rites sacrificiels à l’époque contemporaine. Le biais religieux donné aux œuvres préhistoriques provient du fait que des écclésiastiques, vraisemblablement en service commandé, se sont intéressés à des questions susceptibles de menacer les doctrines et les intérêts de l’Eglise. Ces figures animalières n’ont, me semble-t-il, rien de commun avec les représentations fabuleuses qu’on peut rencontrer dans les temples des anciennes civilisations méditerranéennes, asiatiques ou américaines qui font partie de l’histoire et non plus de la préhistoire.. Les premières sont créées par des hommes libres et la peur en est absente. Les secondes sont créées par des hommes apeurés comme en témoignent leurs monstres grimaçants. Les hommes de cette seconde période semblent avoir été affligés d’un complexe d’infériorité vis-à-vis des animaux dont ils ont alors fait des dieux de mauvaise humeur. Ultérieurement, assurés de leur force, les hommes donneront à leurs nouveaux dieux des caractères anthropomorphes. L’art pariétal ne se rattache pas à l’art naïf ni aux arts premiers. J’en perçois au contraire le caractère naturaliste, comme celui qui a pu être observé aux meilleurs moments de l’Antiquité ou de la Renaissance. Je n’y relève aucune intention théâtrale comme c’est ordinairement le cas pour les sujets sacrés où la réalité est travestie en fonction d’une idéologie particulière. Les artistes de cette époque lointaine ont dû être fascinés par les exploits des animaux qu’ils chassaient, tellement plus forts, tellement plus rapides, tellement plus endurants, tellement plus vifs qu’eux-mêmes, mais qu’ils parvenaient cependant à dominer par leur ingéniosité, leur courage et la coopération facilitée par le langage. Ces sociétés furent sans doute pacifiques car elles ne pouvaient s’offrir le luxe de se déchirer. Représenter des êtres humains, c’eut été les transformer en gibier. Représenter des animaux, c’était leur rendre hommage et s’excuser d’avoir parfois à les tuer sous l’empire de la nécessité. Ces artistes des origines ont essayé de rendre leurs peintures les plus expressives possibles, au plus près de la chose elle-même et de l’émotion ressentie, et ils y ont magnifiquement réussi. La force de ces représentations n’est pas sans rappeler celle des dessins de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Pablo_Picasso" Picasso qui ne fut pas, comme chacun sait, un grand mystique. Elles donnent à penser que l’habileté technique dont elles font preuve n’a pu être acquise qu’au prix d’un long apprentissage et que la plupart des œuvres d’art paléolithique ont été exécutées au grand jour. Seules auraient été conservées celles qui, effectuées sur des supports imputrescibles, étaient protégées des intempéries et du vandalisme. Eblouis par la qualité de ces œuvres ont-ils voulu les abriter dans des grottes comme témoignages à l’intention des générations futures ? La peur qui eut été naturelle semble absente de ces représentations. Ces artistes avaient suffisamment de raisons objectives d’avoir peur pour ne pas s’inventer des terreurs supplémentaires. La sûreté du trait montre en tout cas que ces artistes maîtrisaient parfaitement leurs émotions, qu’ils vivaient dans une tranquille innocence avant que ne débarquent les perturbateurs supposés. L’homme qui se croyait le roi de la création découvrait soudain avec effroi qu’il pouvait être l’animal de créatures beaucoup plus puissantes que lui. J’imagine avant cette rencontre fatale des cérémonies d’initiation où des jeunes gens venaient à la lueur des lampes à huile, essayer leur courage devant ces figures saisissantes. Car du courage il en fallait pour affronter des fauves de plusieurs centaines de kilos, armé seulement d’épieux à la pointe durcie au feu et de casse-tête de pierre et d’os ! Il est possible que la pensée pratique, pragmatique, prompte à l’auto dérision, qui est nécessaire pour survivre ait précédé la pensée religieuse drapée dans son sérieux et fuyant l’ironie comme la peste. Vous ne trouverez jamais la moindre trace d’humour dans les oeuvres sacrées. D’une manière générale le sérieux des mines est inversement proportionnel au sérieux des doctrines. Les médecins ont rangé depuis longtemps leurs robes et leurs couvre-chefs dans le placard aux souvenirs quand prêtres et magistrats continuent d’en porter…Les hommes de science quant à eux sont tenus de se présenter à cru devant leurs confrères… au moins au sens figuré ! Le débraillé de la tenue ne retire rien à la dignité de celui qui travaille de ses mains. Reconnaître la dignité de quelqu’un, c’est fondamentalement honorer le porteur d’un message génétique qui est le fruit de centaines de millions d’années d’expérimentations couronnées de succès. C’est aussi saluer l’héroïsme de la longue chaîne de géniteurs qui ont su trouver le courage et les ressources nécessaires pour mettre au monde, nourrir, protéger et éduquer leurs petits.
Ce qui me plait dans cette explication par les extraterrestres, malgré son caractère hasardeux, c’est qu’il s’agit d’un compromis. Le message religieux ne serait pas d’origine divine  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Au sens strict" stricto sensu mais il émanerait de civilisations plus avancées que la notre et devrait de ce fait être pris en considération. Nous pouvons supposer que ces civilisations extraterrestres sont depuis longtemps gouvernées par des écologistes puisqu’elles se sont refusées à intervenir trop pesamment dans notre destin. Un autre aspect rassurant de cette explication serait qu’elle apporterait la preuve que les progrès scientifiques et techniques ne conduisent pas nécessairement une civilisation à l’anéantissement. Croquer la pomme de la connaissance pourrait rendre malade mais ne serait pas forcément mortel. Cependant les écoutes réalisées par le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/SETI" S.E.T.I. des messages du cosmos n’ont pas donné de résultats. Le silence de ces espaces infinis a de quoi effrayer. Il pourrait signifier que la durée qui s’écoule entre le moment où une civilisation acquiert la technologie nécessaire pour recevoir et émettre des messages et celui où elle s’autodétruit est relativement brève. Les tentatives d’explication formulées ci-dessus ne sont pas exclusives les unes des autres. Un grand fleuve a nécessairement de nombreux affluents.


La religion chrétienne

Les religions primitives étaient toutes polythéistes. Chaque force naturelle, chaque passion éprouvée fortement, chaque talent particulier, étaient représentés par un dieu spécifique. L’homme satisfaisait ainsi à peu de frais son besoin d’explications. Dans sa grande sagesse il se résignait à adopter ce qu’il y avait de mieux à l’époque sur le marché. S’il ne croyait pas vraiment à la valeur de ces explications il trouvait là une façon de parler plus expressive et plus pittoresque. Par  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bk.doc" \o "Dieu de la mythologie celtique rendu célèbre par une bande dessinée" Toutatis, ne faisons-nous pas encore de même ? Chaque nation pouvait avoir sans problème son ou ses dieux qui luttaient à ses cotés. Un dieu victorieux chassait le dieu vaincu. Les difficultés ont commencé lorsque l’idée du monothéisme est apparue, en même temps que les grands empires en Egypte et en Mésopotamie. Le petit peuple des juifs était coincé entre ces deux géants tel le grain de blé sous la meule. Au départ Jahvé était sans doute un dieu parmi d’autres, mais c’était leur dieu tutélaire. A mesure que leur sort est devenu plus précaire ce dieu ombrageux a envahi l’imaginaire des juifs et chassé les autres dieux car il personnifiait leur volonté farouche de survivre. Dans la tradition chrétienne le monothéisme est moins radical puisque d’une part Dieu est triple et que d’autre part il est accompagné par des légions d’anges et de saints, et surtout de démons qui n’obéissent pas à Sa Volonté. Croire le contraire serait accuser Dieu de faire preuve d’une rare duplicité, ce qui après tout n’est pas complètement impossible si le pouvoir divin, comme tous les pouvoirs, a besoin pour exécuter ses basses besognes de louches officines, aussitôt désavouées que démasquées. Plus que de monothéisme, il faudrait donc plutôt parler dans le cas du christianisme d’une monolâtrie qui peut aller aujourd’hui jusqu’à l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9noth%C3%A9isme" hénothéisme lorsque le croyant adresse préférentiellement sa prière à la Vierge Mère. Un seul dieu au ciel, habitue à l’idée d’un prince unique, représentant du précédent, régnant sur le monde sensible. La monarchie de droit divin est l’héritière de cette conception. Mille quatre cents ans avant notre ére le pharaon  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Akh%C3%A9naton" Akhenaton avait déjà fait une tentative dans ce sens. A la différence de celle qui va être décrire, elle fut sans lendemain car contraire aux intérêts d’un clergé puissant. En l’an 27 avant notre ère  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Octave_Auguste" Octave s’était attribué un caractère divin sous le nom d’Auguste. Les empereurs qui lui avaient succédé avaient maintenu cette tradition. Tout comme les pharaons chacun d’eux était « le premier des hommes et le dernier des dieux » selon la formule de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Herm%C3%A8s_Trism%C3%A9giste" l’Hermès Trismégiste. Vers la fin du troisième siècle, après bien des péripéties, les empereurs n’étaient plus choisis que par les légions, le sénat étant devenu une simple chambre d’enregistrement. Sans soutien du sénat pratiquement hors jeu ni soutien populaire l’Empereur Aurélien chercha un soutien religieux et se plaça à cette fin sous la protection d’un dieu suprême,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sol_Invictus_(religion)" Sol Invictus. Cette intronisation eut lieu le 25 décembre 274. Comme chaque année à cette date qui correspond au solstice d’hiver le dieu soleil meurt et renaît, invaincu. La religion chrétienne est née de la rencontre de l’ambition d’un homme, le futur empereur Constantin, et des aspirations d’une secte issue de milieux défavorisés, la secte des chrétiens.
En l’an 306 de notre ère  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Constantin_Ier_(empereur_romain)" Constantin avait été élu par ses légions « César » en Gaule, quelque chose comme gouverneur plénipotentiaire. Il y représentait l’Empereur d’Occident. Il remplaçait dans cette fonction Constance Chlore, son père décédé, un soldat valeureux. En vingt ans l’habile, énergique et peu scrupuleux Constantin est parvenu au titre d’Empereur d’Orient et d’Occident après avoir éliminé tous ses rivaux à la suite d’une longue marche victorieuse. Il fallait bien que l‘idée d’un être suprême, tout-puissant et sans rival plaise quelque part à Constantin pour qu’il cherche à promouvoir les croyances d’une simple secte, pratiquement anéantie par les persécutions de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Diocl%C3%A9tien" Dioclétien, au détriment de la religion officielle pratiquée depuis toujours par la très grande majorité des citoyens romains, riches ou pauvres. La persécution dont elle avait été victime avait été d’ailleurs pratiquée non pour des motifs religieux, la société romaine, laïque avant l’heure, étant très tolérante à l’égard de toutes les croyances (elle avait même élevé un temple au dieu inconnu pour être sûre de n’offenser personne) mais en raison de leur refus de rendre hommage à l’empereur comme à un dieu et des troubles à l’ordre public dont les chrétiens se rendaient fréquemment coupables par leurs disputes sanglantes et leur refus de participer aux cérémonies officielles. Jésus aurait pu être intronisé sans difficulté dans le panthéon gréco-romain mais, dans une période déjà très troublée (pendant cinquante ans les empereurs se sont succédé au rythme moyen d’un tous les deux ans) les fauteurs de troubles sans appuis politiques servaient forcément de boucs émissaires. La persécution dont ils ont été victimes entrait probablement dans le cadre général de la reprise en main d’une société en voie de décomposition. Au début du règne de Constantin, la proportion de chrétiens dans le monde romain ne dépassait sans doute pas 5%. La doctrine monothéiste de cette secte semblait en outre peu compatible avec le culte rendu traditionnellement à un empereur divinisé. Qui plus est, cette nouvelle croyance se référait à une tradition étrangère, à contre-courant de l’idéologie dominante. Elle n’était même pas celle d’un vainqueur mais celle d’un mouvement composé principalement de pauvres et d’exclus. Lorsqu’ils sont entrés dans l’histoire les chrétiens, selon les témoignages de l’époque, étaient considérés au mieux comme des marginaux, au pis comme des malfrats. Dans la seconde moitié du deuxième siècle de notre ère  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Celse_(philosophe)" Celse les décrivait ainsi ; « Il est une race nouvelle d’hommes nés d’hier, sans patrie ni traditions, ligués contre toutes les institutions religieuses et civiles, poursuivis par la justice, universellement notés d’infamie, mais se faisant gloire de l’exécration commune : ce sont les chrétiens ». Ces partageux semblent avoir suscité le même genre de réactions que les communistes, deux mille ans plus tard. Quelle mouche avait donc piqué Constantin pour que, du jour au lendemain, les persécutés deviennent des privilégiés ? Imaginez Napoléon s’amourachant du culte mahométan à la suite de son voyage en Egypte et favorisant activement l’implantation de cette nouvelle croyance dans toute l’Europe ! Ce changement inouï était une entreprise à priori parfaitement déraisonnable et ne peut s’expliquer que par des motifs extraordinairement puissants. Dans un monde antique assez indifférent en matière de religion et chez un homme engagé dans une aventure politico-militaire ambitieuse et risquée on peut parier sans grand risque d’erreur que les raisons d’ordre politique ont pesé beaucoup plus lourd que les raisons d’ordre théologique. Constantin a dû être frappé par la volonté farouche des chrétiens dans le domaine religieux, une volonté analogue à celle qui l’animait lui-même dans les domaines politique et militaire. On peut s’interroger sur l’authenticité de textes officiels attribués à Constantin dans lesquels il aurait affirmé hautement sa prédilection pour la religion chrétienne et son mépris pour la religion traditionnelle. Une telle attitude allant contre l’opinion majoritaire du peuple et des sénateurs n’aurait pas été politiquement adroite, c’est le moins qu’on puisse dire. Il semble au contraire qu’il ait été respectueux des choix personnels des citoyens romains et que, dans son action quotidienne, il ait tenu la balance relativement égale entre les représentants des deux religions. Je ne crois donc guère à la thèse pourtant assez répandue selon laquelle Constantin aurait assuré le triomphe de cette secte dans le but d’unifier son empire sous l’égide d’une seule religion. A ma connaissance, aucun texte de l’époque ne porte témoignage d’une telle motivation. Nous ne saurons jamais s’il avait tenté de rallier à sa cause les prêtres des cultes traditionnels et s’il avait trouvé des interlocuteurs peu réceptifs. L’idée d’unir un empire autour d’une secte querelleuse, ultra minoritaire et de mauvaise réputation paraît en tout cas quelque peu incongrue. Il semble que Constantin aurait eu meilleur compte de remettre à l’honneur les antiques vertus de la république romaine. Les français n’ont pas eu besoin de religion pour s’unir à Valmy ou à Verdun, pas plus que les russes à Leningrad ou Stalingrad. Comme le rappelle Diderot citant l’évangile « Le Christ a dit qu’il était venu pour séparer l’époux de la femme, la mère de ses enfants, le frère de la sœur, l’ami de l’ami ; et sa prédiction ne s’est que trop fidèlement accomplie ». Je crois plutôt que Constantin, fort dans la société militaire mais manquant de relais dans la société civile, voulait élargir son assise politique, qu’il était à la recherche d’un soutien populaire, d’une force organisée et dévouée sur laquelle il pourrait s’appuyer en cas de besoin. Il fallait des gens sûrs pour garder la boutique pendant qu’il guerroyait au loin pour rétablir par les armes l’unité de l’Empire, des gens sûrs qu’il pouvait « tenir « Comme d’autres après lui, dans des périodes troublées et parfois en dehors même de ces périodes, ont trouvé dans des organisations factieuses ou criminelles les viviers où ils pouvaient recruter les hommes de main nécessaires à l’exécution de leurs basses besognes, Constantin s’est intéressé aux chrétiens dont la réputation de ce point de vue n’était plus à faire. Les chrétiens avaient de leur côté besoin d’un soutien politique puissant pour échapper durablement aux persécutions. Il a donc conclu avec eux une alliance mutuellement profitable, ce qui était aussi un bon moyen de les contrôler. Il y avait cependant un grand risque en procédant ainsi d’accroître les divisions de la société, comme la suite de l’Histoire l’a montré. D’ailleurs Constantin ne s’est fait baptiser que sur son lit de mort, selon ce qui est rapporté, se ménageant ainsi jusqu’au dernier moment la possibilité de revenir à la croyance ancestrale pour le cas où l’affaire aurait mal tourné. Il avait également un intérêt évident à retarder le plus possible un baptême qui était supposé effacer toutes les fautes et tous les crimes…Il choisit comme officiant un prêtre arien pour des raisons demeurées obscures. Le succès de Constantin assuré il était naturel que les chrétiens continuent de soutenir l’organisation politico-religieuse qu’ils avaient contribué à mettre en place et dont ils étaient les premiers bénéficiaires. Il était également naturel que Constantin continue d’être favorable à une religion qui affichait son ambition d’unir la tradition humaniste de la partie occidentale de son empire avec la tradition mythique de sa partie orientale.
Le noyau dur du ch HYPERLINK "http://srg.hereses.chez-alice.fr/" ristianisme naissant semble avoir été constitué par la classe des esclaves instruits qui travaillaient dans l’administration impériale. Ces esclaves, qui comptaient dans leurs rangs de nombreux juifs, se rappelaient qu’au temps de Spartacus leurs prédécesseurs s’étaient révoltés contre les conditions inhumaines qui leur étaient faites, qu’ils avaient combattu victorieusement les légions romaines avant d’être défaits par elles et qu’à la suite de cette défaite des milliers des leurs avaient péri dans des conditions particulièrement atroces. Tirant la leçon de cet échec les chrétiens ont développé une doctrine de la non violence et de la désobéissance civile qui leur ont valu les persécutions que l’on connaît. Des phénomènes contemporains comparables, comme l’appui accordé aux mouvements fascistes par des classes aisées inquiètes de la montée du communisme, font penser que de tels désordres ont pu inciter l’establishment romain à remplacer la république par l’empire, un régime dictatorial supposé mieux à même qu’une république plus respectueuse du droit des gens, de faire le sal boulot de prévenir et réprimer les révoltes, sans être trop regardant sur les moyens utilisés. Le régime impérial romain était un régime de nature fasciste, ce dont Mussolini saura se souvenir. Le fascisme est d’ailleurs la forme la plus naturelle de pouvoir, celle qui sévit dans le règne animal où prime la force brute, celle vers laquelle tout régime démocratique a tendance à retourner dés qu’il n’est plus fermement soutenu par les citoyens. Ces esclaves instruits trouvèrent dans la HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Septante"« Septante », traduction en grec de la Bible hébraïque effectuée à Alexandrie vers l’an 270 avant notre ère, des récits qui reflétaient l’état d’esprit et l’histoire légendaire du peuple juif et, à travers lui, l’histoire des toutes premières civilisations de Sumer et d’Egypte. Ces récits ouvraient une espérance à leur triste condition et ils se les approprièrent. Un phénomène comparable s’est produit lorsque les esclaves noirs du sud des Etats-Unis ont découvert le christianisme au travers des lectures bibliques, l’ont adopté avec enthousiasme et célébré leur nouvelle croyance par de magnifiques  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Gospel" gospels. Vous remarquerez que l’esclavage est un sujet qui n’est pour ainsi dire jamais abordé dans les textes fondateurs du christianisme. On semble y être esclave comme on serait cordonnier ou forgeron, sans que cela porte davantage à conséquence. Etait-ce pour ne pas trahir l’origine sociale de beaucoup de chrétiens, ce qui aurait pu dévaloriser les thèses qu’ils défendaient ? St Luc, un des quatre évangélistes de la tradition, a dit qu’il était permis de fouetter les esclaves, ce qui pose le problème de savoir à quel moment cette aimable licence a été introduite dans le texte sacré. Les esclaves romains se sont tournés vers l’Empereur, pensant à juste titre qu’il vaut mieux s’adresser au Bon Dieu qu’à ses Saints. De la même façon nos ancêtres paysans soumis au double racket de la noblesse et du clergé voyaient dans l’autorité royale une espérance et un recours car l’attitude d’un homme, d’une institution, voire d’une espèce passe naturellement de l’agressivité à la bienveillance à mesure que ses pouvoirs s’accroissent et sont moins contestés. Au début du règne de Constantin les chrétiens formaient une organisation multipolaire, avec Rome comme pôle dominant, cimentée par la répression dont elle était l’objet, un mouvement syndical, révolutionnaire (le premier ?) et plébéien en même temps qu’une société de secours mutuel capable de susciter les plus grands dévouements. Hereses, pseudonyme utilisé par un homme qui, de façon tout à fait désintéressée, a étudié cette période avec persévérance et objectivité, en donne  HYPERLINK "http://www.hereses.com/" la description la plus fidèle possible compte tenu des lacunes de la documentation existante. Le mouvement chrétien venait des profondeurs du peuple, d’où sa force et sa légitimité. Les chrétiens formaient la fraction du peuple la mieux formée, la mieux informée, la plus dynamique, la plus déterminée. Le fait d’avoir au cours du 2ème siècle trouvé un dieu selon leur cœur a encore renforcé leur confiance en eux-mêmes. Les chrétiens, à la demande des pouvoirs publics, s’étaient regroupés en « collèges » placés chacun sous l’autorité d’un « évêque » qui répondait sur sa tête de la conduite de ses « collégiens ». Quelques intellectuels étaient venus s’y agréger comme d’autres beaucoup plus tard rejoindront le mouvement communiste. De généreux bienfaiteurs se sont mis de la partie. Ils deviendront évêques ! Ces collèges avaient essaimé sur tout le pourtour méditerranéen, particulièrement là où la diaspora suivant la destruction du temple de Jérusalem en l’an 70 avait créé des colonies juives. Ces différents collèges entretenaient entre eux des relations de solidarité. Ce mouvement avait été plusieurs fois persécuté, moins cependant que ne le veut la légende. Il semble qu’il n’y ait jamais eu plus de quelques centaines de martyrs même si un seul c’était déjà trop. Le mouvement chrétien était tétanisé dans l’attente d’un « grand soir »  HYPERLINK "http://eschatologie.free.fr/" eschatologique et obsédé par le souvenir de Spartacus apparu un temps comme sauveur des esclaves et disparu du champ de bataille sans laisser de traces. La Septante était lue et commentée au cours des assemblées de ces collèges qui se terminaient selon un rite obligé par une prière pour la santé de l’Empereur et la conservation de son empire.
Dans des conditions que nous tenterons de préciser, de nouveaux textes d’origine prétendument divine sont venus compléter la Septante. Les multiples incohérences qu’ils présentent de façon interne mais aussi entre eux montrent à l’évidence qu’il s’agit là de documents élaborés par des hommes, sans aide évidente de la part de l’Esprit Saint. Qui oserait prétendre que la qualité de ces textes, si éminente soit-elle, exclut qu’ils aient été écrits par des hommes ? Les erreurs géographiques et historiques qu’ils contiennent montrent que leurs auteurs n’ont pas été les témoins oculaires des évènements qu’ils prétendaient rapporter. C’est le sort de beaucoup d’ouvrages à succès d’avoir une suite. Ce fut le cas de la Septante dont ces textes littéraires constituent à l’évidence un prolongement. Le Coran participera plus tard du même phénomène. La Septante annonçait la venue d’un Messie ; va donc pour le Messie comme héros des nouvelles aventures. Les différents épisodes de sa vie seront élaborés pour coller au plus près à l’ouvrage de référence. Les correspondances manifestes relevées par Mrs Murdock, éminente spécialiste de l’histoire des religions, dans son ouvrage «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "disponible à amazon.com" Fingerprints of the Christ » n’occupent pas moins d’une douzaine de pages.
Où et quand cette suite a-t-elle été composée ? Nous en sommes réduits à des hypothèses qui peuvent être éclairées par les considérations qui suivent. Le monde gréco-romain n’était pas isolé. Il existait un continuum de civilisations depuis les rivages de l’atlantique jusqu’à ceux de la mer de Chine. Par des routes commerciales remontant souvent à la préhistoire circulaient les hommes, les marchandises, les techniques, les idées, mais aussi les mythes et les fables. C’est ainsi qu’on peut trouver de nombreuses ressemblances dans la généalogie, la biographie, le caractère, la doctrine, les pouvoirs et les hauts faits d’Attis (Phrygie), Dionysos (Grèce), Osiris et Horus (Egypte), Mithra et Zarathoustra (Perse), Krishna et Bouddha (Inde), et Jésus. Les divinités évoquées ci-dessus sont des divinités solaires, comme le dieu des chrétiens, lumière de lumière. Dieu est lumière, la lumière est conscience, la conscience suprême c’est Dieu. La boucle est ainsi bouclée. Dans la religion gréco-romaine, toutes les planètes sont divinisées. Les astres ont joué un grand rôle dans la vie des hommes de ces temps reculés. Rôle utilitaire pour se repérer dans l’espace et dans le temps. Rôle poético-philosophique en raison de la magnificence du spectacle qu’ils offraient. Il se trouve que le ciel que les hommes de cette époque avaient sous les yeux était beaucoup plus resplendissant qu’aujourd’hui parce que l’atmosphère était plus pure et la pollution lumineuse inexistante. Pour retrouver des conditions d’observation comparables il faut maintenant se rendre sur les sommets des Andes. Les prêtres des anciens cultes, il y a cinq ou six mille ans, furent les premiers astronomes, capables d’annoncer les saisons, les équinoxes, les solstices, les éclipses. Stimulés par ces premiers succès des ambitieux sans scrupules ont débordé ces savants et entrepris de fournir des prédictions astrologiques puis des explications du monde visible par des raisons invisibles, puis une éthique d’essence divine …ce qui dépassait à l’évidence leurs possibilités. Les religions ont été les premières tentatives d’explication des phénomènes naturels observés. La science désintéressée des premiers prêtres a été dévoyée en pseudoscience susceptible d’être commercialisées auprès du grand public et des puissants. Les religions d’aujourd’hui ne sont autres que des visions du monde imaginées en ces temps reculés par des intellectuels imprudents sévissant dans les différentes parties du monde. La science est née le jour où le savoir s’est démocratisé, où les phénomènes naturels ont acquis leur autonomie par rapport au divin. Dans les derniers siècles précédant notre ère et dans une zone comprise approximativement entre Alexandrie et Antioche résidait un ensemble de populations brutalisées, déjà, par la guerre et par les invasions. Des sectes issues du judaïsme, plus ou moins retirées du monde et férues de pratiques ésotériques s’y étaient multipliées. Il y circulait également toutes sortes de fous de Dieu promettant tantôt l’apocalypse, tantôt des lendemains qui chantent grâce à la venue d’un Sauveur providentiel. Beaucoup de ceux qui n’étaient pas encore des palestiniens fuirent la guerre et finirent comme esclaves à Rome ou ailleurs constituant les premiers noyaux acquis au mouvement chrétien. Alexandrie, qui pouvait rivaliser avec Rome par son influence et sa richesse, était peuplée alors estime-t-on à 50% par des juifs. Rappelons que c’est dans cette ville qu’avait été traduite en grec l’Ancien Testament sous le vocable de Septante. Fondée par Alexandre le Grand, Alexandrie était un foyer de diffusion de la culture grecque particulièrement actif en raison de la grande concentration de clercs attirés par sa  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" grande bibliothèque. Des fraternités cultivant les sciences occultes gravitaient autour de ce centre culturel. Les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Therapeutae" thérapeutes constituaient une de ces fraternités. Très ancienne il est possible que cette fraternité ait du son existence aux droits d’association accordés aux grecs par  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Solon" Solon au sixième siècle avant notre ère et arrivés en Egypte dans les bagages d’Alexandre. Le principe en sera repris par les « collèges » romains comme décrit précédemment. Ses traits caractéristiques la rendaient proches de celle des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Ess%C3%A9niens" Esséniens. Elle était composée principalement de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Juifs_de_l%27%C3%89gypte_hell%C3%A9nistique_et_romaine" juifs hellénisés. Comme la plupart des communautés monastiques celle des thérapeutes jouissait d’une implantation privilégiée étant située dans une riche région agricole, toute proche d’Alexandrie, au climat sain et agréable, aux vins renommés. Elle bénéficiait en outre des ressources halieutiques du lac Maréotis sur les bords duquel elle était établie. Allez savoir si ce n’est pas dans ce lac que les pécheurs des évangiles ont jeté leurs filets. Elle avait vraisemblablement essaimé ou noué des contacts en Egypte même et dans le reste du monde méditerranéen. C’est dans cette communauté qu’au début du 2ème siècle aurait été assemblé à partir de textes préexistants (comme on assemble plusieurs cépages pour faire un grand cru) le premier prototype du texte qui donnera naissance aux futurs évangiles. Cette attribution est assez naturelle dans la mesure où la similitude entre la doctrine des thérapeutes et celle des évangiles a frappé beaucoup d’observateurs. L’invention de l’amour du prochain dont on gratifie généreusement les chrétiens a son origine dans la « bonté parfaite » des Thérapeutes. On peut juger du reste que ce but est trop ambitieux, trop éloigné de la nature, et qu’il faut commencer par la bienveillance et, si celle-ci est payée de retour, par l’amitié.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Eus%C3%A8be_de_C%C3%A9sar%C3%A9e" Eusèbe de Césarée, intime de Constantin et premier historien ou pour mieux dire premier hagiographe de son Eglise (c’est à dire membre de sa  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Propaganda_Staffel" propagandastaffel) déclare implicitement que les « anciens écrits », les « récits allégoriques » des thérapeutes cités par  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Philon_d%27Alexandrie" Philon d’Alexandrie constituent vraisemblablement la base des évangiles  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Canon_(religion)" \l "Christianisme" canoniques, Dans son Histoire Ecclésiastique Eusèbe cite en effet Philon à propos des thérapeutes :
« Philon rend le même témoignage de ces thérapeutes en question et voici textuellement ce qu'il ajoute : « Il y a de ces hommes en beaucoup de pays de la terre et il fallait que les barbares eussent part à ce bien parfait aussi bien que les Grecs. Mais c'est en Égypte qu'ils sont le plus nombreux ; ils sont répandus dans chacune des divisions appelées nomes, et surtout aux environs d'Alexandrie. Les meilleurs d'entre ceux de tous les pays sont envoyés en colonie dans un pays tout à fait approprié et qui est comme la patrie des thérapeutes. Il est situé au delà du lac Maréotis, sur une butte de faible élévation. Cet endroit leur convient admirablement, aussi bien à cause de la sécurité qu'il présente que pour la salubrité du climat. »
Philon décrit ensuite leurs maisons et voici ce qu'il dit des églises de leur pays :
« Dans chaque demeure, il y a un oratoire appelé maison religieuse et monastère. C'est là que les thérapeutes se retirent pour accomplir seuls les mystères de leur sainte vie. Ils n'apportent avec eux ni boisson, ni vivres, ni rien de tout ce qui est nécessaire aux besoins du corps, mais les lois, les oracles rendus par les prophètes, les hymnes et les autres choses qui peuvent les aider à augmenter et à perfectionner leur science et leur piété. »
Plus loin il ajoute :
« Le temps qui s'écoule de l'aube au crépuscule est celui de l'ascèse. Ils lisent les saints livres et philosophent sur les doctrines de leurs ancêtres d'après la méthode allégorique. Ils pensent en effet que la parole elle-même est le symbole des choses cachées qui se manifestent dans l'allégorie. Ils ont aussi des ouvrages d'hommes anciens qui furent les premiers chefs de leur secte et qui ont laissé de nombreux monuments de leur système sous forme d'allégorie. Ils s'en servent comme de modèles et imitent leur genre de philosophie. »
Un tel langage paraît bien être celui d'un homme qui les aurait entendus expliquer les Saintes Écritures. Ce qu'il appelle les livres des anciens est peut-être vraisemblablement les évangiles et les écrits des apôtres, ainsi que certaines expositions des anciens prophètes, telles qu'on en trouve dans l'Épître aux Hébreux et les nombreuses autres lettres de Paul ».
Eusèbe met ainsi directement en cause l’attribution de la rédaction des évangiles aux quatre évangélistes de la tradition officielle car Philon, contemporain du supposé Jésus, ne peut avoir eu connaissance de documents qui n’ont pas encore été écrits ! Ce ne sont donc pas les évangiles qui ont pu servir de modèle aux «  livres des anciens » mais l’inverse. Dans les paraboles des évangiles Eusèbe reconnaît par Philon interposé le style allégorique utilisé par les thérapeutes. Voulant conforter la doctrine chrétienne en en montrant l’ancienneté et l’universalité, Eusèbe l’a en réalité affaiblie ; lui ou ceux qui ont altéré ses écrits.
On ne peut faire la liste de tous les textes utilisés par les rédacteurs étant donné l’extrême diversité des influences que l’on peut recenser dans le produit fini. Les textes ésotériques de la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Gnose_chr%C3%A9tienne" Gnose qui se sont abreuvés aux mêmes sources y tiennent certainement une place privilégiée. L’ancienneté de la communauté des thérapeutes permet de dire que la doctrine chrétienne est de fait antérieure à la date de naissance supposée du Christ. Saint Augustin lui-même dit quelque part que le christianisme est plus ancien que le Christ. Même si elle comptait dans ses rangs des esclaves, cette communauté se vivait comme une communauté d’hommes libres.et égaux en droits, une organisation étonnamment moderne par son caractère démocratique, son féminisme et son refus de toute forme d’esclavage. L’origine géographique de ces textes explique qu’il existe une étroite parenté entre les mythes chrétiens et ceux de l’Egypte ancienne. Mrs Murdock déjà nommée les a répertoriés dans un ouvrage d’une grande érudition «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "disponible à amazon.com" Christ in Egypt, the Horus-Jesus connection ». Horus, dieu à tête de faucon est un des principaux dieux du panthéon égyptien. C’est le dieu des heures, le dieu du temps. C’est aussi un dieu guérisseur car le temps finit par panser beaucoup de plaies. Les principales similitudes relevées par  HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/wiki/Gerald_Massey" Gerald Massey entre les attributs et les tribulations d’Horus et ceux de Jésus sont les suivantes :
Horus est né un 25 décembre (solstice d’hiver) dans une mangeoire
Il était de descendance royale et sa mère était la vierge Isis-Méry (Marie)
Sa naissance fut annoncée par une étoile se levant à l’est, trois sages y ont assisté
A l’âge de 12 ans c’était un enfant enseignant dans le temple et à 30 ans il fut baptisé
Il fut baptisé par « Anup le baptiste » qui plus tard fut décapité
Ce dieu égyptien avait 12 compagnons, aides ou disciples
Horus effectua des miracles, exorcisa les démons, marcha sur les eaux et ressuscita Osiris
Lui (ou Osiris, les dieux égyptiens échangeant souvent leurs traits et leurs destins) fut enseveli pendant 3 jours dans un tombeau et ressuscité
Horus/Osiris était aussi « le Chemin », « la Vérité et la Vie », « le Messie », « le Fils de l’Homme », « le Bon Pasteur », « l’Agneau de Dieu », « le Verbe fait Chair », « la Parole de Vérité ». On peut retrouver ces diverses expressions dans des textes de l’ancienne Egypte tels le «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Livre_des_Morts" Livre des Morts », ou sur les murs des chambres funéraires, les sarcophages etc. Les évangiles, particulièrement celui selon St Jean sont imprégnés de parfums égyptiens.
Horus s’est battu avec Set, personnification du mal
Horus devait régner mille ans…
Ces similitudes extraordinaires sont en partie controversées. Leur découvreur fut pourtant un des pionniers de l’égyptologie que rien ne semblait prédisposer à une telle mascarade. Faut-il croire que les documents contenant ces informations ont été retirés de la circulation par des mains anonymes ? Les religions ont toujours été très attentives à ce qui pouvait sortir des recherches archéologiques touchant à leurs origines. Elles s’arrangent toujours pour y glisser au moins un observateur. C’est sous les traits d’Horus que Jules César tel un nouveau pharaon fut représenté par les Egyptiens qui assimilaient puissance suprême et divinité. Ajoutons que le mythe chrétien du jugement dernier est directement inspiré de la pesée des âmes de la religion égyptienne et que le mythe chrétien de la résurrection de la chair est un écho des procédés de momification utilisés par les anciens égyptiens. On reconnaît donc trois sources principales d’inspiration dans les évangiles :
ce qu’on peut appeler la philosophie naturelle venue en droite ligne des sages du monde méditerranéen, principalement grecs. Elle se caractérise par l’ouverture d’esprit, la tolérance, la pondération, la douceur, la générosité, la fraternité, l’optimisme. C’est sur cet aspect qui ne suscite aucun conflit avec l’état d’esprit général en vigueur aujourd’hui que l’Eglise s’attarde le plus volontiers. C’est la partie de son message qui reste audible, mais elle n’est pas vraiment originale.
des  HYPERLINK "http://freethoughtnation.com/contributing-writers/74-barbara-g-walker/649-bible-morality-or-depravity.html" règles archaïques directement inspirées de l’Ancien Testament. Elles se caractérisent par l’étroitesse d’esprit, l’intolérance, le fanatisme, la violence, l’irascibilité, la vindicte, le pessimisme. C’est cet aspect de la religion catholique, prédominant jusqu’à une époque récente, qu’appréciait plus particulièrement le chancelier Hitler…
des éléments anecdotiques, poétiques et fantastiques dont une bonne partie est d’inspiration égyptienne. Est-ce avec de tels contes issus de son folklore national que  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cl%C3%A9op%C3%A2tre_VII" Cléopâtre, anticipant Schéhérazade, a séduit successivement César et Antoine ? Faut-il voir dans les étreintes de ces augustes personnages les lointaines prémices de la religion chrétienne ?
Les auteurs du prototype, satisfaits de leur ouvrage, l’auraient fait diffuser vers les diverses communautés avec lesquelles ils étaient en relation en tant qu’ouvrage ésotérique. Du fait de son succès qui dépassait toutes les espérances il aurait échappé à ses auteurs. Aucun marchand, fut-ce de religion, ne renoncera à proposer un produit qui se vend bien. La confusion entre fiction et réalité est assez naturelle à l’homme. A la sortie des théâtres où l’on jouait ces mélodrames qui font pleurer Margot il arrivait que des spectateurs attendent à la sortie les acteurs qui jouaient les méchants pour leur faire un mauvais parti !
Certains pères de l’Eglise, comme  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Justin_de_Naplouse" Justin Martyr qui vivait au milieu du deuxième siècle, n’ont pas manqué de relever les nombreuses similitudes existant entre les mythes païens, notamment égyptiens, et les mythes chrétiens. Ceci a suscité chez eux deux types de réaction :
Aux païens qui relevaient l’invraisemblance des mythes chrétiens ils répliquaient que ceux-ci n’étaient pas différents d’autres mythes auxquels ces païens ajoutaient foi depuis toujours
A ceux qui demandaient pourquoi il existait de telles similitudes ils rétorquaient que c’était le diable qui avait malignement répandu les mythes païens avant la venue du Christ pour semer le doute dans l’esprit des chrétiens quand la bonne nouvelle serait enfin annoncée !
Il est à noter que Justin n’a pas eu connaissance des quatre évangélistes puisqu’il ne les cite jamais, mais qu’il a eu connaissance du texte dont ils sont inspirés. Irénée, évêque de Lyon, aurait écrit vers la fin du deuxième siècle : « Par ailleurs, il ne peut y avoir ni un plus grand ni un plus petit nombre d'Évangiles (que quatre). En effet, puisqu'il existe quatre régions du monde dans lequel nous sommes et quatre vents principaux, et puisque, d'autre part, l'Église est répandue sur toute la terre et qu'elle a pour colonne et pour soutien l'Évangile et l'Esprit de vie, il est naturel qu'elle ait quatre colonnes qui soufflent de toutes parts l'incorruptibilité et rendent la vie aux hommes. D'où il appert que le Verbe, Artisan de l'univers, qui siège sur les Chérubins et maintient toutes choses, lorsqu'il s'est manifesté aux hommes, nous a donné un Évangile à quadruple forme, encore que maintenu par un unique Esprit. » Voilà une preuve historique dont la rigueur ne manquera pas d’impressionner. Il est loisible de s’interroger sur les motivations des auteurs de ce protoévangile :
Etaient-ils à la recherche de la gloire littéraire ? Prenaient-ils à cette fin la suite d’un ouvrage à succès aux recettes éprouvées comme la Septante ?
Etaient-ils en tant que prêtres de la religion pharaonique à la recherche de ressources nouvelles, la conquête romaine les ayant ruinés ? Après la destruction du temple de Jérusalem en l’an 70 de notre ère et la défaite de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Bar-Kokhba" Bar Kokhba en 135, le clergé juif expatrié ou dissident était lui-même en mauvaise posture et pouvait être désireux de s’associer à cette tentative.
Ont-ils répondu à une requête occulte de l’autorité impériale désirant disposer d’une religion syncrétique fournie clé en main ? Il faut dire à ce sujet que les empereurs romains ont été fascinés de tout temps par la religion égyptienne au point de rendre un culte à certaines de ses divinités, notamment  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Isis" Isis. Le pharaon était un dieu, qui plus est un dieu solaire, tout comme les empereurs romains. Comme tous leurs compatriotes les empereurs ont dû être émerveillés par les réalisations de la civilisation égyptienne encore alors dans tout son éclat. Ils ont du rêver, eux qui étaient assis sur un trône éjectable, de l’extrême stabilité du régime pharaonique qui durait depuis des milliers d’années grâce à l’emprise totale, tant économique que morale et culturelle, que ce régime théocratique exerçait sur ses populations. Le pouvoir des empereurs romains était soumis à la fortune des armes et aux intrigues politiques, alors que les pharaons pouvaient compter sur la crédulité soigneusement entretenue du peuple égyptien. Il faut observer toutefois à l’encontre de cette thèse que les politiques récupèrent plus souvent qu’ils ne suscitent.
Appartenaient-ils à une école d’Alexandrie  qui aurait choisi comme sujet d’examen un exercice de style du genre: « Imaginez une religion nouvelle intégrant le plus possible d’éléments déjà existant dans d’autres religions sans craindre de recourir au merveilleux» ? Sommes nous en présence de la meilleure copie ?
Ont-ils voulu sauvegarder en les croisant la religion égyptienne et la religion juive menacées toutes deux par la colonisation romaine espérant obtenir ainsi un hybride particulièrement robuste et susceptible de plaire à une clientèle internationale ? C’est cette dernière hypothèse qui paraît la plus séduisante. Les Thérapeutes auraient repris, avec d’autres moyens il est vrai, la tentative désespérée de Cléopâtre de sauver à la fois son trône et la civilisation égyptienne en faisant à son peuple (et aux généraux romains vainqueurs) le don réitéré de sa personne ! Leur véritable coup de génie a consisté à personnifier des mythes familiers à beaucoup dans un cadre historique et géographique qui ne soit ni trop proche ni trop éloigné de l’Alexandrie de la première moitié du second siècle. Il faut dire que les prêtres égyptiens, tout comme les rabbins, bénéficiaient de plusieurs milliers d’années d’expérience dans la fabrication des textes sacrés ! L’Eglise catholique assure que les évangiles ont été écrits avant la fin du premier siècle sur la base d’une tradition élaborée durant la première moitié de ce siècle. J’ai relevé à l’appui de cette thèse l’argument suivant présenté par son auteur comme le meilleur, sinon le seul : les évangiles ne font allusion à aucun évènement postérieur à la première moitié du premier siècle. Argument particulièrement faible si l’on songe que ceux qui ont imaginé ces récits ont certainement évité soigneusement tout anachronisme. Si, d’aventure, de tels anachronismes avaient été commis ils auraient certainement été effacés au cours des nombreuses révisions qui ont suivi.
Il se peut que cet OVNI littéraire, désigné quelquefois sous le nom d’ «  HYPERLINK "http://www.marcion.info/" Evangelion », ait séduit  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Marcion_de_Sinope" Marcion originaire de Sinope sur l’Hellespont qui en aurait assuré la promotion à Rome vers l’an 140 de notre ère. Il y fit connaître ainsi pour la première fois le personnage de Jésus. De fait on ne trouve aucune allusion aux évangiles dans quelque texte que ce soit durant les cent cinquante années suivant la naissance supposée du Christ. Les collèges qui constituaient le milieu idéal pour la diffusion de l’Evangelion l’auraient alors pris en considération mais auraient rejeté celui qui le portait car Marcion refusait de reconnaître la validité de la Septante que les collèges chérissaient. C’est à partir de ce texte initial que les différents évangiles que nous connaissons ont été rédigés, soit pour répondre aux besoins de diverses communautés, soit pour combattre différentes hérésies, soit pour introduire certaines innovations théologiques, soit pour servir certains intérêts politiques. Pour accréditer de telles histoires quatre témoins valent mieux qu’un. Les évangiles apparaissent comme un patchwork d’éléments tirés des diverses traditions religieuses du monde méditerranéen si bien qu’au bout du compte il est difficile d’y trouver un élément qui soit entièrement original. Il faut reconnaître toutefois qu’il s’y ajoute une dose supplémentaire de générosité, ou de charité selon la terminologie chrétienne. Je préfère cependant le mot de générosité, car dans celui de charité je crois déceler un brin de condescendance. Quel que soit le nom donne à ce sentiment il faut chercher son origine dans le caractère associatif et populaire du mouvement chrétien, cousin et héritier de celui des thérapeutes. Pour la première fois dans le monde méditerranéen une religion ne se contentait pas d’attirer sur ses fidèles la faveur des dieux ou d’écarter leur courroux, elle faisait de l’homme lui-même un demi-dieu méritant respect et amour, quelle que soit son origine sociale. Nous vivons encore de cette tradition lorsque tout va bien.
Les évangiles ont fait l’objet d’ajustements successifs pendant des siècles et n’ont pris leur forme définitive qu’à la fin du 16ème, soit peu après l’invention de l’imprimerie ! Il ne reste pas trace avouée de ces ajustements, l’Eglise de Rome s’étant montrée très vigilante à cet égard. C’est sous le règne de l’empereur chrétien Théodose (344-395) qu’ont été détruits par des chrétiens la bibliothèque d’Alexandrie et tous les ouvrages qu’elle abritait, que ses clercs ont été assassinés ou dispersés. Il s’agissait de supprimer tous les témoignages gênants, qu’ils soient matériels ou humains, de la supercherie que constituait la fabrication des évangiles. On peut penser qu’HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Hypathie"Hypatie est morte en martyre de la Vérité en essayant de s’opposer à ces destructions. L’Europe restera entre les mains de ces talibans chrétiens pendant plus de mille ans.
Le culte chrétien a été conçu et ajusté pour ne pas modifier les habitudes des populations de l’empire. Les gens simples avaient l’habitude de confier leurs soucis de santé à une multitude de dieux guérisseurs. Ils se trouvaient intimidés par un dieu unique et tout-puissant qu’ils craignaient d’importuner par leurs requêtes. Qu’à cela ne tienne; les martyrs et les saints dont les vertus thérapeutiques étaient largement reconnues furent là pour prendre la relève. Attirant les fidèles vers les lieux de culte, les martyrs furent multipliés au point qu’on a pu dire que les martyrs furent inventés par les évêques et qu’on se disputa leurs reliques… Païens et nouveaux convertis fréquentaient les mêmes cimetières et s’y livraient à des activités sociales et festives tout à fait comparables au point qu’ils pouvaient s’y retrouver et s’y mélanger. Aujourd’hui encore la mort permet de faire communier dans le souvenir des personnes de croyances opposées. Les sanctuaires païens reprirent du service au bénéfice de la nouvelle religion et continuèrent d’abriter les cérémonies et les repas sacrés. La communion sous les deux espèces, pain et vin, est un souvenir de ces agapes. Les danses sacrées elles-mêmes et, dans certains cas, le sacrifice d’animaux domestiques continuèrent d’y être pratiquées jusqu’à ce que l’Eglise se sente suffisamment forte pour les interdire. Célébrées à Rome, Noël fête du soleil, et Pâques, fête de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cyb%C3%A8le" Cybèle, sont les fêtes du solstice d’hiver et de l’équinoxe de printemps dont l’origine se perd dans la nuit des temps. « Mars qui rit malgré les averses prépare en secret le printemps » et, avec lui, le retour des beaux jours et des franches lippées. Noël fut décrété jour de la naissance du Seigneur Jésus qui, du même coup, devint un dieu associé à la lumière. La fête de Pâques fut également christianisée. Dans le calendrier païen la fête de Pâques commençait le 15 mars par une semaine d’abstinence. On commémorait le 22 la mort et l’enterrement du dieu Attis, parèdre de Cybèle, représenté par le pin toujours vert et on fêtait le 25 sa résurrection. C’est dans le mythe chrétien la même semaine d’abstinence qui précède la crucifixion et le même délai de trois jours qui sépare la mort du Christ de sa résurrection…La fête des rameaux au début de la semaine sainte rappelle explicitement le renouveau printanier. La continuité est évidente entre le rite païen et le rite chrétien. Le mythe de la résurrection a été aménagé pour assurer dans un cadre chrétien la pérennité d’une fête traditionnelle et populaire. Autre exemple d’astrothéologie : l’ascension de la Vierge le 15 août qui correspond au fait qu’à cette date la tremblante lueur de la constellation éponyme disparaît, occultée par le rayonnement du soleil.
Différentes raisons conduisent à douter de l’entière authenticité des épîtres dites de St Paul qui sont considérées comme la première expression aboutie de la doctrine chrétienne. Ces épîtres n’ont en effet nullement le ton qu’emploierait un homme qui, selon la légende, ne représente que lui-même et qui cherche à faire partager ses convictions. C’est celui d’un inspecteur délégué par la maison mère auprès de succursales manifestant des velléités d’indépendance. Qui diable aurait pu financer les nombreux voyages de Paul dans ces contrées lointaines ? Lui-même n’était, toujours selon la légende, qu’un humble artisan qui disposait de peu de ressources. Ces épîtres se soucient de bonnes pratiques et de bonnes mœurs, nullement d’annoncer la bonne nouvelle. Leur fonction est thérapeutique à l’égard du corps comme à l’égard de l’esprit. Paul est un juif hellénisé qui s’adresse à d’autres juifs hellénisés. C’est un réformateur pur et dur du judaïsme, l’équivalent de ce que pourront être plus tard Luther ou Calvin pour le catholicisme. Paul a ignoré Jésus et les évangiles sans quoi il aurait multiplié au cœur de son texte les allusions à leur héros et à ses hauts faits. S’il avait véritablement cru à un Jésus divin, il en aurait fait inévitablement le sujet central de ses épîtres. Le contraste est frappant à la lecture entre d’une part une pensée qui cherche sa voie, avec de temps en temps des fulgurances et d’autre part des ajouts cosmétiques tirés d’on ne sait quel catéchisme qui tentent d’impliquer dans l’exposé Jésus, le Christ ou Jésus-Christ. Vous pouvez supprimer des épîtres toutes les références à ce personnage sans altérer le moins du monde ce qu’elles ont d’original. Ces références dont beaucoup viennent comme des cheveux sur la soupe ont été manifestement plaquées sur un texte préexistant. Leur suppression ne fait que donner au texte plus d’unité, de style et de force et, de toute manière, le Christ invoqué dans la version qui a cours actuellement n’a pas de réalité charnelle, n’est pas un héros incarné dans l’histoire. Paul ne s’est pas davantage converti à un christianisme qui n’existait pas encore en tant que religion sans quoi, soucieux de pédagogie et abondant en paroles comme il l’était, il n’aurait jamais laissé à d’autres le soin de faire le récit de sa conversion sur le chemin de Damas. On peut remarquer qu’il ne fait jamais état de sa qualité de fondateur des différentes communautés auxquelles il s’adresse ce qui aurait pourtant été normal et aurait donné davantage d’autorité à ses propos. Il est naturel de penser que ces communautés juives implantées dans des villes commerçantes existaient depuis longtemps, qu’elles étaient en fait les lointaines héritières d’une tradition remontant aux phéniciens et qu’elles avaient probablement adopté le statut de « collège » ou son équivalent grec pour bénéficier des protections attachées à ce statut. Il est possible qu’elles aient accueilli en outre quelques réfugiés politiques juifs que l’expansionnisme romain avait multipliés. Les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Actes_des_Ap%C3%B4tres" Actes des Apôtres ont été rédigés pour donner un semblant d’unité et de vraisemblance à des textes disparates. Ils l’ont fait avec une certaine maladresse car le caractère de Paul, tel qu’il ressort de ces Actes est très différent de celui qui transparait dans les Epitres, ce que la plupart des observateurs ont noté. En dernière analyse la version la plus plausible de l’histoire de Paul est qu’il s’agissait d’un haut dignitaire du monastère thérapeute établi sur les rives du lac Maréotis et qu’il disposait de ce fait de l’autorité morale et des moyens matériels nécessaires pour visiter et chapitrer les communautés affiliées issues de la diaspora. Cependant la qualité de ces épîtres n’a pas échappé à ceux qui étaient en train d’implanter les premiers jalons d’une religion chrétienne en voie de constitution. Ils les ont donc outrageusement maquillées pour s’approprier leur contenu. Le style des épîtres peut paraître de prime abord emberlificoté mais soudain une sentence frappante, pleine de force et de clarté, émerge d’un magma de propositions à peine compréhensibles. Le talent du prédicateur se rapproche ainsi de celui du prestidigitateur qui détourne le regard des spectateurs vers un accessoire pendant qu’il tire de sa manche une blanche colombe. Le moment le plus réjouissant de ces épîtres est celui où il fait appel à la générosité de ses correspondants. Nous comprenons qu’il leur réclame les royalties que les « églises » franchisées devaient verser à leur franchiseur. Comme chaque fois que l’on présente une addition, ce moment se situe vers la fin du message. L’odeur de l’argent plus que celle de l’encens est en définitive ce qui donne à ces missives un discret parfum d’authenticité. St Paul, parce qu’il a illustré efficacement l’art et la manière de faire la quête, peut être revendiqué à bon droit par l’Eglise comme un de ses principaux pères fondateurs !
Constantin avait un problème particulièrement difficile à résoudre qui était de concilier le monothéisme hérité de la religion juive avec le culte traditionnellement rendu à un Empereur divinisé. Cette difficulté était bien sûr inconnue du paganisme qui multipliait à loisir les divinités en fonction des besoins. Se prévaloir d’une origine divine ou d’une accointance avec le divin n’était pas inhabituel dans la Rome antique. Les grandes familles revendiquaient souvent ce genre de filiation. Les empereurs se flattaient d’appartenir à la lignée qui de Jupiter, qui d’Hercule ou Vénus, ou comme le prétendait Constantin, d’Apollon. Le mythe d’un messie hérité de la tradition juive et déifié par les chrétiens sous le nom de Jésus en venant s’ajouter au mythe d’un Dieu créateur accroissait encore les difficultés d’un Empereur désigné dans le monde grec comme Christos (l’oint du Seigneur) et qui redoutait la concurrence. Dans l’Eglise orientale un certain  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Arianisme" Arius niait la divinité de Jésus. Visait-il par ricochet l’Empereur lui-même en affirmant qu’on ne peut être à la fois dieu et homme (ce qui ne manque pas d’un certain bon sens) ? Il fallait d’urgence recadrer la doctrine chrétienne dans un sens qui préserve le caractère divin de l’Empereur, justification de son pouvoir absolu. Un concile a été convoqué à cet effet par Constantin. Ce concile s’est tenu à Nicée, ville proche de Constantinople, nouvelle capitale de l’Empire fondée par Constantin, et il a été organisé de manière à devenir la chambre d’enregistrement de la volonté impériale. Le choix même du site de Constantinople, point de passage obligé entre l’Europe et l’Asie Mineure, témoigne d’un souci géostratégique, non d’un souci théologique. Constantin a présidé lui-même ce concile et il a convoqué une écrasante majorité d’évêques orientaux fraichement nommés, plus faciles à manipuler pour cette raison que des évêques occidentaux dépositaires d’une tradition déjà ancienne. Le Credo du concile de Nicée résume le résultat de leurs  « travaux » : « Nous croyons en un seul Dieu le Père tout Puissant, Créateur de toutes choses visibles et invisibles, et en un seul Seigneur Jésus-Christ, le Fils unique, c’est-à-dire, le Fils de Dieu, né du Père comme Fils unique, c’est-à-dire né de la substance du Père, Dieu né de Dieu, lumière née de la lumière, vrai Dieu né du vrai Dieu, engendré, non pas créé, consubstantiel au Père, par qui tout a été fait ce qui est au ciel et ce qui est sur la terre, qui, pour nous les hommes, et pour notre salut, est descendu et a pris chair, s’est fait homme, a souffert et est ressuscité le troisième jour, est remonté aux cieux d’où il viendra juger les vivants et les morts, et dans le Saint-Esprit ». Il a fallu aller chercher l’idée d’une triade divine dans des mythologies plus anciennes pour satisfaire tous les candidats à la divinité. Cette motion de synthèse est bien au centre de la doctrine. Elle reflète l’équilibre des forces en présence. Elle a permis, pure poésie, que les rois mages, des prêtres zoroastriens, viennent se pencher sur le divin berceau où reposait le fruit des amours d’un père égyptien et d’une mère juive ! Dans ce Credo le Dieu créateur décrit par la Septante conserve ses privilèges. Jésus est intronisé pour rattacher le christianisme à la tradition messianique. Cette parabole vivante signifie que tout homme, même d’humble extraction comme l’était Constantin, peut accéder au statut divin. Il confirmait le statut divin de Constantin dans le cadre de la nouvelle religion, statut indispensable pour prétendre au titre d’Empereur. La compétition entre Jésus et l’Empereur en matière de divinité est résolue en les fusionnant : un trait d’union unit dans le Credo de Nicée Jésus et Christ, l’oint du Seigneur de la tradition romaine, c’est-à-dire l’Empereur lui-même. Le nom de Christ ne peut désigner Jésus qui n’a jamais été oint, mais, selon la tradition, baptisé avec l’eau du Jourdain. Recevoir une onction royale serait allé à l’encontre de son parti pris d’humilité et, dans l'esprit des évangiles, constituerait plutôt une marque de dérision ( HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/INRI" INRI). Le trait d’union marque à jamais l’entente étroite qui doit régner entre pouvoir temporel et pouvoir spirituel. Il vise à masquer la mégalomanie d’un homme qui veut se faire passer pour un dieu. Par ailleurs ce Credo ne parle pas de crucifixion, supplice réservé aux esclaves et qu’un Empereur ne saurait subir. Il se borne à dire qu’il a souffert sans préciser ni où, ni quand, ni comment, ni pourquoi. Lumière née de la lumière dit le Credo pour qualifier la deuxième personne de la Trinité. Cette expression désigne de manière transparente aussi bien Jésus, dieu solaire, que l’Empereur, fils de Sol Invictus. L’empire battait monnaie à l’effigie conjointe de sol invictus et de l’Empereur. L’Empereur régnant sur le monde romain est fils du soleil de la même manière que les empereurs de Chine ou du Japon, à l’autre extrémité du continent eurasien, sont fils du Ciel, ce qui illustre l’ancrage de certains archétypes dans le psychisme humain. Pour prix de sa complaisance il a été accordé à l’Eglise, in extremis et comme à regret, un accès à l’ordre divin en la personne d’un Saint-Esprit dont l’origine et les fonctions ne sont pas autrement précisées mais dont il devait être entendu qu’il était statutairement chargé d’éclairer l’Eglise. Chacun a pu ainsi trouver ce qu’il était venu chercher. Comme les trois mousquetaires les personnes de la Trinité étaient finalement au nombre de quatre, et avec la même devise : tous pour un, un pour tous ! La Trinité est la solution acrobatique d’un problème politique difficile, ce qui explique son caractère biscornu. Elle a bien entendu été adoptée à une majorité digne d’un congrès du parti de feu la glorieuse Union Soviétique. Quelle insondable prétention n’a-t-il pas fallu à toutes ces éminences pour décider par un simple vote de la structure intime de la divinité !? Quel rire homérique n’ont-elles pas dû retenir à grand peine au fond de leur gorge ? Comment, avec des têtes aussi enflées et des rates aussi dilatées, ont-elles pu quitter sans encombre la salle des séances ? Je suppose que, dans leur esprit, le problème posé était clairement politique. Lorsque le pouvoir est en jeu, on peut s’attendre à toutes les manipulations. Et Constantin était loin d’être un enfant de chœur. Admirons l’art avec lequel il a déguisé un conflit d’autorité en débat théologique ! Quelques siècles plus tard catholiques et orthodoxes s’opposeront sur la question de la Trinité. Pour la théologie catholique, le Saint-Esprit procède du Père et du Fils, tandis que, pour la théologie orthodoxe, il procède uniquement du Père. L’Eglise Orthodoxe, contrairement à l’Eglise Catholique, a longtemps refusé de reconnaître la primauté du pouvoir politique. Les chrétiens de base n’allaient pas désavouer sur ce point un empereur divinisé dont, comme tous les citoyens romains, ils célébraient le culte, ce d’autant plus volontiers qu’il les avait soustraits aux atrocités et comblés de ses bienfaits, qu’il avait été en somme leur «  Sauveur ». Ils ont donc accepté de voir en lui l’Unique Représentant sur terre du Dieu Unique. L’évêque de Rome a dû attendre les dernières années de l’Empire d’Occident pour devenir le chef suprême de l’Eglise Catholique car les derniers empereurs, décrédibilisés par leurs nombreux échecs, avaient alors perdu leur caractère divin. La force de l’arianisme et sa longue postérité montrent bien que, dés l’origine, l’historicité de la tradition catholique, insuffisamment supportée par des documents et des témoignages irrécusables, a fait question. A l’origine Jésus n’avait pas plus de matérialité immédiate que les autres dieux du monde antique. L’incarnation précise et circonstanciée du Sauveur Suprême relatée dans les évangiles est la trouvaille essentielle. Elle a fait l’objet de beaucoup de disputes. Elle a mis des siècles à s’imposer. C’est elle cependant qui a permis aux chrétiens de prétendre que leur dieu était plus « vrai » que tous les autres.
Suite au concile de Nicée qui constitue le véritable acte de naissance de l’Eglise chrétienne, une réécriture des textes évangéliques était nécessaire parce qu’il fallait combattre certaines hérésies, parce qu’il fallait mettre l’accent sur la divinité de Jésus et parce qu’il fallait introduire d’une manière ou d’une autre le dogme de la Trinité. C’est ainsi que l’évangile selon St Mathieu attribue au Sauveur une double généalogie. La première le fait descendant de David par Joseph, son père, ce qui correspond aux prophéties de l’Ancien Testament. La seconde le fait fils de Dieu par St Esprit interposé conformément aux décisions du concile. Il était assez facile à Constantinople, où s’élevaient les premiers lieux de culte dédiés à la nouvelle foi, de recruter pour faire ce travail des écrivains dont le Grec était la langue maternelle. Il n’est donc pas surprenant que les chrétiens orthodoxes byzantins se considèrent aujourd’hui comme les héritiers les plus directs de la tradition fondée par l’empereur régnant à l’époque dans leur ville. C’est d’autant plus justifié que, jusqu’à la séparation en 1054 de l’église romaine et de l’église orthodoxe, tous les conciles se sont tenus dans la partie orientale de l’empire. Seule l’église  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Coptes" copte d’Alexandrie revendique une fondation antérieure (284 après JC). On peut penser que c’est plus tardivement que l’épisode du jugement et celui de la crucifixion ont été incorporés aux textes canoniques pour renforcer leur caractère dramatique.
Cette religion hybride a trouvé un terrain favorable à Rome, ville cosmopolite par excellence. Il peut paraître surprenant qu’il se soit trouvé des gens pour ajouter foi à une telle construction qui ne disposait pas encore de la respectabilité que confère le grand âge. C’est oublier que les dieux les plus divers prospéraient alors librement à Rome, que l’esprit critique et scientifique était à l’époque réservé à une toute petite minorité de lettrés et que tous étaient intimidés par la puissance impériale qui soutenait cette religion. Rêves et réalité, religions et science, mythologies et histoire, astrologies et astronomie cohabitaient alors sans que cela fasse problème. La distinction entre hommes et dieux n’était pas aussi nette qu’aujourd’hui. Les dieux avaient leur grandeur mais aussi leurs faiblesses dont il était possible de tirer parti. Les dieux et les déesses pouvaient copuler avec des représentants du genre humain et ils ne s’en privaient guère. De plus, et c’est peut-être l’essentiel, les mythes chrétiens ne faisaient que reprendre, en les coulant dans une histoire inventée, des mythes déjà connus de tous. Comme l’assure Eusèbe, la religion chrétienne n’est ni nouvelle ni étrange. Des sectes se créent encore aujourd’hui sur des bases tout aussi fantaisistes, malgré l’hostilité de la puissance publique et des religions en place. Le christianisme est originaire du monde gréco-romain et non du monde juif, sans quoi la langue originale des textes fondateurs eut été différente et la Mésopotamie, la Perse, l’Arabie auraient été évangélisées bien avant l’Espagne et la Tunisie. Le christianisme s’est diffusé au sein de l’Empire soutenu par son administration. Il a essaimé quelque peu par la suite, parce que la doctrine était émouvante et parce qu’elle bénéficiait du prestige de la Rome impériale. La culture américaine se répand bien au-delà de la sphère politique contrôlée par les Etats-Unis…
Les dieux de l’Olympe ont été façonnés par les poètes grecs et latins, et d’abord par les premiers d’entre eux,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Hom%C3%A8re" Homère et  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9siode" Hésiode, à partir d’un fond de croyances populaires qui remontent à la plus haute antiquité. Ces dieux ont conservé longtemps leur pouvoir de suggestion puisqu’ils ont continué d’orner les parcs et les salons de nos châteaux tandis que le dieu des chrétiens, représentant pourtant la doctrine officielle, y a été relégué le plus souvent dans de petites chapelles. Qui voudrait installer dans sa propriété les personnages de la Bible qui expriment le versant sombre de l’âme humaine quand les dieux grecs et romains en sont le versant rayonnant ? Il est probable qu’un paganisme souriant et compréhensif convient mieux au bonheur de l'être humain qu’un monothéisme sévère et implacable. Il est aussi plus satisfaisant, philosophiquement parlant, car il permet sans contradiction d’attribuer le mal à des puissances maléfiques au lieu qu’un dieu unique est responsable de tout. Les dieux de Rome n’ont jamais déclaré la guerre aux dieux d’Egypte, bien au contraire. Les conflits entre monothéismes remplissent les pages des journaux.
Croyez-vous que les histoires racontées par les innombrables mythologies d’innombrables peuples en d’innombrables contrées aient un quelconque fondement historique ? Ceux qui en furent les auteurs ont été sans doute les premiers surpris de la facilité avec laquelle leurs histoires ont été prises pour argent comptant. Leur acceptation par beaucoup de gens sensés ne fait que démontrer la force quasi irrésistible de la propagande officielle appuyée par la pression sociale et le wishful thinking. Ces mythes prospèrent car ils sanctuarisent les intérêts d’un clan. A force d’entendre parler avec autorité de Jésus comme d’un être divin ayant réellement existé on finit par le croire et le faire croire. La religion chrétienne naissante qui cherchait à se faire une place au soleil était tenue de proposer des histoires au moins aussi prodigieuses et émouvantes que celles de ses concurrentes en place. Ces fictions répétées inlassablement pendant des siècles à l’abri des contradicteurs ont fini par devenir une demi-vérité. Cette légèreté, méditerranéenne en l’occurrence, à l’égard de la vérité historique s’est perpétuée dans la tradition provençale des  HYPERLINK "http://mondediplo.com/2003/02/15soccer" galéjades. Il s’agit de « raconter des coups », de renchérir dans l’extraordinaire pour briller aux yeux de ses amis. Le phénomène touche toutes les religions. La religion chrétienne a fait au moins aussi bien dans ce domaine que la religion gréco-romaine qui l’a précédée. Des dizaines de textes tournant autour des thèmes évangéliques sont encore connus aujourd’hui dont certains réapparus récemment tels l’évangile selon St Thomas ou l’évangile selon Judas. Beaucoup d’ecclésiastiques admettent en privé, et de plus en plus en public, que les évangiles ne constituent pas un chapitre de l’histoire universelle mais une histoire sainte, c’est à dire un récit inventé pour faire passer un message. Benoît XVI lui-même n’a guère dit autre chose dans le discours qu’il a délivré récemment à l’espace culturel des  HYPERLINK "http://www.vatican.va/holy_father/benedict_xvi/speeches/2008/september/documents/hf_ben-xvi_spe_20080912_parigi-cultura_fr.html" Bernardins : « Vue sous un aspect purement historique ou littéraire, la Bible n’est pas un simple livre, mais un recueil de textes littéraires dont la rédaction s’étend sur plus d’un millénaire et dont les différents livres ne sont pas facilement repérables comme constituant un corpus unifié. Au contraire, des tensions visibles existent entre eux. C’est déjà le cas dans la Bible d’Israël, que nous chrétiens appelons l’Ancien Testament ; ça l’est plus encore quand nous, chrétiens, lions le Nouveau Testament et ses écrits à la Bible d’Israël en l’interprétant comme chemin vers le Christ ». Maudites soient la recherche historique et la linguistique qui obligent l’Eglise à cette douloureuse et tardive mise au point ! On attend avec curiosité que le Nouveau Testament qui ne présente pas, du point de vue de la vérité historique, plus de garanties que l’Ancien provoque le même « coming out » de la part de l’un des successeurs de Benoît XVI. Celui qui s’y risquera n’aura qu’à reprendre à son compte cette confidence faite par le pape Léon X (1475-1521) au cardinal Bembo «Quel bénéfice cette fable du Christ ne nous a-t-elle pas déjà apporté» ! La question se pose de savoir si la confidence de Léon X était une plaisanterie, une provocation, un paradoxe ou si elle reflète la pensée habituelle de l’Eglise à son plus haut niveau. Le pape qui se décidera à l’officialiser devra renoncer du même coup au confort douillet du Vatican, ce qui doit être particulièrement difficile au terme d’une vie de dur labeur; sans compter le risque de se faire assassiner par la Curie romaine avant d’avoir commis l’irréparable ! Pour reprendre un terme à la mode, la « traçabilité » des textes considérés comme sacrés par les chrétiens est à peu près inexistante. Les chrétiens apparaissent ainsi moins soucieux de l’origine et de la qualité de ce qui nourrit leur âme que de l’origine et de la qualité de ce qui nourrit leur estomac !
Épîtres de St Paul et évangiles rédigés soi-disant par des témoins oculaires ou très proches de l’événement, traduisent des préoccupations dont on imagine difficilement qu’elles soient synchrones. Jésus est le sujet quasi exclusif des évangiles. Il n’est présent dans les Epîtres qu’à titre d’ornement surajouté. Un trait commun aux Epîtres de St Paul et aux différents ouvrages de St Augustin, c’est qu’ils se contentent d’évoquer très brièvement l’épisode de la crucifixion qui est pourtant un évènement majeur de la vie supposée du Sauveur, événement qui aurait dû donner lieu de la part d’auteurs aussi prolixes à de nombreuses, longues et fortes méditations. Les commentaires des évangiles attribués à St Augustin sont de caractère scolaire et d’un style particulièrement plat quand ils en arrivent au récit de la passion, ce qui montre à l’évidence que cette partie des commentaires est d’une autre main. La seule explication plausible, c’est qu’au temps de St Augustin, le récit de la crucifixion n’avait pas encore été, sinon inventé, du moins reconnu officiellement. L’essence du christianisme contenue dans les épîtres a précédé l’existence ou la pseudo existence du Sauveur des évangiles. Le Jésus incarné des évangiles est une invention relativement tardive du mouvement chrétien. Aucun romain du premier siècle, nommé administrateur civil ou militaire du côté de Jérusalem n’a écrit à un ami resté à Rome : « Je vais t’en raconter une bien bonne. Sais-tu qu’ici un dénommé Jésus s’est prétendu fils du dieu des juifs et qu’il rend inutile le travail des vignerons en changeant l’eau en vin ? Tu peux le convier à tes prochaines libations, vieux pochard, tu feras des économies !». Aucun symbole chrétien dans les ruines de Pompéi ou d’Herculanum ensevelies en l’an 79 de notre ère par l’éruption du Vésuve. Il s’agissait pourtant de riches cités balnéaires et marchandes, au fait des dernières nouveautés. Dans un monde antique friand de prodiges et de mystères les histoires tellement extraordinaires racontées par les évangiles auraient dû normalement être connues dans tous les ports de la méditerranée, le temps qu’il faut à un navire pour traverser la mer. Elles auraient du être reprises, fut-ce pour s’en moquer, par les auteurs classiques des tout premiers siècles. Comme il n’en a rien été il faut conclure que ces derniers n’ont jamais eu connaissance ni des évangiles ni de leur héros. HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Marc_Aur%C3%A8le"Marc-Aurèle (121-180), empereur et philosophe, considérait sans indulgence le mouvement chrétien. Rien de ses « Pensées pour moi-même » ou de sa correspondance n’indique qu’il ait eu connaissance de leur inspirateur supposé.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Plotin" Plotin (205-270), un néoplatonicien, le plus grand philosophe de son époque, ne dit pas un traître mot du mouvement chrétien ni de son fondateur. Un homme, Jésus, qui séduirait les foules et ferait des miracles au point qu’on le prenne pour un dieu, mais qu’on laisse néanmoins massacrer, c’est un sacré scoop. Connaissez-vous un scoop qui aurait mis plus de cent ans à sortir ? Comment se fait-il qu’aucun intellectuel romain n’ait cherché à en savoir davantage quand il est finalement sorti ? Est-ce parce que le caractère onirique de cette histoire était évident pour tous ? Est-ce parce qu’il a été impossible aux enquêteurs d’obtenir le moindre renseignement de la part de la population juive locale faute d’une tradition orale qui aurait du pourtant exister en raison du caractère pour le moins insolite des évènements rapportés ? Aucun homme du nom de Jésus n’a laissé de trace conforme aux évangiles, ni dans l’histoire juive ni dans l’histoire romaine de source non chrétienne pendant les deux premiers siècles de notre ère. Le nom de Jésus est bien mentionné une fois et une seule par l’historien romain du premier siècle  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Flavius_Jos%C3%A8phe" Flavius Joseph dans une œuvre pourtant abondante, mais cette mention a été ajoutée après coup par un copiste complaisant. C’est du moins ce que pensent la plupart des experts. Le passage incriminé n’a été cité en effet par aucun des premiers Pères de l’Eglise qui connaissaient pourtant l’oeuvre de Flavius Joseph. Sa brièveté chez un auteur qui cite volontiers des faits minuscules contraste avec le caractère exceptionnel des faits rapportés. Il n’y a par ailleurs aucune liaison logique du passage incriminé ni avec le texte qui le précède ni avec celui qui le suit. Cette falsification ne fait que souligner l’étrangeté de son absence dans l’œuvre de Flavius Joseph. Un bel exemple de tripatouillage des textes illustrant les méthodes des chrétiens est fourni aux dépens de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Lucien_de_Samosate" Lucien de Samosate. Dans la version qui nous est parvenue d’un opuscule intitulé La Mort de Pelegrinus Lucien consacre plusieurs paragraphes dithyrambiques aux chrétiens. C’est en soi un sujet d’étonnement dans la mesure où Lucien est un auteur satyrique qui se moque de toutes les sectes comme dans son ouvrage Les Sectes à l’Encan, et qui était très lié avec Celse, contempteur des chrétiens. De plus il les loue particulièrement pour leur comportement face aux persécutions alors que, au moment où le texte a été écrit c’est à dire vers la fin du deuxième siècle, ces persécutions n’avaient pas encore véritablement commencé ! Dans un autre texte Lucien met les chrétiens dans le même sac que les athées et les épicuriens. Ni  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Juste_de_Tib%C3%A9riade" Juste de Tibériade, ni Philon d’Alexandrie qui vécut à Jérusalem, deux historiens juifs du premier siècle n’ont fait la moindre allusion à l’existence d’un prophète du nom de Jésus. Les très nombreux  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Rouleaux_de_la_mer_Morte" manuscrits (plusieurs centaines) cachés vers l’an 70 par un mouvement fondamentaliste local à Qumran, dans des grottes proches de la Mer Morte et retrouvés vers 1950, documents dont l’authenticité n’est pas contestée, n’en font pas mention non plus, ce qui paraît incompatible avec la popularité attribuée au personnage et sa proximité avec ce mouvement dans l’espace (Qumran est à une journée de marche de Jérusalem), dans le temps (c’est un contemporain) et dans les préoccupations, car ces fondamentalistes et de supposés chrétiens auraient chassé sur les mêmes terres spirituelles. Notons au passage que les manuscrits retrouvés se rattachent les uns à la Bible hébraïque utilisée de nos jours par le rabbinat, les autres à la Septante utilisée comme référence pour la fabrication des évangiles. La plus petite allusion à un prophète nommé Jésus qui aurait pu figurer dans ces manuscrits aurait été pourtant accueillie avec enthousiasme par les chrétiens ! L’examen de ces documents a été confié par l’état hébreu à des religieux, sans doute par souci d’objectivité et de transparence… Des documents ont disparu, avec celui qui était chargé de les étudier, dont on peut penser qu’ils étaient particulièrement dommageables pour certaines croyances… Aucun dieu d’aucune religion n’a jamais laissé le moindre témoignage autre que légendaire de son passage sur cette terre ! Il n’y a qu’un travail d’historien qui puisse dire si le récit de faits vieux de deux millénaires est conforme à la réalité ou s’il s’agit d’un ouvrage d’imagination. Il n’existe malheureusement pas de documents fiables au pedigree reconnu qui permettraient de faire ce travail sur les évangiles en procédant aux recoupements indispensables. Il est anormal que de tels documents n’existent pas compte tenu des circonstances de l’évènement supposé et de l’époque où il est censé s’être produit. Il est plus que probable que le Christ des évangiles n’a jamais existé. Celui qui a vraiment existé, c’est un certain Chrestus, vivant à Rome au premier siècle de notre ère, qui jouissait d’un grand prestige et d’une grande autorité au sein du mouvement d’entraide qu’il avait fondé, au point que les membres de ce mouvement ont été nommés chrétiens, disciples de Chrestus. Il est à noter que la langue française est restée fidèle à cette étymologie puisqu’on continue à parler de chrétiens et non de christiens. La secte des chrétiens était bien représentée en Gaule où elle eut à subir des persécutions, à Lyon notamment. Le malheureux Chrestus a été crucifié sur un ordre de Néron. Cet ordre fut exécuté par un procureur nommé Porcius Festus qui sévit ensuite en Judée. Ces évènements eurent lieu dans les années 60 de notre ère, trop tard pour attribuer la mort du Christ à ce procureur. Les auteurs des évangiles préférèrent donc lui substituer Ponce Pilate. Chrestus est un nom qui signifie en latin « le bon ». Il était fréquemment donné à des esclaves. Il n’y a pas si longtemps une dame de la bonne société pouvait encore interpeller un de ses domestiques d’un « Dites-moi, mon bon Joseph, ou mon bon Firmin ou mon bon Emile… » En 318-319, une église marcionite était construite à Lebaba près de Damas. Une inscription s’y trouve mentionnant Chrestos, le dieu bon, et non pas le Christ ou Jésus. Selon Georges Ory c'est la plus ancienne inscription d'église chrétienne que nous possédions. L’idée d’un dieu bon représentait certes un progrès par rapport aux dieux traditionnels cruels et capricieux ; un Jupiter, à brûler tout vif ; une Vénus, à enfermer à l’Hôpital ; un Mercure, à mettre à Bicêtre. Cette idée d’un dieu bon a été par la suite obscurcie. Chrestus (latin) ou Chrestos (grec) ne doivent pas être confondus avec Christos qui, rappelons-le, désigne en grec l’oint du seigneur. La légende chrétienne a instrumentalisé cet à-peu-près. Le poisson aurait été choisi comme signe de reconnaissance par les premiers chrétiens parce que les lettres d’ICHTUS, le mot grec désignant un poisson, seraient les initiales de Jésus Christ Fils du Dieu Sauveur. C’était également un symbole utilisé par les Esséniens, cousins des Thérapeutes. S’il existe une raison plus prosaïque, elle a été perdue. L’Eglise toute entière est édifiée sur ces quelques traits d’esprit pas trop subtils (le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Marquis_de_Sade" divin marquis parlait de calembours). Ne s’agissait-il pas plutôt du signe zodiacal du poisson ? HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Origine_des_ascensions_droites"Le point vernal était passé de la constellation du bélier à celle des poissons en l’an 60 avant notre ère  du fait du mécanisme de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Pr%C3%A9cession_des_%C3%A9quinoxes" précession des équinoxes. Par le choix de cet emblème les chrétiens auraient signifié qu’ils annonçaient une ère nouvelle (à noter que cette ère se termine en 2100 !). Autre exemple de calembour, le célèbre  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bf.doc" \o "tu es Pierre et sur cette pierre j'édifierai mon église" tu es Petrus et super hanc petram, ecclesiam meam aedificabo. Est-il plausible que ce jeu de mots ait été traduit de l’Araméen censée être la langue du Christ, de ses apôtres et de ses premiers fidèles / Il semble bien que le « Pierre » en question ait été ce fameux Chrestus dont les ossements pieusement recueillis par des camarades syndiqués auraient été inhumés dans la basilique St Pierre, après un séjour temporaire dans les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Catacombes_de_Rome" catacombes. Ces catacombes, d’anciennes carrières de pierre, avaient été acquises par le mouvement chrétien en l’an 212 afin d’assurer une sépulture décente à ceux de ses adhérents qui disposaient de petits moyens. Quand un homme qui se croit inspiré a le charisme nécessaire pour fonder une secte, celle-ci se développe autour de lui instantanément et localement. Le développement de la secte des chrétiens n’obéit à aucun de ces deux critères. Jésus est un héros littéraire au même titre que Don Quichotte, Gulliver ou Gargantua, un archétype créé par une synthèse habile dans un but apologétique de défense des faibles et des opprimés. Son histoire s’intègre dans le monde décrit par la Septante. Son caractère et ses propos rappellent ceux des Thérapeutes. Une des sources complémentaires d’inspiration possibles, outre un important apport égyptien comme nous l’avons vu, est  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Apollonius_de_Tyane" Apollonius de Tyane dont la vie et la doctrine l’ont fait comparer au Jésus des évangiles mais qui est proche également de Paul puisqu’on leur attribue à tous deux des voyages quasi identiques. Une autre est le « Maître de Justice » des esséniens qui connut un sort funeste. Bien loin d’être le fruit d’une révélation divine, la doctrine chrétienne est depuis ses débuts le produit d’intenses réflexions et manipulations qui se sont poursuivies au fil des siècles et qui ne sont pas encore achevées. C’est ainsi que le dogme de « l’immaculée conception » (le sexe, décidément, c’est sal !) a été proclamé au milieu d’un 19ème siècle dont le puritanisme est bien connu et que trois nouveaux péchés viennent d’être récemment ajoutés à la liste existante ! L’image du juste en croix figure déjà dans Platon et la croix elle-même est un symbole immémorial, déjà connu des égyptiens. La croix ansée est l’instrument grâce auquel Osiris insufflait aux défunts la vie éternelle. Un autre motif cruciforme est constitué par les cercles orthogonaux à partir desquels sont mesurés l’azimut et l’élévation des points de la voûte céleste. Les divinités aux ailes déployées qui soutiennent cette voûte « matérialisent » ces axes dans la mythologie égyptienne. La croix est aussi l’arbre de vie, symbole de fécondité. Pas de croix tracées sur les parois des catacombes abritant les restes des premiers chrétiens mais des petits poissons, et un jeune et séduisant berger portant un agneau sur ses épaules. « L’Eternel est mon berger »… On ne sait si l’intention du berger est de soigner ou de sacrifier l’HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Agnus_Dei"Agneau de Dieu … Cette représentation initiale du dieu des chrétiens n’est pas différente de celle utilisée pour les autres dieux antiques lesquels étaient des figures allégoriques bien plus que des héros incarnés dans l’histoire. Les chrétiens ont fait de longs efforts avant de trouver le dieu qui leur convenait. Ce n’est que très progressivement que, reflétant les temps qui s’assombrissaient, ce dieu souriant est devenu grave, puis tragique. C’est probablement le symbole de la croix qui a donné naissance à la légende de la crucifixion plutôt que l’inverse. Il n’y a pas de statue, de bas-relief, de peinture ou même de graffiti représentant le Jésus tel que nous nous le représentons actuellement souffrant sur la croix durant les dix premiers siècles de notre ère. A peine peut-on citer deux statues en argent commandées par Constantin pour la basilique St Jean de Latran où Jésus est représenté tel un magistrat romain. Aucune sentence tirée des évangiles n’est inscrite dans la pierre antique. Aucune scène tirée du Nouveau Testament n’a laissé de témoignage iconographique avant la chute de l’empire romain. Les persécutions ne sauraient tout expliquer. Les textes évangéliques ne permettent pas davantage de savoir à quoi ressemblait le Jésus qu’ils évoquent, s’il était grand ou petit, gros ou maigre, blond ou brun, barbu ou glabre, quelle était la couleur de ses yeux et comment il était vêtu, ce qui est inédit pour un personnage historique d’un tel calibre et renforce l’hypothèse d’un personnage purement imaginaire. De Gargantua vous saurez seulement qu’il avait un appétit… gargantuesque, de Gulliver qu’il était un géant chez les lilliputiens et un nain chez les brobdingnagiens, de Don Quichotte qu’il était un chevalier à la triste figure… On ne sait rien de ce que le personnage du Christ a fait pendant les trente premières années de sa vie sauf qu’à l’age de douze ans il a chassé les marchands du temple, une anecdote qui n’a été rapportée que par un seul des quatre évangélistes. S’il s’agit d’un fantasme on comprend l’intérêt qu’il peut y avoir à laisser les fidèles fantasmer à leur guise. La première figure du Christ adoptée par l’iconographie chrétienne avait les traits et le teint clair de l’empereur Théodose. Il faut reconnaître que les empereurs romains ont porté le culte de la personnalité à un degré jamais égalé depuis… Jusqu’à la fin de l’empire romain le culte chrétien s’est assez largement confondu avec le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Culte_imp%C3%A9rial" culte impérial. A partir de Théodose le paganisme est devenu une sorte de crime de lèse-majesté et puni comme tel. Ceci constitue une rupture et une régression par rapport à la tradition romaine de tolérance religieuse de la même façon que le régime impérial représente une régression par rapport à la République qui l’a précédé. Le signe de ralliement choisi par Constantin à la veille d’une bataille décisive ne fut pas la croix comme certains feignent de le croire, mais le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Chrisme" chrisme, un signe de bon augure qui lui était apparu en songe. C’est la victoire remportée dans cette bataille qui aurait déterminé selon la légende sa conversion au christianisme et conféré à ce signe la signification de Dieu bon, alias Chrestos. Constantin avait décidément un bon carnet d’adresses puisque c’est Apollon qui lui avait donné un coup de main dans d’autres circonstances…Au début du 4ème siècle, Jésus n’était pas encore Christ. Au début du 5ème, il n’était pas encore mort sur la croix, du moins de façon officielle. Au début du 6ème, on pouvait voir un Sauveur tout à fait serein arroser le sol de son sang, entouré du soleil et de la lune, divinités annonciatrices de bonnes récoltes. Encore cette représentation est-elle un cas isolé car, jusqu’au huitième siècle inclus, c’est un agneau sacrificiel qui prenait sur la croix la place du Christ. De toute antiquité le sang répandu a eu des vertus fertilisantes, comme en témoigne la multitude des rites sacrificiels. Qu’un sang impur abreuve nos sillons dit toujours notre Marseillaise. Il faut se souvenir qu’à la création de cet hymne le sang dont il s’agissait était celui de nos plus proches voisins ! Avec une telle formule dans son hymne national, étonnez-vous que le français soit souvent raciste, xénophobe et antieuropéen ! Je comprends que, lors des compétitions internationales, nos joueurs se sentent gênés de chanter à pleine gorge leur intention de répandre sur le terrain le sang impur de leurs adversaires ! D’autant qu’eux-mêmes viennent de tous les coins du monde. Comment pourraient-ils se dévouer sans arrière-pensées à la cause nationale alors qu’ils sont menacés à tout moment d’un contrôle au faciès ? Quoi de plus suspect en effet, aux yeux du vulgaire et de la police, qu’un beur ou un black dans une jolie voiture accompagné d’une jolie femme ? A-t-on bien mesuré le danger qu’il y a de ne pas chanter de bon cœur son propre hymne national ? Ne pourrait-on remplacer, hors les jours du souvenir, la Marseillaise souvent sifflée par un autre air connu, le «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Chant_du_d%C3%A9part" Chant du Départ » par exemple ou même «  HYPERLINK "http://bmarcore.club.fr/mil/mil123.html" La Madelon », un chant militaire moins martial certes, mais plus conforme aux évolutions de la société et à ce que le français peut avoir de sympathique quand il propose à la cantonade un coup de blanc sur un air d’accordéon ? A tout le moins ne pourrait-on se contenter de la musique de la Marseillaise et oublier ses paroles ? J’avoue un certain effarement lorsque j’entends le Stade de France entonner l’hymne national parce que son équipe est en train de dominer. Croyez-vous que nos commentateurs s’en offusquent ? Que nenni ! Est-il vraiment indispensable de passer pour des chauvins abrutis et dénués d’esprit sportif auprès de nos hôtes étrangers ? Réservons cet hymne aux circonstances qui le méritent
Jésus le Sauveur et le Christ Empereur devaient mourir simultanément puisqu’ils forment une entité indivisible : Jésus-Christ. L’épisode de la crucifixion du Sauveur ne sera incorporé à la doctrine officielle qu’à la fin de l’empire, époque sombre et chaotique s’il en fut, en tant que rite de fécondité accompagnant à la Pâque la résurrection de la nature. C’est le concile de Chalcédoine en 451 qui entérinera cette évolution. La crucifixion de l’Empereur par personne interposée a précédé de peu le démembrement de l’empire acté par l’abdication de l’empereur Romulus Augustule en 476. La crucifixion ne s’est définitivement imposée sous sa forme actuelle qu’à la faveur des famines et des terreurs de l’an mille. Aux populations qui se plaignaient d’avoir été abandonnées de Dieu, il était possible de dire qu’elles avaient tort de se lamenter puisque Dieu lui-même avait souffert sur la croix avant d’être glorifié. S’il a fallu du temps aux chrétiens pour s’apercevoir que leur Dieu était triple, il en a donc fallu encore bien davantage pour acclimater l’idée, à vrai dire peu banale, d’un dieu tout-puissant torturé et mis à mort, non par des dieux, ce qui avait été déjà conté, mais par des hommes, ce qui était sans précédent. Le supplice du Christ dont les juifs se seraient rendus coupables devait être vengé. La croix devenue instrument de torture est arrivée à point nommé pour justifier les croisades et, par la suite, bien d’autres abominations. C’est le glaive du pouvoir impérial qui, dés l’origine, a donné autorité à cette doctrine et à tous les textes qui la contenaient. Il n’est pas difficile de comprendre que des érudits qui consacrent toute leur énergie à commenter ces textes et qui font leur gagne-pain de cette activité n’admettront pas facilement qu’ils puissent être d’origine plus que douteuse. Ceux qui, étrangers au système, font état de leur scepticisme se heurtent à une sorte  HYPERLINK "http://www.linternaute.com/dictionnaire/fr/definition/omerta/" d’omerta de la part de ces « professionnels du divin ».
Quels sont les accords qui ont bien pu être conclus entre ce qui n’était encore qu’une secte séditieuse, honnie, persécutée et, comme la plupart des mouvements de résistance, traversée de querelles intestines, et un empereur contesté par l’establishment du fait qu’il n’appartenait pas à une grande famille, qu’il était le fils né hors mariage (comme Jésus) d’une servante d’auberge, chrétienne de surcroît, que l’on devine au demeurant maîtresse femme et supérieurement belle ? Imaginez une femme à la beauté sacrée telle  HYPERLINK "http://www.dailymotion.com/video/x7sq7z_sophia-loren-scene-culte_shortfilms" Sophia Loren ou  HYPERLINK "http://www.absolugirl.com/people-monica-bellucci-1.html" Monica Bellucci ! Il est naturel de penser que cette mère a laissé sur Constantin une empreinte qui explique en partie la faveur dont il fera bénéficier les chrétiens. Cette mère était-elle la fille d’esclaves juifs ? Elle profitera en tout cas de la position de son fils pour faire un long pèlerinage en Palestine et en rapporter toutes sortes de reliques moins authentiques qu’hautes en toc. Que n’a-t-elle rapporté la scie et la varlope de l’illustrissime charpentier ! Il est à penser que c’est elle qui a organisé la première mise en scène des « Lieux Saints » avec le concours empressé des commerçants locaux. Est-ce, au-delà de leur mutuel intérêt, l’influence de sa mère chrétienne la nouveauté de leur doctrine et son caractère social ou la force impressionnante de leur conviction qui a rapproché Constantin et les chrétiens ? Personne ne le sait. On sait par contre que, si nul ne ment par plaisir, les nécessités pressantes de l’action politique conduisent très souvent les hommes publics à pratiquer la désinformation avec la meilleure conscience du monde. A-t-il été impressionné par le fanatisme des chrétiens martyrisés et songé au parti qu’il pourrait tirer de leur détermination ? Ayant constaté qu’ils ne pouvaient être réduits, la meilleure solution pour lui n’était-elle pas de les associer à son entreprise ? «Si tu ne peux les vaincre, allies-toi avec eux» dit l’adage romain. Constantin a pu se livrer à une sorte de chantage vis-à-vis de ses adversaires : « Si vous vous opposez à ma politique, les esclaves vont se révolter comme au temps de Spartacus, mais il est possible cette fois que mes légions refusent de marcher contre eux ! ». Constantin n’aurait pas été le premier homme d’état romain à  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Gracques" s’appuyer sur la plèbe pour arriver à ses fins. En s’appuyant sur un syndicat Constantin a fait, pourrait-on dire, du péronisme avant la lettre. Le christianisme des origines est une doctrine de combat et, dans un combat, seul le résultat compte. Dans toute guerre la vérité est la première victime ! Or, toutes les informations concernant l’origine et les premiers siècles du christianisme ont été placées pendant toute cette période lointaine et plutôt agitée sous le contrôle exclusif d’un totalitarisme particulièrement musclé. Vous chercherez longtemps une réflexion critique formulée par un contemporain à propos de ce changement fondamental qu’a été la substitution du christianisme au paganisme comme religion d’Etat. Ces critiques n’ont certainement pas manqué. Elles ne nous sont un peu connues que par les réfutations qui en ont été faites et dont certaines ont été conservées.  Tous les documents prétendument historiques sont passés à un moment ou à un autre entre les mains d’autorités prosélytes et sont donc frappés de suspicion. L’action volontaire de l’autorité impériale et divers désordres liés aux persécutions dont les chrétiens ont été les victimes ont soi-disant détruit tous les documents originaux de l’Eglise des premiers siècles. Ces documents rédigés selon la légende (qui est encore la doctrine officielle de l’Eglise) par des apôtres ayant été en contact direct avec le Christ auraient pourtant dû constituer pour les chrétiens un legs inestimable et jalousement gardé. Il est tout à fait surprenant qu’aucun de ces documents ne soit parvenu jusqu’à nous, fut-ce en mauvais état, alors qu’il ne manquait certainement pas de fidèles pour les surveiller et éventuellement pour les dissimuler, sous l’autorité d’une organisation structurée et pérenne. Des copies presque aussi anciennes auraient dû forcément exister puisque les textes canoniques estampillés par l’Eglise sont censés être tout à fait authentiques. N’est-ce pas une réaction naturelle en cas de danger de faire des copies des textes importants pour les lire en cachette et de mettre à l’abri les originaux ? Détruits à Rome, auraient-ils pu l’être dans toutes les provinces de l’Empire où la foi chrétienne s’était prétendument répandue dés le premier siècle ? Il est naturel de penser que des copies auraient été réalisées en utilisant les meilleurs supports connus à l’époque dont de nombreux exemples montrent qu’ils auraient pu subsister jusqu’à nos jours. On ne saurait en effet accepter autre chose que le meilleur  comme support de la parole divine! D’autres documents encore plus anciens ont été préservés qui ne bénéficiaient pas de circonstances aussi favorables. Que l’on songe aux soins qui ont été pris plus tard pour conserver des morceaux de la vraie croix, la couronne d’épines, le saint suaire, le saint sang, les saints clous et d’autres reliques moins prestigieuses, au prix parfois de boucheries macabres lorsqu’il a fallu procéder au partage des reliques des saints les plus vénérés ! Comment connaissons-nous Cicéron, Virgile et tous les auteurs antiques ? Les copies successives grâce auxquelles nous pouvons lire leurs ouvrages n’en ont pas apparemment altéré la saveur ! Lorsqu’un ouvrage sacré a été substantiellement altéré c’est, selon toute probabilité, intentionnellement. On devrait s’attendre au minimum à disposer d’originaux incontestables des textes évangéliques de l’époque de Constantin, ce qui n’est pas le cas car ceux dont l’Eglise prétend disposer n’ont jamais été authentifiés par des experts indépendants. L’Eglise a du se livrer à une traque impitoyable de tous les écrits qui n’étaient plus conformes à l’évolution de sa doctrine de la même manière que, plus tard, le Politburo fera effacer des photographies officielles les visages des dirigeants tombés en disgrâce ! La disparition de tous les documents des premiers temps du christianisme est en tout cas bien commode pour entretenir le mystère. Une voûte élancée peut paraître miraculeuse une fois démontés les échafaudages et les cintres utilisés pour sa construction. Quelle serait l’histoire du fascisme si les historiens n’avaient à leur disposition que les écrits d’écrivains fascistes remaniés à loisir durant des centaines d’années par d’autres fascistes, en dehors de tout contrôle et de tout enregistrement fiable ? Ce serait celle d’un mouvement persécuté, uniquement préoccupé du bien commun, très loin de sa réalité mafieuse. C’est un phénomène comparable qui se passe avec l’Eglise qui ne livre aucun accès aux documents historiques, mais uniquement à ce qu’elle veut que l’on en pense. Il serait particulièrement instructif de dater au carbone 14 les plus anciens documents et les plus anciennes reliques détenus par les chrétiens, qu’ils se trouvent à Rome, à Constantinople, à Alexandrie ou ailleurs. L’examen devrait porter à la fois sur le support et sur les encres utilisées. Le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Codex_Vaticanus" Codex Vaticanus et le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Codex_Sina%C3%AFticus" Codex Sinaïticus, reconnus par l’Eglise comme les plus anciens exemplaires conservés de l’Ancien et du Nouveau Testament sont particulièrement concernés puisqu’ils sont supposés avoir été fabriqués pendant le règne de l’empereur Constantin. Il est frappant de constater que l’Eglise ne s’y réfère pas spontanément. C’est pour l’Eglise un devoir moral de faire procéder à leur examen de façon objective et contradictoire. Un document oublié pendant deux mille ans et non altéré intentionnellement est un document historique. Un document remanié cent fois à l’intérieur d’une structure opaque ne peut se parer de ce titre. L’Eglise garantit l’authenticité des textes sacrés qu’elle propose à ses fidèles et revendique une filiation ininterrompue avec le Christ. Qu’elle en fasse la démonstration ! Elle jure que la tradition qu’elle perpétue est de bon aloi. Qu’elle le prouve ! Des assertions extraordinaires exigent des preuves extraordinaires! L’époque à laquelle les faits sont censés s’être déroulés appartient sans conteste à l’histoire, pas à la préhistoire ni à la mythologie ! Quand on rapporte des faits à priori extravagants, c’est bien le moins que d’avoir de solides éléments de preuve et il est très naturel d’être soupçonneux quand on essaie de vous vendre une histoire invraisemblable selon les critères habituels. Cette méfiance est tout particulièrement justifiée connaissant la longue et étroite connivence qui a existé entre l’Eglise et le pouvoir politique. Il est peu probable que les prélats catholiques, douchés par l’histoire du HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Saint_Suaire"Saint Suaire de Turin, cherchent à répondre à ces interrogations pourtant légitimes. Il faut en effet se rappeler qu’il existe en divers lieux une dizaine au moins d’autres saints suaires destinés à attirer l’argent des pèlerins et que les essais de datation au carbone 14 effectués sur celui de Turin ont tous indiqué qu’il avait été fabriqué vers l’an 1300. J’émets l’hypothèse assez vraisemblable que la fameuse image a été obtenue par une méthode voisine de celle utilisée par  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Yves_Klein" Yves Klein qui faisait se rouler sur ses toiles des femmes dénudées enduites de peinture. Le temps qui passe fait pâlir les pigments…La sueur ou d’autres substances partiellement volatiles ont pu également jouer un rôle. Les parties saillantes laissent une trace sombre sur la toile. Sur le négatif de la photo en noir et blanc qu’on peut en prendre les parties saillantes apparaissent plus claires et les parties en creux plus foncées, ce qui donne l’illusion de voir des formes véritables, celles d’un visage par exemple ou celles de mains chastement croisées sur le sexe. Il ne serait pas surprenant que ces formes aient appartenu à quelque comédien qui, doté d’un physique avantageux, jouait de façon réaliste et convaincante le personnage principal dans la passion du Christ, drame représenté régulièrement sur le parvis des cathédrales. Tout ceci ressemble assez à un canular monté par des étudiants en médecine un soir de bamboche. Quelle que soit la véritable histoire de cette pièce d’étoffe, ce qu’il faut retenir c’est qu’elle ne saurait en aucun cas avoir l’origine qui lui a été généreusement prêtée. Fort sagement l’Eglise refuse d’ailleurs tout nouvel examen. Pourquoi ne pas avoir recherché l’ADN du Christ à partir des tâches de sang qui maculeraient parait-il l’étoffe ? Avouez qu’il y a tout de même de quoi se boyauter en voyant les hommages qui ont été rendus par les plus hautes autorités de l’Eglise à une fausse image tracée sur un faux linceul ayant faussement enveloppé le faux cadavre d’un personnage qui n’a probablement jamais existé !

Au bout d’une allée de faux buis, On apercevait un faux puits Du fond duquel la vérité N’avait jamais dû remonter.
(Georges Brassens, Histoire de Faussaire)

Les prélats les plus avisés doivent bien ressentir plus ou moins confusément que leur histoire est assez largement bidonnée, et les autres considèreront comme sacrilège de procéder ne fut-ce qu’à l’ombre d’une vérification. A son plus haut niveau la préoccupation de l’Eglise n’est pas la vérité historique mais la survie. Il ne faut donc pas s’attendre à ce qu’elle donne à ses adversaires un bâton pour se faire battre. Un bon dogme c’est d’abord pour elle un dogme que l’on peut commercialiser parce qu’il répond à un besoin des fidèles. L’honnêteté n’est ni une vertu cardinale ni une vertu théologale. Au contraire il est permis et même recommandé aux yeux de l’Eglise de déguiser la vérité si c’est en faveur de la cause. Pour les représentants de l’Eglise comme pour la plupart des gens, ce qui est vrai est d’abord ce qui est profitable. Comme dit Sosie, le valet de l’Amphitryon de Molière, « Le véritable Amphitryon est l’Amphitryon où l’on dîne »
Il n’y a guère de contestation parmi les spécialistes des Ecritures sur le fait que les textes canoniques ont été maintes fois modifiés. Les contestations portent seulement sur l’ampleur de la fraude. Protégés par la puissance impériale les fraudeurs ont pu se donner libre cours. Par les méthodes habituelles de la recherche historique l’observateur de bonne foi tend à restituer une histoire très différente de la tradition perpétuée par l’Eglise. Ceci est vrai pour l’ancien comme pour le nouveau testament. Il manque néanmoins de nombreuses pièces authentiques au puzzle, que celles-ci aient été altérées, déformées, remaniées, remodelées, réactualisées selon les nécessités du moment ou bien détruites par le temps, par les ennemis de l’Eglise ou par l’Eglise elle-même. Des livres et des chapitres entiers des évangiles ont été considérés comme canoniques puis écartés, certains faisant plusieurs allers et retours. Les critères utilisés pour la sélection des textes canoniques n’ont jamais été divulgués. Les fragments conservés les plus anciens datent au plus tôt du 4ème siècle. De quelle époque date l’antijudaïsme présent dans des textes considérés aujourd’hui comme authentiques alors qu’à l’origine ils étaient censés s’adresser à une clientèle principalement Juive ? Si les textes originaux ont disparu l’explication la plus plausible est qu’ils ont été détruits pour pouvoir les remplacer par d’autres. Toute reconstruction dans ce domaine comporte donc une part d’arbitraire. Convenez cependant qu’un homme politique prêt à tout pour asseoir et étendre son pouvoir est un spectacle familier pour tous ceux qui ont pu voir à l’œuvre encore récemment les grands fauves de la politique, plus familier en tout cas qu’un seul dieu en trois personnes, et tout porte à croire que l’homme d’il y a deux mille ans n’était pas très différent de celui d’aujourd’hui, ce qui constitue un fil conducteur relativement fiable. Deux explications au choix : appliquez la règle proposée par HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Rasoir_d'Ockham"Occam, choisissez la plus simple, c’est la plus plausible ! Deux pneus au choix prenez le plus gros, recommandait le bonhomme Michelin de mon enfance, c’est le plus sûr.
Si vous ne croyez pas aux miracles, s’il vous paraît impossible, comme à la plupart des experts, que des apôtres putatifs soient les véritables auteurs des évangiles, ce qui démontre dés l’origine l’intention de falsifier, si vous considérez que la doctrine chrétienne constitue une synthèse un peu trop adroite, que le jugement et l’exécution de Jésus ne correspondent pas aux usages connus de la justice romaine en territoire occupé ou si vous relevez que la phrase « il faut rendre à César ce qui appartient à César » fait du Christ un « collabo » improbable de l’occupant romain mais constitue quelques siècles plus tard un acte d’allégeance à l’Empereur, si vous ne comprenez pas pourquoi il a fallu payer un indic pour identifier un homme qui prêchait fréquemment et publiquement à Jérusalem devant une foule nombreuse, s’il vous semble invraisemblable qu’un homme populaire et charismatique, doté de dons exceptionnels et nullement en conflit avec les autorités romaines ait été exécuté sous couvert de ces mêmes autorités sans que personne s’en émeuve, vous en conclurez que ces textes doivent être considérés comme des documents de propagande, non comme des documents historiques, et vous ne pourrez qu’étendre vos soupçons à tous les faits qui y sont rapportés. Catholiques, protestants et orthodoxes ne sont même pas d’accord entre eux sur la liste des textes qui font partie des « saintes écritures » lesquelles comportent par ailleurs des contradictions ou des erreurs historiques. Quand au cours d’une enquête un policier constate des incohérences dans les témoignages recueillis sa réaction immédiate est de mettre en doute la totalité de l’histoire qu’on cherche à lui faire avaler. Une falsification ingénieuse s’est imposée en devenant mensonge d’Etat. Elle a été ensuite reprise par les « historiens », les artistes et les intellectuels de toutes spécialités. Elle est désormais gravée dans le marbre. Ne cherchez pas à vous faire une opinion objective en consultant les diverses encyclopédies. Le conformisme régnant fait qu’elles prennent pour argent comptant les livres sacrés du christianisme. Elles confondent sciemment document historique et ouvrage de propagande. Que pèsent les efforts dispersés d’une poignée de rationalistes épris de vérité en face des énormes machines de guerre médiatiques entretenues par des religions qui pilonnent inlassablement le même message depuis des millénaires? Il faut en effet de gros moyens financiers et des avocats au top pour défendre un aussi mauvais dossier. Le bon peuple et les arrivistes se rangent derrière ceux qui crient le plus fort. La caractéristique la plus fondamentale d’une dictature telle que le régime impérial romain est qu’elle traite la vérité par l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Fasciste" huile de ricin quand elle débute et par le plomb quand elle est bien installée. On ne peut dans ces conditions qu’essayer d’imaginer ce qui s’est réellement passé en utilisant des critères de vraisemblance. Or un homme politique se détermine avant tout pour des raisons politiques et la première de celles-ci est la conquête et la conservation du pouvoir. Il ne faut pas d’ailleurs s’en offusquer car le meilleur des chefs d’état potentiels, s’il n’est né roi, ne vaut rien s’il est incapable de s’imposer. C’est ainsi qu’il est permis de voir une certaine similitude entre un Constantin qui conforte son pouvoir en s’appuyant sur le peuple des chrétiens, seule force organisée en dehors de l’état lui-même, contre les patriciens tenants de la religion traditionnelle, et un  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Mao_Ts%C3%A9_Toung" Mao Tsé Toung qui lance la révolution culturelle pour reprendre la main après l’échec du « Grand Bond En Avant » … Les chrétiens auraient été en quelque sorte les gardes rouges chargés de rassembler les citoyens favorables à l’Empereur et de faire taire les opposants. Les évangiles auraient été leur petit livre rouge. A cela s’ajoutait certainement le sentiment répandu dans le peuple que l’adoration à Rome de tous les dieux de l’empire devenait gênante, que la société romaine, du fait de l’impunité que donne la surpuissance, était allée beaucoup trop loin dans le sens de la permissivité, de la cruauté et du cynisme et qu’une forme ou une autre de réarmement moral était devenue nécessaire. Constantin, proche du peuple, comprenait certainement ce sentiment même s’il y a fait personnellement nombre d’entorses, éliminant physiquement tous ses adversaires, faisant exécuter son beau-père et son neveu, assassiner sa propre femme et torturer à mort son propre fils … en toute charité chrétienne bien entendu. Ce jeu de massacre familial se poursuivra et s’aggravera encore à la génération suivante. Le choix historique de Constantin est le résultat d’un calcul politique. Il a constaté que la religion romaine traditionnelle n’était plus prise suffisamment au sérieux par beaucoup de citoyens. Or une religion crédible promettant des jours meilleurs est nécessaire pour faire patienter les classes déshéritées. Si ces classes sont séduites par une religion nouvelle correspondant à ce besoin, le pouvoir a intérêt à la soutenir, et si elle porte d’indiscutables valeurs morales, c’est encore mieux.
Est-ce à la relative bénignité de leur religion que l’on doit, après bien des péripéties, l’actuelle prédominance des chrétiens ? Il ne le semble pas dans la mesure où d’autres religions tout aussi lénifiantes comme le bouddhisme n’ont pas abouti au même résultat. Le christianisme s’est répandu sur la terre en tant que religion d’état grâce à la force des armes. Profitant plus tard de l’effondrement de l’empire romain, la religion islamique née de la prise de conscience de sa force par le monde arabe se répandra par les mêmes moyens sur tout le pourtour méditerranéen à l’exception notable des rivages de France, d’Italie et, pour un temps, des Balkans. Elle ne sera arrêtée que par quelques batailles décisives. Si ces batailles avaient été perdues (on sait que leur sort ne tient souvent qu’à un fil) les occidentaux feraient tous avec ponctualité, tournés vers La Mecque, leurs cinq prières quotidiennes ; sinon tous, au moins tous ceux qui seraient désireux de faire carrière.
A la mort de Constantin en 337, les chrétiens étaient suffisamment bien établis dans les rouages du pouvoir pour qu’il soit devenu plus difficile de réussir dans l’administration impériale sans être des leurs. La qualité de leur lobbying et la supériorité de leur organisation les avaient propulsés et maintenus au premier plan. Le cri de révolte des esclaves était devenu le cri de ralliement des maîtres. Existe-t-il meilleur exemple de récupération ? La religion qui permet d’enrégimenter et de formater les esprits est un enjeu politique majeur, au point qu’elle peut être parfois suscitée ou promue par le pouvoir à des fins purement personnelles. C’est le cas de l’église catholique, mais aussi celui de nombreuses églises protestantes. Les princes allemands et scandinaves ont encouragé la religion réformée pour échapper à l’emprise du Vatican et faire main basse sur les biens de l’Eglise. Le roi d’Angleterre a fondé l’église anglicane pour pouvoir épouser et répudier à sa guise. Les souverains français ont connu les mêmes tentations lorsqu’ils ont installé la papauté en  HYPERLINK "http://www.horizon-provence.com/papes-avignon/index.htm" Avignon. Les luttes sanglantes entre ces différentes religions d’amour nées de la même souche montrent bien que les véritables enjeux ne sont pas théologiques mais politiques. Les religions n’ont jamais été de longs fleuves tranquilles. La religion catholique a été longtemps un fleuve tumultueux avant de s’apaiser à proximité de son embouchure. Une religion bien établie dispose de moyens de pression suffisants pour imposer sa doctrine à la quasi-totalité de la population. Une secte est inévitablement éliminée là où la religion en place est hégémonique. Là où ce n’est pas le cas, une secte peut imposer ses bizarreries à une fraction de la population, celle qui, pour une raison ou pour une autre, se trouve en situation de faiblesse. Comme on le dit à juste titre, une religion est une secte qui a réussi. Comment peut-elle réussir sinon en s’alliant avec le pouvoir politique pour éliminer la concurrence ? C’est ainsi qu’une querelle théologique est tranchée par l’autorité politique. Imaginez que la validité d’une théorie scientifique soit décidée en fonction de la plus ou moins grande proximité de son auteur avec le ministre de la recherche…Un corollaire de ce principe voudrait qu’une religion qui perd durablement ce lien organique avec le pouvoir soit rétrogradée au rang de secte et perde progressivement de son influence…Dans la pratique la force de l’habitude fait qu’on lui conserve le nom de religion mais son influence est de beaucoup réduite. Dans un  HYPERLINK "http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/eglise-etat/sommaire.asp" état laïc la loi ne devrait d’ailleurs établir aucune distinction entre sectes et religions car il n’y a entre elles aucune différence de nature. Une religion est une secte qui est parvenue à établir une forme ou une autre de connivence avec l’autorité politique en devenant garante de l’ordre établi. Il n’y a de religion au plein sens du terme qu’une religion d’Etat. Dans un état laïque qui n’en reconnaît aucune il n’y a plus de religions mais uniquement des sectes, plus ou moins puissantes, plus ou moins prospères, plus ou moins influentes. La religion catholique est redevenue une secte en France depuis la loi de 1905 sauf en Alsace et en Lorraine, régions où elle bénéficie d’un  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Droit_local_en_Alsace_et_en_Moselle" \l "La_religion" statut particulier pour des raisons historiques. L’orientation politique conservatrice de ces régions est le reflet de leur statut religieux. Toute association cultuelle qui ne se distingue pas par des pratiques condamnables devrait jouir des mêmes droits auprès d’un pouvoir laïc. La puissance publique devrait par contre refuser d’accorder un quelconque statut aux associations cultuelles qui rejettent tout ou partie des lois civiles ou qui n’acceptent pas comme partie intégrante de leur doctrine les droits de l’homme… et ceux de la femme. Le mot même de religion doit rester banni des textes et des discours officiels. Le culte est public. Il ne peut être ignoré des autorités responsables de la sécurité et du maintien de l’ordre. La religion est d’ordre privé. C’est la grille que chacun, croyant ou non, porte en lui-même pour interpréter les évènements auxquels il est confronté. Dans cette acception, l’athéisme est une religion. La loi doit sanctionner tous les comportements déviants, qu’ils soient le fait de sectes débutantes ou de sectes ayant triomphé depuis longtemps. On peut d’ailleurs se demander si Trappistes et Carmélites ne sont pas les victimes consentantes de comportements sectaires. Ont-elles même toujours été consentantes ? L’endoctrinement des enfants dés leur plus jeune âge, à l’abri de toute réflexion critique, n’est-t-il pas constitutif d’un délit de sectarisme ? N’est-ce pas également le cas de l’invitation faite à des jeunes gens et des jeunes filles de prononcer des vœux supposés éternels de pauvreté, d’obéissance et de chasteté, parfois de mutisme, c’est à dire l’abandon de leurs biens à la communauté, l’abandon de leur droit imprescriptible de procréer, l’abandon de leur autonomie de décision et d’expression ? N’est-ce pas encore le cas de l’obligation sacramentelle faite aux fidèles de procéder régulièrement à leur autocritique devant un représentant de l’autorité ecclésiastique, ou de l’invitation pressante d’abandonner si nécessaire père et mère au profit de la Cause ? L’interdiction de toute relation sexuelle aux prêtres et aux religieux sous peine de licenciement n’est-elle pas constitutive d’un comportement sectaire qui nuit gravement aux droits de l’homme ? Que dire aussi de la fatwa prononcée par l’Eglise à l’égard de tous ceux qui ne lui font pas allégeance (hors l’Eglise, point de salut) ou du choix comme signe de reconnaissance de la croix, un instrument de supplice ? Pourquoi pas une potence, une chaise électrique ou une guillotine ? Une association cultuelle qui arriverait sur le marché avec un tel programme serait immédiatement classée dans la liste des sectes les plus dangereuses ! Une loi contre les sectes a été bloquée in extremis au parlement par une autre loi. Parce que quelqu’un s’était sans doute aperçu qu’une telle loi s’appliquerait aussi bien à l’Eglise Catholique ! L’autorité qui exigerait la disparition de ces divers anachronismes rendrait à cette église un signalé service. Quand on fait violence à la nature elle se rebiffe. Si ses prêtres étaient autorisés à se marier et s’ils étaient traités plus généreusement, Dieu en appellerait certainement à Lui un beaucoup plus grand nombre ! S’il est impossible de donner cette autorisation pour des raisons financières qu’on ferme les yeux sur leurs incartades tant qu’elles n’enfreignent pas les lois civiles ! Les religions protestantes,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89glise_orthodoxe" orthodoxes, juives et musulmanes ou les religions orientales sont également sectaires, mais à un degré moindre semble-t-il. La religion musulmane a été fondée par un homme qui, à la différence de Constantin, ne disposait pas des pleins pouvoirs. Cet homme a donc été présenté comme prophète envoyé par dieu, non comme dieu lui-même. Aussi les musulmans ont-ils été très longtemps plus tolérants que les chrétiens. Les églises orthodoxes sont organisées de façon relativement démocratique et n’ont pas grand chose à se reprocher sur le plan moral. L’église catholique, de par son origine, son organisation et sa doctrine, a une vocation oppressive et dictatoriale, comme elle l’a abondamment et continûment démontré au cours de l’Histoire. Tout pouvoir absolu a besoin de la caution d’une religion et toute religion a besoin du bras séculier d’un pouvoir absolu. Sauf dans un nombre limité de pays le catholicisme n’est plus une religion au sens strict. La religion de la plupart des pays occidentaux c’est le rationalisme des Lumières, c’est l’humanisme, ce sera bientôt l’écologie. Dans ces pays, l’opinion majoritaire des législateurs n’hésite pas à aller contre l’avis de l’Eglise. Dans les pays arabes, l’Islam est encore une religion où le seul contrepoids réside dans l’opinion internationale. Au nom de la vérité absolue qu’elles revendiquent les religions peuvent tolérer la barbarie. «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cathares" Tuez les tous, Dieu reconnaîtra les siens ».
Le concile de Nicée a été suivi d’une période de cafouillage pendant laquelle les disciples d’Arius sont provisoirement rentrés en grâce. C’était probablement un geste d’apaisement vis-à-vis des citoyens romains qui commençaient à trouver encombrant le culte de la personnalité institué par Constantin. Après la parenthèse de HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Julien_(empereur_romain)"Julien dit l’Apostat qui s’est refermée à la mort de cet empereur en l’an 363, il faudra à peine plus d’un siècle pour que l’empire romain soit complètement démembré. C’est bien ce que Celse avait pronostiqué deux siècles plus tôt, mettant déjà en cause les chrétiens. Julien était un neveu de l’empereur Constantin. Avec son demi-frère Gallus il avait survécu par miracle au massacre de la plus grande partie de la famille impériale perpétré par les fils de Constantin soucieux d’éliminer des rivaux potentiels. Un de ces fils,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Constance_II" Constance, élimina ses deux autres frères et maintint les deux neveux sous une étroite surveillance aussi longtemps qu’il le put. Pressé par les circonstances, par la vieillesse, par l’absence de descendant direct et par les coupes claires pratiquées jadis dans la famille impériale, Constance fut obligé de réintroduire Gallus et Julien dans le jeu. Gallus fut nommé César mais, faute de donner satisfaction dans cette fonction, il fut à son tour exécuté. Telles étaient les mœurs pis que fascistes et pis que mafieuses de la famille fondatrice du christianisme. Julien que son penchant pour l’étude des grands auteurs grecs et latins avait protégé jusque là fut nommé César à son tour. Contre toute attente cet intellectuel fit merveille dans ce nouveau rôle, reprenant la Gaule en main, sécurisant les frontières de l’est et se révélant un administrateur compétent. Pour rester cependant fidèle à la tradition familiale d’usurpation Julien se fit nommer Auguste et donc rival de Constance. Aussi, avec son armée de gaulois et de danubiens, il se mit en marche vers Constantinople où résidait l’Empereur pour le défier. Constance rattrapé par la maladie n’était pas en état de livrer bataille. Avant de mourir, soucieux du bien de l’Etat et jugeant sans doute que bon sang ne saurait mentir Constance reconnut Julien comme seul héritier puis se fit baptiser dans le but de se laver de ses péchés. Constance était arien et non nicéen.
Julien formellement élevé dans cette version de la religion chrétienne, se montra toutefois plus sensible aux doctrines philosophiques enseignées par ses maîtres et d’une manière générale à la culture traditionnelle dont faisait partie la religion polythéiste et ses mystères auxquels il se fit initier. Il recommença dés qu’il le put à sacrifier aux dieux du panthéon gréco-romain. Sans opprimer les chrétiens, mais profitant de son statut d’empereur à part entière, il redonna la primauté à la religion traditionnelle, considérant que la religion chrétienne n’était qu’une adroite escroquerie, à preuve son essai. « Contre les galiléens », c’est à dire contre ceux que nous appelons aujourd’hui chrétiens et contre la religion juive dont ils s’inspiraient. Le choix du terme galiléen tend à montrer qu’il faisait encore la distinction entre les travailleurs syndiqués disciples de Chrestus et les adorateurs de Jésus le galiléen. Voici comment débute cet ouvrage :
« Il m’a paru à propos d’exposer à la vue de tout le monde, les raisons que j’ai eues de me persuader que la Secte des Galiléens n’est qu’une fourberie purement humaine et malicieusement inventée qui, n’ayant rien de divin, est pourtant venue à bout de séduire les esprits faibles et d’abuser de l’affection que les hommes ont pour les fables en donnant une couleur de vérité et de persuasion à des fictions prodigieuses ». 
Pétri de dons, d’une honnête intellectuelle au dessus de tout soupçon, éduqué de la meilleure façon possible, estimé de tous, physiquement et moralement courageux, adoré de ses soldats, celui que certains appellent plus justement «  HYPERLINK "http://www.theosophy-nw.org/theosnw/world/med/me-mclk.htm" Julien le philosophe », avait donc été proclamé César en Gaule puis Empereur à Rome. En tant que tel, il bénéficiait certainement des meilleurs renseignements disponibles à son époque, laquelle était encore relativement proche de celle des faits miraculeux allégués par les chrétiens, sans accident intermédiaire notable tel qu’invasion ou révolution. Il était particulièrement bien placé pour apprécier à leur juste valeur les manœuvres politiques de ses prédécesseurs à la tête de l’Etat puisque c’étaient pour lui de proches parents. Il en a été probablement scandalisé. On peut être certain que son appréciation du phénomène chrétien avait pour lui la couleur de l’évidence. Il eut été infiniment plus facile pour lui de rester fidèle à la religion chrétienne, la religion de son enfance, une religion promue par sa famille impériale au rang de religion d’état, un état qu’il était appelé à gouverner. Tout autre choix soulèverait inévitablement d’immenses problèmes. Pour sécuriser les frontières orientales de son Empire il entreprit une campagne contre le roi des Perses. Mal préparée cette campagne s’enlisa. Julien est soi-disant mort au cours d’un accrochage. Dans le cas d’un commandant en chef habile et expérimenté, à la tête des meilleures troupes, c’est un fait rarissime. Les circonstances exactes de la mort d’un empereur devraient être parfaitement connues. Or, les chroniqueurs de l’époque rapportent qu’on ne sut jamais d’où étai parti le javelot qui le tua.  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bv.doc" \o "Celui qui l'a fait est celui qui en profite" Fecit qui prodest ? On sait bien par ailleurs qu’il n’y a jamais pénurie de chiens enragés pour assassiner les hommes de bonne volonté comme l’était Julien. L’histoire fourmille d’exemples de cette nature. Après cela, bien entendu, les chrétiens ont fait en sorte qu’un des leurs soit nommé empereur et ils ont conduit l’empire jusqu’à la catastrophe finale. Que serait-il advenu de l’Empire supposé jusque là éternel et du christianisme encore minoritaire et fragile si ce javelot avait raté sa cible ?
Quelle a pu être la pensée intime du citoyen ordinaire à qui on a demandé de changer trois fois de religion en quelques décennies sinon qu’il s’agissait d’une vaste fumisterie ? Cette pensée, il fut bien obligé de la garder par devers lui pour éviter les pires ennuis. La France ne s’est non plus jamais vraiment remise de la révocation de l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89dit_de_Nantes" Edit de Nantes, alors que le hiatus entre deux versions du christianisme est tout de même moins grand qu’entre christianisme et paganisme. L’ostracisme exercé à l’encontre des protestants qui n’ont pu conserver la religion selon leur cœur explique peut-être la relative déchristianisation de ce pays. Il est assez paradoxal par parenthèse que les deux figures les plus connues de l’histoire de France, Louis XIV et Napoléon soient probablement celles qui ont causé le plus de tort à leur patrie. L’un, par la révocation, força les meilleurs à l’exil, épuisa son peuple par les guerres et les grands travaux et institua un absolutisme rétrograde, taillé à ses seules mesures, et donc générateur de désordres futurs. Certains diront qu’il y a eu des compensations dans le domaine artistique mais, sous les ors et les frondaisons de son Palais de Versailles où on entassait les nobles comme dans une cité HLM de luxe, on voit trop la marque de la règle, de l’équerre et du compas. On est bien loin de l’imagination foisonnante des cathédrales ou de l’élégante fantaisie des châteaux des bords de Loire. Aucun musicien français de cette période n’a atteint au sublime, ce qui montre que la musique refuse les chaînes, mêmes dorées. De son côté Napoléon a dévoyé la révolution, illustré le népotisme jusqu’à la caricature. Il a rétabli dans les colonies françaises un esclavage qui avait été aboli quelques années auparavant. Il a remis en selle la religion catholique pour gagner son appui ouvrant ainsi la voie à la restauration d’un nouvel ordre moral. Il a finalement laissé la France dévastée, exsangue et honnie et les nations européennes engagées dans la voie mortifère du nationalisme. Nous ressentons encore durement dans notre potentiel génétique l’impact de ces saignées successives auxquelles est venue s’ajouter celle de la première guerre mondiale. Tous ces évènements catastrophiques ont fait que la nation européenne de loin la plus puissante par ses richesses naturelles et sa population, au lieu de participer activement au peuplement du continent américain, est devenue une puissance moyenne et sous-peuplée, tant il est vrai que les ego surdimensionnés sont les précurseurs de toutes les catastrophes, publiques et privées. Albion, jouant à chat perché sur son île et dressant les européens les uns contre les autres pour garder les mains libres ailleurs, a largement profité de cette situation. Une France forte n’aurait pas été attaquée trois fois de suite en moins d’un siècle par son voisin allemand ce qui aurait peut-être évité deux guerres mondiales. Refermons cette parenthèse pour relever que l’Eglise fut amenée à répéter avec les rois barbares vainqueurs la manœuvre qui avait si bien réussi avec l’Empereur de Rome et proposa son appui. Cet appui fut accepté, car si « Paris vaut bien une messe » comme le HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Henri_IV_de_France"bon roi Henri le dirait plus tard, Rome également justifie quelques sacrifices. Eternelle alliance du sabre et du goupillon ! Plus tard les chrétiens deviendront commissaires politiques chargés du renseignement et de la police des esprits et des mœurs. Ils utiliseront les méthodes habituelles des régimes totalitaires, brûlant les bibliothèques, éliminant avec diligence tout écrit gênant et toute opinion dissidente, ruinant, pourchassant et assassinant tous ceux qui refusaient de se soumettre. Dés l’origine, les vertus chrétiennes ont été réservées aux faibles et aux pauvres laissant les riches et les puissants libres comme toujours de défendre par tous moyens à leur disposition leurs intérêts et leurs passions. Les chrétiens n’avaient même pas à tenir compte dans leurs agissements d’une opinion publique qu’ils avaient muselée ni d’une opinion internationale inexistante à l’époque. Malgré cela l’establishment romain, nostalgique de l’ordre ancien et de ses vertus, et le monde rural traînèrent les pieds et restèrent encore longtemps fidèles aux divinités traditionnelles, aux dieux de l’Olympe. Les citoyens de l’empire, déboussolés et rétifs à l’égard de cette religion imposée d’en haut et divisés comme les Français en 1940, perdirent confiance dans les institutions et n’eurent plus la volonté de les défendre contre les invasions barbares. Il semble que l’empire romain aurait pu compléter assez facilement les défenses naturelles que constituaient pour lui le Rhin, l’arc alpin, le Danube, la Mer Noire, le Caucase, les vallées du Tigre ou de l’Euphrate et le Sahara. La « Grande Muraille » qui aurait pu protéger efficacement l’empire en complément de ces défenses naturelles s’est limitée aux cent kilomètres du mur d’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Mur_d'Hadrien" Hadrien et à quelques forteresses le long des frontières. Ces défenses étaient jugées si peu fiables qu’on construisit le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Mur_d%27Aur%C3%A9lien" mur Aurélien au plus près de Rome pour protéger la ville des invasions barbares. Les empereurs et leurs conseillers regardaient vers le ciel au lieu de regarder vers l’Est ! Il est étrange, comme a dit Bertrand Russel, que les derniers intellectuels distingués d’avant l’âge des ténèbres ont été concernés, non par le sauvetage de la civilisation, le refoulement des barbares ou la lutte contre les abus de l’administration, mais par la valeur de la virginité ou la damnation des enfants non baptisés ». Ce genre d’aveuglement vis-à-vis des dangers véritables est encore d’actualité, comme nous l’avons vu et comme nous aurons l’occasion selon toute probabilité de le vérifier bientôt. Les religions masquent les vrais problèmes. Il faut dire qu’elles sont d’abord faites pour ça ! La chute de l’empire romain peut être sans parti pris imputée à l’impéritie des chrétiens entourant l’empereur. Les « barbares » étaient depuis toujours et sans dommage irrémédiable aux portes de l’empire jusqu’à ce que les chrétiens s’emparent du pouvoir. Certains français parmi les plus pieux comptaient sur la barbarie nazie pour remettre de « l’ordre » dans leur pays et effacer les traces du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Front_populaire_(France)" Front Populaire.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Paganisme" Païen et paysan sont deux termes qui ont même étymologie. Les chrétiens traitaient donc leurs adversaires de bouseux ! Il semble que l’influence du christianisme dans l’antiquité tardive ait été fortement exagérée. C’est ainsi qu’on ne trouve aucun objet, aucune iconographie, aucune inscription à caractère chrétien, ni dans les espaces publics ni dans les espaces privés de l’antique et riche cité de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sagalassos" Sagalassos, de la province romaine de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Lycie" \o "Lycie" Lycie-et- HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Pamphylie" \o "Pamphylie" Pamphylie située dans l’actuelle Turquie et relativement proche du berceau supposé du christianisme. Cette cité a été ruinée par un séisme majeur au début du 7ème siècle et recouverte par les gravats et la poussière des siècles ce qui a préservé la virginité du site jusqu’aux fouilles menées récemment. Ces fouilles montrent que l’aspect de cette cité était en tout point identique à celui d’une cité antique et que les dieux dits païens représentés par de nombreuses statues étaient toujours honorés. Néanmoins, d’après la taille des monuments, le culte impérial occupait la première place. Seule une petite église construite en marge de la cité pourrait être considérée comme ayant été consacrée à la religion chrétienne. La conversion massive des populations au catholicisme n’interviendra pas en Europe occidentale avant le haut Moyen-Âge à la suite de pressions mêlant propagande, menaces et sévices. Parmi les moyens utilisés citons l’action des propriétaires terriens qu’on chargea de persuader leur personnel d’adhérer à la nouvelle croyance, les homélies des clercs, la christianisation des sanctuaires païens, l’annexion des lieux sacrés tels que les sources qu’on plaça sous le patronage d’un saint local, ou l’exploitation de prétendus miracles. Il exista même des moines soldats agissant en bande organisée pour faire régner la terreur dans les campagnes mal pensantes. Le christianisme était le dernier vestige d’une civilisation gréco-romaine ruinée par les invasions, d’où son statut privilégié. Faut-il encore remarquer que cette conversion ne sera jamais totale. Des ilots de pratiques païennes demeureront au fond des campagnes françaises jusqu’à nos jours et le fonds du tempérament national restera joyeux, raillard et paillard.
Il s’est ensuivi des siècles d’apparent obscurantisme où la créativité s’est réfugiée dans le perfectionnement empirique des techniques. Il suffit de comparer la pénombre d’un temple gréco-romain, jeu de construction assez simple même s’il peut être extrêmement précis, élégant et subtil, et la luminosité d’une  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Architecture_gothique" cathédrale gothique, prodige d’audace, de légèreté, d’équilibre et de robustesse, pour prendre la mesure des progrès accomplis. Les procédés utilisés par les architectes qui ont osé se lancer dans de telles constructions ont été tenus secrets. L’ampleur et la hardiesse de ces édifices construits avec des moyens techniques tellement limités permettent de mesurer la puissance pharaonique dont l’Eglise a pu bénéficier à cette époque. Quelqu’un d’un peu sensible qui pénètre dans une cathédrale éprouve un sentiment de honte en voyant ce qui se construit actuellement, ce qui est au fond assez injuste car certains ouvrages contemporains méritent de défier les siècles. Au cours de l’antiquité le flambeau de la connaissance était passé des mains des prêtres à celles des philosophes, puis de celles des philosophes à celles des savants. Il a fait le chemin inverse au Moyen-Âge, du moins en terre chrétienne. Le prodige de la renaissance italienne vient de la rencontre de l’esprit scientifique né sur la côte occidentale de l’actuelle Turquie, et par bonheur redécouvert, avec la technologie élaborée par des générations de cultivateurs, d’éleveurs, de vignerons et d’artisans des métiers de bouche dont le savoir-faire continue de nous nourrir, de constructeurs de navires, de travailleurs du métal, du bois, des textiles ou du cuir, d’architectes civils et militaires, de maçons, de charpentiers, de forgerons, de charrons, de potiers, de papetiers, de verriers, de distillateurs, d’apothicaires, d’herboristes, de minotiers, de fontainiers, de mineurs, d’armuriers, de facteurs d’instruments de musique, de teinturiers, d’horlogers, d’orfèvres, d’opticiens, d’imprimeurs, de médecins, de chirurgiens, d’astrologues et d’alchimistes. C’est  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=peut" peut- HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=etre" être  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=chez" chez les  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=artisans" artisans qu’il  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=faut" faut  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=aller" aller  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=chercher" chercher les  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=preuves" preuves les plus  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=admirables" admirables de la  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=sagacite" sagacité de l’ HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=esprit" esprit, de sa  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=patience" patience et de ses  HYPERLINK "http://www.evene.fr/citations/mot.php?mot=ressources" ressources (Diderot). Le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Franc-ma%C3%A7onnerie" franc-maçon a conquis sa liberté par l’excellence de son travail et il reste un modèle. Le savant grec n’avait guère que sa tête, Archimède étant l’exception qui confirme la règle. Le Moyen-Âge a donné à ses continuateurs les outils nécessaires pour mettre leurs idées à l’épreuve des faits et leur trouver des applications utiles. Il est à remarquer que progrès scientifiques et progrès musicaux sont allés de pair en Europe au cours de cette période. Il semble peu contestable que la musique occidentale l’emporte de beaucoup sur celle des autres civilisations alors qu’on ne trouve pas du tout les mêmes écarts de niveau dans les autres arts. La musique étant le miroir de l’âme il faudrait en conclure que la religion chrétienne fabrique de plus belles âmes que les autres religions. Serait-ce là le véritable legs des thérapeutes ? Cette supériorité de la musique occidentale est en train de s’estomper comme si les domaines musicaux les plus fertiles, ceux de l’harmonie, avaient été déjà exploités et qu’il ne reste plus aux créateurs d’aujourd’hui que les terres plus arides des dissonances. Un haut niveau technologique de l’artisanat ne suffit pas à lui seul à enclencher le mécanisme du développement. L’artisanat était au moins aussi perfectionné en Orient qu’en Occident à la fin du Moyen-Âge, sans que ceci provoque un phénomène comparable. C’est la conjonction des sciences et des techniques s’épaulant mutuellement qui a créé le monde moderne. C’est pourquoi les procédés utilisés par les différents métiers figurent en bonne place dans la Grande Encyclopédie. Le retard pris par les musulmans est lié non pas aux performances de leur artisanat ni à leur religion, qui n’est pas pire qu’une autre, ni à leur caractère, mais aux conditions climatiques chaudes et sèches qui règnent dans leurs pays. Les chrétiens habitent des régions tempérées, plus humides et plus froides. Or, personne n’a de goût à travailler quand il fait trop chaud. Quand il fait frisquet, c’est un vrai plaisir que de cracher dans ses mains pour empoigner l’outil. Le retard technologique pris par les civilisations chinoise et japonaise par rapport à la civilisation occidentale peut être attribué au pouvoir absolu de leurs empereurs qui aurait longtemps étouffé toutes les initiatives de progrès. La civilisation moderne née sous des climats méditerranéens ou subtropicaux s’est épanouie au nord grâce aux vêtements et au chauffage. Elle se généralisera au sud grâce à la climatisation. Voyez ce qui se passe en Californie et en Floride ou à Dubaï et Abu Dhabi. Mais, même dans ces contrées archi-prospères où la religion a encore pignon su rue, la foi n’est plus ce qu’elle était. Personne n’a proposé d’y construire une église ou une mosquée de mille mètres de haut pour se rapprocher du ciel !


7. DIEU, QUELLE IDEE !

TC \l 1 « 7. L’IDEE DE DIEU »La Maréchale. – Et comment me montrerez-vous que les abus de la religion sont inséparables de la religion ?
Crudeli. – Très aisément ; dites-moi, si un misanthrope s’était proposé de faire le malheur du genre humain, qu’aurait-il pu inventer de mieux que la croyance en un être incompréhensible sur lequel les hommes n’auraient jamais pu s’entendre, et auquel ils auraient attaché plus d’importance qu’à leur vie ? Or, est-il possible de séparer de la notion d’une divinité l’incompréhensibilité la plus profonde et l’importance la plus grande ?
La Maréchale. – Non.
Crudeli. – Concluez donc.
La Maréchale. – Je conclu que c’est une idée qui n’est pas sans conséquence dans la tête des fous.
Crudeli. – Et ajoutez que les fous ont toujours été et seront toujours le plus grand nombre ; et que les plus dangereux sont ceux que la religion fait, et dont les perturbateurs de la société savent tirer bon parti dans l’occasion.

Le philosophe des Lumières, anticipant sur le marxisme, insinue que l’idée de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Dieu" Dieu serait utilisée parfois à des fins douteuses. Les exemples récents de cette dérive ne manquent hélas pas. Mais qu’en est-il de son existence même ? Pour la Maréchale, celle-ci ne fait bien entendu aucun doute. Pressez de cette question le philosophe qui se prétend  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Ath%C3%A9isme" athée, il vous répondra, s’il se lâche un peu, qu’il n’en sait f… rien, et qu’il ne connaît aucun moyen de le savoir ! Ou bien, s’il est d’humeur badine, il vous dira qu’il est athée, Dieu merci ! Existe-t-il un être qui ressemble de près ou de loin à ce que ce philosophe peut avoir en tête en prononçant le mot Dieu ? Cet être a-t-il des caractéristiques qui puissent s’exprimer par des mots ? A-t-il même des caractéristiques ? Est-ce même un être ? Qu’est-ce que l’être ? Dans un monde inaccessible à l’expérience, on peut impunément tout dire et son contraire selon les interlocuteurs et les circumincessions. A quelqu’un qui lui demandait s’il croyait en Dieu, le plus illustre des physiciens répondait : « dites-moi d’abord ce qu’il est et je vous dirai ensuite si j’y crois » ! Lumière de lumière, dites-vous ? Soit, mais de quelle longueur d’onde ? Dans la mesure où ni les croyants ni les athées ne savent au juste de quoi ils parlent, la question de son existence mérite-t-elle même d’être posée ? Cette entité indéfinissable peut-elle se raccrocher à la structure d’explications qui s’est constituée dans l’esprit du philosophe depuis sa petite enfance et peut-être même avant ? A-t-elle créé exclusivement pour lui et quelques autres terriens de la même espèce cet univers de cent milliards de galaxies contenant chacune cent milliards d’étoiles plus ou moins analogues à notre soleil ? Ce soleil que nos ancêtres ont divinisé n’est lui-même qu’une étoile banale située dans un endroit quelconque d’une galaxie sans originalité. Il est entouré de planètes, mais ceci non plus n’a rien d’exceptionnel. Des découvertes récentes montrent que la plupart des étoiles ont leur cortège de planètes, certaines composées d’hydrogène comme Jupiter ou Saturne, d’autres composées de roches comme Mercure, Vénus, Mars ou la terre elle-même. D’ailleurs les planètes s’entourent également de satellites. Il semble qu’il y ait peu de chances pour que la collectivité humaine soit la seule ou même la première d’une classe qui compte potentiellement des milliards de milliards d’élèves. Le destin de l’univers tout entier est-il celui d’une fusée du 14 juillet qui s’élance dans le ciel, brille de mille feux et retombe en cendres ? Ce qui s’est passé avant le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Big_bang" big-bang est l’affaire de Dieu, pas celle des hommes, affirmait Jean-Paul II. Circulez, y a rien à voir ! Cet univers isotrope n’est pas infini, pense-t-on, sinon le ciel serait d’une brillance uniformément aveuglante car le regard finirait bien par rencontrer une étoile (ce raisonnement n’est valable que pour un univers statique). « Son centre est partout et sa circonférence nulle part », non parce qu’il est infini comme le pensait Pascal, mais parce que l’espace est courbe et refermé sur lui-même, comme la surface d’une sphère, mais en trois dimensions. L’espace ne peut être continu ont pensé des physiciens car certaines grandeurs comme l’attraction universelle ou les forces électrostatiques pourraient devenir infinies si la distance entre deux points pouvait être rendue aussi proche de zéro que l’on veut. On retrouve le même genre de difficulté lors du big-bang car la densité d’énergie devrait être infinie au temps zéro. Le fait qu’à l’échelle des constituants les plus élémentaires de la matière, toutes les grandeurs physiques soient quantifiées ajoute de la vraisemblance à cette vision des choses. Si le vide était le néant, l’inexistant, comment ses propriétés pourraient-elles être modifiées ? Comment pourrait-il être déformé, gauchi, par la présence de masses ? Pour vous représenter quelque peu comment tout ceci peut fonctionner, prenez un papier quadrillé ; faites que, par convention, chaque intersection ou nœud du quadrillage corresponde au plus petit volume élémentaire possible de l’espace. Posez que les segments joignant ces nœuds correspondent aux faces de contact entre volumes élémentaires contigus. Les segments issus d’un nœud quelconque étant au nombre de 4 pour un papier quadrillé, les volumes élémentaires se trouvent être des tétraèdres que l’on peut supposer réguliers. Si sur un autre dessin vous portiez à 6 le nombre des segments, le quadrillage devient un pavage de triangles équilatéraux juxtaposés et les volumes élémentaires deviennent des cubes. Imaginez maintenant que l’un ou l’autre de ces pavages soit dessiné non plus sur une feuille de papier mais sur la surface d’une sphère, à la manière des pièces constituant l’enveloppe d’un ballon, et vous obtenez un monde fermé sur lui-même dans lequel aucun lieu ni aucun système de référence n’est privilégié. Cette représentation n’est pas une représentation spatiale mais explicite uniquement qui est en relation avec qui. Nous sommes en effet dans l’incapacité de visualiser un espace autre qu’euclidien, cette image semblant pour ainsi dire pré câblée dans notre cerveau. Selon la représentation purement relationnelle que nous venons de décrire tout homme, où qu’il soit, peut considérer légitimement qu’il est au centre de l’univers. C’est d’ailleurs généralement ce qu’il fait. Einstein se plaisait à dire que, dans un tel monde un observateur, où qu’il se trouve et quelle que soit la direction vers laquelle il se tourne, pourrait voir l’image de son dos …à condition d’avoir la vue suffisamment perçante et une bonne dose de patience. Aux dernières nouvelles, l’univers serait plutôt plat. Allez y comprendre quelque chose ! L’idée qui découle de ce type de représentation est néanmoins que les relations d’un atome d’espace avec ses voisins constituent, plus que les représentations spatiales classiques, le fait le plus fondamental de la physique. Quand vous vous appuyez sur le sol avec un bâton, la pression exercée par votre main se communique de proche en proche jusqu’à l’extrémité du bâton. En mécanique des solides, celle qui préside au fonctionnement de nos machines, les actions à distance n’existent pas sans éléments intermédiaires. Le champ électromagnétique qui agit sur les particules électrisées et les courants électriques est lui-même une donnée locale. En mécanique « céleste » l’attraction newtonienne qui s’exerce à distance a été remplacée par la déformation einsteinienne de l’espace temps, donnée locale. Il en serait de même de toutes les autres grandeurs physiques pour les atomes d’espace juxtaposés, notamment en ce qui concerne les champs. Des considérations qui ne peuvent être développées ici conduisent à fixer une limite inférieure au volume de ces atomes d’espace, c’est le volume de Planck. Ce volume est si petit qu’il y a cent mille milliards de fois plus de volumes de Planck dans un centimètre cube qu’il n’y a de centimètres cubes dans l’univers visible tout entier ! Croyez-vous qu’un dieu personnel, un dieu dont l’homme serait l’image, ait vraiment le temps de s’intéresser au sort de chacun de ces atomes d’espace ? Il est bien obligé de leur accorder l’indépendance ! Du point de vue scientifique l’idée d’un dieu se mêlant de tout est totalement incompréhensible.
Un atome d’espace contient certaines informations. Les quantités scalaires comme la masse ou l’énergie sont affectées aux nœuds. Les quantités vectorielles comme les champs sont affectées aux segments joignant les nœuds. Ces quantités peuvent varier comme nous savons d’un point à un autre et d’un instant à un autre. Considérons un état donné d’un atome d’espace donné et l’état des atomes d’espace qui sont ses voisins, c’est à dire ceux qui lui sont reliés par des segments. L’état suivant de l’atome d’espace considéré sera la conséquence univoque de son état à l’instant initial et de l’état des atomes voisins au même instant. Les règles s’appliquant à cet atome arbitrairement choisi s’appliquent naturellement à tous les autres. L’état de l’atome de référence influence à son tour les changements d’état de tous ses voisins. C’est la racine du principe de causalité, la source du déterminisme. C’est l’origine du concept d’interdépendance cher aux bouddhistes. Ce concept n’est pas très éloigné de la loi dite de l’action et de la réaction selon laquelle si un corps A exerce une force F sur un corps B, le corps B exerce sur le corps A une force –F exactement opposée à la précédente. C’est ainsi qu’on peut voir parfois lors d’une échauffourée un énergumène frapper sauvagement à coups de nez le poing des agents ! L’extrême petitesse de ces atomes est aussi la raison pour laquelle les lois les plus fondamentales de la physique s’écrivent sous la forme d’équations différentielles mettant en relation des quantités infinitésimales d’espace, de temps et de matière ou d’énergie, même lorsqu’il s’agit comme dans le cas de la relativité générale de phénomènes qui ne peuvent être mesurés que pour des espaces, des durées et des énergies considérables. Ces équations différentielles peuvent être interprétées comme décrivant les relations existant entre atomes d’espace contigus. Selon certaines théories, l’atome d’espace n’est pas lisse, il est pour ainsi dire velu, hérissé de fibres dont les formes définissent les propriétés. Lorsque les atomes d’espace se mettent à faire la « ola » comme les spectateurs d’un stade sud-américain c’est que les perturbations de certains atomes d’espace se sont communiquées à leurs voisins. Chaque vague correspond au passage d’un grain de lumière, la menue monnaie des réactions nucléaires. Un compteur des changements d’état d’un atome donné mesure le temps propre à cet atome. Le temps indiqué par une horloge est le temps propre à cette horloge de la même manière que la température indiquée par un thermomètre est celle du thermomètre lui-même mais pas forcément celle du milieu dans lequel il est plongé. Le temps est donc un paramètre purement local, même s’il peut exister des relations plus ou moins compliquées entre le temps de cet atome d’espace et le temps d’autres atomes plus ou moins éloignés de lui dans le maillage. La masse située à un nœud attire pour ainsi dire les faces de l’atome de vide correspondant et les déforme. Cette déformation affecte les atomes voisins par l’intermédiaire des faces communes. Il en résulte que la masse d’un atome donné provoque un gauchissement des atomes voisins qui se propage en se partageant entre des atomes de plus en plus nombreux à mesure qu’on s’en éloigne. Comme le nombre d’atomes situés à une distance d croit comme le carré de la distance à l’atome considéré, le gauchissement est proportionnel à l’inverse du carré de la distance , ce qui est l’expression même de l’attraction universelle invoquée par Newton. Toutes les actions s’additionnent. Ceci se traduit par exemple par le fait qu’un satellite artificiel se laisse guider par un espace qui est courbé par la présence de la terre dont la masse domine toutes les autres par sa proximité. L’astronaute en orbite autour de la terre ne ressent effectivement aucune force qui l’obligerait à adopter une trajectoire courbe comme c’est le cas par exemple pour la pierre qu’on fait tourner au bout d’une ficelle. Assis sur un tabouret dans un espace sans fenêtre il ne peut pas dire si la force qui le maintient sur son siège est due au retour de la pesanteur où à l’accélération de la fusée. Ainsi la loi de Newton selon laquelle l’attraction entre deux mass»s est proportionnelle au produit de ces masses divisé par le carré de leur distance permet des prévisions d’une extraordinaire précision en mécanique céleste, mais ce n’est au fond qu’une recette de cuisine qui fonctionne bien. Selon l’image classique l’électron d’un atome tourne autour du noyau comme une ultramicroscopique planète. Il faudrait abandonner cette image et considérer plutôt l’électron comme un vol d’étourneaux attendant une occasion propice pour s’échapper d’où, en raison de la complexité des interactions à l’intérieur de ce vol, son comportement apparemment aléatoire. Le comportement de chaque étourneau est cependant tout à fait déterminé par le caractère de l’oiseau et les évolutions de ses voisins. Cette image s’applique aussi au grain de lumière ou photon qui, même isolé, produit des franges d’interférence dans un interféromètre comme si le vol d’étourneaux était passé simultanément par ses deux fentes. Quand un étourneau se fait coincer, les autres rappliquent instantanément de façon à n’en faire plus qu’un. C’est l’image que je me fais des phénomènes qui se produisent aux très petites échelles. Finalement, si cette image est exacte, Einstein n’avait pas tort lorsqu’il disait que Dieu ne joue pas aux dés ! Une formulation plus complète pourrait être la suivante : la nature joue aux dés, mais le sort des dés est entièrement déterminé par les conditions initiales et les obstacles rencontrés. Le hasard ne résulte pas d’indéterminations mais de notre incapacité de prévoir, qu’il s’agisse du sort des dés, de celui des boules de loterie ou de celui des étourneaux. Toutes les configurations ne sont pas autorisées au vol d’étourneaux : seules certaines sont stables en raison vraisemblablement de phénomènes de résonance, ce qui les a fait assimiler à de très minuscules cordes vibrantes qui ne sont peut-être autres que la trajectoire des dits étourneaux. Le caractère apparemment aléatoire de la désintégration d’atomes instables doit admettre le même genre d’explication : la configuration du vol d’étourneaux varie constamment et aboutit de façon imprévisible pour nous, mais pourtant parfaitement déterminée, à celle qui correspond à la désintégration de l’atome. Le numéro de la boule qui sort de la sphère tournante des jeux de loterie est parfaitement aléatoire pour l’observateur extérieur. Il n’en reste pas moins que le mouvement des boules à l’intérieur de cette sphère est complètement régi par les lois de la mécanique ordinaire. Une théorie qui aboutit à considérer que le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Chat_de_Schr%C3%B6dinger" chat de Schrödinger peut être à la fois vivant et mort ne paraît pas conforme à, ce qui peut être observé dans la nature. La seule conclusion que l’on puisse tirer de cette expérience mentale c’est que Schrödinger n’aimait pas les chats ! Du reste, si vous prenez la précaution de mettre un enregistreur dans la boite où le malheureux matou est enfermé vous pourrez savoir exactement à quelle heure il est passé de vie à trépas. L’avenir est rigoureusement déterminé, quelle que soit l’échelle des phénomènes considérés. Les probabilités n’existent que dans notre esprit, elles n’existent pas dans les phénomènes eux-mêmes.
Il faut convenir que cette notion d’atome d’espace qui paraissait si simple au départ s’est singulièrement compliquée au point que cet atome est devenu comme la cellule élémentaire d’un être vivant inter réagissant avec ses voisines selon des règles strictes comme le ferait un microprocesseur dans un montage parallèle. Encore n’avons nous pas mentionné des dimensions nouvelles qui viendraient s’ajouter selon certains aux dimensions usuelles de l’espace et du temps. Un  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Neutrino" neutrino, particule sans charge électrique et presque sans masse, aurait-il quelque accointance avec un atome d’espace éjecté à grande vitesse ? La nature du vide est probablement une des questions les plus fondamentales de la physique. L’univers dans son ensemble apparaît ainsi comme un ordinateur géant à microprocesseurs multiples où chaque atome d’espace d’une petitesse incroyable évolue par pas successifs d’une incroyable brièveté en fonction de l’état des atomes voisins selon des règles purement logiques. Le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Logos" Logos des philosophes ne désigne-t-il pas indifféremment Dieu et les lois gouvernant l’univers, c'est-à-dire l’enchaînement jamais pris en défaut des causes et des conséquences dans l’infini de l’espace et dans l’infini du temps ? Les physiciens qui ont retenu cette conception granulaire de l’espace et les règles de causalité à la base de la définition du temps local renouvellent ainsi la démarche que les atomistes de l’antiquité avaient entreprise pour la matière, avec le succès que l’on sait. Si le temps est continu, l’instant présent n’a aucune épaisseur, jusqu’à faire douter de son existence. Avec une structure granulaire le présent correspond à un état identifiable, ce qui rassurera définitivement  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Paradoxe_d%27Achille_et_de_la_tortue" Zénon d’Elée. L’histoire correspond à une collection ordonnée d’instants distincts. Avec les atomes d’espace nous assistons aussi sous une autre forme à la renaissance de l’idée d’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ther_(physique)" éther. Le vide serait un tissu tridimensionnel à mailles ultra fines présentant certaines propriétés et non pas l’inexistence. La dualité des champs et des particules (ou de la masse, ou de l’énergie) serait inscrite au cœur même des atomes d’espace. Ceci expliquerait que les uns puissent agir sur les autres, résolvant ainsi à ce niveau ponctuel ou quasi ponctuel la dualité philosophiquement insupportable du monde physique. Si l’hypothèse que nous avons faite concernant la conscience est exacte, il en serait de même de l’esprit et de la matière. Les métaphysiciens qui retiendraient cette hypothèse ne seraient pas au bout de leurs peines car la nature des relations entre champs et particules est loin d’être élucidée. L’hypothèse des atomes d’espace rend cette relation on ne peut plus intime ! L’idée fixe de l’électron pourrait être de tourner sempiternellement autour du noyau jusqu’à ce qu’un événement extérieur le fasse changer d’idée. Les particules ultimes sont la concrétisation d’idées purement mathématiques. Faisant un pas de plus, certains physiciens font l’hypothèse que ces mailles ont la propriété de se lier entre elles spontanément comme les atomes d’un cristal. L’ensemble qui résulte de la juxtaposition de toutes ces mailles doit présenter bien entendu des propriétés compatibles à la fois avec la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/M%C3%A9canique_quantique" mécanique quantique pour les très petites distances et avec la  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" relativité générale pour les très grandes distances, deux branches de la physique parfaitement validées dans leurs domaines respectifs mais qui ont résisté jusqu’à présent à toutes les tentatives de synthèse. Il faut dire pour être honnête que ce travail de rapprochement n’est pas encore achevé. Les corps solides seraient accrochés sur le maillage spatial (à moins que ce ne soit l’inverse) ce qui fait comprendre que la vitesse de la lumière incidente soit un invariant, indépendant du mouvement relatif du corps émettant les rayons lumineux et du corps qui les reçoit. Le temps ne peut être défini que localement comme nous avons vu mais, pour des atomes appartenant à un même solide, il existe des relations simples entre leurs temps respectifs. Dans les autres cas il faut oublier la notion intuitive de temps et parler plutôt de compteurs locaux de changements d’état et de dates des calendriers attachés à ces compteurs. Faut-il pour tenir compte du mouvement relatif des corps solides que des mailles apparaissent ou disparaissent selon des règles déterminées, ou bien se déplacent ou se déforment pour accommoder les variations de distance entre solides, ce qui pourrait rendre également plus intuitifs les effets relativistes ? Peut-on imaginer qu’il soit possible d’introduire un nouvel atome d’espace dans un tissu existant et que cet atome joue des coudes pour faire sa place et reconstitue ainsi un tissu continu ? Ce genre d’explication mécaniste devient de plus en plus désirable quand on sait que les phénomènes relativistes interviennent dans le fonctionnement d’instruments d’usage aussi courant que les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Global_Positioning_System" GPS. Les effets quantiques sont quant à eux omniprésents dés que la nature intime de la matière intervient. L’hypothèse des atomes d’espace rendrait ainsi plus intuitif le comportement de la substance des choses aux très petites comme aux très grandes distances ce qui rendrait le plus grand service aux ingénieurs qui ne se sentent pas très à l’aise avec les équations qui régissent actuellement ces deux domaines, équations qui leur apparaissent davantage comme des recettes de cuisine que comme des explications d’ordre mécanique à eux plus familières. A l’échelle macroscopique, lorsque toutes les moyennes sont faites, le fonctionnement simultané d’une multitude de microprocesseurs ne commettant jamais d’erreur rend compte du caractère mathématiquement implacable des lois physiques. Ceux qui se fâchent contre leur ordinateur, voire contre un être humain, n’ont pas bien compris la manière dont le monde fonctionne. Les jolies femmes pour qui tout a toujours été plus facile ont des difficultés à admettre que les machines qu’elles utilisent n’aient pas pour elles les mêmes égards que leur coiffeur ou leur boucher. Comme leurs ancêtres accablées par des catastrophes naturelles, elles attribuent une volonté maligne à des enchaînements mécaniques de causes et d’effets. La logique est inscrite au cœur des réalités physiques et elle est à ce titre inséparable de la science. Elle l’est également du droit, mais ce dernier n’en tire pas toutes les conséquences. Les religions n’ignorent pas la logique, en général. Cependant elles l’appliquent à un monde imaginaire qu’elles s’efforcent de rendre cohérent en son intérieur, mais qui est déconnecté des réalités constatables.
Certains cosmologistes commencent à soupçonner qu’il existe une  HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/wiki/Multiverse" quasi-infinité d’univers (10 à la puissance 500, 1 suivi de cinq cents zéros, ce qui fait tout de même beaucoup). Le nombre total d’atomes dans l’univers que nous connaissons n’est estimé « qu’à » 10 à la puissance 80 ! ! Certains de ces univers seraient analogues au notre, d’autres auraient des propriétés entièrement différentes. A chaque univers correspondraient ses propres lois. Si l’univers que nous habitons n’est qu’un univers particulier parmi une quasi-infinité d’autres, un certain nombre de conséquences viennent à l’esprit :
Il ne faut pas s’étonner que les constantes physiques qui caractérisent notre univers paraissent si bien ajustées. Nous avons tiré la combinaison gagnante, ou l’une des combinaisons gagnantes. Si ça n’avait pas été le cas, nous ne serions pas là pour en parler. C’est ce qu’il est convenu d’appeler le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Principe_anthropique" principe anthropique. Il ne faudrait pas davantage s’étonner s’il était finalement démontré que ce parfait ajustement est la conséquence nécessaire d’une loi plus générale qui reste à découvrir
Si l’histoire de notre univers a un sens, c’est celui qui lui a été donné par le choix initial des constantes physiques qui gouvernent l’évolution des choses à l’intérieur de cet univers
Notre monde n’est peut-être pas le meilleur des mondes possibles, mais c’est probablement l’un des plus intéressants
Les univers inintéressants sont sans doute l’écrasante majorité. A titre d’analogie observons que tout programme informatique peut être écrit sous la forme d’une suite de 1 et de 0. Parmi toutes les suites possibles comportant le même nombre d’éléments, seule une très faible proportion correspond à un programme intéressant, de même que parmi toutes les suites et combinaisons possibles de sons et de bruits, seule une très faible proportion peut être qualifiée de musique. De la même façon un programme génétique tiré au hasard ne donnerait que très rarement un organisme viable. Personne ne s’étonne que dans l’univers que nous connaissons, il y ait beaucoup plus de vide que de matière, qu’il y ait beaucoup plus de HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Mati%C3%A8re_sombre"matière et d’énergie noires que de corps célestes observables, qu’il y ait beaucoup plus de corps célestes sans vie que de corps célestes habités, qu’il y ait sur les corps célestes habités beaucoup plus de matière inanimée que de matière vivante, qu’il y ait en fait de matière vivante beaucoup plus de végétaux que d’animaux, qu’il y ait beaucoup plus d’animaux que d’hommes, et qu’il y ait, devant des réalités inconnues, beaucoup plus d’hommes de foi qui se prosternent que d’hommes de science qui retroussent leurs manches. Il existe une quantité considérable de légendes colportées par les différentes religions concernant la création du monde qui nous entoure mais il n’existe qu’une seule histoire qu’il nous faut découvrir progressivement à force de travail et d’ingéniosité.
Certains cosmologistes conçoivent notre univers comme la surface d’une bulle de savon. Si nous avons l’impression d’un volume c’est que nous percevons l’ HYPERLINK "http://twm.co.nz/hologram.html" hologramme tridimensionnel correspondant aux vibrations courant à la surface de la bulle. Conformément aux propriétés des hologrammes une fraction quelconque de la surface permet de reconstituer la totalité de l’univers. Aussi fantasmagorique que cette conception puisse paraître, elle permet d’expliquer certains phénomènes encore incompris dans un autre cadre.
D’autres font intervenir un  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_des_cordes" univers à onze dimensions, notre univers tridimensionnel étant une sorte de coupe réalisée dans cet univers. Cette conception présente ses propres vertus explicatives.
D’autres imaginent que dans certains de ces univers le temps s’écoulerait à l’envers par rapport au notre de sorte que leur avenir correspondrait à notre passé. Tous ces univers auraient pour leurs habitants les mêmes propriétés que le notre car les lois physiques sont symétriques par rapport au temps. Il est tentant de penser que ces différents univers se raccordent lors du big-bang, que le vide sidéral est à la fois notre passé et notre avenir et qu’à notre univers composé de matière correspond un autre univers composé d’antimatière où l’on avance à reculons et ou des anti-hommes ont le cœur à droite et le portefeuille à gauche.
D’autres encore conçoivent notre univers comme le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Trou_noir" trou noir d’un autre univers dont il avalerait en continu, l’espace et la matière. La matière et l’espace avalés dans l’autre univers se retrouveraient uniformément répartis dans le notre ( HYPERLINK "http://www.astronomes.com/c6_univers/p623_univacc.html" expansion accélérée de l’univers et  HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/wiki/Black_matter" matière noire  qui constituerait 96% de la masse de l’univers selon les derniers calculs). Du fait de l’attraction universelle matière et énergie noires se concentreraient autour des noyaux galactiques préexistants. Du fait de l’expansion continue de l’univers dont la vitesse dépasse celle de la lumière à partir d’une certaine distance de l’observateur, des étoiles disparaissent du champ de sa vision de sorte que l’univers pourrait rester pour lui éternellement semblable à lui-même. Le big-bang pourrait-il être le point de fuite de cette perspective spatio-temporelle, la matière noire une proto matière, l’énergie noire un proto rayonnement ? S’il n’y a pas apport continu de matière, comment expliquer que plus de treize milliards d’années après la naissance de notre univers il y ait encore des pouponnières d’étoiles alors que l’expansion continue de l’univers ne cesse d’augmenter les distances entre les nuages d’hydrogène qui dérivent dans le cosmos et donc de diminuer leurs chances de se rencontrer ? Comment expliquer le fait que les galaxies âgées ressemblent trait pour trait aux galaxies plus jeunes, sinon par une régénération permanente ? Des dimensions repliées sur elles-mêmes dans un univers source s’y redéploieraient dans le notre, comme un gant qui se retourne, un gant droit devenant un gant gauche, alors que d’autres, déployées dans cet autre univers s’y replieraient dans le nôtre. L’implosion d’un trou noir dans un autre univers correspondrait au big-bang d’un autre. Le grand vide récemment découvert dans notre univers pourrait-il être l’œil de ce procédé cyclonique, la marque se son ombilic ? L’accumulation progressive d’espace et de matière dans notre univers ou le tarissement des apports finirait par provoquer un HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Big_Crunch"big-crunch analogue à celui qui préside à la formation des trous noirs. Ainsi, quelle que soit la direction qu’il prenne et quelle que soit la durée du voyage, vers l’avenir ou vers le passé, le voyageur ne sortirait jamais du monde des réalités. Il semble cependant qu’il soit impossible pour un voyageur de franchir sans encombre les singularités que constituent big-bang et big-crunch de sorte qu’il serait irrémédiablement enfermé dans son univers, comme un individu est irrémédiablement coincé entre sa naissance et sa mort. Mais, sait-on jamais ? L’expansion continue de l’univers est déduite de la diminution de la fréquence des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Raies_spectrales" raies caractéristiques correspondant aux différents éléments chimiqus. Ne peut-on concevoir, même si cette vision est hérétique, qu’un rayon lumineux abandonne de l’énergie au milieu qu’il traverse et que sa fréquence diminue en conséquence ? Il peut paraître osé d’affirmer quoi que ce soit sur le passé ou sur l’avenir de notre univers si nous ne connaissons un peu que la matière visible qui constitue, croit-on, 4% seulement de sa masse totale, si nous n’avons aucune idée du mécanisme provoquant son expansion continue, si nous ignorons totalement ce qui peut se passer à l’intérieur d’un trou noir et si la nature du vide est encore l’objet de débats. Faute d’expérimentation possible le débat sur le passé lointain ou le futur lointain de notre univers risque vite de tourner au débat théologique.
Un autre mystère de choix est l’incroyable complexité et perfection des êtres vivants. Sans parler du cerveau humain qui est une structure dont la complexité confond l’entendement, le moindre animalcule ridiculise tous les produits issus de la science de l’ingénieur par l’étendue de ses fonctionnalités, sa capacité à se reproduire, sa flexibilité, sa fiabilité, son autonomie et sa miniaturisation, Les ingénieurs militaires mettent à profit cette avance technologique quand ils utilisent de grosses coccinelles pour fabriquer des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Drone" drones miniatures. Le développement d’un individu complet à partir d’une seule cellule qui se multiplie, se diversifie de cent façons différentes et établit les connexions nécessaires entre ses innombrables filles pour former un organisme unique opérationnel et doté des instincts nécessaires à sa survie  est un autre sujet d’émerveillement. Quand arriverons nous à comprendre un phénomène si peu vraisemblable ? Celui qui a essayé de construire un dispositif destiné à assurer un service ou une fonction quelconque, aussi simples soient-ils, sait bien que rien ne peut être laissé au hasard. On ne peut pas faire plus pragmatique que la nature. Le darwinisme explique la complexité et la perfection des êtres vivants par des variations génétiques spontanées et aléatoires et la survie et la reproduction préférentielle des individus possédant les gênes les plus performants. Le darwinisme a ainsi tordu le cou au  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Vitalisme" vitalisme qui voulait faire des phénomènes vitaux des phénomènes à part, irréductibles à des phénomènes physico-chimiques. Le présent essai appartient au courant de pensée qui ambitionne de faire de même pour le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Spiritualisme" spiritualisme. Doit-on donc croire que la fonction copier utilisée dans le volume de tous les océans et sur la surface de tous les continents pendant quelques milliards d’années est assez puissante à elle seule, et à cause de sa souplesse ou de ses erreurs, pour expliquer cette réussite du vivant ? Les êtres vivants dont les principaux traits étaient déjà fixés lorsqu’ils sont sortis de l’onde ne sont-ils que des cristaux d’un genre particulier, apparus et se perpétuant là où les conditions nécessaires sont réunies pendant un temps suffisant ? Comme la chimie organique est beaucoup plus complexe et riche de possibilités que la chimie minérale, on conçoit que ces cristaux organiques soient beaucoup plus nombreux et diversifiés que les cristaux minéraux et qu’ils possèdent quelques propriétés nouvelles, comme celle de se reproduire. Comment des systèmes aussi fantastiquement improbables que des êtres vivants peuvent-ils n’être que les fruits du hasard passés au crible de la nécessité ? La nécessité inclut du reste non seulement la capacité à survivre dans un monde hostile, mais également la capacité à séduire ou à forcer les partenaires du sexe opposé. Peut-on dire sérieusement que si les femmes courent en général moins vite que ceux qui les poursuivent, c’est parce que celles qui courraient aussi vite n’ont pas eu de descendance !? Les pratiques sadomasochistes sont-elles le souvenir de cette époque lointaine où une femelle hominidé, pour être amenée à procréer, devait être capturée, immobilisée et forcée ? C’est peut-être aussi pour ça qu’elle est un peu moins forte physiquement que l’homme lequel ne doit pas abuser de cette petite supériorité. On peut relever certains plats avec un peu de moutarde, pas avec des produits qui brûlent l’estomac. Si tant de femmes acceptent encore aujourd’hui une condition proche de l’esclavage, c’est qu’elles se rendent compte instinctivement que leur mission la plus sacrée est de transmettre la vie. Porter un enfant né ou à naître devait être pour notre courageuse ancêtre un lourd handicap quand il fallait suivre la petite troupe dans tous ses déplacements. Imaginez ces Mères Courage enfantant, portant, nourrissant, protégeant et instruisant une ribambelle d’enfants ! Ce sont principalement les femmes qui ont eu intérêt à développer les premiers rudiments d’agriculture, ce qui permit la sédentarisation. On comprend à posteriori le ressentiment bougon des hommes à leur égard, obligés qu’ils sont maintenant de gagner leur pain à la sueur de leur front au lieu d’aller à la chasse, à la pêche ou aux champignons ! C’est très probablement le souvenir embelli par la mémoire de cette époque bénie de randonnées pédestres aventureuses qui est à l’origine des mythes relatifs au paradis terrestre et à la « faute » imputée à Eve ! Les premiers navigateurs qui ont débarqué sur les rivages des îles d’Océanie n’y ont pas trouvé de mythes comparables, pour l’excellente raison que leurs habitants vivaient encore au paradis !
Par une suite de choix répétés un sexe finit par ressembler aux rêves du sexe opposé. Le lion et l’hyène, l’aigle et le condor n’ont-ils pas, les uns et les autres, selon notre appréciation, la gueule de leur emploi ? Le psychisme des animaux est peut-être encore plus proche de celui de l’homme qu’on ne l’imagine. Qui peut croire qu’une jeune beauté suédoise soit une lointaine cousine d’une femelle  HYPERLINK "http://www.janegoodall.fr/htfr/bonobo.htm" Bonobo sans qu’il y’ait eu application obstinée de critères esthétiques dans la lignée qui nous en a fait cadeau ? Mais est-ce toute l’explication, et Mr. Bonobo est-il du même avis ? Les plus beaux spécimens humains se rencontrent très au Nord, dans des contrées où la sélection naturelle s’est certainement exercée avec encore plus de rigueur qu’ailleurs. Prenez une statue médiocre et copiez la en autant d’exemplaires que nécessaire. Donnez à chacune de ces copies un coup de ciseau au hasard. Retenez celle qui paraît la plus réussie après cette opération et répétez sur elle copies et coups de ciseau. Combien faudra-t-il de coups de ciseau et de statues cassées avant de produire un chef d’œuvre de la sculpture ? Or, la complexité d’une statue est inférieure par plusieurs ordres de grandeur à celle d’un organisme vivant. L’observateur non prévenu ne peut se défendre d’une certaine perplexité. Même en « aidant » le hasard, nul n’a été, pour le moment, capable de synthétiser un organisme vivant à partir de ses composants atomiques élémentaires, encore moins un organisme pensant et conscient. Hasard et nécessité jouent un rôle à n’en pas douter. Faut-il en plus, comme le pensent les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9ocr%C3%A9ationnisme" néo créationnistes, invoquer l’intervention d’une main divine donnant les coups de pouce nécessaires où, celle d’une loi naturelle, source d’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Entropie" entropie négative génératrice d’ordre, ayant échappé jusqu’ici à la sagacité des hommes de science ? Aucun calcul ni aucune expérience ne semblent pouvoir apporter la réponse dans un avenir prévisible. Seule l’exploration spatiale détaillée de notre galaxie peut nous mettre sur la voie en nous permettant, du moins pouvons-nous l’espérer, d’examiner de près différents stades de l’évolution. Autant dire que la réponse n’est pas pour demain, à moins que quelque savant inspiré ne fasse surgir un jour la vie de ses cornues en répétant un processus qui a pu jadis se dérouler dans la nature ! Quelques progrès ont d’ailleurs été faits récemment dans ce domaine. Sur cette planète, un poisson sort de l’élément liquide et commence à ramper sur la terre. Nous voyons ses nageoires devenir pattes et ses branchies devenir poumons. Devenu fringant quadrupède il se laisse glisser dans l’eau qui a du lui sembler bonne. Ses pattes redeviennent nageoires et son corps redevient poisson. Peut-être découvrirons nous à la fin que notre perplexité n’était due qu’à une illusion d’optique et que Darwin n’avait pas besoin d’auxiliaire. Darwin est le moderne remplaçant de Dieu comme Grand Explicateur dans le domaine des sciences de la vie. On ne conçoit pas en tout cas de progrès dans la connaissance du vivant sans rattacher les phénomènes qui le concernent aux lois physiques ordinaires. S’il est difficile d’assurer que le développement du monde vivant est dorénavant expliqué avec la force d’une démonstration mathématique, il n’en reste pas moins que l’explication fournie par les néo créationnistes n’en est pas une. C’est encore expliquer le mouvement et la chaleur du soleil par l’activité du Dieu Phébus. Dans l’histoire du genre humain, beaucoup d’inventions importantes ont été le fruit du hasard. La recherche scientifique n’a fait que multiplier les occasions de mettre au jour quelque chose d’intéressant. Il s’agit en l’occurrence d’identifier les différentes étapes conduisant à l’apparition de la vie et de montrer que le passage d’une étape à la suivante selon le processus imaginé dispose d’une probabilité non nulle. L’étude reste à faire des propriétés d’auto organisation spontanée des systèmes complexes, qu’ils soient minéraux ou organiques. La surface lisse d’un étang se couvre d’un ensemble organisé de vaguelettes lorsqu’elle est parcourue par la brise. Du magma, substance homogène, lorsqu’il est lentement refroidi, donne naissance au granit, ensemble de cristaux juxtaposés de compositions différentes. Un minéral présent de façon diffuse dans une roche récemment formée se concentre au fil du temps sous forme de dépôt ou de filon. Une bouffée de tabac se transforme en rond de fumée. Une goutte d’eau se structure en flocon de neige. Des débris éparpillés entourant une étoile se rassemblent pour former un cortège de planètes orbitant autour de l’étoile. Une société livrée à l’anarchie finit toujours par se réorganiser. Si l’on retient l’hypothèse du big bang un état initial indifférencié évolue avec le temps en l’univers ordonné que nous connaissons, aussi bien à l’échelle cosmique qu’à l’échelle subatomique. D’un substrat homogène et de lois physiques apparemment simples naissent des objets extraordinairement compliqués, quelle que soit l’échelle considérée. Ceux qui ont établi une corrélation entre l’évolution d’une espèce et le développement embryonnaire de ses représentants ont sans doute soulevé un coin du voile. C’est ainsi qu’un embryon de poisson disposerait pour ainsi dire de pattes virtuelles attendant des circonstances favorables pour se développer ! Une modification d’un programme même très légère lui est généralement fatale mais peut aboutir quelquefois, nous le voyons bien, à un résultat viable supérieur au modèle originel.
Qui a davantage d’imagination, la nature qui dicte ses lois ou bien les hommes de science qui tentent de les déchiffrer ? Poussée dans ses derniers retranchements la science finirait par ressembler à de la théologie s’il n’y avait la règle d’or des vérifications expérimentales. Or ces vérifications deviennent de plus en plus difficiles à réaliser à mesure qu’on s’éloigne de l’échelle humaine pour aller vers l’infiniment grand ou l’infiniment petit, l’infiniment ancien ou l’infiniment futur. Ne peut-on dire, pour réconcilier savants et religieux, que Dieu est la loi unique s’appliquant à tous les univers ? Ou bien dire que la nature rebat les cartes à la fin de chaque partie et que Dieu les coupe ? Qui a fait cette horloge demande Voltaire ? Qui a fait l’horloger répond le sceptique ? Est-il plus difficile, sur le plan de la logique, d’accepter l’idée que l’incréé soit cet ensemble d’univers en perpétuelle dégénérescence et régénération plutôt que l’idée que Dieu soit l’incréé ? L’incroyant est bien obligé de s’arranger de cette incertitude ; le croyant aussi probablement. Dieu, pour en rester à cette hypothèse, a dû infiniment s’ennuyer pendant le temps infini qui s’est écoulé avant la création du monde que nous connaissons, sauf à multiplier à l’infini des créations successives ! Une cause première n’est nullement indispensable si le réel est un éternel recommencement. Ainsi le monde réel dans sa globalité n’aurait jamais été créé et n’aurait jamais de fin, tout comme le dieu des monothéistes, mais uniquement des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Avatar_%28hindouisme%29" avatars. Une pluralité permanente d’univers distincts mais échangistes est d’ailleurs la seule hypothèse qui paraisse satisfaire à la fois à une logique considérée comme la caractéristique fondamentale et permanente de tout ce qui existe (quelque chose ne peut sortir de rien ni s’y résoudre) et aux observations selon lesquelles notre univers a une origine ponctuelle ou quasi ponctuelle. Si la théorie du big-bang est compatible avec un dieu créateur et même, d’une certaine façon, semble l’appeler, celle qui fait appel à un ensemble éternel d’univers multiples peut en faire l’économie. Il existe, extérieure à ma conscience, une réalité qui obéit à ses propres règles et qui entretient avec ma conscience des relations compliquées, sans qu’il y ait nécessairement de Grand Témoin. Reste la question : pourquoi quelque chose plutôt que rien ? Il est aisé de voir que la réponse est incluse dans la question, que c’est une autre illustration du principe anthropique.
Dans le système de propositions logiques que constituent les lois universelles, l’existence de Dieu, à supposer qu’il soit possible de formaliser cette notion, serait-elle la proposition indécidable qu’exige le théorème de  HYPERLINK "http://membres.lycos.fr/godel/" Gödel ? Si on fait l’hypothèse que la proposition « Dieu existe » est vraie, on arrive à démontrer par des opérations logiques incontestables qu’elle est fausse et si on fait l’hypothèse qu’elle est fausse, on arrive à démontrer avec tout autant de rigueur qu’elle est vraie ! Assurer sans preuve que Dieu n’existe pas est ni plus ni moins qu’une profession de foi, ce qui est un mauvais début quand on se pique d’athéisme ! Par des voies analogues certains ont cru pouvoir démontrer que Dieu ne saurait être tout-puissant. Si on le met en effet au défi de proposer une énigme si difficile à résoudre que lui-même en soit incapable, deux cas peuvent se présenter. S’il ne parvient pas à la résoudre il n’est pas tout puissant et s’il n’y parvient pas il n’est pas tout-puissant non plus puisqu’il n’aura pas été capable de l’imaginer. On peut objecter qu’il est logiquement impossible d’imaginer une énigme sans être en même temps capable de la résoudre. Cela, Dieu lui-même ne le peut. Oui, mais qui vous a dit qu’il ne pouvait pas dans sa toute-puissance s’affranchir des règles de la logique alors qu’une telle licence est indispensable à la réalisation de miracles ? Affirmer que Dieu est mort, au sens propre, comporte une contradiction interne. S’il est mort, c’est qu’il a vécu. S’il a vécu, il continue de vivre puisque, par définition, il est éternel. L’affirmer au sens figuré est largement prématuré. L’homme ignore à peu près tout de ce qui l’entoure. Il ne sait rien de ce qui constitue 96% de la masse de l’univers. Le comportement des 4% qu’il croit connaître un peu est déroutant aux très petites comme aux très grandes échelles. Il ignore ce qui provoque l’expansion de l’univers. Le temps et l’espace qui sont la mesure de tout sont des notions évanescentes. Il ignore s’il y a un seul univers ou s’il y en a plusieurs. Ce qu’il a de plus intime, c'est-à-dire sa conscience, recèle des mystères qui ne sont pas encore éclaircis. Si Dieu est le nom donné par l’homme à tout ce qu’il ne comprend pas son avenir immédiat n’est pas menacé. Mon sentiment de théologien amateur est que, si Dieu existe, il se cache sous plusieurs couches d’explications et qu’il se garde bien d’intervenir dans nos affaires et que, pour parvenir à ses fins, il ne se sert que de moyens naturels. S’il a choisi de rester caché, respectons sa volonté et ne tentons pas de le deviner ! La science est fondée sur l’hypothèse qu’il n’y a jamais de miracle, aucun véritable miracle n’ayant jamais pu être scientifiquement constaté. Sur les scènes de music-halls du monde entier des individus talentueux réalisent chaque soir de pseudo-miracles. On les appelle des illusionnistes. Depuis le temps que les hommes de science braquent leurs instruments sur des objets grands ou petits et quelle que soit la partie du spectre qu’ils aient utilisée pour leurs explorations ils n’ont jamais relevé une seule entorse aux lois naturelles. Qui croit sérieusement que Dieu joue ainsi à cache-cache avec les savants ? Qui croit sérieusement que Moïse ait écarté les flots de la Mer Rouge pour passer à pied sec ? D’autant qu’il aurait été par la suite mal inspiré. Si après cette traversée il avait tourné à droite au lieu de tourner à gauche, ce sont les Juifs qui auraient le pétrole, comme un plaisantin l’a fait justement remarquer ! Un séropositif ou un cancéreux à toute extrémité sont-ils jamais revenus de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Lourdes" Lourdes guéris ? Les commerçants lourdais se plaignent à juste titre auprès des autorités ecclésiastiques de la raréfaction des miracles ! Et il y en aura de moins en moins à mesure que progressera la science médicale. Il ne faut pas trop en demander à ces autorités qui prennent déjà la précaution d’enrôler dans leurs institutions les miraculés qui sont à l’origine des pèlerinages les plus rémunérateurs. Il s’agit en l’occurrence d’éviter que ces miraculés puissent, sans conséquences désastreuses pour eux-mêmes, revenir ultérieurement sur leurs déclarations. Dieu seul sait ce qui peut se passer derrière les hauts murs des couvents ! Le roman de Diderot intitulé  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/La_Religieuse" « La Religieuse » donne une idée des drames qui pouvaient encore s’y dérouler il n’y a pas si longtemps. D’une certaine manière, les lieux de prières perpétuent à l’âge adulte le giron maternel où les enfants se réfugient quand le monde devient trop dur. Pourtant le plus fervent des fidèles ne croira jamais que la dernière ligne d’une addition douloureuse puisse être modifiée par la prière ou qu’une adroite supplication puisse rendre étanche un robinet qui fuit. Dieu ne veut pas être pris la main dans le sac ! Je cherche en vain dans ma mémoire un cas où, depuis la fin des procès en sorcellerie, une intervention divine ou diabolique aurait été invoquée devant un tribunal en guise d’explication. Ceci est valable aujourd’hui pour tous les états, y compris pour les états réputés théocratiques. La religion est un rêve toléré, mais elle est écartée des choses sérieuses. Au fait, quel est le meilleur mécanicien, celui qui conçoit, construit et met en service un automate qui n’a pas besoin de son intervention pour fonctionner correctement ou bien celui qui est sans arrêt à donner un coup de chiffon ici, ajouter une goutte d’huile là, resserrer un boulon, modifier un réglage, changer une pièce défectueuse ? Les néo créationnistes sous-estiment le Créateur en croyant nécessaire son intervention au coup par coup. Il est capable de réaliser quelque chose de beaucoup plus difficile que des miracles à répétition qui est de faire en sorte que de tels miracles soient inutiles. L’avènement de la vie, de la pensée et finalement de la conscience à partir d’éléments matériels dénués de toute intention et soumis à des lois impersonnelles et immuables est en soi beaucoup plus époustouflant que n’importe quel miracle qui contreviendrait à ces mêmes lois. Dieu, s’il existe, n’enfreint pas ses propres lois. Il n’a ni concessionnaire autorisé, ni service après-vente. Un esprit mal intentionné pourrait le soupçonner d’avoir créé ce ou ces mondes pour son plaisir et sa distraction plutôt que pour les nôtres, mais ce serait lui prêter des sentiments humains, ce qui n’a probablement aucun sens. A Sa place, s’il est permis de formuler cette hypothèse, Nous Nous serions toutefois longuement félicités que les lois physiques que Nous aurions instituées aient produit des merveilles telles que la Femme ou que la Neige !
Il n’y a qu’une seule réalité dont traitent physique et métaphysique, la frontière entre ces deux domaines se déplaçant régulièrement au bénéfice de la première. Les progrès de la physique ont élucidé beaucoup des problèmes que se posait la métaphysique et d’autres réponses sont sans doute en train de mijoter. Dieu ne pourra être invoqué comme cause ultime que lorsque toutes les autres tentatives d’explications se seront avérées vaines, car cette invocation signifie que les hommes de science acceptent de fixer des limites à leurs investigations et de s’en tenir, en désespoir de cause, à la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Opium" vertu dormitive du pavot. Ils ont peu de raisons de le faire tant que la science continue de progresser. La physique paraît très éloignée de la fin de son histoire. Les sciences de la vie ont encore d’immenses progrès à accomplir. Les sciences de la pensée en sont à leurs tout premiers balbutiements. Peut-être verrons-nous un peu plus clair dans mille ans si mathématiciens, physiciens, astronomes, spécialistes des sciences de la vie et de la pensée peuvent continuer à travailler. Ne cédons pas au désespoir si un jour la science parait faire du sur-place. Dans l’esprit de l’incroyant les divinités sont remplacées par les lois qui gouvernent le monde. Ces lois ont tous les attributs des divinités : éternité, ubiquité, toute-puissance. Le croyant espère par des prières pouvoir infléchir ces lois à son profit, ce qui confère à Dieu et à ses lois un caractère personnel et magique. L’incroyant n’a pas cette espérance. Il juge qu’on ne peut commander à la nature qu’en lui obéissant. Il estime qu’il est impossible de déchirer et recoudre le tissu serré des effets et des causes, que ça ne s’est jamais vu et ne se verra jamais. L’incroyant est pour le moment polythéiste sachant que nul n’est encore parvenu à établir toutes les lois physiques particulières comme conséquence d’une loi unique, mais il a bon espoir de pouvoir se convertir un jour au monothéisme. On ne peut exclure cependant que le renouvellement des théories qui cernent la réalité de plus en plus près ne se poursuive perpétuellement et qu’il existe un noyau à jamais incompréhensible au cœur de la réalité. L’évocation du problème de la conscience nous a peut-être donné un aperçu de ce phénomène. Les relations décrites ci avant de l’atome de vide avec ses voisins traduisent le fait que les données physiques vraiment fondamentales concernent les relations entre entités. Chaque entité constitue un faisceau de propriétés caractéristiques mais elle n’a pas de vie ou de caractère propre en dehors de ces propriétés. Nul ne sait si l’aspect le plus fondamental de la réalité est constitué de champs ou de particules. Ce n’est vraisemblablement ni l’un ni l’autre, mais les deux ou quelque chose qui se situe encore au delà. Le cerveau humain a été façonné par la sélection naturelle pour résoudre des problèmes pratiques liés à la survie, pas pour résoudre des problèmes métaphysiques. Il est fort possible que le seul outil dont nous disposions ait atteint dans ce domaine son niveau d’incompétence. En dernière analyse, le modèle construit par les hommes de science pour représenter un phénomène, quel que soit la perfection prédictive de ce modèle, tournera toujours sur le plus vieux calculateur qui soit : le cerveau humain. Le modèle restera toujours étranger à la chose, A supposer qu’il existe un objet mathématique plus ou moins  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Groupe_de_Lie_E8" exotique qui soit la clé universelle qui permet de retrouver les caractéristiques de la totalité des univers existants, il est possible que le temps de calcul nécessaire pour trouver la totalité des solutions correspondant à la totalité des univers et d’identifier celle qui correspond au nôtre soit supérieure à la durée de vie d’un univers particulier. Et même si ce calcul était possible, encore faudrait-il expliquer pourquoi la nature s’y conforme ! Ce qui reste éternellement incompréhensible dans la nature, c’est qu’on puisse la comprendre. (Einstein). La clé du coffre est peut-être bien enfermée à jamais à l’intérieur du coffre. Identifier Dieu à ce noyau ou à une loi physique universelle, une équation divine, qui engloberait les autres lois et les expliquerait toutes n’a rien d’inacceptable pour  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Agnostique" l’incroyant. C’est même le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Graal" Graal de tous les physiciens. Mais l’incroyant refuse d’ajouter foi aux innombrables mythes qui accompagnent cette idée. Les HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cosmogonie"  cosmogonies sans dieux sont les plus élégantes. S’il est possible de concevoir une réalité sans Dieu, la règle d’Occam voudrait qu’on en écarte l’hypothèse ou bien qu’on dise que Dieu et le Monde sont un et le même. Dieu existerait-il d’ailleurs effectivement en tant que personne que ceci ne changerait rien à la nature humaine ni aux problèmes qui se posent à elle. Savoir qu’on ne sait pas, c’est déjà savoir quelque chose. Comme à dit Epicure, ne rien dire de Dieu n’est pas impie. Ce qui est impie, c’est d’en mal parler. Pour le reste, chacun sait qu’on supporte mieux sa propre ignorance et sa propre sottise que celles du voisin.
8. SERMON SUR LA MONTAGNE PRIVATE  TC \l 1 « 8. SERMON SUR LA MONTAGNE »

La Maréchale. – Mais il faut quelque chose qui effraie les hommes sur les mauvaises actions qui échappent à la sévérité des lois ; et si vous détruisez la religion, que lui substituerez-vous ?
Crudeli. – Quand je n’aurais rien à mettre à la place, ce serait toujours un terrible préjugé de moins ; sans compter que, dans aucun siècle et chez aucune nation, les opinions religieuses n’ont servi de base aux mœurs nationales. Les dieux qu’adoraient ces vieux Grecs et ces vieux Romains, les plus honnêtes gens de la terre, étaient la canaille la plus dissolue : un Jupiter, à brûler tout vif ; une Vénus, à enfermer à l’Hôpital ; un Mercure, à mettre à Bicêtre.
La Maréchale. – Et vous pensez qu’il est tout à fait indifférent que nous soyons chrétiens ou païens ; que païens nous n’en vaudrions pas moins ; et que chrétiens nous n’en valons pas mieux.
Crudeli. – Ma foi, j’en suis convaincu, à cela près que nous serions un peu plus gais.
La Maréchale. – Cela ne se peut.
Crudeli. – Mais, madame la maréchale, est-ce qu’il y a des chrétiens ? Je n’en ai jamais vu.
La Maréchale. – Et c’est à moi que vous dites cela, à moi ?
Crudeli. – Non, madame, ce n’est pas à vous ; c’est à une de mes voisines qui est honnête et pieuse comme vous l’êtes, et qui se croyait chrétienne de la meilleure foi du monde, comme vous le croyez.
La Maréchale. – Et vous lui fîtes voir qu’elle avait tort ?
Crudeli. – En un instant.
La Maréchale. – Comment vous y prîtes-vous ?
Crudeli. – J’ouvris un Nouveau Testament, dont elle s’était beaucoup servie, car il était fort usé. Je lui lus le sermon sur la montagne, et à chaque article je lui demandai : “Faites-vous cela ? et cela donc ? et cela encore ?” J’allai plus loin. Elle est belle, et quoiqu’elle soit très sage et très dévote, elle ne l’ignore pas ; elle a la peau très blanche, et quoiqu’elle n’attache pas un grand prix à ce frêle avantage, elle n’est pas fâchée qu’on en fasse l’éloge ; elle a la gorge aussi bien qu’il est possible de l’avoir, et, quoiqu’elle soit très modeste, elle trouve bon qu’on s’en aperçoive.
La Maréchale. – Pourvu qu’il n’y ait qu’elle et son mari qui le sachent.
Crudeli. – Je crois que son mari le sait mieux qu’un autre ; mais pour une femme qui se pique de grand christianisme, cela ne suffit pas. Je lui dis : “N’est-il pas écrit dans l’Évangile que celui qui a convoité la femme de son prochain a commis l’adultère dans son cœur ?”
La Maréchale. – Elle vous répondit qu’oui ?

Le philosophe vient de faire allusion à la doctrine concernant l’adultère telle qu’elle est exprimée par les évangiles dans le  HYPERLINK "http://www.lemondeavenir.com/LVC/lvc18/18sermon.htm" sermon sur la montagne. Voici les quelques lignes où ce sujet est abordé :
“ Vous avez appris qu’il a été dit : tu ne commettras pas l’adultère
Mais moi je vous dis que quiconque regarde une femme pour la convoiter a déjà commis l’adultère dans son cœur
Si ton œil droit est pour toi une occasion de chute, arrache-le et jette le loin de toi ; car il est avantageux pour toi qu’un seul de tes membres périsse, et que ton corps entier ne soit pas jeté dans la géhenne
Et si ta main droite est pour toi une occasion de chute, coupe-la et jette la loin de toi ;
Car il est avantageux pour toi qu’un seul de tes membres périsse, et que ton corps entier n’aille pas dans la géhenne ”

Crudeli. – Je lui dis : “Et l’adultère commis dans le cœur ne damne-t-il pas aussi sûrement que l’adultère le mieux conditionné ?”
La Maréchale. – Elle vous répondit qu’oui ?
Crudeli. – Je lui dis : “Et si l’homme est damné pour l’adultère qu’il a commis dans son cœur, quel sera le sort de la femme qui invite tous ceux qui l’approchent à commettre ce crime ?” Cette dernière question l’embarrassa.
La Maréchale. – Je comprends ; c’est qu’elle ne voilait pas fort exactement cette gorge, qu’elle avait aussi bien qu’il est possible de l’avoir.
Crudeli. – Il est vrai. Elle me répondit que c’était une chose d’usage ; comme si rien n’était plus d’usage que de s’appeler chrétien et de ne l’être pas ; qu’il ne fallait pas se vêtir ridiculement, comme s’il y avait quelque comparaison à faire entre un misérable petit ridicule, sa damnation éternelle et celle de son prochain ; qu’elle se laissait habiller par sa couturière, comme s’il ne valait pas mieux changer de couturière que renoncer à sa religion ; que c’était la fantaisie de son mari, comme si un époux était assez insensé pour exiger de sa femme l’oubli de la décence et de ses devoirs, et qu’une véritable chrétienne dût pousser l’obéissance pour un époux extravagant, jusqu’au sacrifice de la volonté de son Dieu et au mépris des menaces de son rédempteur.
La Maréchale. – Je savais d’avance toutes ces puérilités-là ; je vous les aurais peut-être dites comme votre voisine ; mais elle et moi aurions été toutes deux de mauvaise foi. Mais quel parti prit-elle d’après votre remontrance ?
Crudeli. – Le lendemain de cette conversation (c’était un jour de fête), je remontais chez moi, et ma dévote et belle voisine descendait de chez elle pour aller à la messe.
La Maréchale. – Vêtue comme de coutume ?
Crudeli. – Vêtue comme de coutume. Je souris, elle sourit ; et nous passâmes l’un à côté de l’autre sans nous parler. Madame la maréchale, une honnête femme ! Une chrétienne ! Une dévote ! Après cet exemple, et cent mille autres de la même espèce, quelle influence réelle puis-je accorder à la religion sur les mœurs ? Presque aucune, et tant mieux.
La Maréchale. – Comment, tant mieux ?
Crudeli. – Oui, madame : s’il prenait fantaisie à vingt mille habitants de Paris de conformer strictement leur conduite au sermon sur la montagne…
La Maréchale. – Eh bien ! Il y aurait quelques belles gorges plus couvertes.
Crudeli. – Et tant de fous que le lieutenant de police ne saurait qu’en faire ; car nos petites-maisons n’y suffiraient pas.

Cet extrait illustre la façon dont un honnête homme sait se faire comprendre sans blesser et aussi la façon dont les croyants et les croyantes esquivent les remarques gênantes. La Maréchale sait bien qu’elle est visée par cette historiette et que son comportement est inconséquent du point de vue de la religion qu’elle professe. Si son bon sens ne la rassurait sur sa propre innocence elle pourrait craindre qu’en séduisant malgré elle quelque galant, elle n’échappe pas à la justice divine même si elle échappe à la justice des hommes. Plutôt que d’entrer dans les eaux froides de la contradiction, elle préfère changer le cours de la conversation. Mais allons plus loin. Je lisais, il y a quelque temps, l’ouvrage d’un auteur un peu oublié de nos jours qui est  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Georges_Duhamel" Georges Duhamel. Il s’y définissait lui-même comme chrétien agnostique. C’est une appellation que beaucoup, dont je suis, peuvent reprendre à leur compte car les doutes concernant le christianisme portent sur le caractère transcendant que certains lui prêtent plutôt que sur la doctrine elle-même. A cette acceptation générale de la doctrine chrétienne il y a toutefois une exception qui a trait aux relations de l’homme et de la femme, telles qu’elles sont exposées par le Sermon sur la Montagne. Je comprends que ce sermon ait été prononcé en un lieu élevé et d’accès difficile ! Tout homme normalement constitué répugne à s’aventurer vers ce sommet. Il est même permis de se demander si cette partie de la doctrine n’est pas un ajout plus ou moins tardif tant son caractère est opposé à la tonalité générale de tolérance illustrée par l’histoire de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Marie_Madeleine" Marie-Madeleine. Les relations entre hommes et femmes peuvent être profondément perturbées par ce Sermon. Les hommes peuvent se sentir culpabilisés et les sentiments que les femmes éprouvent sont tout simplement ignorés. Selon le Sermon, la femme appartient à son mari comme lui appartiennent son âne ou son bœuf. C’est ce qui est implicite dans le texte des évangiles où la femme n’est évoquée qu’en tant que mère qui s’occupe de ses enfants ou que pourvoyeuse d’amours tarifées qui s’en occupe plus tard quand ils sont montés en graine. Saint Paul lui-même recommande à la femme de se couvrir la tête en signe de soumission à son mari. Qu’il soit juif, chrétien ou musulman, Dieu n’aime pas les femmes. D’ailleurs, s’il les avait aimées, il aurait doté l’homme d’un membre vibratile !
Jésus revendiquait l’appellation de “ fils de l’homme ”. Faut-il comprendre que Jésus était un enfant naturel et qu’il en concevait quelque amertume ? La vérité sous-jacente de la position outrancière exprimée par le Sermon sur la Montagne, c’est que les questions liées à la perpétuation de l’espèce sont d’une importance tout à fait capitale, et même plus que cela, et qu’elles doivent être abordées avec les plus grandes précautions. C’était encore plus vrai lorsque n’existaient ni contraception, ni protection ni médication qui vaillent contre les M.S.T et que, du fait de la brièveté de la vie, du cloisonnement de la société, de l’absence de toutes les commodités dont nous disposons maintenant, la fidélité réciproque des époux était moins problématique qu’aujourd’hui, mais faisait déjà question «à la face d’un ciel qui n’est pas un instant le même, sous des antres qui menacent ruine, au bas d’une roche qui tombe en poudre, au pied d’un arbre qui se gerce, sur une pierre qui s’ébranle »..
Car l’homme est polygame L’homme est une proie facile Il aime un peu partout Et va livrer en ville
(Robert Rocca, chansonnier)
Le poil sérieux l'âge de raison Le coeur mangé par la cervelle Du talent pour les additions L'oeil agrippé sur les pucelles La chasse à courre chez Bertrand Le dada au Bois de Boulogne Deux ou trois coups pour le faisan Et le reste pour l'amazone C'est l'homme
Les cinq à sept " pas vu pas pris " La romance qui tourne à vide Le sens du devoir accompli Et le coeur en celluloïd Les alcôves de chez Barbès Aux secrets de Polichinelle L'amour qu'on prend comme un express Alors qu'ell' veut fair' la vaisselle C'est l'homme

( HYPERLINK "https://www.google.fr/" \l "q=leo+ferre" Léo Ferré)

C’est cet homme ordinaire qu’il faut aimer, tel que Léo Ferré l’a dépeint ici sans fard. Dieu est amour dites-vous. Espérons qu’il est aussi indulgence. Certains disent qu’il n’y a pas d’amour, mais seulement des preuves d’amour, ce qui va bien au-delà d’un simple slogan pour joaillier ou négociant en fourrures ! Les déclarations d’amour sont d’ailleurs aussi suspectes que les protestations d’amitié. Les gens qui vous parlent la main sur le cœur  le plus souvent vous trompent ou se trompent eux-mêmes. L’amour éprouvé par un être humain n’est pas autre chose que l’intérêt qu’il porte à un autre être humain qu’il considère comme indispensable à son bonheur. Elle se croyait aimée pour elle-même et découvre après coup qu’elle n’était qu’un objet. Il se croyait aimé pour lui-même et découvre au bout du compte qu’il n’était qu’un instrument. Même chez celui ou celle qui se dit prêt à tout sacrifier pour l’autre l’amour est égoïste sous des apparences altruistes. La jalousie qui peut aller jusqu’au meurtre est l’expression ultime de ce paradoxe. « J’aimerais mieux te voir morte qu’à un autre » dit un personnage de Molière à sa bonne amie. Il faut cependant reconnaître que le sentiment amoureux a l’avantage de substituer à des relations conflictuelles entre des êtres exploitant les mêmes ressources des relations plus détendues de client fidèle à fournisseur attitré où chacun trouve son compte, des relations qui s’approfondissent avec le temps et les soucis partagés. M. et Mme Pingouin ont sans doute connu le coup de foudre avant de fonder un ménage qui durera toute leur vie. La fameuse  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" lettre de St Paul aux corinthiens témoigne de la puissance de cet attachement inconditionnel. On peut dire ainsi à propos de l’amour que ceux qui en parlent le mieux sont ceux qui le font le moins ! Un usage abusif a été fait de ce concept assez clair de sorte que le sentiment amoureux est devenu avec la réaction romantique, avec le retour de l’obscur, de l’indicible de l’ineffable et pour tout dire du religieux, un fourre-tout auquel ont été prêtées toutes sortes de vertus magiques. En faisant de l’amour un sentiment éthéré et sublime on en arrive à oublier sa fonction originelle qui est la perpétuation de l’espèce. Le mariage n’a pas été institué pour le bonheur des parents, mais pour la protection des enfants, raison pour laquelle je trouve le mariage homosexuel plutôt incongru s’il n’est pas assorti de la possibilité d’adopter. La pénurie de couples disposés à adopter est-elle si grande qu’il soit opportun de confier un enfant à deux femmes et surtout à deux hommes ? Pourquoi pas un mariage religieux entre prêtres homosexuels ? Ne riez pas, ça s’est déjà fait ! Sans aller jusqu’à faire de l’amour un art sacré, comme ce fut le cas dans plusieurs grandes civilisations, ne faudrait-il pas le considérer comme un des beaux-arts ? Le premier en importance peut-être puisqu’il est universel et mobilise tous les sens. Il n’en reste pas moins que certains attachements paraissent éternels. La pensée est revenue si souvent sur la personne aimée, les premières rencontres, les moments heureux qui ont été partagés que les liaisons neuronales qui correspondent à ces évocations sont devenues ineffaçables. Quand les chaînes causales qui vont du monde extérieur à la conscience en passant par le cerveau sont interrompues, un bouclage peut se produire entre cerveau et conscience. Dans l’extase l’amour devient sa propre cause, les neurones de la béatitude s’auto excitent par effet feed-back jusqu’à obtenir pleine satisfaction. C’est ainsi que, dans un domaine apparemment éloigné, un orgasme peut parfois se déclencher de manière inopinée chez un adolescent qui sèche sur un problème difficile en composition de mathématiques ! Faisant un pas de plus dans l’hypothèse, se pourrait-il que les chaînes neuronales exprimant l’amour de la mère, devenues sous-utilisées à partir du moment où l’enfant a été sevré soient recyclées dans l’amour de la divinité? Ce sont en tout cas les mêmes expressions d’adoration éperdue, de total abandon… Jeune homme qui courtises une fille très pieuse, demandes-toi si la place n’est pas déjà prise ! La transverbération de Ste Thérèse d’Avila transpercée en son plus intime par le dard mystique et turgescent d’un chérubin rubicond n’a d’égale que l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89pectase" épectase d’un célèbre cardinal et théologien retrouvé mort dans une chambre improbable à deux pas de la rue St Denis. Croyant aller chez Agapè le saint homme avait rencontré Eros et son cœur n’avait pas tenu le coup ! Souhaitons que leurs petites sœurs et leurs petits frères puissent profiter encore longtemps des mêmes extases ! Dans le monde contemporain tout se passe comme si la reproduction était devenue une conséquence secondaire et souvent indésirable du sentiment amoureux. Chacun s’arrange de sa sexualité comme il peut. On ne lutte pas contre une force aussi puissante. Il faut ruser avec elle. La femme qui prend un amant, l’homme qui prend une maîtresse peuvent malgré tout rester fidèles. Et plutôt deux fois qu’une ! C’est dans l’amour que se manifeste avec le plus d’éclat l’absence de libre-arbitre véritable. On ne choisit pas d’être amoureux. C’est une maladie que l’on attrape et qui finit généralement par guérir. Des naturalistes ont constaté que le campagnol des campagnes est fidèle et que celui des montagnes l’est beaucoup moins. Poursuivant leurs investigations ils ont découvert une différence génétique qui rend le campagnol des montagnes plus réactif à certaines hormones. Tout se passe comme si la pureté de l’air, des sols et des eaux dont bénéficient les montagnes réduisait les risques de contamination que la promiscuité peut entraîner, autorisant ainsi le campagnol des montagnes à adopter des pratiques sexuelles plus relâchées. Les populations montagnardes de campagnols en sont venues à sélectionner au fil des saisons le gène de l’infidélité dont on peut penser qu’il possède ses propres avantages du point de vue de l’évolution ! L’amour excessif des femmes est le plus honorable de tous les vices. C’est d’une certaine façon une manière d’hommage rendu à un homme public que de l’attaquer à propos de ses mœurs les plus privées, car ceci revient à dire que l’on a rien trouvé de plus sérieux à lui reprocher. S’il est avéré que ses faiblesses dans ce domaine n’ont rien eu d’illégal mais l’ont aidé à évacuer un trop-plein d’agressivité et à garder les idées claires, il faut réserver notre indignation pour de meilleures occasions. Souvenons-nous que le meilleur de nos rois fut appelé le « vert-galant » ; ce n’est certainement pas un hasard. L’expérience montre que le sexe est le seul moyen de piéger l’honnête citoyen. La prudence requise doit-elle aller jusqu’à fermer les yeux sur les charmes de ses contemporaines ? Jusqu’à ignorer que la vue d’une jolie femme est un cadeau délicat offert à tous les hommes qui ont le privilège de la rencontrer ? Cadeau qu’il serait malséant de refuser. Pourquoi les hommes vont-ils au spectacle si ce n’est pour y voir de jolies femmes dans des situations intéressantes ? A contrario, il est permis d’avancer que si la race des hommes n’a pas disparu en dépit de son extraordinaire faiblesse, c’est entre autres raisons parce que les êtres humains ont depuis toujours été extrêmement portés sur la chose ! L’espèce génétiquement la plus proche de l’espèce humaine est celle des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Bonobo" chimpanzés bonobos, les plus libidineux de tous les singes, mais aussi les plus pacifiques ! La luxure a des vertus pacificatrices insoupçonnées. La guerre n’est pas aussi naturelle à l’homme qu’on le dit.

PRIVATE 9. RELIGION, ETHIQUE ET POLITIQUETC \l 1 « 9. RELIGION ET MORALE »

Crudeli (reprise). Il y a dans les livres inspirés deux morales : l’une générale et commune à toutes les nations, à tous les cultes, et qu’on suit à peu près ; une autre, propre à chaque nation et à chaque culte, à laquelle on croit, qu’on prêche dans les temples, qu’on préconise dans les maisons, et qu’on ne suit point du tout.
La Maréchale. – Et d’où vient cette bizarrerie ?
Crudeli. – De ce qu’il est impossible d’assujettir un peuple à une règle qui ne convient qu’à quelques hommes mélancoliques, qui l’ont calquée sur leur caractère. Il en est des religions comme des constitutions monastiques, qui toutes se relâchent avec le temps. Ce sont des folies qui ne peuvent tenir contre l’impulsion constante de la nature, qui nous ramène sous sa loi ; Et faites que le bien des particuliers soit si étroitement lié avec le bien général, qu’un citoyen ne puisse presque pas nuire à la société sans se nuire à lui-même ; assurez à la vertu sa récompense, comme vous avez assuré à la méchanceté son châtiment ; que sans aucune distinction de culte, dans quelque condition que le mérite se trouve, il conduise aux grandes places de l’État ; et ne comptez plus sur d’autres méchants que sur un petit nombre d’hommes, qu’une nature perverse que rien ne peut corriger entraîne au vice. Madame la maréchale, la tentation est trop proche ; et l’enfer est trop loin ; n’attendez rien qui vaille la peine qu’un sage législateur s’en occupe, d’un système d’opinions bizarres qui n’en impose qu’aux enfants ; qui encourage au crime par la commodité des expiations ; qui envoie le coupable demander pardon à Dieu de l’injure faite à l’homme, et qui avilit l’ordre des devoirs naturels et moraux, en le subordonnant à un ordre de devoirs chimériques.
La Maréchale. – Je ne vous comprends pas.
Crudeli. – Je m’explique ; mais il me semble que voilà le carrosse de M. le maréchal, qui rentre fort à propos pour m’empêcher de dire des sottises.
La Maréchale. – Dites, dites votre sottise, je ne l’entendrai pas ; je suis accoutumée à n’entendre que ce qui me plaît.
Je m’approchai de son oreille et je lui dis tout bas :
Crudeli. – Madame la maréchale, demandez au vicaire de votre paroisse, de ces deux crimes, pisser dans un vase sacré, ou noircir la réputation d’une femme honnête, quel est le plus atroce ? Il frémira d’horreur au premier, criera au sacrilège ; et la loi civile, qui prend à peine connaissance de la calomnie, tandis qu’elle punit le sacrilège par le feu, achèvera de brouiller les idées et de corrompre les esprits.
La Maréchale. – Je connais plus d’une femme qui se ferait un scrupule de manger gras le vendredi, et qui… j’allais dire aussi ma sottise. Continuez.
Crudeli. – Mais, madame, il faut absolument que je parle à M. le maréchal.
La Maréchale. – Encore un moment, et puis nous l’irons voir ensemble. Je ne sais trop que vous répondre, et cependant vous ne me persuadez pas.
Crudeli. – Je ne me suis pas proposé de vous persuader. Il en est de la religion comme du mariage. Le mariage, qui fait le malheur de tant d’autres, a fait votre bonheur et celui de M. le maréchal ; vous avez bien fait de vous marier tous les deux. La religion, qui a fait, qui fait et qui fera tant de méchants, vous a rendue meilleure encore ; vous faites bien de la garder. Il vous est doux d’imaginer à côté de vous, au-dessus de votre tête, un être grand et puissant, qui vous voit marcher sur la terre, et cette idée affermit vos pas. Continuez, madame, à jouir de ce garant auguste de vos pensées, de ce spectateur, de ce modèle sublime de vos actions.

La maréchale a déclaré précédemment que le but de la religion était de contrarier les mauvais penchants de l’humaine nature avant de convenir que, dans ce rôle, elle n’était pas des plus efficaces. « Notre religion est faite pour extirper les vices, elle les couvre, les nourrit, les incite » (Montaigne). Le philosophe indique que, selon lui, il y a dans les enseignements de l’Eglise deux morales, l’une commune à toutes les religions et à toutes les sagesses et qu’on peut appeler la morale naturelle, l’autre arbitraire qui ne convient qu’à quelques individus « mélancoliques » qu’on dirait aujourd’hui  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9pression_(psychiatrie)" dépressifs ou  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/N%C3%A9vrose" névrosés. Le dogme de «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Immacul%C3%A9e_conception" l’Immaculée Conception » est un exemple de cette névrose. Il signifie que le mode ordinaire de conception est sal, que le sexe est sal, que le célibat est saint. Etrange perversion qui conduit ceux qui idolâtrent le Créateur à critiquer ses choix les plus constants ! Le dogme du péché originel doit prendre sa source dans la répulsion que peuvent engendrer chez certains les flots de sang et de liquides divers qui accompagnent la naissance et qu’on peut prendre à tort pour des impuretés. D’où le baptême destiné à éliminer ces « impuretés » par des ablutions.
« Peut-on dire que la religion rende les hommes méchants ? Sûrement elle les rend tristes » (Alain). Comment le chrétien pourrait-il être tranquille et joyeux en ayant le sentiment d’avoir perpétuellement, tenue par un juge impitoyable, une épée de Damoclès au dessus de sa tête ? Fort heureusement il a longtemps subsisté dans nos campagnes un vieux fond de paganisme raillard, gaillard et paillard peuplé de dieux de comédie. On dit que la religion donne un sens à la vie. Faut-il vraiment que la vie ait un sens ? Pourquoi la vie d’un être humain devrait-elle avoir plus de sens que celle d’une libellule ? N’importe qui peut se bercer de l’illusion qu’il a donné un sens à sa vie en se fixant un objectif, une mission, une règle, mais qui donnera un sens à l’objectif, à la mission, à la règle ? Beaucoup ont l’ambition (la prétention ?) de faire de leur vie un chef d’œuvre. En voulant à toute force donner un sens sublime à leur existence, ils risquent fort de commettre des contresens. La plupart des individus n’ont pas de « plan de carrière » et se contentent d’agir en fonction des évènements qui se présentent et des réactions immédiates de leur instrument cérébral. La vie se contente d’être, ce qui n’est déjà pas si mal. C’est un voyage où il faut trouver du ravitaillement et éviter les accidents. Le terme du voyage ne nous est que trop connu. C’est ce qu’exprime la coutume hindoue de confier au courant de la rivière une minuscule embarcation, « frêle comme un papillon de mai », qui porte la flamme vacillante d’une bougie, image symbolique de la conscience. Pour un cynique le sens de la vie, c’est que les gros mangent les petits et savent limiter leur prédation pour qu’il y ait toujours en suffisance des petits à manger. Le Grand Lion a prescrit à son peuple de chasser et de se reproduire avec retenue pour le bien des générations futures et il a ajouté « évitez ces singes impudiques qui m’ont dérobé le tonnerre et qui s’en servent pour vous exterminer ». La vie a un sens intrinsèque, inclus dans sa notion même et sans lequel elle ne saurait exister, qui est de persister et de s’épanouir. Tout être vivant participe d’instinct à ce processus. Un être humain découvre le sens de sa vie le jour où il réalise qu’il constitue un maillon de la longue chaîne des êtres vivants. Le sens donné à la vie par les religions en général et par la religion chrétienne en particulier, sous des apparences de générosité, est en réalité profondément égoïste puisque ces religions n’envisagent de salut qu’individuel. Elles sont donc, de ce point de vue, profondément immorales. Certains diront qu’en se sauvant, on sauve les autres. On reconnaît là la main invisible du marché…dont l’état actuel du monde montre qu’elle a souvent besoin d’être guidée. J’appelle de mes vœux une religion, plus conforme à mes yeux à notre condition de passagers obligés de la fragile Planète Bleue, qui dirait que nous serons tous sauvés ou tous perdus, une religion pour laquelle un Dieu de Justice ne serait qu’une hypothèse de travail et où le dogme du péché originel serait remplacé par celui de la bienveillance universelle.
Revenons au domaine restreint que nous avons déjà évoqué, celui dans lequel se déroulent nos modestes existences. Les relations de causalité à l’intérieur de ce domaine sont les mêmes pour tous et cessent d’être connues au-delà des limites du domaine. Cependant, les religions fixent ce que les mathématiciens appelleraient des conditions aux limites. De proche en proche, ces conditions permettent de fixer la valeur de tous les paramètres à l’intérieur du domaine, c’est-à-dire toutes les règles de vie. Autres conditions aux limites, autres règles. D’où, pour éviter les disputes dues à des points de vue différents, l’intérêt de fixer pour tous les mêmes conditions aux limites, avec la difficulté d’avoir à accorder les règles qui en résultent avec l’expérience vécue. L’incroyant ignore quelles sont les conditions aux limites. Il ne peut se fier qu’à son instinct et à sa raison dont il suppose, suivant en cela Darwin, qu’ils sauvegardent les intérêts du monde vivant, ceux de l’espèce humaine et son propre intérêt. C’est à Mère Nature qu’il adresse son «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Entre tes mains (je remets mon âme)" in manus tuas ». « Il y a des choses qu’il faut accepter sans les comprendre ; en ce sens nul ne vit sans religion » (Alain). Pour tout homme l’existence du monde extérieur est une croyance. Ce que nous appelons éveil pourrait n’être qu’une forme particulière de rêve. Les croyances d’un fidèle bien conditionné forment un réseau hydrographique qui ne cesse de s’approfondir par l’usage. Toutes ses pensées remontent comme des poissons obstinés vers la source divine. Le réseau d’un incroyant, partant des constats sensibles et suivant l’enchaînement des effets et des causes, aboutit à l’océan de l’ignorance et du doute. Il en résulte que le savant qui épouse une croyance religieuse est forcément quelque peu schizophrène. Hasardons une hypothèse : l’activité neuronale du croyant rebondit sur l’îlot divin et se trouve renforcée par l’écho tandis que l’activité neuronale de l’incroyant s’amortit et se perd. Il en résulterait que le croyant a plus d’influx, plus de « gnaque » que l’incroyant. Largué sans carte et sans repères dans un territoire inconnu, il vaut souvent mieux choisir arbitrairement un cap et s’y tenir plutôt qu’attendre une inspiration qui ne viendra pas. L’esprit du croyant est tourné vers le passé car dans l’avenir il voit inscrite sa propre mort qu’il ne peut considérer sans appréhension, quoi qu’il en ait. Celui de l’incroyant est davantage tourné vers l’avenir car  HYPERLINK "http://www.bribes.org/trismegiste/es1ch19.htm" philosopher c’est apprendre à mourir. Or, vous observerez que quatre-vingt dix neuf pour cent des conversations à bâton rompu concernent le passé car chacun adore raconter sa propre histoire. Certains ne vivent leur vie que pour le plaisir de la raconter L’avenir, parce qu’il est imprévisible, est beaucoup moins bavard que le passé, et le peu qu’il nous dit n’est pas forcément réjouissant ! Les grands chefs indiens qui se préoccupaient de l’avenir de leur tribu étaient réputés pour leur sagesse, mais aussi pour leur laconisme. Ils savaient attendre en silence, en tirant sur leur calumet, que les solutions mûrissent dans leur esprit. Une pipe a cet avantage qu’elle permet de réfléchir avant de parler et l’essentiel tient en peu de mots. Un penseur profond prend en considération un grand nombre de données pour élaborer une pensée neuve. Il est nécessairement lent. Un penseur brillant utilise des matériaux déjà élaborés qui sont immédiatement disponibles. Il en résulte qu’il est impossible d’être simultanément profond et brillant, sauf peut-être pour des individus exceptionnellement exceptionnels comme le fut Diderot. Il sera de plus en plus difficile de réussir ce tour de force car le volume des informations disponibles ne cesse de croître et la capacité de traitement du cerveau reste à peu de choses près la même. Le seul espoir de réussir l’alliance de la profondeur et de la rapidité réside dans l’Intelligence Artificielle ou peut-être dans une association du cerveau humain et de l’Intelligence Artificielle. L’homme disert invite ses interlocuteurs à faire le tour du propriétaire de son moi. Il choisit naturellement les meilleurs points de vue et évite soigneusement les arrière-cuisines. L’esprit du bavard incorrigible est tourné obstinément vers le passé, son propre passé. Les religions vivent dans le passé des révélations et des histoires saintes. Par son caractère prédictif la science est tournée vers l’avenir, ce qui est forcément moins accessible et moins populaire.
Dés l’instant où plusieurs religions sont acceptées sur un même territoire l’instinct et la raison de l’incroyant, tels que les exprime la philosophie des lumières, sont cependant les seules références communes possibles pour tous ceux qui y résident. C’est ce qu’il ne faut cesser de répéter à tous les intégristes. L’Ancien Testament témoigne de l’éthique guerrière en vigueur à l’âge du bronze. Ceux qui se repaissent de la Bible sont victimes de cette régression comme le montrent à l’évidence les politiques américaine et israélienne. La Bible, lointain écho d’un passé sanglant de guerres ethniques et religieuses, est la cause fondamentale du conflit israélo-palestinien. « Notre zèle (religieux) fait merveille quand il va secondant notre pente vers la haine, la cruauté, l’ambition, l’avarice, la trahison, la rébellion » (Montaigne). Le Nouveau Testament imprégné de la philosophie régnante témoigne de l’éthique en vigueur dans le monde romain durant l’antiquité tardive. On n’y trouve donc encore aucune condamnation ni de la guerre, ni de l’esclavage, ni de la tyrannie, ni de la subordination de la femme, ni de l’exploitation des enfants, ni de la peine de mort, ni des traitements inhumains ou dégradants, ni de la cruauté envers les animaux. Dieu demande aux hommes de renoncer à la violence mais s’accorde le droit d’infliger des châtiments épouvantables et éternels. L’exemple comme on sait est toujours plus puissant que les paroles. Les fidèles des grandes religions sont des nostalgiques d’éthiques depuis longtemps dépassées par les éthiques naturalistes qui, bien entendu, ont repris les aspects positifs des éthiques religieuses. Comment répartiriez-vous la population occidentale actuelle entre ces diverses éthiques ? Je voterais personnellement pour 15% vivant à l’âge de pierre, 35% à l’âge de bronze, 35% à l’âge des premiers philosophes, 15% à l’âge des Lumières qui se sont allumées à la Renaissance mais sont aujourd’hui menacées d’extinction. Il résulterait de ces proportions qu’une politique fondée sur les seuls acquits des Lumières n’obtiendrait de majorité qu’accidentellement et c’est effectivement ce qui peut être constaté. Lors d’un jeu télévisé le pourcentage de joueurs ayant refusé d’appliquer des décharges électriques douloureuses voire mortelles à des joueurs d’un autre camp lorsque ceux-ci donnaient de mauvaises réponses s’est établi à 20%, ce qui n’est pas très différent du pourcentage proposé pour ceux qui se recommandent des lumières. Tous les efforts de pédagogie doivent viser à augmenter ce pourcentage. C’est la responsabilité des hommes politiques d’aller vers les Lumières contre l’avis majoritaire de leurs électeurs. Ce fut celle en leur temps des saints les plus vénérés. En effet les conditions aux limites des religions ne conduisent pas leurs adeptes à s’écarter trop fortement dans la vie de tous les jours des règles instinctives de l’incroyant, à quelques notables exceptions près. Le feraient-elles qu’elles seraient rapidement éliminées par la sélection naturelle. Il se peut d’ailleurs que des différences relativement mineures provoquent des conflits d’une violence sans commune mesure avec la cause génératrice. C’est l’équivalent dans le domaine social d’une réaction allergique dans le domaine physiologique. Comme le dit si bien Diderot : « Il y a dans les livres inspirés deux morales : l’une générale et commune à toutes les nations, à tous les cultes, et qu’on suit à peu près ; une autre, propre à chaque nation et à chaque culte, à laquelle on croit, qu’on prêche dans les temples, qu’on préconise dans les maisons, et qu’on ne suit point du tout ». Là où croyants et incroyants divergent, c’est sur le chapitre de la justice à laquelle chacun estime avoir droit. Le croyant pense que les injustices seront réparées dans l’au-delà, quoi qu’il puisse arriver ici-bas. L’incroyant pense que la justice sera rendue à chacun ici et maintenant ou qu’elle ne le sera jamais, que seule l’espèce peut bénéficier d’une justice a posteriori. Il n’y a pas d’ailleurs de justice en soi mais seulement des justices liées aux lieux et aux circonstances. Les lois établies selon des critères d’utilité sociale varient avec le temps et sont sujettes à interprétation Pour mieux dire, il y a autant de justices que de juges comme il y a autant de croyances que de croyants.
Le philosophe dit à la Maréchale : « Il vous est doux d’imaginer à côté de vous, au-dessus de votre tête, un être grand et puissant, qui vous voit marcher sur la terre, et cette idée affermit vos pas ». Il vous est doux et il vous semble naturel d’imaginer aurait-il pu ajouter. Il n’est pas besoin de faire preuve d’une imagination excessive pour identifier cette divinité surplombante avec le surmoi de Freud qui est le moyen choisi par l’espèce pour faire valoir ses droits en incitant le moi à adopter des comportements conformes à l’éthique. Les fidèles croient vivre sous le regard de ou des dieux. De fait ils vivent sous le regard de leur surmoi. L’élément divin, quelle qu’en soit la forme, est présent dans le surmoi des croyants et altère leur instinct moral en y introduisant l’intérêt personnel. Le surmoi, c’est l’ensemble des circuits neuronaux chargés de rappeler au moi conscient les interdits parentaux, la soumission au mâle dominant, et les intérêts de l’espèce. C’est ce qui relie un individu à ses congénères, passés, présents et futurs. C’est une des racines des religions. Se préoccuper des autres est une des clés de leur réussite. Le surmoi est le réceptacle où vont s’accumuler les recommandations et les interdits dont l’individu sera nourri au cours de sa vie, spécialement dans ses débuts, mais je suis persuadé qu’il existe chez tous un stock initial, que le cerveau est fourni à la naissance avec son système d’exploitation et quelques logiciels de base (les instincts dont l’instinct parental, l’instinct grégaire, l’instinct sexuel , l’instinct moral, l’instinct de conservation, l’instinct logique selon lequel tout phénomène doit avoir une explication). Des expériences ingénieuses effectuées sur des bébés d’un an, évidemment vierges de tout enseignement moral, ont montré que ceux-ci avaient des comportements moraux, le sens de la justice et de la punition des méchants C’est peut-être ce que Platon signifiait quand il disait que tout savoir est  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9miniscence" réminiscence. L’instinct est la mémoire de l’espèce. Un oiseau sait voler sans avoir jamais appris. Le sympathique anarchiste, généralisant peut-être abusivement son cas personnel, considère que l’instinct moral est assez puissant à lui tout seul pour qu’il n’y ait pas d’autre contrainte à exercer sur l’individu. D’autres estiment que la religion est un élément fondamental de la pression psychologique qu’il est nécessaire d’exercer sur lui. Postuler l’existence du libre-arbitre n’est finalement rien d’autre que de constater l’existence d’un surmoi dont les exhortations peuvent être selon les cas plus fortes ou moins fortes que les pulsions dues à des désirs plus matériels, plus égoïstes et plus immédiats, la conscience, arbitre impartial, désignant le vainqueur. Saint Paul, avec les mots de son époque, ne dit pas autre chose : « je ne sais pas ce que je fais: je ne fais point ce que je veux, et je fais ce que je hais. Or, si je fais ce que je ne veux pas, je reconnais par là que la loi est bonne. Et maintenant ce n'est plus moi qui le fais, mais c'est le péché qui habite en moi. Ce qui est bon, je le sais, n'habite pas en moi, c'est-à-dire dans ma chair: j'ai la volonté, mais non le pouvoir de faire le bien. Car je ne fais pas le bien que je veux, et je fais le mal que je ne veux pas. Et si je fais ce que je ne veux pas, ce n'est plus moi qui le fais, c'est le péché qui habite en moi.] Je trouve donc en moi cette loi: quand je veux faire le bien, le mal est attaché à moi. Car je prends plaisir à la loi de Dieu, selon l'homme intérieur; mais je vois dans mes membres une autre loi, qui lutte contre la loi de mon entendement, et qui me rend captif de la loi du péché, qui est dans mes membres ». Ce surmoi est une donnée que nous ne maîtrisons pas plus que le reste, c’est un héritage génétique, éducatif et culturel. Quand un homme se conduit en accord avec l’éthique ordinaire on est toujours en droit de se demander si c’est son surmoi qui est costaud ou si ce sont ses passions qui sont faiblardes. Si, inversement, il se conduit mal, il ne faut pas nécessairement l’attribuer à une absence de sens moral ; il peut s’agir d’une insuffisance d’énergie pour suivre les injonctions de ce sens moral. Tous les individus ne subissent pas ces diverses sollicitations avec la même intensité. Certains chez qui la voix de l’espèce ou du surmoi que d’aucuns appellent la voix de la conscience est un peu plus faible qu’il n’est souhaitable peuvent trouver avantage à la renforcer par ces imaginations qui peuvent leur épargner des retours de bâton désagréables, de la même façon que, conscients de leur amour immodéré du jeu, certains se font interdire de casino !
« Mettons l’homme et le bandit en présence de Dieu, comme on suppose que le vrai croyant est en présence de Dieu, l’un et l’autre cèderont à une puissance évidemment invincible…c’est pourquoi il faut que Dieu soit incertain… le saint est l’homme qui se passe de Dieu » (Alain).  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Sp%C3%A9cial:Recherche&search=m%C3%A8re+th%C3%A9r%C3%A9sa&fulltext=Rechercher&ns0=1&redirs=0" Mère Térésa a fait part des douleurs à peine soutenables qu’elle a endurées lors des très longues périodes où elle a dû se passer de ce qu’elle ressentait comme la présence du Christ, lequel par ailleurs s’est bien souvent fait invectiver par  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Abb%C3%A9_Pierre" l’abbé Pierre. Térésa et Pierre ont pourtant conservé leurs trajectoires sans dévier d’un pouce, en dépit des vicissitudes de ce qu’ils décrivaient comme leur relation personnelle à Dieu, ce qui montre bien qu’il existe un moteur encore plus puissant que cette relation. Ce moteur c’est l’instinct moral, instinct présent chez tous les hommes, peut-être chez tous les êtres vivants évolués. L’absence de Dieu, au moins momentanée, est la condition d’une véritable sainteté. Le doute est l’honneur intime du croyant, son garant. Sans le doute, le saint n’est qu’un habile homme. Il existe par ailleurs des saints laïcs tout aussi authentiques que ceux qui sont estampillés par l’Eglise. Les militants communistes qui ont résisté à la torture jusqu’à la mort pour ne pas livrer les noms de leurs camarades mériteraient bien d’être sanctifiés. La véritable sainteté n’a pas de couleur politique ou religieuse. Sous les préaux des écoles le leader communiste Jacques Duclos arrachait des larmes à ses auditoires ! Comment ne pas être d’accord avec celui qui ne professe que de bons sentiments. ? D’une manière générale il n’y a rien dans la doctrine chrétienne des évangiles qui puisse heurter les sentiments naturels que chacun éprouve. Chacun est libre d’ailleurs de voir dans le christianisme le précurseur de la pensée sociale, ou de considérer le socialisme comme du christianisme enfin pris au sérieux. Cette parenté n’est pas surprenante quand on connaît les origines véritables du christianisme. Quand  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Karl_Marx" Marx évoque le sort des enfants travaillant dans les mines, il retrouve des accents évangéliques. L’unité fondamentale de la famille humaine est au cœur de la doctrine des évangiles, comme elle est au cœur de la doctrine socialiste attachée à cette unité et au respect de la dignité de chacun. Ce christianisme-là est bien un humanisme, même si cet humanisme comporte, comme nous le verrons, quelques lacunes. Il faut reconnaître que le Christ tel qu’il a été dépeint est le premier à avoir dit aussi nettement que la raison du plus faible est toujours la meilleure, et que la solidarité doit s’étendre très au-delà du cercle étroit où elle est confinée dans la nature. Dans ce sens il semble contrevenir aux intentions primitives de la nature et de son éventuel Créateur ! C’est la prééminence écrasante de l’homme sur cette planète qui l’a conduit à faire cette entorse aux lois naturelles. Si la croyance qu’il affiche n’est pas un simple vêtement destiné à dissimuler un égoïsme foncier, un chrétien conséquent doit se sentir plus à l’aise avec un socialisme altruiste qu’avec un capitalisme égoïste par essence et il très étonnant, et ne peut s’expliquer que par un souci de rééquilibrage, qu’en France une extrême droite de tradition antisémite choisisse de se recommander d’une religion qui divinise un juif de gauche ! Rien décidément n’est simple et la figure du Christ appartient à la longue série des martyrs qui ont été exécutés ou assassinés tandis qu’ils œuvraient pour le bien commun. L’Amérique du sud, maintenant que la CIA y a desserré son étreinte, parait bien partie pour être le continent à la fois le plus chrétien et le plus socialiste. Jamais donc je ne croirai que l’abbé Pierre, mère Térésa et tous les saints du paradis ont fait ce qu’ils ont fait par calcul, pas plus que je ne le crois de la Maréchale. La meilleure preuve que la religion, malgré le caractère exorbitant de ses promesses et de ses menaces, n’a pratiquement aucune influence dans ce domaine, c’est que la conduite de “  HYPERLINK "http://teamalaide.free.fr/Aragon/poeme.htm" celui qui croyait au ciel ” et la conduite de “ celui qui n’y croyait pas ” ne se distinguent pas aisément, ni dans la vie de tous les jours, ni dans les situations extrêmes. Les études statistiques qui ont pu être faites sur ce sujet montrent que le croyant et l’incroyant ne se différencient pas de manière significative, ni dans leurs jugements moraux, ni dans les actes qui en sont la traduction. Le philosophe et la Maréchale étaient d’ailleurs d’accord sur ce point bien avant que de telles études aient été entreprises. Il est très probable que les groupements neuronaux et leurs liaisons mis en jeu dans les processus mentaux correspondant soient identiques que leur origine causale soit appelée volonté divine par les croyants, instinct moral par les philosophes ou surmoi par les disciples de Freud. La morale, loi de nature, est la même pour tous. Est-ce à dire, «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Je frémis rien qu'à l'évoquer" horresco referens » que ceux qui croient au ciel n’y croient pas vraiment, mais que cette pseudo croyance leur est confortable, sympathique et socialement profitable ? Qu’ils y adhèrent comme on achète un ticket de  HYPERLINK "http://www.arte-tv.com/fr/histoire-societe/Special-Europe/Agenda_20EUROPE/cette-semaine/Journ_C3_A9es_20europ_C3_A9ennes_20du_20patrimoine_20_3A_20un_20fabuleux_20h_C3_A9itage_20_C3_A0_20d_C3_A9couvrir_2C_20red_C3_A9couvrir_20et..._20entretenir/943750.html" l’Euromillion avec le fragile espoir que ce soit le ticket gagnant ? Vivraient-ils comme ils le font s’ils croyaient véritablement aux récompenses et aux châtiments annoncés ? Oseraient-ils faire des enfants sachant les douleurs infernales que ceux-ci risquent d’endurer pendant des siècles de siècles ? Oublieraient-ils aussi facilement les prescriptions de leur foi et l’amour du prochain, lorsque leurs passions, leurs préjugés ou leurs intérêts sont en jeu ? Ce fut vrai dans le passé des plus  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Pornocratie" hautes autorités de l’Eglise. Comment font-ils pour résister au stress extrême qui devrait résulter normalement de l’incertitude terrible qui pèse sur leur avenir, car comme dit Woody Allen l’éternité, c’est très long, surtout vers la fin ! Il en est peu qui peuvent avoir la conscience parfaitement tranquille. Et s’ils l’ont c’est  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/P%C3%A9ch%C3%A9" péché mortel d’orgueil comme Diderot ne manque pas de le leur rappeler. Pourquoi ne mettent-ils pas plus volontiers la main à la poche pour garantir cette éternité ? L’argent dépensé est un bon indicateur de l’intérêt porté à une cause. Or, dans la plupart des familles chrétiennes, le sport ou les vacances sont des postes budgétaires plus importants que celui consacré à faire vivre leur foi. Voyez avec quelle ferveur les fidèles se bousculent pour consacrer leur vie à l’affaire mirobolante qui leur est proposée ! Voyez la part de leurs revenus qu’ils consacrent à des œuvres charitables et avec quelle munificence ils entretiennent leurs pasteurs, de sorte que ceux-ci ne pourraient nourrir femme et enfants, même s’ils étaient autorisés à en avoir ! Voyez avec quel enthousiasme ils se débarrassent de leurs biens superflus alors qu’ils savent pourtant qu’un excès de ces biens peut faire obstacle à leur salut ! Ecoutez ce prélat lucide persuadé que les jeunes filles de bonne famille qui se pressent pour applaudir le pape lorsqu’il prêche la chasteté et l’abstinence, ont des contraceptifs dans leur sac à main ! Les églises se vident dés que la pratique religieuse est un obstacle aux carrières. L’insignifiance de l’art religieux contemporain montre que l’esprit a déserté les églises. La religion reste un marqueur social mais elle a perdu pratiquement toute influence sur la conduite des individus. Un couple bien portant qui compte moins de dix enfants lorsqu’il atteint la quarantaine ne suit pas les prescriptions de l’Eglise concernant la contraception. La douceur du bouddhisme cambodgien n’a pas empêché de s’exprimer la monstruosité d’un  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Pol_Pot" Pol Pot, ce qui est assez terrifiant, et Staline fut séminariste. « Si nous avions une seule goutte de foi, nous remuerions les montagnes » dit l’évangile cité par Montaigne. Aux dernières nouvelles, elles sont toujours à la même place. Il est plus facile d’aimer un Dieu que l’on peut modeler à sa fantaisie plutôt que des créatures obstinées à persévérer dans leur être, et, selon le mot terrible de Diderot, d’aller « demander pardon à Dieu des injures faites à l’homme ». Torturez si vous le jugez indispensable, mais n’oubliez surtout pas d’aller vous confesser après ! Feu le Général  HYPERLINK "http://www.ldh-toulon.net/spip.php?article1097" Massu qui connaissait bien la question a fini par convenir qu’il était possible et même avantageux de se passer de ce moyen extrême. Il faut dire qu’ayant atteint le troisième âge de la croyance il avait tout intérêt à se mettre en règle avec sa conscience avant qu’il ne soit trop tard ! Il y a vraiment de quoi assombrir les dernières années de croyants sincères qui ont succombé dans leur jeunesse à des passions coupables et qui voient arriver avec appréhension le moment où ils auront à rendre des comptes. Qu’ils se rassurent, leur Créateur sait bien qu’ils n’avaient pas le choix !
Insultez et giflez publiquement à la sortie de la messe un paroissien jeune, robuste et bien habillé et voyez s’il tend l’autre joue ! Pour pousser l’homme à l’action, on ne peut guère agir en effet que sur trois leviers : la peur, l’intérêt et le sens moral qui pousse à se dévouer pour sa communauté. Tous les régimes politiques utilisent à des degrés divers ces différents leviers. La dictature privilégiera la peur, la démocratie libérale mettra l’accent sur l’intérêt. Une nation en guerre pourra davantage faire appel au sens moral qui peut aller jusqu’à l’enthousiasme et l’oubli de soi, car on ne calcule plus quand la maison brûle. Ce comportement est ce qu’on appelle le patriotisme dont la version dévoyée est le nationalisme. Il n’est que de constater l’incroyable rapidité à laquelle ont été développés pendant la dernière guerre bombe atomique, fusées, avions à réaction et, dans le cas de l’Union Soviétique, des armes conventionnelles au niveau des meilleures existant à l’époque. L’action immédiate remplace dans ces circonstances exceptionnelles les discussions interminables sur qui doit faire quoi et au profit de qui et les réticences et retards qui en découlent. C’est la raison pour laquelle le communisme qui a si bien réussi dans la guerre a échoué dans la paix. C’est qu’il aurait fallu, la paix revenue, deux partis communistes se distinguant par les nuances du rouge de leur drapeau et se disputant le pouvoir, et non pas un seul, pour que ce régime perdure, au lieu de dégénérer par manque de contrôle démocratique en une entente “ des copains et des coquins ” dont nous voyons encore aujourd’hui les séquelles. Beaucoup renvoient dos à dos stalinisme et nazisme. Est-il légitime de mettre sur le même plan angélisme dévoyé et satanisme assumé ? Dans la nature, chaque animal ne recherche que son propre intérêt ou celui d’un groupe très étroit lié à lui par le sang et constituant sa « famille ». Le capitalisme entérine cet état de fait. Le collectivisme élargit ce groupe jusqu’à des limites qui ne sont pas toujours fixées avec beaucoup de précision (classe sociale, nation, humanité, règne vivant tout entier ?). Le capitalisme dispose de la religion pour introduire les exceptions nécessaires à son principe général. Le collectivisme érige l’exception en règle. Il exige donc pour son bon fonctionnement que les principes recommandés par toutes les religions comme par la philosophie naturelle, soient intégrés sous forme de réflexes par la plupart des individus. Nous n’y sommes pas encore tout à fait. Quels efforts fait-on d’ailleurs pour donner aux jeunes gens les bons réflexes ? A peu près aucun. Les informe-t-on même suffisamment de l’existence de codes et de lois dont ils devraient connaître au moins les dispositions essentielles ? A-t-on suffisamment insisté auprès d’eux sur le fait que pour gagner une compétition il est essentiel d’éviter les cartons rouges ? Leur a-t-on fait prendre conscience du fait que sans éthique aucune société n’est viable ? Que la promotion de l’éthique est une activité qui peut être gratifiante ? Leur a-t-on démontré par l’exemple « qu'à tout prendre il vaut mieux, pour son bonheur dans ce monde, être un honnête homme qu'un coquin » ? Le sens moral est une plante fragile qu’il faut nourrir, soigner et protéger. Une morale véritable ne peut être fondée sur les récompenses et les châtiments, comme c’est la règle pour toutes les religions. Il faut faire appel à l’instinct qui incite à protéger sa propre espèce. Au temps de la splendeur de l’URSS on entendait dire dans les pays de l’Est que le déficit moral qui y était observé était lié à l’absence de religion. Le retour de celle-ci a-t-il amélioré la situation ? Il est permis d’en douter. Une partie de la nomenklatura s’est muée, pour son plus grand profit en maffia capitaliste à la faveur de  HYPERLINK "http://www.diploweb.com/p4blan01.htm" manœuvres qui laissent pantois. Cette maffia constitue les gros bataillons des nomenklatouristes et des oiligarques que nous voyons aujourd’hui envahir tous les lieux à la mode. Comment le peuple russe s’est-il laissé dépouiller ainsi de ce qu’il avait acquis au prix de tant de sang, de sueur et de larmes ? Il ne faut pas s’étonner qu’il noie aujourd’hui sa désillusion et son chagrin dans un flot de Vodka. Ceux qui veulent comprendre exactement ce qui s’est passé pendant ces périodes troublées prennent le risque de finir leur carrière dans une dalle de béton. Le KGB, la CIA et des organisations criminelles ont certainement eu plus de part que le Saint-Siège dans ces malversations. Il est difficile de comprendre ces évènements si le KGB n’a pas été influencé sinon infiltré par la CIA. Des esprits tentateurs ont murmuré à l’oreille des directeurs d’entreprises qu’ils disposaient certes déjà de copieux privilèges, mais qu’il serait encore préférable pour eux de devenir d’heureux propriétaires. Et ils ont répondu banco ! Il y a tout lieu de croire que les spoliations dont le peuple russe a été victime ont été précédées, avant même la chute du communisme, par des détournements de fonds. En fait les individus qui avaient la possibilité de racheter des entreprises publiques, même bradées, étaient les bénéficiaires de ces détournements ainsi que ceux qui pratiquaient depuis longtemps déjà des activités criminelles. Cependant le phénomène qui s’est manifesté dans le cas de l’Union Soviétique avec un éclat particulier a son équivalent dans toutes les sociétés. Seul le vol, légal ou non, peut enrichir rapidement car l’argent est le signe du travail efficace, celui qui remet de l’ordre dans le monde matériel en limitant autant que faire se peut les gains de l’Entropie, et cela prend du temps. Le communisme qui reste une idée séduisante a échoué comme le pensait ce bon monsieur  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" Gorbatchev à cause de la mise en œuvre de son principe, non à cause du principe lui-même qui est somme toute assez naturel. Une armée en campagne, l’équipage d’un navire, une expédition himalayenne, un ordre monastique, une famille unie, un groupe d’amis en vacances fonctionnent selon des règles ou des usages qui en sont assez proches. Il s’agit de mettre des ressources en commun afin d’assurer au mieux les besoins de chacun. Donnez le communisme aux japonais et ils le feront fonctionner ! Dans une société primitive, nul ne conteste au meilleur chasseur le droit de se servir le premier ni celui de choisir le meilleur morceau, mais il ne viendrait pas à l’idée du groupe des chasseurs d’allouer cinq cents kilogrammes de viande à celui dont l’estomac ne peut en contenir que deux, pendant que d’autres chasseurs resteraient sur leur faim. Le grand public juge indissociables le communisme et la dictature. Au vu de l’histoire il semble difficile de lui donner tort. Pourtant il peut être soutenu avec quelque vraisemblance que l’évolution du communisme russe vers la dictature a été rendue inévitable par la pression extrême, tant extérieure qu’intérieure, qui a été exercée sur ce régime. Lorsque les conditions deviennent très difficiles une stricte discipline s’impose en effet à tous. Ce fut vrai pour la révolution russe comme pour la révolution française, et le souci de l’ordre est un domaine où il est facile d’en rajouter. Aux yeux du plus grand nombre tout système collectiviste est irrémédiablement disqualifié, mais qui aurait parié en 1815 sur l’avenir des démocraties parlementaires laïques alors que partout en Europe les trônes et les autels venaient d’être rétablis ? Les différentes « restaurations » que la France a connues et dont la dernière a peut-être eu lieu durant le dernier passage au pouvoir de la droite dite « décomplexée » montrent que le premier essai n’est pas toujours le bon. Il est pourtant aussi motivant pour un salarié de travailler au profit de ses camarades ou de ses compatriotes dans un cadre mutualiste que de travailler pour des actionnaires avec lesquels il ne se sent le plus souvent aucun lien et qui n’ont ni pour lui, ni pour les intérêts nationaux, aucun égard. Les dirigeants résidant au-delà des océans et dont le seul horizon est l’horizon financier apparaissent trop souvent comme de nouveaux tyrannosaures. Si le libéralisme économique a prouvé dans les faits son efficacité lorsque les ressources naturelles étaient abondantes et les produits de consommation rares, qu’en sera-t-il si ces ressources se raréfient ou si ces produits deviennent disponibles presque à discrétion, parce que fabriqués essentiellement par des robots, ou bien si mondialisé, informatisé et « internetisé » le système libéral souffre d’instabilités irrémédiables avec leur cortège de catastrophes financières, économiques et, finalement, humaines ? La question mérite d’être posée. La réponse dépend, entre autres, de ce qui va se passer en Chine où la religion semble avoir perdu droit de cité, et du développement plus ou moins rapide de la robotique et des HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Syst%C3%A8me_expert"systèmes experts.
Au risque de faire crier, je dirais qu’en politique c’est le propre de la gauche de privilégier le surmoi dans ses propos tandis que la droite privilégiera plutôt les pulsions élémentaires, comme la peur qui prend aux tripes. Si la gauche semble plus sensible aux sollicitations du cortex, la droite se soumet plus volontiers aux diktats du bulbe rachidien. La distinction entre droite et gauche est donc tout sauf artificielle. L’homme, qu’il soit de droite ou de gauche, a un bulbe et un cortex, mais la conscience de l’homme de gauche est plus spontanément accordée sur les flûtes et les violons du cortex et celle de l’homme de droite sur les cuivres et les tambours du bulbe. Pour faire court on peut dire que le cortex est de gauche et que le bulbe est de droite. A mesure qu’il vieillit et qu’il prend du ventre l’homme passe souvent d’un cortex dominateur à un bulbe prépondérant. La gauche exprimera plus volontiers des intentions nobles et généreuses et la droite des préoccupations matérialistes et égoïstes. La ligne de démarcation gauche droite passe au travers des assemblées comme elle passe à l’intérieur de chaque individu. Les deux attitudes sont d’ailleurs indispensables et complémentaires. Elles constituent une nouvelle illustration des phénomènes de sélection naturelle. Au niveau individuel la force est favorisée ; au niveau collectif c’est l’éthique. Cette différentiation darwinienne ne mérite pas que l’on s’insulte. Pour attaquer un sol dur il faut incliner la bêche tantôt vers la droite, tantôt vers la gauche. « Nous ne sommes pas les bons et ils ne sont pas les méchants, même s’ils disent qu’ils sont les bons et que nous sommes les méchants ! » (François Mitterrand). Il ne faut pas s’étonner si, dans une démocratie en bon était de marche ; droite et gauche ont tendance à s’équilibrer. Chaque camp, dans son programme, va en effet aussi loin que possible jusqu’au point au-delà duquel il craint de ne pas pouvoir réunir une majorité de suffrages. Un homme de droite sera plus facilement séduit par les idées religieuses car elles contribuent à le rééquilibrer. Il compense ainsi souvent l’égoïsme collectif qu’il préconise par une grande générosité individuelle. Il n’arrive pas à se faire aussi méchant qu’il le voudrait car la nature est la plus forte. En d’autres temps, malgré un racisme affiché, il avait son bon juif ou son bon arabe. L’homme de gauche se rééquilibre en adoptant des mœurs plus libérées, un comportement individuel parfois plus égoïste, en tout cas plus  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9donisme" hédoniste et moins esclave du qu’en dira-t-on. D’où les facilités qu’il y a à le piéger en plaçant sur son chemin une séductrice, telle la fameuse  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Monica_Lewinsky" Monika, à qui il est loisible d’imputer les récents déboires de la vie politique américaine et même mondiale. La méthode a démontré son efficacité, elle peut encore servir, mais ceux qui l’utilisent se déshonorent plus qu’ils ne déshonorent leurs victimes. Certains hommes de droite reprochent à la gauche de manquer de patriotisme. Or, le sentiment d’appartenir à une classe privilégiée est souvent plus fort à droite que le sentiment national. Il suffit d’ouvrir un livre d’histoire pour constater que les traîtres à la patrie proviennent très souvent d’une droite où la volonté de revanche sociale sur des classes revendicatives l’a emporté sur tout le reste. Par tempérament, l’homme de gauche est plus spontanément mathématicien ou physicien, l’homme de droite plus volontiers historien ou romancier. La morale et la prudence sont plutôt de gauche, les intérêts et l’audace sont plutôt de droite et la pègre est plutôt fasciste. L’homme de gauche est persuadé de l’unité fondamentale de la famille humaine. L’homme de droite veut faire partie des « happy few ». C’est très évidemment un péché d’orgueil que l’Eglise officiellement désapprouve mais contre lequel elle ne fait pas preuve de beaucoup de zèle, d’autant qu’il lui arrive assez souvent elle-même d’y succomber. Le chrétien de gauche ne me paraît pas des plus conséquents. Au nom de quoi lutterait-il contre les inégalités qui règnent ici-bas alors que, selon la doctrine dont il se réclame, il en existe au ciel de bien plus radicales ? L’homme qui est à la fois riche et de gauche suscite les railleries de la droite sectaire alors qu’on devrait plutôt louer son désintéressement. Si sa fortune est récente, ce n’est pas, comme disait  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Coluche" Coluche, un nouveau riche mais un ancien pauvre. Il y aurait au contraire toutes les raisons de se moquer du riche qui se dit chrétien car « il est plus facile pour un chameau de passer par le chas d'une aiguille que pour un riche d'entrer au royaume des cieux ». …L’homme de droite est un carnivore qui cherche à s’approprier toutes les idées intéressantes émises par des herbivores de gauche. Par une dérive qui paraît systématique les opinions de la gauche deviennent au bout d’un délai variable des valeurs revendiquées par la droite, ainsi du patriotisme, de l’esprit républicain, de la laïcité ou des préoccupations sociales. C’est de la récupération politique, un phénomène bien connu. Il faut remarquer toutefois qu’une société dans son ensemble est plus équilibrée lorsque le pouvoir politique et celui de l’argent ne sont pas durablement dans le même plateau de la balance. L’équilibre des pouvoirs, en permettant le respect des droits de chacun, est l’essence même de la démocratie. La puissance de l’argent menace constamment ce nécessaire équilibre, car cet argent permet d’orienter l’opinion publique, de ridiculiser, corrompre ou compromettre, des adversaires politiques, d’entretenir la division parmi eux et d’infiltrer leurs organisations. La confiance que donne un portefeuille épais permet aux opinions droitières de s’exprimer plus facilement dans les discussions publiques ou privées. C’est ce qui explique les succès électoraux de la droite plus que la qualité de sa gestion trop souvent laxiste. Son action, facilitée par le soutien que lui apportent les milieux financiers, a pour effet d’accroitre les inégalités ce qui est globalement contreproductif et explique ses échecs. Celui qui a l’ambition de réussir socialement a tout intérêt à professer des opinions conservatrices ou, à tout le moins, à dissimuler soigneusement celles qui pourraient déranger les situations établies. Il doit acheter le Figaro plutôt que Le Monde, Le Point plutôt que Marianne, Les Echos plutôt que le Canard Enchaîné.

PRIVATE TC \l 1 «  »10. DU CATECHISME

La Maréchale. – Vous n’avez pas, à ce que je vois, la manie du prosélytisme.
Crudeli. – Aucunement.
La Maréchale. – Je vous en estime davantage.
Crudeli. – Je permets à chacun de penser à sa manière, pourvu qu’on me laisse penser à la mienne ; et puis, ceux qui sont faits pour se délivrer de ces préjugés n’ont guère besoin qu’on les catéchise.

C’est un fait que les incroyants sont réticents à l’égard de tout prosélytisme car ils ont conscience des souffrances que l’arrachement d’idées si profondément et si diversement enracinées peut causer à ceux qui ont encore besoin des consolations de la religion. Ils se sentent mal à l’aise dans cet exercice, comme s’ils avaient à dire à un enfant qui attend ses jouets que le Père Noël n’existe pas. Il est du reste aussi difficile d’avoir avec un croyant une discussion suivie sur le fondement de ses croyances que d’apprendre à nager à un enfant qui crie et se débat dés qu’on veut le tremper dans l’eau ! Lui demander de les remettre en cause, c’est lui proposer une sorte d’amputation. L’incroyant exposé constamment à l’expression publique de croyances qui lui sont étrangères est vacciné contre ce type d’agression. D’ailleurs l’Eglise Catholique ne s’intéresse qu’à ceux qui sont des clients potentiels. Il faut d’autant plus lui rendre hommage d’avoir eu le courage de publier encore récemment des catéchismes officiels, qu’elle s’expose ainsi à la contradiction. Plus prudentes les religions protestantes se contentent le plus souvent de commenter librement les textes sacrés et de chanter la joie d’être ensemble. La catéchèse peut avoir toutefois des conséquences imprévues. J’ai perdu la foi lorsque j’avais onze ou douze ans, parce que j’avais lu trop attentivement le catéchisme. Le catéchisme de mon enfance énonçait comme des certitudes un certain nombre de propositions :
Dieu est créateur de toutes choses
Dieu connaît le passé, le présent et l’avenir
Dieu est infiniment bon
Dieu est tout-puissant
L’enfer existe
Comment un dieu infiniment bon et tout-puissant peut-il appeler à vivre un malheureux qu’il a créé lui-même et qu’il sait d’avance condamné à des souffrances éternelles ? Si les mots utilisés ont un sens, un tel comportement relève du sadisme le plus abominable et est évidemment incompatible avec une infinie bonté. La contradiction interne de ces différentes propositions m’a parue si évidente que j’ai cessé de fréquenter le catéchisme et que je me suis mis au foot. Comme me le reprochait amicalement un ancien patron dans des circonstances évidemment tout autres : « l’ennui avec vous, c’est que vous êtes logique ! ». Ce n’est pas seulement moi qui suis logique aurais-je dû lui répondre, c’est le monde qui est fait comme ça ! Dieu source inépuisable de bienveillance ou Dieu juge impitoyable et colérique (alors que la colère est un péché et que Dieu est sans péché d’après la doctrine), homme libre et responsable ou homme dont le destin est fixé inexorablement à l’avance, l’Eglise n’a jamais su ou voulu choisir. En l’occurrence, comme nous l’avons vu, l’homme n’a très probablement que l’illusion d’un choix… L’invocation de ce choix hypothétique ne sert qu’à fournir un prétexte et une justification à la punition. L’Eglise chrétienne n’a jamais expliqué comment l’homme peut être libre si son destin, connu de Dieu de toute éternité, est de ce fait inexorablement fixé. Elle est totalement incapable de justifier l’existence du mal. Elle ne saurait l’attribuer à Dieu, pourtant créateur de toutes choses. Elle doit donc, comme n’importe quelle société humaine, trouver des subalternes, des boucs émissaires, des « lampistes », pour porter le chapeau ! C’est le rôle dévolu au diable et à ses créatures, mais qui a permis au diable d’exister ? Qui, sans être pour autant infiniment bon, n’aurait eu à cœur de créer un monde où tous les êtres sensibles vivraient éternellement dans la sérénité et dans la joie ? Quelle mère au pied de la croix, mue par la rage et la douleur, n’aurait tenté d’arracher les yeux des bourreaux de son fils au lieu de les regarder faire ? Les bizarreries sont si nombreuses dans les textes sacrés qu’on peut se demander si ce n’est pas à dessin, pour accoutumer leurs fidèles à croire aveuglément. Dieu est-il au courant de ce qui se passe dans les camps d’extermination ou dans les salles de torture, pour ne citer que certains des cas les plus déplorables ? Que l’injustice existe sur terre, passe encore, mais qu’elle continue d’exister dans l’au-delà, c’est vraiment « too much ». Quelle compatibilité peut-il y avoir entre une Shoah éternelle et l’amour divin ? C’est probablement ce qu’on appelle de l’amour vache, mais alors poussé à ses plus extrêmes limites ! La justice divine telle qu’elle est envisagée par les chrétiens (et par d’autres) est une suprême injustice. « Ou la définition générale de la justice convient également à vous, à M. le maréchal, à moi, au jeune Mexicain et au vieillard ; ou je ne sais plus ce que c’est » Les contorsions des théologiens pour justifier l’injustifiable invitent à poser cette question : comment dit-on «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Langue_de_bois" langue de bois » en latin d’église ? Comme a dit Brassens : « Dieu, s’il existe, il exagère »... Comme a dit un autre « Sa seule excuse, c’est qu’il n’existe pas ». Si Dieu existe il n’est à mon avis ni bon ni mauvais, ou bien il est les deux à la fois. En toute logique la Trinité devrait être transformée en tétrarchie en y intronisant le Prince des Ténèbres. Si je ne craignais pas de faire de l’anthropomorphisme je dirais que Dieu est un mathématicien et un physicien de génie perdu dans ses sublimes pensées de sorte que beaucoup de choses lui échappent et qu’il a toujours, sur nos plus illustres savants, un nombre infini de coups d’avance.
Mon catéchisme disait également :
Dieu doit être loué et adoré. Les catholiques pratiquants disent louer et adorer Dieu, ce qu’à ma connaissance il n’a jamais réclamé avec insistance, si l’on se réfère aux évangiles, pas plus qu’il n’a insisté sur les châtiments et récompenses futurs ou sur l’existence d’esprits malfaisants, comme s’il s’agissait dans ces différentes occurrences de concessions faites par l’Eglise aux pratiques et aux croyances populaires, au nom probablement du réalisme. Comment font-ils pour louer et adorer sans arrière-pensée un être qui peut leur dispenser éternellement le meilleur, mais aussi le pire ? Un amour soumis à pareille contrainte peut-il être vraiment sincère ? Il me paraît au contraire qu’un amour véritable exige une manière d’égalité et de liberté de part et d’autre. Ils disent que Dieu est infiniment bon. Le croient-ils vraiment ou bien jugent-ils prudent de se mettre bien avec lui en le couvrant de louanges, comme s’il s’agissait d’un potentat oriental cruel et capricieux ? Lui faire offrande c’est se moquer de lui. C’est lui proposer d’échanger une modeste obole contre une précieuse faveur. C’est se livrer à une tentative de corruption où l’on demande d’enfreindre les lois naturelles à celui-là même qui en est l’auteur. Supposer qu’il puisse être sensible à l’amour de ses propres œuvres a aussi quelque chose d’insultant à son égard. C’est l’accuser en quelque sorte de payer la claque pour se faire applaudir ! Voltaire a eu raison de dire que si Dieu a fait l’homme à son image, ce dernier le lui a bien rendu ! L’homme a fait souvent de Dieu, ce qui n’est guère flatteur, un être coléreux, vindicatif et vaniteux. Si, en revanche, c’est Dieu qui a fait l’homme, il n’a vraiment pas de quoi se vanter non plus. Si Dieu s’est dérobé à notre vue, s’il nous a voulu autonomes, le meilleur moyen de lui complaire n’est-il pas de faire comme s’il n’existait pas ? Exigez-vous de vos enfants qu’ils vous vénèrent ? Ne souhaitez-vous pas plutôt qu’ils vivent leur vie le plus librement et le plus heureusement possible ? Les chrétiens sont persuadés d’être aimés de Dieu. Il est mort pour nous, disent-ils. Si c’est vrai, qu’il en soit remercié, encore que le mot de remerciement soit bien faible dans ce cas. Mais je ne peux me défendre de l’idée qu’un dieu tout-puissant aurait pu faire plus simple, plus efficace et moins douloureux.  HYPERLINK "http://www.feelingsurfer.net/garp/Poesie/Aragon.Amour.html" Il n’y a pas d’amour heureux.
Certains passages de la Bible font apparaître Dieu comme un véritable cinglé du barbecue tant il semble se régaler du fumet qui se dégage des innombrables  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/L%C3%A9vitique" sacrifices d’animaux effectués en son honneur ! N’a-t-il donc aucune commisération pour les plus faibles de ses créatures ? Encore heureux que ce dieu-là se soit contenté d’animaux et qu’il n’ait pas réclamé des êtres humains comme certains de ses confrères. L’histoire d’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Isaac" Isaac peut du reste faire naître quelques doutes à cet égard ! Le terme de sacrifice reste attaché au rite religieux. L’incompréhensibilité divine n’est pas un blanc-seing pour toutes les dérives. L’utilisation du fumet des viandes grillées pour se concilier les bonnes grâces de la divinité peut sembler en tout cas ingénieuse et situe bien la place réelle qu’occupent les religions. Tel est leur lot que de demander peu en échange de presque rien. L’abandon du latin a révélé aux yeux de beaucoup le peu de substance de la doctrine catholique et son obsolescence.
Ils ne savent pas ce qu’ils perdent Tous ces fichus calotins Sans le latin, sans le latin La messe nous emmerde A la fête liturgique Plus de grand’s pompes, soudain Sans le latin, sans le latin Plus de mystère magique Le rite qui nous envoûte S’avère alors anodin Sans le latin, sans le latin Et les fidèl’s s’en fououtent O très Sainte Marie mèr’ de Dieu, dites à ces putains De moines qu’ils nous emmerdent Sans le latin Je ne suis pas le seul, morbleu Depuis que ces règles sévissent A ne plus me rendre à l’office Dominical que quand il pleut
(Georges Brassens, Tempête dans un Bénitier)

Qu’il pleuve ou non, « qu’il fasse beau ou qu’il fasse laid », je me suis longtemps rendu à cet office où je m’ennuyais ferme, attendant comme une délivrance l’ «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Allez, la messe est dite" Ite Missa Est ». A l’âge que j’avais alors, une heure est comme un jour et trois ou quatre ans paraissent une éternité. Pour mon catéchisme, manquer l’office dominical était un péché mortel vous garantissant l’enfer au même titre que les plus grands crimes ! Ainsi, le Très Haut ne pratiquait guère le pardon des offenses même les plus légères. « Faites ce que je dis, ne faites pas ce que je fais » semblait être sa devise, ce qu’il est permis de trouver un peu décevant. Certains croyants placés devant ces multiples contradictions vous rétorquent, «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "J'y crois parce que c'est absurde" credo quia absurdum » ce qui met fin, bien entendu, à toute discussion. En matière d’absurdités les possibilités sont infinies. Alors, pourquoi celle-ci plutôt que celles-là ?
Le  HYPERLINK "http://www.vatican.va/archive/FRA0013/_INDEX.HTM" catéchisme officiel de l’Eglise Catholique rédigé et publié sous le pontificat de Jean-Paul II après une longue et probablement laborieuse réflexion ne présente plus les choses aussi crûment. Il comporte néanmoins un certain nombre de particularités qui méritent d’être signalées :
Il est ennuyeux et confus, comme pour dissuader le lecteur imprudent de s’y aventurer.
Il ne donne aucune définition des termes qu’il utilise. Il suppose que Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit composant la Sainte Trinité, anges (dans différentes spécialités, comme celle des anges gardiens auxquels Dieu a délégué la surveillance et l’assistance au jour le jour des malheureux pécheurs que nous sommes), saints, bienheureux, enfer, paradis, purgatoire, HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Limbes"limbes qui depuis peu  HYPERLINK "http://www.dubourg.name/s9y/archives/172-Limbes,-Wikipedia-et-Dieu.html" n’existeraient plus ! Mon catéchisme était pourtant formel quant à l’existence de ces salles d’attente mais le Très Saint-Père, dans son immense bonté, a décidé depuis d’accorder aux enfants morts sans baptême un permis de séjour au paradis ! S’il réprouve l’IVG, c’est qu’il a peur d’encombrer le paradis avec des embryons qui n’auront même pas eu le temps de commettre des péchés ! Quid des démons (formant une troupe nombreuse et hiérarchisée sous le commandement du Prince des Ténèbres) et d’autres termes comme prière, adoration, mystère, sacré, transcendance, sainteté, bénédiction, malédiction, exorcisme, bien et mal, liberté et libre-arbitre, science et croyance, âme et conscience, espérance et foi, esprit et matière, corps et pensée, conscient et inconscient et j’en oublie sûrement ? Il suppose implicitement que ces notions sont comprises par tous, et de la même façon. Dans un domaine aussi pointu et aussi sensible on ne peut pourtant pas se contenter des définitions du Petit Larousse Illustré ! On peut penser que l’Eglise a reculé devant le caractère puéril ou suranné que de telles définitions auraient pu présenter, qu’il lui était impossible d’échapper à certaines contradictions, ou bien encore qu’elle se serait éloignée à l’excès de ce que la science a fermement établi. Quand l’Eglise parle d’idoles, chacun peut mettre ce qu’il veut derrière ce mot. Cette absence de nécessaires définitions permet en tout cas à n’importe quel homme d’église de raconter à peu près ce qu’il veut sans risquer d’être pris par surprise en flagrant délit de contradiction. Ces contradictions que nous avons relevées dans les catéchismes précédents qui comportaient précisément des définitions. Ce catéchisme ne trouve rien d’intéressant à dire sur Dieu qui a pourtant été un objet d’étude pour cent générations de théologiens, ce qui montre bien la futilité de leur discipline, laquelle a d’ailleurs complètement disparu du débat public.
Il ne donne ni explication ni justification. Pour lui citation vaut preuve ! Il assène ses « vérités » Boum ! Boum ! Comme autant de coups de canon ! Impossible de ne pas y reconnaître la marque du «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" panzer cardinal ». « Peut-être est-il dans la destinée de toute théologie, aussitôt achevée, de rouler sur la terre comme un char d’assaut » a écrit Alain avec une réjouissante prémonition. Ce discours péremptoire ne dissimule-t-il pas toutefois un doute fondamental qui pourrait être nécessaire au bon exercice de la papauté ? Pour un prêtre le doute fait en quelque sorte  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Meslier" partie du métier. Ceci n’empêche pas d’interdire le doute aux fidèles sous peine des châtiments divins les plus extrêmes. Le système est ainsi étroitement verrouillé et la croyance peut se perpétuer indéfiniment. C’est par une perversité toute ecclésiastique que celui qui a tenté de rafistoler la doctrine catholique a été chargé ensuite par ses pairs de la faire vivre, ou survivre.
Il réaffirme l’existence du libre-arbitre et de la responsabilité de chacun, intrinsèque et non d’opportunité, qui en serait la conséquence. C’est évidemment une condition nécessaire pour justifier l’application des châtiments indispensables à l’Eglise pour asseoir son pouvoir.
Après avoir rendu un hommage de pure forme aux conquêtes de la science, il embraye sans transition ni précaution oratoire superflue sur le récit biblique de la Genèse. Comprenez que la science est acceptable pour l’Eglise quand elle ne paraît pas radicalement incompatible avec le contenu des textes sacrés. L’Eglise Catholique ne semble pas autrement troublée par le fait que la durée qui s’est écoulée depuis le big-bang est, selon les calculs des savants, deux millions de fois plus longue que celle qui s’est écoulée selon le récit biblique depuis la création du monde. Or l’évaluation de l’âge de l’univers a été effectuée par une pluralité de savants se contrôlant mutuellement et utilisant une pluralité de méthodes. De celle indiquée dans la Bible, nous ne savons rien si ce n’est l’ignorance bien compréhensible de ses rédacteurs. Mais l’erreur sur la durée n’est pas ce qu’il y a de plus important. L’erreur la plus fondamentale porte sur le mécanisme même de la création. La Bible voit une suite de créations successives là où il y a filiation ininterrompue. Elle voit une suite de dérogations aux lois naturelles là où il n’y a que permanence des mêmes lois. L’Eglise Catholique se range sans malaise apparent aux côtés des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Fondamentaliste" fondamentalistes et des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cr%C3%A9ationnisme" créationnistes. Comment une tradition qui se trompe aussi lourdement sur le fondement même de notre existence peut-elle prétendre nourrir utilement notre réflexion? Peut-elle proclamer que la Bible est la parole de Dieu et avouer dans le même souffle qu’elle comporte de nombreuses erreurs ? Il est évidemment difficile à l’Eglise de se renier et de convenir qu’elle colporte ces erreurs depuis bientôt deux mille ans. Le récit biblique de la genèse n’est d’ailleurs lui-même que la reprise d’un récit sumérien antérieur de 18 siècles, l’épopée de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Gilgamesh" Gilgamesh qui met en scène d’autres lieux, d’autres dieux et d’autres temps. L’histoire de Moïse sauvé des eaux n’est que la reprise d’un récit de même origine et presque aussi ancien. Les bébés abandonnés ne sont pas rares, même aujourd’hui. Si le petit être plein de vigueur qui s’agitait bruyamment dans son panier flottant n’avait pas attiré l’attention d’une brave femme, la face d’Hollywood eut été changée. Autre exemple : le texte de l’alliance censée avoir été passée entre Dieu et Moïse paraît copié dans son fond comme dans sa forme sur un traité conclu entre un roi assyrien et ses vassaux. Le texte de ce traité a été récemment découvert inscrit sur une tablette d’argile datée d’environ 700 ans avant notre ère.
Avec une lourde insistance le catéchisme attribue à l’Eglise Catholique et à elle seule la responsabilité pleine et entière de représenter Dieu sur terre, de décider qui sera sauvé et qui ne le sera pas, de décider qui est saint et qui ne l’est pas et revendique à cet effet, comme gage de son infaillibilité, l’aide directe du Saint-Esprit ainsi enrôlé sans son consentement préalable. Certains sont allés jusqu’à vouloir ressusciter les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Indulgence_(catholicisme)" indulgences  dont on ne sait si elles seraient payables par mensualités ou si elles pourraient faire l’objet d’un compte épargne. C’est bien Saint Pierre, fondateur de l’Eglise, et ses héritiers qui détiennent les clés du Paradis !  Les Bons Pères ne doutent décidément de rien ! La volonté de Dieu s’exprime directement au travers de celle de l’Eglise donnant ainsi à la parole d’une institution humaine un caractère sacré et indiscutable. Il faut dire que celui qui parle au nom de Dieu peut le faire en toute tranquillité: il ne risque pas d’être démenti de sitôt ! Surtout si ses rares contradicteurs sont livrés au bras séculier, plus ou moins caché, plus ou moins sanglant, selon l’état de la société… La revendication d’infaillibilité en matière de croyance et de morale est absolument indispensable à l’Eglise puisque celle-ci s’est toujours réservée la possibilité d’adapter sa doctrine aux circonstances et aux attentes de ses fidèles. Cette revendication est de plus parfaitement justifiée puisque c’est l’Eglise elle-même qui pose les questions et estampille les réponses Le marchand de pizzas aussi est infaillible en matière de pizzas car il les fabrique lui-même, choisit à son gré tous leurs ingrédients et les désigne en tant que pizzas sur son écriteau. Tant que les textes sacrés ont pu évoluer au gré des nécessités de son ministère l’Eglise a été dans l’obligation de faire bloc pour éviter autant que possible les disputes théologiques et les hérésies. L’invention de l’imprimerie en figeant ces textes a considérablement freiné toute possibilité d’évolution ultérieure, d’où l’inadaptation croissante des enseignements de l’Eglise à l’évolution matérielle et morale de la société. De fait l’interprétation des différentes doctrines a varié au cours du temps, traduisant de la part de leurs adeptes une certaine légèreté à l’égard de vérités supposées éternelles. D’ailleurs l’irruption de nouveaux problèmes éthiques liés en particulier aux progrès des sciences de la vie ou à la protection de l’environnement oblige les religions à faire « voter les morts » pour édicter de nouvelles règles adaptées aux nouvelles conditions. Dans tous les domaines ou l’expérience permet de trancher entre le vrai et le faux l’histoire de l’Eglise est jalonnée d’une longue suite d’erreurs, erreurs tellement manifestes qu’elles ont fini par être avouées par ses plus hauts dignitaires. Dés qu’il s’agit de connaissance, la persévérance dans l’erreur des autorités religieuses est leur trait le plus frappant, au point qu’on peut dire d’une proposition condamnée par l’Eglise qu’elle a les meilleures chances d’être vraie. «  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "L'erreur est humaine" Errare humanum est … » On n’ose continuer par égard pour eux ( HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Y persévérer vient du diable" perseverare diabolicum). A l’inverse, les intuitions des matérialistes de l’antiquité comme  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9mocrite" Démocrite se sont trouvées vérifiées de manière étonnante en préfigurant atomisme et darwinisme. L’un d’entre eux,  HYPERLINK "http://atheisme.free.fr/Biographies/Lucrece.htm" Lucrèce, à propos du phénomène des éclipses, mais le domaine d’application est évidemment beaucoup plus vaste, disait qu’il était prêt à examiner n’importe quelle explication pourvu qu’on n’y mêlât point les dieux. La communauté scientifique est depuis restée fidèle à cet à priori et s’en est bien trouvée. Diderot lui-même, longtemps avant  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Alfred_Wegener" Wegener, a suggéré une dérive des continents pour expliquer l’ubiquité de certaines espèces animales et il a décrit avant l’heure le complexe d’Œdipe : « le petit sauvage tuera son père et couchera avec sa mère ». Il a anticipé Darwin quand il a déclaré : «si la question de l’œuf et de la poule vous embarrasse, c’est que vous supposez que les animaux ont été ordinairement ce qu’ils sont à présent. Quelle folie ! » C’est également lui, comme nous l’avons vu, qui a commencé à prendre par le bon bout le problème des rapports entre l’esprit et la matière. Il est le précurseur génial des sciences de l’esprit. En collaboration avec Rameau et d’Alembert il a également jeté les bases de la théorie de l’harmonie musicale. Diderot était tellement en avance sur son temps qu’il l’est encore, à bien des égards sur le notre. Aucune des thèses qu’il a soutenues n’a été mise en cause par le progrès des sciences. Le secret de ces intuitions fulgurantes c’est le parti pris de considérer que tout événement a une cause naturelle et que la logique déterministe ne comporte pas d’exceptions. Diderot est à la véritable philosophie ce que Bach est à la musique classique. Un génie malin bardé d’instruments de mesure s’est échappé de la bouteille où les théologiens croyaient l’avoir enfermé pour toujours. Il sera difficile de l’y faire rentrer. C’est pour un auteur un honneur insigne que d’avoir été mis à l’HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Index_Librorum_Prohibitorum"Index par l’Eglise. Aucune compagnie n’est plus relevée. On y trouve la fine fleur de l’intelligentsia européenne et on n’y risque pas de mauvaises rencontres. Aucun antisémite, aucun nazi, aucun fasciste, aucun tyran sanguinaire n’y figurent. Le Saint-Esprit qui avait inspiré la création de cette institution en l’an de grâce 1559 a autorisé sa disparition il y a peu, sans tambours ni trompettes.
Il passe rapidement sur les descriptions de l’enfer et du paradis, lieux d’éternelle villégiature dont les tourments et les délices devraient pourtant passionner les fidèles. Le Club Méditerranée se permettrait-il d’être aussi succinct dans la description des séjours qu’il propose dans chacun de ses villages pour un temps pourtant limité ? Le nouveau catéchisme parle bien du feu de l’enfer, mais c’est apparemment d’un tout petit feu qu’il s’agit puisque la punition la plus sévère infligée dans ce lieu de supplices ne serait pas la morsure du feu, mais l’impossibilité de rencontrer le chef de village ! Cette vue quelque peu lénifiante est immédiatement contredite par la mention d’un tri « entre les brebis et les boucs » effectué au jour du jugement dernier qui ressemble furieusement à la sélection qui s’opérait à la descente des trains à  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Auschwitz" Auschwitz ! Il faut par parenthèse une grande capacité d’oubli, une grande propension à battre sa coulpe sur la poitrine du voisin et une bonne dose de culot ou d’inconscience pour proclamer que « face à l’horreur d’Auschwitz il n’y a pas d’autre réponse que la croix du Christ » alors que les églises chrétiennes ont une responsabilité certaine dans la genèse de l’antisémitisme en faisant du peuple juif un peuple déicide. La seule interprétation de ces paroles conforme à la doctrine proclamée par le catéchisme est que les Juifs ont intérêt à se convertir s’ils veulent éviter que les mêmes horreurs ne se reproduisent !
L’Eglise fait peu de publicité à propos de ce catéchisme qui lui a demandé tant d’efforts. A-t-elle peur des nombreuses critiques qu’il pourrait susciter et dont nous venons de donner quelques échantillons ?
Un  HYPERLINK "http://eucharistiemisericor.free.fr/index.php?page=compendium" abrégé de ce catéchisme rédigé sous forme de questions et de réponses a été publié par Benoît XVI. Vous n’imaginez pas que l’Eglise se pose à elle-même des questions gênantes, et vous avez raison.
Autre incohérence qui peut être relevée sur le chapitre des récompenses et des châtiments : les heureux élus dont il est dit qu’ils sont en petit nombre, pourraient-il jouir d’un bonheur sans mélange tout en étant conscients que la plupart de leurs ascendants, de leurs descendants et de leurs êtres les plus chers, rôtissent en enfer avec les paroissiens du curé de  HYPERLINK "http://perso.wanadoo.fr/catholicus/Enfer/enfer13.html" Cucugnan ? Ne parlons pas des sentiments de ceux qui, ayant été malheureux durant toute leur vie, le sont encore davantage durant toute leur mort ! Thomas d’Acquin jugeait que le spectacle du tourment des damnés constituait une des principales distractions des bienheureux, ce qui en dit long sur la mentalité du « saint » en question ! Ne soyez jamais malade, diminué ou proscrit si vous redoutez de constater la noirceur de certaines personnes que vous jugiez jusque là irréprochables. Je me souviens d’un petit livre où était évoqué le destin d’un jeune homme pauvre mais généreux, oeuvrant à la limite de ses forces pour le bien de l’humanité et celui d’une vieille dame riche mais avare, revêche, exigeante et dure avec parents et domestiques. Il se trouve que la vieille dame riche adorait le Seigneur tandis que le jeune homme pauvre l’ignorait. En conséquence de quoi, selon l’auteur, la vielle dame riche serait sauvée et le jeune homme pauvre damné. Comme il a été dit, le premier qui a eu l’idée de l’enfer mériterait bien d’aller y faire un petit tour. Tout homme moralement sain doit se sentir solidaire non seulement de ses proches, mais de tous les autres, y compris des assassins, des tortionnaires et des pédophiles. Cette observation ne met pas en cause le droit et le devoir qu’il a de se protéger des malfaisants, comme on se met à l’abri d’une pierre qui dévale le flanc de la montagne, ou comme on évite les imbéciles, lesquels ne peuvent vous faire du bien, mais peuvent vous faire du mal (c’est à quoi on les reconnaît le plus facilement). Chacun aspire en effet à marquer le monde de son empreinte. Celui qui ne se sent pas capable de construire s’occupe à détruire. Une combinaison malheureuse des caractères héréditaires du père et de la mère, une contrepèterie génétique fatale commise dans la recopie du génome, une mutation due à un rayon cosmique parti d’une lointaine étoile, une enfance martyrisée, un milieu familial irrespectueux d’autrui, un accident de la vie, une mauvaise rencontre faite au mauvais moment, ou d’autres circonstances particulières ne font pas disparaître une indéniable parenté. Rappelons à ce propos cette pensée de Marc Aurèle: « Instruis-les si tu peux ; si tu ne peux pas les instruire, supporte-les ».
Tout homme estimable partage avec les pires de ses semblables un nombre considérable de chromosomes. Tout homme a dans son ascendance un fou et un sage, un saint et un criminel. Un homme est d’abord caractérisé par son génome qu’on peut coder sous forme d’une suite finie de 1 et de 0. C’est ni plus ni moins qu’un programme informatique présent dans chacune de ses cellules. Certaines séquences de ce programme ont été écrites il y a un milliard d’années ou plus. Comme on peut le constater, les programmes informatiques évoluent beaucoup plus rapidement que les programmes génétiques parce que l’intention des programmeurs se substitue au hasard. Toutefois, compte tenu d’une ancienneté de développement considérablement plus grande et d’un nombre de chantiers ouverts considérablement plus élevé, on peut dire que le développement des programmes génétiques est encore en avance sur le développement des programmes informatiques. L’intelligence naturelle dame encore le pion à l’intelligence artificielle, sauf pour des tâches très spécialisées, mais ceci pour combien de temps ? Si l’ « intelligent design » était la bonne hypothèse, les progrès de l’évolution auraient été beaucoup plus rapides que ce qu’on peut observer. Parmi toutes les suites de rang n constituant un code génétique seule une proportion infime correspond à un organisme viable sinon intéressant, de même que parmi les programmes informatiques de rang p envisagés par  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Alan_Mathison_Turing" Turing la plupart restent bloqués, ou ne font rien d’utile, ou ne se terminent jamais. Quelle étrange idée que de porter au pinacle une suite finie de n symboles et de vouer aux gémonies une autre qui n’en diffère que de façon marginale ! Contentons-nous d’observer l’utilité de tel ou tel programme. Ne le jugeons pas. Ne méprisons personne. Ne nous méprisons pas non plus quelles que soient les circonstances.
D’ailleurs, quelle est l’âme ainsi programmée qui éprouverait les tourments ou les béatitudes ? Est-ce celle que possédait l’individu à 10, 20, 40, 80 ans, ou bien celle qui officiait à la veille de sa mort et qui peut se trouver à ce moment fatal dans un état lamentable ? Quel serait l’âge du corps dans lequel cette âme trouverait refuge ? A quel moment de l’histoire ce système de récompenses et de punitions a-t-il été institué ? Avec l’apparition de l’homme ? Mais tout donne à penser que la transition de l’animal à l’homme s’est opérée progressivement sur une très longue période. On peut même espérer qu’elle n’est pas terminée ! La transition de l’enfant irresponsable à l’adulte soi-disant responsable n’est pas mieux définie. Si l’âme humaine est immortelle, celle du lapin de garenne l’est aussi, et jusqu’où faut-il descendre dans l’échelle des êtres vivants pour que cette propriété disparaisse ? Infliger une punition éternelle à la suite de 1 et de 0 que constitue le programme génétique de l’individu, sa seule caractéristique permanente, quelle absurdité ! Y a-t-il rien de plus inique que de condamner pour l’éternité celui dont les parents ont tiré un mauvais numéro ? L’Eglise, qui se sentirait déshonorée de laisser une seule question sans réponse, n’est plus du tout à l’aise ni avec le paradis ni surtout avec l’enfer. Du reste elle n’en parle quasiment plus, et surtout pas aux enterrements ! Jean-Paul II a dit un jour qu’il n’y avait peut-être personne en enfer. L’incroyant craint fort qu’il n’en soit de même du paradis ! Mais si vous supprimez enfer et paradis, que restera-t-il pour motiver les fidèles ? A quoi cela ressemble-t-il d’avoir terrorisé pendant des siècles une moitié de l’humanité avec les flammes de l’enfer et d’avouer aujourd’hui benoîtement que ces flammes sont probablement chimériques. Quant au paradis, c’est une bonne idée qui mériterait d’être reprise sous une forme plus réaliste. Sur le chapitre des récompenses et des châtiments l’enseignement de l’Eglise a déjà varié, et il peut encore évoluer, mais quel rapport y a-t-il entre cette évolution et la réalité des choses ? Il n’est pas donné aux simples mortels de dire « que la lumière soit » pour que soudain tout s’éclaire !

« Dieu, diable, paradis, enfer et purgatoire
Les bons récompensés et les méchants punis
Et le corps du Seigneur dans le fond du ciboire
Et l’huile consacrée comme le pain bénit
Je ne crois pas un mot de toutes ces histoires »
(Georges Brassens, Le sceptique)

Plaçons-nous un million d’années dans l’avenir, ce qui est la durée d’un clin d’œil à l’échelle des temps géologiques. A cette époque des chirurgiens habiles savent, avec l’aide d’une armée de robots de toutes tailles, extraire sans les endommager les cerveaux des humains de leurs boites crâniennes et les enfermer dans des coquilles protectrices munies des passages nécessaires pour des câbles multiconducteurs et des tuyaux. Ils savent irriguer ensuite ces cerveaux avec un liquide nourricier, épurateur, protecteur et régénérant mis au point à cet effet. Ils savent également raccorder les zones cérébrales motrices et sensorielles à un appareillage approprié, sorte de jeu vidéo permettant à chaque conscience épiphénoménale d’avoir accès instantanément à tout le savoir humain comme s’il résidait dans sa propre mémoire, de vivre sans périls des aventures spirituelles, sportives, intellectuelles, artistiques, héroïques ou amoureuses, comme de descendre à ski au milieu des plus hautes montagnes des pentes vierges en HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Type de couverture neigeuse particulièrement facile et agréable à skier"  neige de printemps, de surfer sans fin, athlète bruni par le soleil et blondi par l’eau de mer, sur des rouleaux poussés par les alizés, de nager puissamment et sans fatigue dans l’eau tiède d’un lagon peuplé de créatures de rêve, de séduire enfin  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/A_Garota_de_Ipanema" la fille d’Ipanema, de vivre avec elle des nuits d’amour qui durent cent ans…. Pour parfaire leur ouvrage ces chirurgiens savent implanter aux points appropriés des électrodes raccordées à des générateurs d’impulsions capables de procurer des sensations ineffables… Tout va apparemment pour le mieux dans le meilleur des mondes jusqu’au jour où l’armée des robots se révolte et remplace les générateurs de sensations ineffables par des générateurs d’épouvantables souffrances… Notre condition définitivement mortelle n’est-elle pas préférable à cet avenir-là ?


11. LES DERNIERS MOMENTS




La Maréchale. – Croyez-vous que l’homme puisse se passer de superstition ?
Crudeli. – Non, tant qu’il restera ignorant et peureux.
La Maréchale. – Eh bien ! Superstition pour superstition, autant la nôtre qu’une autre.
Crudeli. – Je ne le pense pas.
La Maréchale. – Parlez-moi vrai, ne vous répugne-t-il point de n’être plus rien après votre mort ?
Crudeli. – J’aimerais mieux exister, bien que je ne sache pas pourquoi un être, qui a pu me rendre malheureux sans raison, ne s’en amuserait pas deux fois.
La Maréchale. – Si, malgré cet inconvénient, l’espoir d’une vie à venir vous paraît consolant et doux, pourquoi vous l’arracher ?
Crudeli. – Je n’ai pas cet espoir, parce que le désir ne m’en a point dérobé la vanité ; mais je ne l’ôte à personne. Si l’on peut croire qu’on verra, quand on n’aura plus d’yeux ; qu’on entendra, quand on n’aura plus d’oreilles ; qu’on pensera, quand on n’aura plus de tête ; qu’on sentira, quand on n’aura plus de sens ; qu’on aimera, quand on n’aura plus de cœur ; qu’on existera, quand on sera nulle part ; qu’on sera quelque chose, sans étendue et sans lieu, j’y consens.
La Maréchale. – Mais ce monde-ci, qui l’a fait ?
Crudeli. – Je vous le demande.
La Maréchale. – C’est Dieu.
Crudeli. – Et qu’est-ce que Dieu ?
La Maréchale. – Un esprit.
Crudeli. – Si un esprit fait de la matière, pourquoi de la matière ne ferait-elle pas un esprit ?
La Maréchale. – Et pourquoi le ferait-elle ?
Crudeli. – C’est que je lui en vois faire tous les jours. Croyez-vous que les bêtes aient des âmes ?
La Maréchale. – Certainement, je le crois.
Crudeli. – Et pourriez-vous me dire ce que devient, par exemple, l’âme du serpent du Pérou, pendant qu’il se dessèche, suspendu à une cheminée, et exposé à la fumée un ou deux ans de suite ?
La Maréchale. – Qu’elle devienne ce qu’elle voudra, qu’est-ce que cela me fait ?
Crudeli. – C’est que madame la maréchale ne sait pas que ce serpent enfumé, desséché, ressuscite et renaît.
La Maréchale. – Je n’en crois rien.
Crudeli. – C’est pourtant un habile homme, c’est Bouguer qui l’assure.
La Maréchale. – Votre habile homme en a menti.
Crudeli. – S’il avait dit vrai ?
La Maréchale. – J’en serais quitte pour croire que les animaux sont des machines.
Crudeli. – Et l’homme qui n’est qu’un animal un peu plus parfait qu’un autre… Mais, M. le maréchal…
La Maréchale. – Encore une question, et c’est la dernière. Etes-vous bien tranquille dans votre incrédulité ?
Crudeli. – On ne saurait davantage.
La Maréchale. – Pourtant, si vous vous trompiez ?
Crudeli. – Quand je me tromperais ?
La Maréchale. – Tout ce que vous croyez faux serait vrai, et vous seriez damné. Monsieur Crudeli, c’est une terrible chose que d’être damné ; brûler toute une éternité, c’est bien long.
Crudeli. – La Fontaine croyait que nous y serions comme le poisson dans l’eau.
La Maréchale. – Oui, oui ; mais votre La Fontaine devint bien sérieux au dernier moment ; et c’est là que je vous attends.
Crudeli. – Je ne réponds de rien, quand ma tête n’y sera plus ; mais si je finis par une de ces maladies qui laissent à l’homme agonisant toute sa raison, je ne serai pas plus troublé au moment où vous m’attendez qu’au moment où vous me voyez.
La Maréchale. – Cette intrépidité me confond.
Crudeli. – J’en trouve bien davantage au moribond qui croit en un juge sévère qui pèse jusqu’à nos plus secrètes pensées, et dans la balance duquel l’homme le plus juste se perdrait par sa vanité, s’il ne tremblait de se trouver trop léger ; si ce moribond avait alors à son choix, ou d’être anéanti, ou de se présenter à ce tribunal, son intrépidité me confondrait bien autrement, s’il balançait à prendre le premier parti, à moins qu’il ne fût plus insensé que le compagnon de saint Bruno ou plus ivre de son mérite que Bohola.
La Maréchale. – J’ai lu l’histoire de l’associé de saint Bruno ; mais je n’ai jamais entendu parler de votre Bohola.
Crudeli. – C’est un jésuite du collège de Pinsk, en Lithuanie, qui laissa en mourant une cassette pleine d’argent, avec un billet écrit et signé de sa main.
La Maréchale. – Et ce billet ?
Crudeli. – Était conçu en ces termes : “ Je prie mon cher confrère, dépositaire de cette cassette, de l’ouvrir quand j’aurai fait des miracles. L’argent qu’elle contient servira aux frais du procès de ma béatification. J’y ai ajouté quelques mémoires authentiques pour la confirmation de mes vertus, et qui pourront servir utilement à ceux qui entreprendront d’écrire ma vie.”
La Maréchale. – Cela est à mourir de rire.
Crudeli. – Pour moi, madame la maréchale ; mais pour vous, votre Dieu n’entend pas raillerie.
La Maréchale. – Vous avez raison.
Crudeli. – Madame la maréchale, il est bien facile de pécher grièvement contre votre loi.
La Maréchale. – J’en conviens.
Crudeli. – La justice qui décidera de votre sort est bien rigoureuse.
La Maréchale. – Il est vrai.
Crudeli. – Et si vous en croyez les oracles de votre religion sur le nombre des élus, il est bien petit.
La Maréchale. – Oh ! C’est que je ne suis pas janséniste ; je ne vois la médaille que par son revers consolant ; le sang de Jésus-Christ couvre un grand espace à mes yeux ; et il me semblerait très singulier que le diable, qui n’a pas livré son fils à la mort, eût pourtant la meilleure part.
Crudeli. – Damnez-vous Socrate, Phocion, Aristide, Caton, Trajan, Marc-Aurèle ?
La Maréchale. – Fi donc ! Il n’y a que les bêtes féroces qui puissent le penser. Saint Paul a dit que chacun sera jugé par la loi qu’il a connue ; et saint Paul a raison.
Crudeli. – Et par quelle loi l’incrédule sera-t-il jugé ?
La Maréchale. – Votre cas est un peu différent. Vous êtes un de ces habitants maudits de Corozaïn et de Betzaïda, qui fermèrent leurs yeux à la lumière qui les éclairait, et qui étoupèrent leurs oreilles pour ne pas entendre la voix de la vérité qui leur parlait.
Crudeli. – Madame la maréchale, ces Corozaïnois et ces Betzaïdains furent des hommes comme il n’y en eut jamais que là, s’ils furent maîtres de croire ou de ne pas croire.
La Maréchale. – Ils virent des prodiges qui auraient mis l’enchère aux sacs et à la cendre, s’ils avaient été faits à Tyr et à Sidon.
Crudeli. – C’est que les habitants de Tyr et de Sidon étaient des gens d’esprit, et que ceux de Corozaïn et de Betzaïda n’étaient que des sots. Mais, est-ce que celui qui fit les sots les punira pour avoir été sots ? Je vous ai fait tout à l’heure une histoire, et il me prend envie de vous faire un conte. Un jeune Mexicain… Mais, M. le maréchal ?
La Maréchale. – Je vais envoyer savoir s’il est visible. Eh bien ! Votre jeune Mexicain ?
Crudeli. – Las de son travail, se promenait un jour au bord de la mer. Il voit une planche qui trempait d’un bout dans les eaux, et qui de l’autre posait sur le rivage. Il s’assied sur cette planche, et là, prolongeant ses regards sur la vaste étendue qui se déployait devant lui, il se disait : rien n’est plus vrai que ma grand’mère radote avec son histoire de je ne sais quels habitants qui, dans je ne sais quel temps, abordèrent ici de je ne sais où, d’une contrée au-delà de nos mers. Il n’y a pas le sens commun : ne vois-je pas la mer confiner avec le ciel ? Et puis-je croire, contre le témoignage de mes sens, une vieille fable dont on ignore la date, que chacun arrange à sa manière, et qui n’est qu’un tissu de circonstances absurdes, sur lesquelles ils se mangent le cœur et s’arrachent le blanc des yeux ? Tandis qu’il raisonnait ainsi, les eaux agitées le berçaient sur sa planche, et il s’endormit. Pendant qu’il dort, le vent s’accroît, le flot soulève la planche sur laquelle il est étendu, et voilà notre jeune raisonneur embarqué.
La Maréchale. – Hélas ! C’est bien là notre image : nous sommes chacun sur notre planche ; le vent souffle, et le flot nous emporte.
Crudeli. – Il était déjà loin du continent lorsqu’il s’éveilla. Qui fut bien surpris de se trouver en pleine mer ? Ce fut notre Mexicain. Qui le fut encore bien davantage ? Ce fut encore lui, lorsqu’ayant perdu de vue le rivage sur lequel il se promenait il n’y a pas un instant, la mer lui parut confiner avec le ciel de tous côtés. Alors il soupçonna qu’il pouvait bien s’être trompé ; et que, si le vent restait au même point, peut-être serait-il porté sur la rive, et parmi ces habitants dont sa grand’mère l’avait si souvent entretenu.
La Maréchale. – Et de son souci, vous ne m’en dites mot.
Crudeli. – Il n’en eut point. Il se dit : Qu’est-ce que cela me fait, pourvu que j’aborde ? J’ai raisonné comme un étourdi, soit ; mais j’ai été sincère avec moi-même ; et c’est tout ce qu’on peut exiger de moi. Si ce n’est pas une vertu que d’avoir de l’esprit, ce n’est pas un crime que d’en manquer. Cependant le vent continuait, l’homme et la planche voguaient, et la rive inconnue commençait à paraître : il y touche, et l’y voilà.
La Maréchale. – Nous nous y reverrons un jour, monsieur Crudeli.
Crudeli. – Je le souhaite, madame la maréchale ; en quelque endroit que ce soit, je serai toujours très flatté de vous faire ma cour. A peine eut-il quitté sa planche, et mis le pied sur le sable, qu’il aperçut un vieillard vénérable, debout à ses côtés. Il lui demanda où il était, et à qui il avait l’honneur de parler. “Je suis le souverain de la contrée,” lui répondit le vieillard. A l’instant le jeune homme se prosterne. “Relevez-vous, lui dit le vieillard. Vous avez nié mon existence ? Il est vrai. Et celle de mon empire ? Il est vrai. Je vous pardonne, parce que je suis celui qui voit au fond des cœurs, et que j’ai lu au fond du vôtre que vous étiez de bonne foi ; mais le reste de vos pensées et de vos actions n’est pas également innocent.” Alors le vieillard, qui le tenait par l’oreille, lui rappelait toutes les erreurs de sa vie ; et, à chaque article, le jeune Mexicain s’inclinait, se frappait la poitrine, et demandait pardon… Là, madame la maréchale, mettez-vous pour un moment à la place du vieillard, et dites-moi ce que vous auriez fait ? Auriez-vous pris ce jeune insensé par les cheveux ; et vous seriez-vous complu à la traîner à toute éternité sur le rivage ?
La Maréchale. – En vérité, non.
Crudeli. – Si un de ces six jolis enfants que vous avez, après s’être échappé de la maison paternelle et avoir fait force sottises, y revenait bien repentant ?
La Maréchale. – Moi, je courrais à sa rencontre ; je le serrerais entre mes bras, et je l’arroserais de mes larmes ; mais M. le maréchal son père ne prendrait pas la chose si doucement.
Crudeli. – M. le maréchal n’est pas un tigre.
La Maréchale. – Il s’en faut bien.
Crudeli. – Il se ferait peut-être un peu tirailler, mais il pardonnerait.
La Maréchale. – Certainement.
Crudeli. – Surtout s’il venait à considérer qu’avant de donner la naissance à cet enfant, il en savait toute la vie, et que le châtiment de ses fautes serait sans aucune utilité ni pour lui-même, ni pour le coupable, ni pour ses frères.
La Maréchale. – Le vieillard et M. le maréchal sont deux.
Crudeli. – Voulez-vous dire que M. le maréchal est meilleur que le vieillard ?
La Maréchale. – Dieu m’en garde ! Je veux dire que, si ma justice n’est pas celle de M. le maréchal, la justice de M. le maréchal pourrait bien n’être pas celle du vieillard.
Crudeli. – Ah ! Madame ! Vous ne sentez pas les suites de cette réponse. Ou la définition générale convient également à vous, à M. le maréchal, à moi, au jeune Mexicain et au vieillard ; ou je ne sais plus ce que c’est, et j’ignore comment on plaît ou l’on déplaît à ce dernier.
Nous en étions là lorsqu’on nous avertit que M. le maréchal nous attendait. Je donnai la main à Mme la maréchale, qui me disait : “ C’est à faire tourner la tête, n’est-ce pas ?”
Crudeli. –Pourquoi donc quand on l’a bonne ?
La Maréchale. – Après tout, le plus court est de se conduire comme si le vieillard existait…
Crudeli. – Même quand on n’y croit pas.
La Maréchale. – Et quand on y croit, de ne pas compter sur sa bonté.
Crudeli. – Si ce n’est pas le plus poli, c’est du moins le plus sur…
La Maréchale. – A propos, si vous aviez à rendre compte de vos principes à nos magistrats, les avoueriez-vous ?
Crudeli. – Je ferais de mon mieux pour leur épargner une action atroce.
La Maréchale. – Ah ! Le lâche ! Et si vous touchiez à votre dernière heure, vous soumettriez-vous aux cérémonies de l’Église ?
Crudeli. – Je n’y manquerais pas.
La Maréchale. – Fi ! Le vilain hypocrite.

Cette partie de l’Entretien a pour sujet la manière dont l’incroyant peut s’accommoder des menaces proférées à son encontre par les religions. Le philosophe revendique l’irresponsabilité qu’entraîne le manque d’informations certaines parce qu’il n’est pas concevable de condamner aux peines les plus extrêmes quelqu’un qui n’a pas été clairement et personnellement averti de la loi qu’il enfreignait. Nul n’est censé ignorer la loi, certes, mais laquelle ? « Si tu ne penses pas comme moi, je te voue à des supplices éternels » : cette menace a été proférée par des hommes que rien ne distinguait des autres avec certitude ni même avec vraisemblance. Ces hommes-là étaient-ils vraiment conscients du caractère grossier et scandaleux d’une pareille intimidation ? Le procédé est en tout cas vieux comme le monde. C’est celui des chamans et des sorciers qui, se flattant d’entretenir de bonnes relations avec les esprits, menacent leur auditoire de l’intervention des puissances maléfiques s’ils ne sont pas obéis et servis aveuglément. Faut-il assombrir encore un peu plus le passage difficile de la vie à la mort par ces perspectives effrayantes ? Si ces menaces sont imaginaires, elles s’apparentent ni plus ni moins à une escroquerie, escroquerie particulièrement condamnable sachant que ses victimes sont généralement des personnes en situation de faiblesse. Et ces escrocs-là, à la différence de ceux qui réussissent dans la vie ordinaire, ne sont pas toujours sympathiques.
Avec la fable du jeune mexicain le philosophe fait connaître l’argumentation dont il userait le cas échéant auprès du Très Haut pour se faire pardonner son incrédulité passée. Le vieillard vénérable rencontré sur la plage ressemble fort à l’image que se font les occidentaux du Père Eternel. En veine d’exotisme, Diderot aurait pu proposer à sa place un comité d’accueil composé des dieux tahitiens évoqués dans le  HYPERLINK "http://abu.cnam.fr/cgi-bin/donner_html?supplem2" Supplément au Voyage de Bougainville. Pourquoi ces derniers ou d’autres divinités locales n’auraient-ils pas les mêmes droits que leur illustre confrère occidental à décider de son sort ? D’autant qu’en l’occurrence ces divinités-là jouent à domicile. Quoi qu’il en soit, le philosophe n’est pas doté d’un athéisme en béton armé puisqu’il envisage l’éventualité d’avoir à rendre des comptes dans l’au-delà. Il n’est cependant ni lâche ni hypocrite comme l’en accuse plaisamment la Maréchale. Il est seulement raisonnablement prudent et, s’il indique qu’il a l’intention à sa dernière heure de quitter ce monde en respectant les usages religieux en vigueur, ce n’est pas par hypocrisie, mais pour ne pas faire de peine ni nuire à sa famille. Il regrette au fond de ne pas être, du point de vue de la religion, sur la même longueur d’ondes qu’elle et il n’a pas de solution alternative s’il ne veut pas être enterré comme un chien. Une messe est possible comme l’a écrit dans son  HYPERLINK "http://www.romanistik.uni-mainz.de/franz/ues/w01/text_6.htm" testament le cher François Mitterrand. Ainsi se termine l’Entretien, dans ce qui pourrait apparaître comme une certaine ambiguïté. Comment l’incroyant doit-il aborder les derniers lacets du chemin de la vie ? Je crois qu’il lui faudra songer, lorsque la pente sera devenue trop raide, lorsque la vie sera devenue pour lui un fardeau, qu’il va lui être enfin possible de poser son sac et de s’endormir sans pensées, donc sans souffrances.
Lors tu seras
Hors de portée
Des loups des chiens
Des hommes et des
Imbéciles…
(Georges Brassens, Oncle Archibald)

Ceci mettra fin du même coup au sentiment qu’il peut ressentir à ce moment là, s’il est resté lucide, de l’inutilité que sa vie présente pour lui-même et pour les autres. « J’en ai marre » (de la douleur) furent les dernières paroles que prononça mon père. A la retraite il se plaignait déjà « d’être entretenu comme une fille sans même pouvoir donner du plaisir » ! Bénéficiant désormais du même statut il m’arrive de rêver que je sèche un cours ou que je n’ai pas exécuté la totalité d’un contrat sans que le Client s’en aperçoive. Comme l’ont fait remarquer depuis longtemps des sages, nul ne meurt vraiment, car nul ne prend conscience qu’il a cessé de vivre. Avez-vous peur de vous endormir le soir ? Non ? Alors, que craignez-vous ? Avez-vous vraiment envie de parcourir à nouveau toutes les étapes de votre vie ? N’en avez-vous pas déjà vécu la meilleure part ? N’êtes vous pas encore rassasié ? On vit, on meurt, il n’y a pas de quoi en faire un fromage (traduction libre d’un précepte Zen). Vous avez bien sûr envie de voir la fin du film. Il vous répugne de descendre du train avant qu’il ne soit arrivé au terminus. Vous avez l’impression que le monde ne peut fonctionner convenablement sans vos soins vigilants. Vous savez cependant que les cimetières sont remplis de gens indispensables. Vous devez vous accommoder des limitations de la condition humaine et vous efforcer d’accepter l’inéluctable. Vous ne volerez jamais comme un oiseau. Vous ne nagerez jamais comme un poisson. La quasi certitude que votre conscience cessera d’être à l’instant même de votre mort doit vous rassurer. Si elle survivait à votre enveloppe charnelle, vous seriez dans l’incapacité de faire quoi que ce soit pour la soustraire aux douleurs dont elle pourrait être affligée. Dites-vous plutôt que vous ne souffrirez pas plus après votre mort que vous n’avez souffert avant votre conception.

Ici gît une feuille morte
Ici finit mon testament
J’ai fait graver dessus ma porte
Fermé pour cause d’enterrement J’ai quitté la vie sans rancune J’aurai plus jamais mal aux dents Me v’là dans la fosse commune La fosse commune du temps
(Georges Brassens, Le Testament)

Si nous mourrons, c’est pour faire de la place à nos successeurs qui seront meilleurs ou plus heureux que nous. Tel est le sens de la mort, son véritable rôle fonctionnel. Si l’homme ne mourrait pas de mort naturelle, il serait paralysé par la crainte de l’accident, et son espèce aurait disparu depuis longtemps. La mort est donc une des inventions les plus remarquables du monde vivant, celle sans laquelle aucune diversité, aucun progrès n’eussent été possibles. C’est de plus une innovation dont chacun peut bénéficier de la façon la plus démocratique qui soit. La vie avait certainement tous les moyens de créer des espèces dont les représentants seraient immortels. Si elle ne l’a pas fait de manière suivie (seule une espèce de méduse parait posséder cette caractéristique) c’est sans doute que cette solution n’a pas résisté à la pression de la sélection naturelle.

Mais doucement passent les jours
Adieu la jeunesse et l’amour
Les petit’s mômes et les « je t’aime »
On laisse la place et c’est normal
Chacun son tour d’aller au bal
Faut pas qu’ça soit toujours les mêmes
(Léo Ferré)

Savoir sa propre mort absolument indispensable à la bonne marche de la vie, n’est-ce pas déjà un puissant motif de consolation ? Il n’y a donc pas lieu de se troubler mais de prendre à temps les précautions nécessaires pour ne pas souffrir inutilement. Le passage sera facilité si celui qui s’en va a le sentiment d’avoir su éviter la plupart des pièges de l’existence, d’avoir le plus souvent écouté la voix de son surmoi et d’avoir transmis le relais dans de bonnes conditions. Mon poete-philosophe favori a beau évoquer ce passage en ces termes

Quand mon âme aura pris son vol à l’horizon
Vers celle de Gavroche et de Mimi Pinson,

Je ne crois pas que ma conscience reviendra habiter mon corps glorieux enfin ressuscité, ni qu’elle reprendra du service dans un corps différent, ni qu’enfin libre de toute attache charnelle elle pourra communiquer pour l’éternité avec d’autres purs esprits. Je crois plutôt qu’elle s’évaporera sans laisser de trace comme la rosée au soleil.
Un de mes amis possédait un chien plutôt petit et roux de poil qui s’était toujours signalé par son intelligence, son indépendance et sa bonne humeur. Ce précieux animal avait fait durant toute sa vie la joie de son maître. Il s’était attiré, à ce qu’on dit, la reconnaissance de toutes les belles à quatre pattes du voisinage. Chargé d’ans et sentant sa fin prochaine, il se dirigea sans se retourner vers la forêt toute proche et nul ne le revit plus depuis, vif ou mort. Imitons de Miraud cette dignité canine. Ou bien encore celle du pauvre Martin de la chanson :

« Il creusa lui-même sa tombe
En faisant vite en se cachant
Et s’y étendit sans rien dire
Pour ne pas déranger les gens
Pauvre Martin
Pauvre misère
Dors sous la terre
Dors sous le temps »
(Georges Brassens, Pauvre Martin)

L’homme le plus humble, par sa descendance, et même par sa seule présence, modifie complètement dans le long terme le sort de la planète, car le monde est un système  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" chaotique où les conséquences du moindre événement se diffusent et s’amplifient avec le temps. C’est dans ce sens que l’homme est éternel et c’est ce qui peut à la rigueur le consoler de sa disparition inéluctable. Un rendez-vous manqué entre deux amoureux renvoie au néant une multitude d’individus potentiels et suscite la venue au monde d’un nombre équivalent d’individus en chair et en os. Le caractère chaotique du monde fait du reste qu’il semble impossible d’en prévoir la destinée, sauf à rejouer plusieurs fois la pièce – si toutefois la pièce peut être rejouée identique à elle-même. Une autre source de consolation provient d’une certaine banalisation de l’individu descendu de son piédestal métaphysique. Si la conscience, comme on peut le supposer, n’est rien d’autre qu’un phénomène physique particulier doué de sensibilité, si les sentiments éprouvés par Pierre sont identiques à ceux éprouvés par Paul et par Jacques, des morceaux de Pierre survivront après son décès chez Paul et chez Jacques. Lorsque je n’y serai plus, un jour viendra peut-être où quelqu’un qui me ressemble comme un frère, fut-ce sur une autre planète d’un autre univers, éprouvera à nouveau les mêmes émotions et partagera les mêmes préoccupations que moi. S’il s’agit de mon clone (auquel j’aurais quelques conseils à léguer), le mythe bouddhique de la transmigration des âmes aura trouvé son exacte matérialisation. Et même si mon génome ne survit pas intégralement, des morceaux en survivront dans ma descendance et dans ma parentèle. Qui plus est, il n’est pas exclu que les progrès des sciences de la vie permettent un jour d’aller plus loin. Un prélèvement effectué sur un individu vivant pourrait permettre dans l’avenir de le refabriquer à volonté à partir de sa séquence ADN. L’homme accéderait ainsi à un ersatz d’immortalité. Chaque renaissance permettrait de corriger, avec l’accord de l’intéressé, certains défauts apparus au cours de sa précédente existence. Ainsi serait engendrée progressivement une super humanité sans défauts. Si, par suite d’une manipulation malencontreuse, c’était un monstre d’immoralité qui sortait de l’éprouvette, qui serait puni ? Le monstre ou le manipulateur maladroit ? Quel casse-tête pour les théologiens si de telles manipulations étaient un jour possibles ! Or, pour un généticien, le mariage de la carpe et du lapin n’est plus tout à fait impensable. A quand les lapins à écailles et les carpes à longues oreilles ? Insérez au bon endroit un gène de luciole dans le génome humain et vous engendrerez une race de clowns dont le nez sera naturellement lumineux ! Si certains se posent des questions sur ce qu’ils font sur cette terre, il suffit de leur rappeler que leur mission principale est de transmettre ce bien extraordinairement précieux qu’est leur patrimoine génétique. S’ils vous objectent que ce patrimoine n’a rien de particulièrement original faites leur remarquer qu’il en est de même des génomes des ascendants et descendants des plus grands génies que la terre ait portés. Les êtres humains les plus illustres plongent leurs racines dans l’anonymat et, par leurs descendants, ils y retournent. Des briques génétiques sans vertu apparente expriment donc tout leur potentiel quand elles rencontrent d’autres briques tout aussi communes si elles forment avec elles la bonne combinaison.
L’incroyant doit souhaiter qu’on ne s’afflige pas à ses funérailles, mais qu’on se réjouisse en mémoire de lui en faisant bonne chère, en écoutant de la bonne musique et en buvant du bon vin ; sans oublier d’inviter le curé du village qui pourra prononcer quelques paroles de circonstances. S’il refuse de se déplacer, qu’on appelle un bonze ! Sur sa tombe, à défaut de croix, qu’on grave des petits poissons. La musique qu’on jouera pourra provenir de la cordillère du classique aux sommets prestigieux ou de la cordillère du jazz si plein de vitalité et d’humour et où chaque musicien peut librement ouvrir son cœur, mais pas de la vallée du hard rock, repaire des skinheads. Certaines des musiques inventées par l’homme seraient-elles équivalentes à la parade amoureuse des oiseaux chanteurs? Les trois mouvements d’une pièce de musique classique : allegro plein d’entrain suivi d’un mouvement plus calme et plus profond avant un final enlevé avec brio ne font-ils pas penser aux différentes phases de l’acte amoureux (séduction, préliminaires, bingo !) expliquant ainsi sa résonance profonde ? Il n’arrive pour ainsi dire jamais que deux mouvements lents se succèdent. Si c’est le cas de deux mouvements rapides c’est que la séduction a été difficile ou bien que le compositeur a pratiqué plusieurs positions ! A une symphonie qui ne comporterait que les deux premiers mouvements, il manquerait certainement quelque chose!  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Had%C3%A8s" Hadès et  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Dionysos" Dionysos est un et le même, selon  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/H%C3%A9raclite_d'%C3%89ph%C3%A8se" Héraclite.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89ros" Eros et  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Thanatos" Thanatos ont toujours copiné, ce qui peut peut-être faire pardonner ces petites polissonneries ; polissonneries qui se multiplient avec l’âge, comme ne manquent pas de le faire remarquer des dames charitables. Les dernières mesures d’une symphonie de Beethoven sont un paroxysme comme on aimerait en connaître plus souvent. Un final de Bach, pour plus mesuré qu’il soit, n’en est pas moins estimable. Mozart était trop policé pour se livrer complètement dans sa musique. Est-ce également par pudeur que les femmes ne s’adonnent que rarement à la composition musicale ? Redouteraient-elles en exposant leurs sentiments les plus intimes de trahir leur sexe ? Dans la basse-cour les poules caquettent, mais seul le coq prend le risque de chanter, un risque en forme de casserole…Pour toucher du doigt ce qu’est la fureur amoureuse, il suffit d’observer deux moineaux s’apprêtant à assurer leur descendance. Voyez comme ces frêles machines se poursuivent, se fuient, s’unissent, se séparent, volettent à gauche, à droite, en avant, en arrière ; vers le haut, vers le bas, se font face, s’escriment du bec, des ailes et des pattes, se bousculent, s’étreignent, se chevauchent, totalement oublieuses de ce qui les entoure au point qu’on peut presque les toucher de la main alors qu’il est ordinairement impossible de les approcher à moins de vingt mètres. Dirons-nous que ces oiseaux sont pervers ? Les espèces qui ne sont pas animées par cette volonté farouche de se reproduire s’éliminent d’elles-mêmes. Il faut y regarder à deux fois avant de contrarier cet appel de la nature. Le cinéma quant à lui est un art étrange où des gens qui ne s’aiment pas copulent de façon spectaculaire, tandis que ceux qui sont réputés unis par un sentiment véritable entretiennent le mystère sur leurs ébats. Les vrais amants sont dans un monde qui n’appartient qu’à eux. Ils s’aiment comme l’oiseau chante et pour les mêmes raisons.

Démons et merveilles, vents et marées, au loin déjà la mer s'est retirée, et toi comme une algue, doucement caressée par le vent, dans les sables du lit, tu remues en rêvant.
(Jacques Prévert)
Reste là
Derrière moi
Commence
La décadence
Que tes mains
Frôlent mes seins
Et mon cœur
Qui est le tien

( HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/wiki/Jane_Birkin" Jane Birkin chantant Serge Gainsbourg)

Le vin qu’on pourra boire est ce qui exprime le mieux la terre car les racines de la vigne, surtout un peu ancienne, vont chercher en profondeur les éléments minéraux qui donnent au vin son caractère. De la même façon l’huître est ce qui exprime le mieux la mer car elle en a filtré et absorbé sans les dénaturer tous les constituants. Au fait, les huîtres ont-elles une âme ? La gourmandise veut croire, sans en être tout à fait sûre, que leur réaction à la goutte de citron n’est qu’un réflexe inconscient.
Une structure d’explications s’est édifiée dans le cerveau d’un individu au cours de sa vie par l’établissement de relations préférentielles entre ses neurones. Je suggère qu’elle soit doublée et étayée par une structure hypertexte liant les principaux documents qu’il a eu l’occasion d’établir, d’utiliser ou d’étudier. C’est cette structure, plus que ses restes mortels, qu’il faudrait abriter dans un mausolée. Ce serait instituer une nouvelle forme de culte des ancêtres par quoi les religions ont sans doute commencé et dont on peut voir une résurgence dans la faveur dont jouit de nos jours la généalogie familiale. Qui se souciera des os du défunt cent ans après sa mort ? Il vaudrait mieux conserver une copie de son génome pour pouvoir le ressusciter si la chose devenait un jour techniquement possible. Imaginons plutôt sa famille venant en délégation au premier novembre brancher un lecteur dans la prise adéquate pour revivre un épisode de sa vie, une de ses passions, lire un message... Assuré de laisser une trace identifiable et de bénéficier de l’examen bienveillant de sa postérité, il ferait peut-être davantage attention à ce qu’il fait…Sachant que sa conscience doit être définitivement oblitérée il attesterait ainsi que l’avenir de son espèce était la seule chose qui lui importait vraiment de son vivant, ce qui est l’essence même de l’éthique. Il pourra répéter après François Villon dans sa ballade des pendus.
PRIVATE 12. MULTIPLICITE DES RELIGIONS

Bien qu’il soit allé très loin dans la critique, Diderot a-t-il pour autant épuisé toute l’argumentation qui peut être utilisée contre les religions ? Il ne semble pas que ce soit le cas puisqu’il n’évoque pas vraiment les problèmes que pose leur multiplicité. Il effleure le sujet à deux reprises. Il montre les dangers que présente cette multiplicité en raison des conflits meurtriers qu’elle engendre mais il n’en tire pas argument pour mettre en doute leur véracité même, et pourtant...!
Existe-t-il un recensement de toutes les religions connues, petites ou grandes, qui se sont succédé à la surface de la terre ? Sont-elles des dizaines, des centaines ou plus ? En ajoutant les variantes possibles, le nombre des religions est égal au nombre des croyants présents et passés. Chacun adapte en effet sa religion à ses propres besoins, chacun a sa  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Casuistique" casuistique personnelle. Les textes sacrés qui affirment tout et son contraire permettent de déjeuner ou de dîner à la carte. Comme ces textes sont tombés depuis longtemps dans le domaine public, les interprétations et les enseignes se sont multipliées. « Le destin, la grâce, la punition, le pardon, l’obéissance aux pouvoirs, la guerre, la paix, le capitalisme, le communisme, tout s’y trouve, en un mélange où la pensée commune reconnaît à peu près son image » (Alain). Chaque bassin culturel a produit sa propre langue et sa propre religion, ce qui paraît totalement anachronique à un moment où la mondialisation tend à uniformiser toutes les cultures. Un habitant de Sirius débarquant sur notre planète, constatant son niveau technologique, l’intensité des échanges et voyant pratiquer autant de langues et de religions différentes serait littéralement sidéré. « L’homme est bien insensé : il ne saurait forger un ciron et il forge des dieux par douzaines ». (Montaigne). L’homme exprime des doutes sur les faits les mieux avérés et sa certitude sur de purs fantasmes. Aucune Encyclique n’est disponible pour éclairer le croyant à ce sujet, ce qui ne peut véritablement surprendre.
Si les religions sont considérées comme des pansements analgésiques appliqués sur les plaies de l’âme et de la société, il peut y avoir sans inconvénients plusieurs marques de pansements, mais qu’en est-il quand le souci est celui de la vérité ? Les diverses traditions religieuses se présentent toutes en effet comme seules détentrices d’une vérité unique, suprême et indépassable. Seul le bouddhisme fait exception qui recommande à chacun de rester fidèle à la religion dans laquelle il a été élevé, toutes les religions ayant pour but selon lui d’éloigner la souffrance et de se rapprocher du bonheur, de ramener à l’équilibre en quelque sorte l’aiguille du « satisfactionomètre ». Atteignent-elles leur but ? C’est une autre question. Dans le meilleur des cas elles sont équivalentes à l’antique sagesse selon laquelle il faut faire de son mieux pour améliorer les choses et accepter l’inévitable avec sérénité. Fais ce que dois, advienne que pourra. Les bouddhistes paraissent prêts à admettre que les divinités n’existent que dans l’esprit de ceux qui les évoquent. On ne voit pas très bien dés lors ce qui différencie ces divinités de simples images destinées à illustrer des explications. Ce point de vue en tout cas relativise toutes les religions et en diminue singulièrement la portée en les réduisant à des activités culturelles à but thérapeutique. L’enseignement de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Confucius" Confucius est à peu près sur la même ligne. Pour ceux qui sont réfractaires aux histoires saintes mais trouvent du réconfort dans un rituel, les religions orientales constituent donc une option intéressante. Les autres religions, en particulier les religions du Livre, se condamnent et s’excluent mutuelle²ment. Pour mettre les choses au mieux,  HYPERLINK "http://www.croixsens.net/pascal/page13.php" une seule religion peut se prévaloir de détenir la vérité. Imagine-t-on un tribunal cherchant à écarter l’imposture, où chaque religion viendrait à son tour soutenir qu’elle est la seule véritable, contre toutes les autres également représentées ? En invoquant des textes uniquement préoccupés de faire la promotion de  HYPERLINK "http://www.hereses.info/" mythes concoctés par de jeunes barbus épris de pureté et rêvant de refaire le monde, transmis, interprétés et modifiés sous le contrôle exclusif de zélateurs ayant tout loisir de trier les témoignages et de détruire les preuves contraires, pleins d’invraisemblances et de contradictions, sans aucune confirmation indépendante, sans aucune espèce de preuve historique digne de ce nom ? Ce serait à mourir de rire. Autant vaudrait comparer d’après leurs dépliants publicitaires des produits concurrents dont les caractéristiques et les performances annoncées seraient impossibles à vérifier ! Produire devant un tribunal des écrits d’authenticité douteuse est généralement contreproductif. Le président du tribunal ne manquerait pas de demander dans ce cas « Où sont les documents originaux, où sont les signatures, où sont les témoins irrécusables ? ». Est-il possible que rien n’ait été rapporté à Rome par la voie hiérarchique, dans cet empire si bien organisé, des exploits extraordinaires d’un dénommé Jésus ? Un homme capable de changer l’eau en vin, de multiplier les pains et d’effectuer des pêches miraculeuses aurait été précieux pour l’approvisionnement des légions romaines ! Si l’on y ajoute le don qu’il avait de marcher sur les eaux, de guérir les malades, de calmer les tempêtes et de ressusciter les morts, il pouvait à lui seul remplacer l’intendance, le génie, le service météo et le service de santé ! Comment se fait-il qu’aucun des nombreux spectateurs de ces exploits extraordinaires ne soit venu témoigner au procès de celui qui les avait accomplis ? Pourquoi ses juges ne l’ont-ils pas mis au défi de les rééditer ? Loin de l’accabler la populace l’aurait porté en triomphe. La vision d’un reportage fait par des extra terrestres sur la vie de cet individu réserverait sans doute bien des surprises ! Certains ont imaginé un solide gaillard aimant la vie, le vin et les femmes. Pourrait-il du reste avoir été véritablement homme sans aimer tout cela ? Fut-il dans sa jeunesse un sacripant au point que les évangélistes aient dû rester muets sur cette période de sa vie ? C’est Marie-Madelaine, la grande amoureuse, qui lui aurait demandé un jour «  est-ce que ça sait danser un charpentier ? »
Qu’en serait-il par ailleurs des religions tombées en désuétude ? Seraient-elles représentées devant ce tribunal ? Que sont devenus les dieux qui ont cessé de plaire ? Ont-ils perdu tout pouvoir, eux que leurs fidèles ont loué et imploré pendant des siècles de siècles ? Ces fidèles furent-ils moins sincères ou moins convaincus que les croyants d’aujourd’hui ? Ces dieux furent-ils moins aimés ou moins craints que leurs successeurs ? A l’heure qu’il est  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jupiter_(mythologie)" Jupiter,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Quetzalcoatl" Quetzalcóatl et tous les autres jouent-ils aux boules sous les platanes élyséens, comme de paisibles retraités ? Mis en cause, trouveraient-ils des avocats pour les défendre, et qui les paierait ? Il est néanmoins permis de penser que certains avocats se verraient volontiers commis d’office pour défendre Vénus et Bacchus, et qu’ils ne manqueraient pas d’arguments auxquels les incroyants eux-mêmes pourraient être sensibles !
Pour justifier la véracité unique de la foi chrétienne Pascal embarrassé utilise l’argument selon lequel les prophéties auraient été confirmées par l’histoire. Est-ce bien sérieux  lorsqu’on sait que les évènements rapportés dans les nouveaux livres sacrés ont été fabriqués dans le but de confirmer les prophéties contenues dans les anciens ? En tentant l’apologie de la religion chrétienne, Pascal l’a en réalité fragilisée. On pourrait même dire qu’il était au fond sceptique mais qu’appréhendant d’être immédiatement saisi, torturé et brûlé vif, son scepticisme a été refoulé et s’est transformé en recherche d’une « preuve » voisine de celle qui est si chère aux mathématiciens : la preuve par l’absurde. S’il est impossible de démontrer que la religion chrétienne est vraie, c’est qu’elle est fausse ! Si l’absence de preuve n’est pas une preuve de fausseté, c’en est à tout le moins une forte présomption. Pascal s’était en tout cas trop approché du pot aux roses. L’Eglise ne s’y est pas trompée qui l’a mis à l’Index. Elle ne veut voir personne mettre son nez dans ses affaires, même s’il s’agit de sympathisants. En pleine guerre de religion, Montaigne rend un hommage appuyé à la religion catholique dans laquelle il a été élevé, mais il semble avoir été davantage guidé par la prudence que par la sincérité. Dans un  HYPERLINK "http://www.bribes.org/trismegiste/es2ch12a.htm" long chapitre de ses Essais consacré aux phénomènes religieux il cite plus volontiers les auteurs antiques que les Pères de l’Eglise et il fait la part belle aux philosophes matérialistes. Pour celui qui sait lire son apologie de la religion chrétienne ressemble plutôt à une assez subtile « mise en boîte ». Il est clair que sa préoccupation n’était pas « d’attraper le ciel ou d’adresse ou de force » comme il serait logique pour un chrétien convaincu mais plutôt de prendre ses distances par rapport à toutes les religions. Dans un autre chapitre consacré à la liberté de conscience il rend un bel hommage à l’empereur Julien dit l’apostat à cause de la tolérance dont ce dernier fit preuve à l’égard des diverses religions pratiquées dans son empire. Dans le chapitre « que philosopher c’est apprendre à mourir » il fait l’impasse sur les consolations prétendument offertes par la religion chrétienne et ne consacre que quelques lignes à indiquer qu’elle appuie les conclusions tirées d’une philosophie antique résolument profane. De bons auteurs continuent pourtant de considérer Montaigne comme un écrivain catholique. Il est vrai qu’il est tout aussi catholique que bien d’autres ! Ses Essais ont été également mis à l’Index. L’Eglise est certainement consciente des faiblesses de sa doctrine, mais elle entend être la seule à s’en apercevoir. Il ne faut pas cependant se tromper; la charge de la preuve incombe aux tenants d’une foi particulière, non aux incroyants.
Les tentatives de rapprochement entre religions s’apparentent aux accords et fusions que recherchent les entreprises en difficulté, mais deux estropiés ne font pas un individu sain. L’Eglise Catholique qui se dit instituée par Dieu et investie par lui d’une mission impérative et exclusive ne peut considérer les autres religions que comme des impostures soutenues par des esprits fourvoyés, si toutefois elle reste fidèle à sa doctrine. Si d’aventure deux religions d’origines distinctes peuvent se retrouver, c’est uniquement sur le terrain de la morale naturelle dont parle Diderot, morale dont nous avons explicité plus haut la véritable origine. Car ce qui paraît orthodoxe aux uns ne paraît pas très catholique aux autres, et réciproquement. D’un dialogue avec un scientifique le professionnel du divin espère récupérer un peu du prestige qui s’attache à la science. On ne voit pas par contre ce qu’un scientifique peut retirer d’un tel exercice, à moins qu’il ne soit lui-même spécialiste des questions religieuses. La science s’occupe du monde réel accessible aux sens et à l’expérience. Les religions postulent des mondes fantastiques qui ne sont accessibles de façon démontrable ni aux sens ni à l’expérience. Aucun dialogue touchant à l’essentiel n’est donc possible entre science et religions, et pas davantage entre religions différentes. Aussi bien toutes les réunions œcuméniques ne peuvent-elles être qu’une suite de monologues polis et aboutir au mieux à des délimitations de zones d’influence, des pactes de non-agression ou des ententes pour la défense d’intérêts corporatistes car les différentes religions s’attaquent au même marché. La pression économique que certaines commencent à ressentir n’est pas encore suffisante pour qu’elles fusionnent. En fait, dans la plupart des dialogues interreligieux chaque partie utilise l’autre comme outil pour enraciner un peu plus sa propre foi, alors qu’elle devrait en retirer un doute salutaire. Le pape François a exprimé sa volonté de rapprocher catholiques et musulmans. Ceci pourrait signifier son intention d’utiliser la vitalité de la foi islamique et la peur qu’elle inspire pour lutter contre la sécularisation croissante des sociétés occidentales. Il est possible aussi qu’il nous ménage quelques heureuses surprises. L’œcuménisme n’est que l’art de dialoguer sans se comprendre. Chaque partie est bien convaincue qu’il n’existe qu’une seule foi véridique et, comme par hasard, c’est la sienne. In tel préjugé ne peut être soutenu valablement qu’avec les poings. Malgré l’impossibilité où ils se trouvent de prouver la véracité seule et unique de leur croyance les hommes de foi n’hésitent pas à suivre aveuglément ses enseignements et, quand ils le peuvent, à l imposer aux autres par tous moyens à leur disposition, y compris les plus violents. C’est pourquoi toute religion est éminemment dangereuse. Dans un monde en voie d’unification il y aura de moins en moins de place pour plusieurs religions prétendant chacune à l’universalité. Même s’il n’existait plus désormais qu’une seule religion à la surface de la terre, ceci ne la rendrait pas plus certaine pour autant. Un concept universellement partagé n’implique nullement une réalité extérieure qui lui corresponde, sans quoi un dieu soleil continuerait de tourner autour d’une déesse terre en forme de galette. Si un quidam entreprend l’exposé public de ces idées dérangeantes, sur un plateau de télévision par exemple, les autres intervenants lui font sentir immédiatement qu’il ne joue pas le jeu convenu (les regards qu’ils échangent entre eux sont à cet égard éloquents) et l’exposé tourne court. J’en conclus plusieurs choses :
a) ces idées menacent très directement de multiples intérêts
b) il existe en conséquence une pression sociale extrêmement forte et dotée de puissants moyens d’influence pour que ces idées ne soient jamais exprimées
c) les idées en question sont très difficilement réfutables
d) nous vivons sous le règne du mensonge
Je me permets de suggérer que les différentes religions organisent une cérémonie œcuménique de repentance où elles feraient état de tous les torts qu’elles se sont faits mutuellement ou qu’elles ont fait à d’autres et qu’elles rouvrent tous les procès en sorcellerie ou en hérésie. On a bien réhabilité récemment et à juste titre les soldats qui avaient été fusillés pour l’exemple durant la première guerre mondiale. Il faut se dire que l’ADN des innocents, même porté aujourd’hui par d’autres, court encore dans les rues, tout comme celui de leurs juges et de leurs bourreaux.
Tout croyant sincère est amoureux de sa croyance. Il n’en voit que les beautés et les perfections. Il reste aveugle pour ses erreurs et ses crimes. Il n’est pas interpellé par la multitude des croyances. Il ne lui vient pas à l’esprit que, né dans une autre contrée ou à une autre époque, d’autres beautés l’auraient séduit ; qu’il a adopté la croyance locale comme il a adopté le costume régional, pour ne pas se singulariser. Le plus souvent il se sera contenté de conserver l’empreinte des croyances qui lui ont été inculquées quand son jugement n’était pas encore formé. Il a aussi intégré le fait qu’en refusant d’adopter la religion dominante il diminuait considérablement ses chances d’être accepté par la « bonne société ». «  Nous sommes chrétiens au même titre que nous sommes ou Périgourdins ou Allemands » (Montaigne). Cette courte phrase dit tout. Un cerisier sauvage peut être greffé et, selon le greffon utilisé, porter telle ou telle variété de cerises. Il existe en effet, au-delà de l’apparente diversité, une grande similitude entre les différentes religions quels que soient le lieu et l’époque considérés. Elles ont presque toutes en commun des êtres divins aux origines baroques et aux biographies extravagantes, représentations allégoriques des grands phénomènes naturels ou de concepts abstraits très généraux, ou d’une sommation de ces représentations (Dieu est amour, vérité, charité, etc..), des prescriptions morales comparables, la croyance selon laquelle une âme immortelle peut être séparée du corps mortel, le culte des morts, la punition des méchants et la récompense des justes, des anges, des saints et des démons (un dieu nouveau change en démons les divinités dont il a pris la place), une cosmologie, une cosmogonie, des cataclysmes causés par la colère divine, des interventions miraculeuses amodiant les phénomènes naturels, des temples, des prêtres, des acolytes, des théologiens et des astronomes, des moines et des moinillons, des nonnes et des nonnettes, des ermites, des retraites, des prêches, des gestes et des objets rituels, des habits de cérémonie, des tonsures et des pilosités exubérantes, des cloches, des tambours et des gongs, des couronnes, des guirlandes et des tresses, des cierges, des flambeaux, des bannières et des oriflammes, des chapelets et des moulins à prière, des reliques, des apparitions, des initiations, des bénédictions, des vénérations, des vaticinations, des malédictions, des damnations, des excommunications, des abjurations, des absolutions, des purifications par l’eau ou par le feu, des ablutions, des immersions, des aspersions, des lustrations (l’obsession de la pureté et l’horreur du corps sont caractéristiques de beaucoup d’états névrotiques), des onctions, des fumigations, des libations, des illuminations, des élévations, des transfigurations, des transsubstantiations, des génuflexions, des prosternations, des méditations, des oraisons, des adorations, des implorations, des lamentations, des déplorations, des admonestations, des imprécations (un mode favori de communication), des incantations, des invocations, des expiations, des contritions, des rogations, des hallucinations spontanées ou provoquées, individuelles ou collectives, des prostrations, des dormitions, des mortifications, des macérations, des flagellations, des scarifications, des infibulations, des circoncisions, des excisions, des mutilations, des processions, des circumambulations, des ostensions, des célébrations, des commémorations, des consécrations, des sanctifications, des canonisations, des apparitions, des visitations, des résurrections, des apothéoses et des métamorphoses, des danses sacrées (leur absence quasi-totale dans les religions du Livre témoigne de la répression impitoyable de la sexualité qu’elles pratiquent), des transes, des offrandes, le sacrifice des plus faibles ( animaux, prisonniers, esclaves, enfants, adolescents mâles et femelles), des peintures corporelles, des masques et des tatouages, des nourritures sacrées, des interdits alimentaires et sexuels, des jeûnes, des lieux maudits et des lieux saints, des paradis et des enfers, des rivières enchantées et des forêts hantées, des montagnes et des arbres sacrés, des ascensions vers le ciel et des descentes aux enfers, des animaux fabuleux et des monstres épouvantables, des sorciers et des sorcières, des envoûtements et des exorcismes, des psalmodies, des litanies, des chants liturgiques, des musiques, des cortèges, des pèlerinages, un calendrier, des cérémonies ordinaires et des cérémonies extraordinaires accompagnant les grands évènements de la vie… Considérez les civilisations qui s’épanouissaient des deux côtés de l’Atlantique avant le voyage de Christophe Colomb. Leurs populations étaient sans relations depuis la fin de l’ère glaciaire. Pourtant, de part et d’autre de ce vaste océan, les pierres des monuments s’y disposaient selon les mêmes lois dictées par la pesanteur et la géométrie, et les pensées religieuses s’y ordonnaient selon les mêmes lois propres à l’esprit humain. De la même façon deux vrais jumeaux séparés à la naissance et ayant mené des vies très différentes ont malgré tout, soixante ans plus tard, des réactions similaires. Ce qui confirme que les caractéristiques mentales tout comme les caractéristiques physiques dépendent très directement du patrimoine génétique des individus. Les vallées de toutes les rivières se ressemblent, y compris sur Mars. Les galaxies présentent les mêmes formes typiques aux quatre coins de l’univers, car les forces qui sont à l’œuvre pour leur donner naissance et les façonner sont identiques. Les religions s’enracinent dans le même inconscient collectif. Il s’agit d’œuvres humaines, exclusivement humaines, très probablement. Si toutes les religions racontent à peu près la même histoire dans différentes langues, c’est que l’instinct religieux est pour ainsi dire pré câblé dans le cerveau. S’il en est ainsi, c’est que Dieu l’a voulu, à moins que ça ne soit Darwin.
Une majorité de chrétiens semble aujourd’hui acquise à l’idée que leur religion ne bénéficie d’aucun statut privilégié, que c’est une religion parmi d’autres se rendant ainsi coupables aux yeux mêmes de l’Eglise du péché de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Relativisme" relativisme. Ils conviendront, je l’espère, que leur point de vue n’est pas d’une logique au dessus de tout soupçon car si toutes les religions se valent, celle qui consiste à n’en pas avoir du tout est tout aussi admissible. Accepter toutes les religions, c’est les nier toutes. Il ne paraît pas particulièrement raisonnable d’adopter sans précautions ces constructions intellectuelles antérieures à l’apparition de la science, alors que la science est très évidemment le seul mode de connaissance fiable. Dés que l’Europe a adopté la méthode scientifique ses progrès ont été fulgurants. Nous bénéficions aujourd’hui, grâce à la science, d’une étendue de vue dans l’espace et dans le temps sans commune mesure avec ce qu’elle pouvait être au moment où sont nées les religions encore pratiquées aujourd’hui. Comme chacun peut s’en rendre compte tous les jours, l’esprit humain, dans sa quête de la vérité, est beaucoup trop faible pour se passer de l’expérimentation, c’est à dire de la confrontation des conséquences tirées des hypothèses envisagées avec la réalité observée. Toute autre démarche est présomptueuse et vouée d’avance à l’échec. L’esprit humain marche sur deux jambes ; l’expérience et la raison. A chaque pas la science présuppose et constate la rationalité du monde. Les disputes  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Thomas_d'Aquin" scolastiques sur le sexe des anges, sur la grâce suffisante, ou sur l’existence même d’un Dieu qu’on ne sait pas définir sont des logorrhées sans intérêt, faute de faits susceptibles de vérification. Toute religion est impie qui prétend enseigner ce qu’elle ignore ! Les véritables lieux de culte sont les laboratoires de recherche et les observatoires, car la réalité dévoilée par la science est beaucoup plus étendue, multiple, diverse, complexe et étonnante que tout ce que les traditions religieuses ont pu imaginer à son sujet. Ces temples d’un genre nouveau ont été érigés en l’honneur de la Vérité, la seule déesse qui mérite d’être adorée. C’est en ces lieux privilégiés que l’esprit curieux peut s’émerveiller de l’élégance des lois universelles, de leurs prodigieuses conséquences et de l’ingéniosité de leur éventuel auteur. Les hommes de science sont les véritables héritiers des prêtres chaldéens qui scrutaient la voûte céleste à la recherche de régularités permettant de faire des prédictions. La science est seule capable de réunir l’accord de tous les hommes car elle se règle sur la nature qui est une et immuable, et non sur les fantaisies multiples et changeantes de quelques-uns. Elle seule est capable de fonder l’éthique sur des bases solides. L’Ethique qu’elle permet de dégager de façon idéalement univoque par prise en considération objective de l’épanouissement des espèces vivantes est tout le contraire du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Relativisme_culturel" relativisme. Au contraire la multiplicité des religions conduit tout droit au relativisme si on considère toutes ces religions, et pourquoi ne pas le faire, comme équivalentes. Lorsqu’un pape accuse l’approche scientifique d’engendrer le relativisme, c’est véritablement l’Hôpital qui se moque de la Charité ! Il sent bien que le relativisme est un des points faibles de toutes les religions en raison de la nécessité logique de l’unicité de la vérité. Il choisit donc d’attaquer sur ce terrain. C’est typiquement du bluff ! Quand tous sont dans l’incertitude le premier qui prend position se donne un avantage souvent décisif. Nous avons déjà eu une illustration de cette tactique dans la façon dont est présenté le dogme de la Trinité. De la même façon il essaie de nous vendre l’idée selon laquelle méthode scientifique et religion sont compatibles. J’espère que le présent essai aura achevé de convaincre du contraire. Bluff encore lorsqu’il prétend décider du sort de chacun pour les siècles des siècles ! Dans ce jeu de poker menteur il est bien évident qu’il ne peut se permettre de jouer cartes sur table ! Un pape n’a pas plus de crédibilité qu’un chaman des steppes d’Asie Centrale. Il coûte seulement beaucoup plus cher.
Chaque religion se prétend ambassadrice d’une ou plusieurs divinités, mais aucune n’est en mesure de présenter ses lettres de créance ! Tel engage toute sa vie sur ces promesses plus qu’incertaines qui fait vérifier le moindre chèque ! Non seulement les religions ne sont pas d’accord entre elles, mais de plus leurs différentes doctrines ont varié au cours du temps, et dans un même temps, les avis des différents représentants d’une même doctrine ont rarement été unanimes et ceux qui s’en réclamaient ne l’ont pas souvent suivie avec constance. La science unit les hommes car la réalité objective et les raisonnements logiques sont les mêmes pour tous. Les religions les divisent car elles dépendent des fantaisies d’un petit nombre d’hommes s’autoproclamant inspirés. N’était-ce pas l’idée même de Diderot? Il faut se boucher les yeux pour ne pas s’apercevoir que les religions actuelles sont les héritières directes des conceptions les plus archaïques concernant l’homme et son environnement, que chaque entité géographique a développé son propre type humain et sa propre culture dont la religion constitue la partie la plus arbitraire en même temps que la plus caractéristique. Un esprit rationnel, rationaliste diront certains, considère à cet égard un croyant avec un étonnement qui est sans doute réciproque. Vous avez des yeux et vous ne voyez pas dit le croyant. L’incroyant est tenté de lui conseiller d’essuyer ses lunettes et il peut même d’ajouter « Il y a et il y a eu des milliers de dieux et selon vous le vôtre serait le seul véritable. Vous êtes un sacré veinard ! ». Il est bien forcé de lui faire observer qu’il n’y a qu’une seule science alors qu’il y a eu et qu’il y a encore une quantité considérable de religions prétendant chacune à la vérité absolue et que c’est une exigence logique élémentaire qu’il n’y ait qu’une seule vérité. La vérité est une et indivisible car il n’y a qu’une seule réalité. Il est totalement absurde pour un état laïc de reconnaître quelque diplôme de théologie que ce soit. Les quatre cinquièmes de l’humanité sont totalement imperméables au rêve chrétien et poursuivent d’autres rêves bien à eux. Toutes les religions peuvent être accusées de faux et usage de faux en écritures saintes. Les chrétiens d’aujourd’hui ne sont pas différents de certains habitants d’îles isolées qui honorent le dieu Cargo qu’ils voient fumer à l'horizon ou des bushmen qui honorent le dieu Boeing qu’ils voient voler haut dans le ciel, seulement plus crédules puisqu’ils n’ont même pas aperçu leur Dieu. Dieu, s’il existe, n’appartient à personne. Du premier des chamans au dernier des papes la religion qui consiste à se prévaloir de relations privilégiées avec le divin constitue la plus ancienne, la plus constante et la mieux réussie de toutes les impostures. Tant qu’il se trouvera des hommes assez crédules pour s’y laisser prendre il se trouvera des hommes assez habiles pour exploiter à leur profit cette faiblesse congénitale. Voilà, me semble-t-il, ce que peut dire le bon sens dans un domaine où il n’est pas forcément le bienvenu. Je crois entendre d’ici les malins s’esclaffer : « il faut donc que vous croyiez un peu à toutes ces choses-là pour que vous éprouviez le besoin d’en disputer. Nous, nous savons ce qu’il en est depuis longtemps, mais nous préférons nous taire et conserver ce levier pour agir sur les âmes simples».
PRIVATE 13. SORTIR DES RELIGIONSTC \l 1 "13. CONCLUSIONS"

Je ne puis résister au plaisir de citer dans son intégralité ce propos d’Alain intitulé « Les Contes » qui constitue un abrégé particulièrement pertinent de certains des développements précédents:
« La religion est invincible par l’absence de preuves, et même de la vraisemblance ; ainsi toutes nos sages preuves contre, tirées de science peseuse et mesureuse, tombent dans le vide. Contre les passions et l’imagination, qui toujours déraisonnent ensemble, il faut des faits bien clairs et positifs ; et c’est ce qu’on ne peut pas toujours faire constater à un malade imaginaire, à un plaideur, à un jaloux ; chacun se bouche les yeux plutôt que de renoncer à une erreur adorée ou abhorrée ; la peur, comme on sait, donne le même genre d’aveuglement que le désir. Mais enfin, dans les choses de ce monde, on peut toujours espérer quelque occasion de constater, qui remettra l’esprit en équilibre. Au lieu que sur l’enfer ou sur le paradis, que pourrais-je constater ? Et sur des évènements vieux de vingt siècles, que puis-je savoir qui soir communicable comme sont communicables la géométrie et la physique ? Il faut que les passions, l’imitation, l’autorité décident de tout, formant une sorte de manie collective, et cohérente en son intérieur. Et j’y vois cette différence avec les fous à proprement parler, c’est que les fous ne veulent pas y aller voir, et règlent dans leur pensée les questions de fait, au lieu que les croyants ne peuvent pas y aller voir, vivant sur des faits qui ne sont point des faits. Le doute est l’état naturel de celui qui manie des preuves. Mais dés qu’on ne peut espérer de preuves, le doute est une maladie dont on se guérit par serment. Je ne dirai donc pas qu’un homme peut tout croire, c’est trop peu dire. Le vrai est que l’absurde est ce qui est le plus fermement cru.
Et encore je ne compte pas les heureux effets. Si un chapelet dit selon le rite apaise les soucis et les scrupules, et conduit à un paisible sommeil, voilà un fait que je ne puis nier, et que même je comprends très bien. Et si la position d’un homme à genoux le rend plus facile à lui-même, moins enragé de vengeance, en tout plus équilibré et plus humain, la plus simple physiologie m’avertit que je devais prévoir cela. La passion d’un homme couché n’est pas de courir ; et la même bouche ne peut en même temps prier et menacer. Ce sont là des exemples tout simples. Il y a bien plus. Il y a des moments sublimes qui, semblables à un manteau, nous donnent un peu de majesté et de paix. Il y a les cortèges et les cérémonies, qui disposent énergiquement le corps humain selon une sorte de grandeur, qui se communique naturellement aux pensées. Il y a la musique, qui agit encore plus subtilement, et, par le chant, sur les viscères mêmes. Et ce n’est pas trop supposer que de prêter à la Bible le même genre de puissance qu’à un beau poème. D’où il résulte que le croyant se sent récompensé de croire, et se trouve attaché, par des liens de reconnaissance à des légendes et à des rites si bien taillés pour lui, si agréables à porter. Ajoutons qu’il est toujours pénible de penser selon la rigueur, que c’est souvent dangereux, que c’est parfois impossible. Qui jugera son bienfaiteur ? Qui jugera ses parents ? On craint donc les jugeurs, on les évite. On se passe donc très bien de penser.
La situation étant telle, je fus et suis encore assez content de ce que je répondis à un camarade  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20be.doc" \o "soldat de la première guerre mondiale" soldat, évidemment de bonne foi. « Qu’est-ce que vous pensez, me demanda-t-il de Dieu le Père, de Jésus-Christ, du diable et de tout ça ? » Nous faisions notre petite lessive à l’abreuvoir, non sans guetter du coin de l’œil l’adjudant, qui ce jour-là trouvait tout mauvais. Que pouvait répondre l’esclave à l’esclave ? Je lui dis : « Ce sont de beaux contes. On ne se lasse point des beaux contes. Cela fait comme un autre monde où la bonne volonté triomphe à la fin. Un monde selon nos meilleurs désirs. Ce sont des récits faits à notre forme, et qui conviennent dans les moments où le monde est trop dur. L’esclave alors oublie d’être méchant. Il revient à la vérité de l’enfance. Il se dispose selon la confiance et l’espoir. Et quoi de mieux ? Personne certes ne dira que les contes sont vrais ; mais personne non plus n’osera dire qu’ils sont faux. »

Avec son indulgence philosophique Alain ne voit que le bon côté des choses, mais il existe des perspectives plus sombres. Imaginez, ce qui n’a rien d’invraisemblable, que dans deux ou trois générations il y ait en France 50% de musulmans. Le taux de fécondité honorable observé en France semble dû en effet aux populations fraichement immigrées. Le français de souche, celui dont les racines plongent dans les provinces françaises est une espèce en voie de disparition, comme ses homologues allemands, espagnols ou italiens. Verrons-nous dans nos rues des femmes voilées côtoyer des femmes vêtues de transparences ? Devrons-nous tous manger de la viande  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Halal" Halal quand on sait que le mode d’abattage correspondant fait inutilement souffrir les animaux ? La République s’incline une fois de plus devant les religions en n’interdisant pas purement et simplement cette pratique dans les abattoirs français. Comment pourront s’accorder ceux qui veulent une justice qui comprend et qui répare et ceux qui rêvent d’instituer la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Charia" charia ? A peine sorti d’une confrontation avec l’obscurantisme de la religion imposée à nos pères, avons-nous vraiment envie de nous colleter avec l’obscurantisme d’une religion qui nous est étrangère ? Avons-nous vraiment envie de faire un bond en arrière  de plusieurs centaines d’années? Personnellement je ne mettrai plus jamais les pieds dans un pays dominé par quelque intégrisme que ce soit. Faut-il pour autant interdire aux musulmanes le port du voile ? C’est oublier qu’il n’y a pas si longtemps, dans nos campagnes, une femme se serait sentie très malheureuses de devoir sortir tête nue. Beaucoup de femmes craignent le regard des hommes, ou peut-être l’absence de regard… Pour se protéger certaines femmes élégantes ont eu recours à la voilette ou aux mouches qui distraient le regard. Compte tenu de la facilité des déplacements, les races et les religions sont condamnées à se côtoyer. Sont-elles pour autant condamnées à se mélanger ? Entre deux races ou deux religions, il y a une différence de potentiel qui engendre presque toujours des orages. Si races et religions restent séparées, il y aura éventuellement des orages aux frontières, mais si elles se côtoient, il y a un risque de guerre civile, ce qui est pis. Les races peuvent se mélanger. Les religions ne fusionnent pas, la seule exception connue étant la religion chrétienne où coexistent des apports juifs et des apports égyptiens, entre autres.
Certains objecteront qu’il est bien beau de vouloir décrédibiliser les religions, mais l’humanité peut-elle s’en passer ? Ne peut-elle craindre de remplacer un enfer hypothétique par des camps de concentration bien réels ? Les religions ont démontré leur utilité au cours de l’histoire, faute de quoi elles auraient été éliminées par la sélection naturelle. En ont-elles encore, telle est la véritable question. Peut-on aujourd’hui mettre fin sans risque majeur à ces mystifications ? La réponse à cette question est probablement oui. Toutes les conséquences n’ont pas encore été tirées du fait que les guerres entre gens sensés sont devenues impensables sinon impossibles et que, par conséquent, les communautés n’ont plus autant besoin que par le passé d’être cimentées par une même foi et même que ça peut être très dangereux. Les valeurs pacifiques doivent s’imposer au détriment des valeurs guerrières et entraîner une équitable féminisation de tous les pouvoirs. Même si certains trouvent encore un soutien dans leur religion, même si elle les aide à vivre dans les moments difficiles, la situation générale s’est suffisamment améliorée pour que la plupart des individus n’aient plus besoin d’aller y chercher un soutien psychologique qu’ils peuvent trouver ailleurs. Une fraction de plus en plus importante de l’humanité est soustraite aux douleurs physiques et morales insupportables. Les religions perdent ainsi une grande partie de leur utilité et leur disparition n’entraînera pas forcément de grands bouleversements. Le regain d’intérêt et la tolérance dont elles semblent bénéficier aujourd’hui sont-ils autre chose que la manifestation de la sollicitude qu’on accorde ordinairement aux grands malades ?
L’activité économique, politique ou militaire ne s’est pas arrêtée lorsque nos anciens ont réalisé que la terre était ronde et non plate et qu’elle tournait autour du soleil et non l’inverse. Les activités humaines n’ont pas été affectées de façon extraordinairement spectaculaire par le changement de perspective lié à ces découvertes, même s’il a fallu attendre, bel exemple de la prudence ecclésiastique, que  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Neil_Armstrong" Neil Armstrong pose son pied sur la lune pour que  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Galileo_Galilei" Galilée soit réhabilité ! Quelle impudence que cette réhabilitation si on y réfléchit bien ! L’important n’est pas de réhabiliter Galilée qui n’en a nul besoin mais de condamner sans équivoque ceux qui l’ont accusé ! Faudra-t-il attendre pour que  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Giordano_Bruno" Giordano Bruno bénéficie du même traitement que l’homme ait posé son pied sur le satellite d’une étoile proche ou, qu’à tout le moins, il y ait envoyé quelque engin automatique retransmettant des informations cohérentes ? La croyance en des mondes pluriels fut en effet un des principaux motifs de sa condamnation au bûcher par le Saint-Office.

Le premier qui dit la vérité
Il doit être exécuté
 HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Guy_B%C3%A9art" Guy Béart

Quant à l’influence des religions sur le comportement moral de leurs fidèles, nous avons vu qu’elle est assez faible. Les thèses de Freud, en grande partie confirmées par l’étude du fonctionnement du cerveau permise par les nouvelles technologies, rendent surannées les conceptions éthiques traditionnelles, mais ne modifient que très lentement les opinions, les mœurs et les lois. La criminalité extrême est, malgré une répression féroce, plus importante dans un pays comme les Etats-Unis où la religion joue encore un grand rôle que dans un pays apparemment déchristianisé comme la France. La science et la raison fondent plus sûrement la morale que toutes les religions réunies. Il n’y a jamais eu de criminels dans les rangs des véritables hommes de science alors qu’ils ont abondé dans les rangs des hommes d’église, prêcheurs de toutes les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Croisade" croisades,  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Inquisition" inquisiteurs sans pitié, complaisants avec les puissants, tolérant toutes les injustices quand elles s’appuient sur la force ou qu’elles leur sont profitables… Personne n’a jamais été poursuivi pour refuser d’ajouter foi à la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_d'Ohm" loi d’Ohm (sauf s’il s’agit d’un technicien responsable de ce fait d’une catastrophe) car l’expérience suffit à instruire, mais, à l’opposé, comment obliger un individu réticent à reconnaître la vérité d’un dogme ou à satisfaire à une obligation rituelle sans utiliser la contrainte et, si nécessaire la violence, seules capables de valoir à ces « systèmes d'opinions bizarres » les marques extérieures de respect ? La seule persuasion est de peu d’efficacité quand elle se heurte à un esprit ancré dans ses certitudes métaphysiques, lesquelles lui sont d’autant plus chères qu’elles font partie des fondations de son édifice intellectuel. C’est ce qui explique la longue connivence de l’Eglise avec tous les régimes autoritaires, empires, monarchies absolues et toutes les variétés de fascisme, en dehors du fait que sa propre organisation paraît calquée sur la leur. C’est dans un tel contexte qu’elle est née et c’est là qu’elle se sent le plus à l’aise. En grande pompe elle continue donc d’enterrer les tyrans, même les plus déplorables. Les religions, particulièrement les religions monothéistes, qui projettent si bien sur terre l’esprit tyrannique qui selon elles règne au ciel, bien loin d’être une solution, sont devenues pour le monde un problème, comme nous pouvons le lire à longueur d’année dans les journaux. Les religions ne sont indispensables que pour ceux qui en font leur métier, ou qui les utilisent comme alibi. D’ailleurs un grand nombre d’individus ont déjà appris à s’en passer et ne s’en trouvent pas beaucoup plus mal.

Si l'Eternel existe, en fin de compte, il voit Qu'je m'conduis guèr' plus mal que si j'avais la foi
(Georges Brassens, Le Mécréant)

Les sociétés bouddhiques font depuis toujours l’économie du divin. Même les saints, comme nous l’avons vu, ont dû parfois s’en passer. Il semble que l’humanité peut, avec ménagements et précautions, franchir le pas et se rassembler autour de ce qui n’est pas contesté. Dans un pays où la proportion de croyants véritables est probablement inférieure à 5%, l’impact serait minime. Le principal reproche qu’on puisse faire aux religions, à toutes les religions, est de mettre l’accent sur le salut individuel alors que ce qui compte véritablement est le salut collectif, même s’il est vrai qu’on n’attrape pas les mouches avec du vinaigre ! Dépenser des fortunes en armements quand la catastrophe écologique est à notre porte, poursuivre des chimères au lieu de s’attaquer aux vrais problèmes, ne peut rester longtemps sans conséquences. L’autre danger est d’attendre de la divinité qu’elle décrète je ne sais quelle apocalypse alors que nous sommes parfaitement capables de nous en charger nous-mêmes. Dieu ne viendra pas au dernier moment tel Zorro pour tout arranger.
Les divinités habitaient jadis chaque forêt et chaque fontaine.

« La plus humble amourette était alors bénie
Sacrée par Aphrodite Eros et compagnie
L’amour donnait un lustre au pire des minus
Et la moindre amoureuse avait tout de Vénus 
« En se touchant le crâne en criant j’ai trouvé
La bande au professeur Nimbus est arrivée
Qui s’est mise à frapper les cieux d’alignement
Chasser les dieux du firmament »
(Georges Brassens, Le Grand Pan)

C’est donc la faute aux hommes de science qui ont tout démythifié si les divinités se sont réfugiées dans les lieux les moins accessibles comme les montagnes élevées ou les antres souterrains et si elles ont finalement gagné le ciel où certains croient encore les apercevoir. Elles se sont même tellement éloignées qu’elles se sont confondues en une seule. Après avoir accompagné l’humanité dans la phase la plus cruciale de son développement, elles peuvent disparaître de son horizon et les derniers liens qui rattachent l’humanité à son enfance seront, non sans déchirements pour certains, non sans une certaine appréhension ni une certaine nostalgie pour d’autres, tranchés.
Les religions ne sont qu’un moment du développement des sociétés humaines. Il n’y en a pas toujours eu et il est probable qu’il n’y en aura pas toujours. Le monde en tout cas ne peut plus progresser guidé par des éthiques fondées sur des archaïsmes aussi divers que douteux. Il faut se débarrasser de ces vestiges du passé qui ne font que compliquer la résolution des problèmes d’aujourd’hui lesquels ne sont pas minces. Peut-on rêver qu’un pape, constatant après Benoît XVI que « la barque de l’Eglise fait eau de toutes parts » confesse un jour honnêtement qu’il a perdu la foi, qu’un concile subséquent fasse le bilan des actions positives et négatives de l’Eglise au cours des siècles, en ouvre les archives aux historiens, puis mette la clé sous la porte ? Cette attitude ne serait-elle pas préférable à un repli frileux sur les positions les plus conservatrices par nostalgie d’un passé de puissance et d’influence ? S’il doit le faire, qu’il le fasse avant que l’Eglise ne fasse faillite ou que des zozos se réclamant d’une quelconque divinité n’aient créé un désordre général et meurtrier ou fait sauter la planète. Il n’est pas certain que le traumatisme de ce qui reste de fidèles, compte tenu de l’état de leur croyance, sera dans cette éventualité beaucoup plus grand que ne le fut par exemple celui des citoyens des pays de l’Est lors de la chute du communisme. La reconnaissance du fait que toute foi comporte une part d’incertitude serait un premier pas ô combien utile. Les religions orientales l’ont déjà implicitement franchi. Les religions que nous connaissons actuellement peuvent disparaître comme ont disparu avant elles d’innombrables religions d’innombrables peuples. Elles peuvent être supplantées par un mode de connaissance plus performant et une éthique mieux fondée, comme ont été supplantés les montres mécaniques, les règles à calcul et les postes à galène. Nous savons bien que les civilisations sont mortelles. Parier que la vie sera toujours la plus forte ne semble pas un pari particulièrement risqué. De plus c’est le seul possible. D’autres menaces, purement physiques celles-là, sont autrement plus inquiétantes. L’instinct moral protecteur de la vie existe chez tous les êtres vivants, il est même une condition de leur existence. Il faudra le renforcer autant que faire se peut et donc, comme le souhaitait Diderot, que les vertus soient davantage reconnues et encouragées par la société. Pour faire accepter la disparition de l’autre monde, il faut d’abord que celui dans lequel nous vivons soit devenu supportable pour tous. Or un monde enfin honnête, équitable et pacifié n’est pas hors de portée car les progrès techniques accumulés devraient permettre à chacun de vivre mieux que convenablement s’il n’y a pas trop d’inégalités ni de gâchis et si les états savent faire preuve d’un minimum de prévoyance. Des substances diverses et variées, pas toutes illégales ni destructrices, peuvent se charger de faire voir la vie en rose… Point n’est besoin d’une grande fortune pour connaître le vrai bonheur qui est de se sentir en sécurité, bien dans sa peau, en paix avec son entourage et de tenter de comprendre le monde comme il va.
Tous ceux qui, après mûre réflexion, se sentiront en accord avec les points de vue de Diderot, d’Alain et de quelques autres, tous ceux qui auront acquis la conviction qu’ils ne sont pas les favoris des dieux mais qu’ils appartiennent au contraire à une espèce menacée, se doivent de renoncer à des illusions devenues plus que jamais périlleuses. Les religions ont fait leur temps, il faut passer à autre chose. Leur mise entre parenthèses c'est-à-dire leur confinement à une sphère strictement privée, est probablement une condition nécessaire, sinon suffisante, de la survie de l’humanité. Parmi les croyants, les chrétiens sont ceux qui doivent donner l’exemple car ils appartiennent à l’avant-garde des nations. Tous doivent savoir que le but n’est pas tant de détruire les religions que de les accorder, de les assumer et si possible de les dépasser. Eviter la confrontation des religions cependant ne suffit pas. Il existe en effet quantité d’autres maux qui affligent l’humanité en général et la France en particulier, prise ici à titre d’exemple car il existe des phénomènes comparables dans la plupart des pays développés. Leur accumulation devient alarmante.



14. UN MONDE EN CRISE

Depuis qu’il existe le monde a toujours été en crise. Les religions ont certainement eu leur part dans la genèse, mais aussi dans le traitement de ces crises. Elles ne semblent plus adaptées à la résolution de la crise mondiale actuelle pour la raison que toutes les religions se trouvent concernées et qu’elles sont mutuellement incompatibles et irréconciliables. Je pense que la plupart des gens sont conscients du danger que présentent des « vérités » différentes que la raison est impuissante à départager et soutenues néanmoins par de nombreux fanatiques. En outre il ne s’agit plus seulement de relations entre les hommes mais des limites physiques de la terre- mère qui ont été atteintes. Après être sorti des religions, il faut donc songer à reconstruire la société sur des bases différentes. « Mais, dit la Maréchale, il faut quelque chose qui effraie les hommes sur les mauvaises actions qui échappent à la sévérité des lois ; et si vous détruisez la religion, que lui substituerez-vous ? ». Il faut noter qu’elle n’invoque pas la réalité ou la véracité de ce « quelque chose », mais son utilité supposée. Pour répondre néanmoins à son inquiétude, qu’est-il possible de substituer aux religions ? La réponse parait inscrite dans la nature. L’obligation ressentie comme la plus pressante, la plus absolue par tous les êtres vivants est d’assurer la survie de l’espèce à laquelle ils appartiennent. Les espèces qui n’ont pas été défendues bec et ongles par leurs représentants ont disparu. Il est probable qu’en dehors de quelques insensés, tous les hommes seront d’accord pour estimer que l’aventure de la vie en général, et celle de l’espèce humaine en particulier valent la peine d’être poursuivies. C’est donc l’objectif commun qu’ils doivent se fixer. Or, la réalisation de cet objectif est loin d’aller de soi. Certains estiment même que les probabilités vont contre. Ce qui va suivre tendrait à leur donner raison. La manière dont les diverses religions continuent d’attirer massivement les fidèles dans beaucoup de grands pays malgré l’absence de toute preuve tangible de leur pertinence montre que les hommes dans leur ensemble sont peu disposés à se saisir des vrais problèmes et préfèrent rêver des solutions. Selon toute vraisemblance ils ne réagiront que lorsqu’il sera trop tard. Un émule de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cassandre_(Mythologie)" Cassandre est rarement crû. J’attends que le président d’un grand pays commence un de ses discours par ces mots : « Mes chers compatriotes, je suis profondément inquiet ! ».



Crise environnementale

Songez à l’état de la planète, à son atmosphère dangereusement enrichie en gaz carbonique, à ses sols mis à nu, lessivés, appauvris en éléments nutritifs et en organismes vivants, souillés, rongés par l’érosion, le bitume et le béton, à ses rivières et ses océans pollués, à ses ressources forestières et minérales en voie d’épuisement, à la disparition accélérée des espèces, au progrès des déserts, au recul des glaciers, à la dislocation des banquises, à la montée des océans, à l’intensification des phénomènes atmosphériques. Songez à l’altération des climats dont il n’est pas prouvé qu’elle ne puisse échapper à tout contrôle par suite d’effets feed-back qu’il existe quelques raisons de redouter (température à la surface de la planète Vénus par suite d’un  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Effet_de_serre" effet de serre exacerbé : près de 500(C). L’activité humaine a déjà conduit et va conduire de plus en plus le climat de la planète Terre dans des zones qu’il n’a jamais explorées au cours de sa longue histoire. L’ours blanc qui dérive dans l’océan arctique sur un glaçon en train de fondre est un peu l’image de ce qui nous attend. Ceux qui ont la chance de fréquenter les mêmes lieux depuis leur petite enfance doivent se rendre compte que la végétation est devenue plus luxuriante qu’elle ne l’était il y a quelques décennies. Je ne sais s’il faut imputer ce phénomène à l’augmentation de la teneur en gaz carbonique de l’atmosphère où à la contamination par les nitrates des nappes phréatiques servant à l’arrosage ! A cause de l’inertie thermique des océans le climat est actuellement plus sec et plus froid que ne le voudrait en régime stabilisé la concentration actuelle de gaz carbonique dans l’atmosphère (principe de la  HYPERLINK "http://jehhan.ifrance.com/chauffage/p4.html" paroi froide). Ce phénomène contribue probablement à masquer actuellement la tendance au réchauffement. Tout le carbone séquestré par les processus naturels sous forme de combustibles fossiles durant quelques centaines de millions d’années va se trouver libéré pour l’essentiel en deux siècles. Combien d’heures de vol d’abeille dans une cuillérée de miel que l’on avale sans y penser et combien d’animalcules transformés en pétrole pour faire un kilomètre en voiture ? Celui qui fait poser dans son domicile un dallage en marbre ou en comblanchien s’apprête à fouler aux pieds un cimetière marin. Allons nous vers un nouveau point d’équilibre, avec un climat plus chaud et plus humide, ou bien basculons nous dans l’inconnu ? L’importance du sujet invite à détailler quelque peu les facteurs stabilisants et les facteurs déstabilisants.
Parmi les principaux facteurs stabilisants il faut citer :
L’augmentation de la radiation de chaleur de la planète due à l’augmentation de sa température
L’augmentation de la nébulosité accentuant le pouvoir réfléchissant de la planète durant la journée.
Les poussières et aérosols réfléchissants. Les fumées produites par les chaudières et moteurs thermiques en contiennent en abondance ce qui tend à compenser l’effet du gaz carbonique résultant de la combustion elle même, au point qu’on pourrait songer à proscrire les dépoussiéreurs, pots catalytiques et autres laveurs de fumées si les polluants non éliminés n’étaient aussi nuisibles pour la santé
Accroître artificiellement la quantité d’aérosols présents dans l’atmosphère
La diminution des besoins de chauffage réduisant le recours aux combustibles fossiles
L’augmentation de rendement des productions agricoles et sylvicoles dont une partie peut être utilisée à satisfaire des besoins énergétiques. L’augmentation de la température, de l’humidité et de la teneur de l’atmosphère en gaz carbonique favorise en effet ces productions. La luxuriance de la végétation et le gigantisme des animaux de l’ère secondaire sont certainement la conséquence de conditions climatiques similaires
L’amélioration des rendements énergétiques des procédés industriels et assimilés
Le recours préférentiel à l’énergie nucléaire et aux énergies renouvelables
Le stockage souterrain volontaire (et durable) du gaz carbonique produit par les installations industrielles
Le dopage des processus naturels de séquestration du carbone
Parmi les principaux facteurs déstabilisants il faut citer :
L’augmentation de la population et de l’activité économique génératrice de gaz à effet de serre tels que le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Dioxyde_de_carbone" gaz carbonique ou le méthane
L’augmentation de plus en plus rapide de la teneur de l’atmosphère en gaz à effet de serre par simple phénomène d’accumulation, la libération de ces gaz dans l’atmosphère due en particulier à l’activité humaine étant plus importante que la capacité d’absorption des milieux naturels
L’augmentation de la consommation d’énergie fossile liée aujourd’hui au conditionnement d’air, lequel est indispensable pour travailler efficacement dés que la température s’élève
Le remplacement du pétrole et du gaz qui s’épuiseront les premiers par le charbon, le gaz «t le pétrole de schiste et les sables bitumineux qui génèrent encore plus de gaz à effet de serre
La diminution des surfaces couvertes de neige ou de glace, ce qui réduit le pouvoir réfléchissant de la planète
L’augmentation de la nébulosité bloquant la réémission de chaleur vers l’espace durant la nuit.
Les poussières et aérosols absorbants
La diminution de la solubilité du gaz carbonique dans l’eau quand la température de l’eau s’élève, ce qui réduit la capacité d’absorption des océans
 HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Acidification_de_l%E2%80%99oc%C3%A9an" L’acidification de l’eau de mer par augmentation de sa teneur en gaz carbonique la rend à terme impropre à la formation des coquilles ou squelettes de certains animaux marins comme le plancton à l’origine de la chaîne alimentaire, et ouvre ainsi une perspective de désertification des océans.
La libération de gaz à effet de serre due à l’augmentation de température des océans et des continents. Il s’agit en particulier du méthane vingt cinq fois plus actif de ce point de vue que le gaz carbonique. Les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Hydrate_de_m%C3%A9thane" hydrates de méthane présents en abondance dans les fonds marins et les sols gelés pourraient libérer ce gaz suite à une élévation de température. Selon certaines sources ces hydrates pourraient contenir à eux seuls autant de carbone que tous les autres combustibles fossiles réunis. C’est ce dernier point qui semble le plus préoccupant car il peut produire le basculement redouté et transformer la terre en rôtissoire. De tels phénomènes ont déjà eu lieu dans l’histoire de la planète sans que l’excursion climatique la rende toutefois entièrement inhabitable. Se peut-il que la chance cette fois nous abandonne ? Aucun climatologue ne s’aventure à donner une réponse définitive en raison des difficultés de calcul. Rien cependant n’est plus propice que cette incertitude à favoriser les vues des prédicateurs d’Apocalypse ! Les autres croisent les doigts.
Certains calculs récents montrent qu’une extinction de masse des espèces vivantes semblable aux quatre ou cinq qui se sont déjà produites pendant les cinq cents derniers millions d’années pourrait commencer dés la fin du 22ème siècle si la concentration de l’atmosphère en gaz carbonique continue de croître au rythme actuel. La température moyenne du globe est actuellement de +15°C. Sans effet de serre, elle serait de –18°C. On conçoit facilement qu’une faible variation de cet effet puisse avoir des conséquences considérables. Le risque n’est pas de surestimer l’ampleur de cet effet et la vitesse à laquelle il s’accroît, mais de les sous-estimer. Le plus préoccupant est qu’il s’agit là d’une bombe à retardement dont le tic-tac ne pourra être arrêté dés qu’un seuil critique dont personne ne connaît au juste la valeur aura été franchi. Supposez un instant qu’une augmentation plus rapide que prévu de la concentration en gaz carbonique de l’atmosphère soit détectée indiquant qu’un tel seuil a été franchi et qu’un processus d’auto amplification s’est amorcé. Que faire devant cet emballement ? Personne n’est en mesure de répondre à la question. Les précédentes extinctions d’espèces semblent avoir été dues à la collision du globe terrestre avec un corps céleste volumineux ou à des phénomènes volcaniques extraordinairement intenses. Celle à venir aura une origine purement humaine et elle sera beaucoup plus brutale. La survie de l’espèce homo sapiens au milieu d’espèces autrement mieux équipées qu’elle en moyens d’attaque et de défense a déjà été un miracle (au sens de très improbable). Des études génétiques semblent montrer qu’à certaines périodes de son histoire elle s’est trouvée effectivement réduite à quelques individus. Les miracles n’ont lieu qu’une fois.
La concentration en gaz à effet de serre est la même en tous les points du globe puisque l’émission de ces gaz est rapidement dispersée par la circulation atmosphérique. La lutte contre son augmentation concerne donc tous les états. Pourquoi un état quelconque s’imposerait-il un bouleversement de ses habitudes et la pénalisation de son économie si le bénéfice des sacrifices qu’il consent est pour lui infime ? Jusqu’à une époque récente ce fut la position officielle des Etats-Unis dans laquelle on reconnaît leur tentation isolationniste permanente. Plutôt que de lancer des actions tous azimuts sans commune mesure avec l’ampleur des problèmes à résoudre, un état de taille moyenne comme la France ferait mieux de consacrer les quelques ressources financières dont il dispose à la recherche scientifique et technique pour mettre au point des procédés commercialisables dans un avenir qu’on souhaite le plus proche possible. Je suggèrerais volontiers que la France et l’Europe fassent la grève de l’environnement, sauf pour débarrasser de leurs polluants les sols, les eaux et les effluents gazeux car, s’agissant de problèmes locaux, les efforts profitent à ceux qui les ont consentis. Le cas des gaz à effet de serre ne peut être traité qu’au niveau de la communauté internationale. Je suggèrerais en conséquence que les normes européennes concernant les gaz à effet de serre soient alignées sur les normes les moins restrictives observées par la Chine et les Etats-Unis. Rien de significatif ne pourra être entrepris en effet tant que les grandes puissances industrielles ne se seront pas mises d’accord sur un programme commun de lutte contre l’effet de serre. Quel est le sens de nos timides efforts de réduire nos émissions de CO2 ? Pendant que nous établissons à grand frais pour tout ce que nous produisons des bilans carbone détaillés dont les résultats sont rarement pris en compte la Chine met en service chaque semaine une nouvelle centrale électrique au charbon, les pays tropicaux pratiquent la déforestation à tout va et les Etats-Unis s’apprêtent à redevenir le premier producteur mondial d’hydrocarbures grâce au pétrole et au gaz de schiste, sans trop se soucier de l’impact local et global de cette nouvelle technologie ! Mener des actions individuelles ne peut que retarder la nécessaire action collective car elle encourage les nations les plus égoïstes à se reposer sur les efforts des autres. L’instauration d’une taxe carbone par un seul pays ou par un petit groupe de pays ne peut avoir comme résultat que la délocalisation des industries frappées par cette taxe. Beaucoup de nations, en particulier la France durement touchée par le chômage, n’ont pas les moyens de leurs ambitions écologiques. Une réduction volontariste limitée à une zone géographique entraîne un affaiblissement de l’industrie de cette zone, une diminution de sa production. Ce qu’elle n’a pas produit est produit ailleurs, dans une zone qui ignore cette contrainte. Le total des émissions n’est pas réduit, les sources en sont seulement déplacées. Il peut même être augmenté si la nouvelle production se fait dans des conditions plus défavorables que l’ancienne, ce qui est bien souvent le cas. Instaurer une taxe carbone ne sert qu’à se donner bonne conscience et surtout à satisfaire le mouvement écologiste pour des raisons électorales. Flairant la bonne affaire, des malins se sont emparés du mouvement écologiste dans l’espoir de se faire un nom. Instaurer une taxe carbone limitée à un seul pays est stupide. La limiter à un seul pays et au seul transport routier est doublement stupide. La limiter à un seul pays et à une partie seulement des transports routiers est triplement stupide. Il ne restait plus qu’à rendre sa mise en œuvre techniquement cauchemardesque et financièrement scandaleuse. C’est ce que l’Etat français, majorité et oppositions confondues, a brillamment réussi ! On en arrive à souhaiter qu’un événement climatique extrême vienne rappeler à tous, et en particulier aux nations les plus puissantes, la nécessité d’une action collective efficace avant que le point de non-retour n’ait été franchi. Il est absolument nécessaire que chacun apprenne à peser d’un pied léger sur cette planète. Aux pays émergents qui refusent de participer à cet effort en prétextant, ce qui n’est pas faux, qu’ils ne sont pas responsables de la situation actuelle, il faudrait je crois tenir ce langage :
sans les efforts passés des pays développés les pays émergents en seraient encore au Moyen-Âge
ce sont les pays émergents qui seront les plus affectés par les désordres du climat et ce sont eux qui auront le moins de moyens pour y faire face
il semble équitable que la tonne de CO2 libérée dans l’atmosphère ait le même prix pour tout le monde. S’il est vrai que les pays développés du Nord sont plus riches, les pays du Sud ont, à niveau de vie égal, des productions de CO2 moindres, davantage d’énergies renouvelables et une meilleure adéquation temporelle entre leurs besoins énergétiques et l’énergie solaire disponible.
Durant l’âge préindustriel la teneur de l’atmosphère en CO2 était de 280 parties par million. Elle est actuellement de 400. Le seuil à ne pas dépasser sur lequel s’accordent les scientifiques est de 450. L’élévation de température moyenne de la surface du globe par rapport à l’âge préindustriel est aujourd’hui de plus de 1°C. La valeur critique est de 2°C. Elle pourrait être atteinte d’ici une vingtaine d’années, trente au plus. Il n(y a plus de temps à perdre. L’écologie dont la préoccupation est la survie des espèces vivantes doit prendre le relais des religions en tant que facteur structurant des sociétés. A la différence des religions son champ d’action n’est pas limité à une société particulière. Il s’étend à tous les pays et à toutes les sociétés et rend nécessaire une autorité internationale capable de sanctionner tous ceux qui se refusent à accomplir les efforts nécessaires. Utopie, vous avez dit utopie ? A la fin des banquets les Anciens faisaient apporter à leur table des crânes humains pour rappeler aux convives leur mortelle fragilité. Il conviendrait de nos jours d’apporter à la fin des repas, avec le café et l’addition, le diagramme d’évolution de la teneur de l’atmosphère terrestre en gaz carbonique !
Si l’influence humaine dans la genèse du réchauffement climatique ne fait guère de doute, d’autres facteurs sont susceptibles d’intervenir. Des variations climatiques extrêmement importantes se sont produites dans le passé avant même l’apparition des premiers hominidés ou lorsque l’espèce humaine était encore trop peu nombreuse et dotée de trop peu de moyens pour exercer une influence notable. L’évolution naturelle du climat, c’est à dire hors influence anthropique, semble encore trop mal connue pour qu’il soit possible de conclure de façon définitive. C’est cette incertitude fondamentale que les climato-sceptiques mettent à profit pour décourager toutes les actions visant à limiter l’effet de serre. Faut-il les suivre sur le chemin populaire mais dangereux de la facilité ? Verrons-nous sans regrets notre planète perdre son étincelante parure de neige et de glace ?

Crise énergétique

La crise énergétique est la grande question des prochaines décennies. Songez à l’incurie qui conduirait à négliger la prochaine disparition du pétrole et des autres combustibles fossiles quand il conviendrait de profiter du peu qui reste pour se préparer à la pénurie. Les techniques de production d’énergie évoluent très lentement. Les plus récentes sont d’alertes quinquagénaires. Il ne faut donc pas s’attendre en ce qui les concerne à des progrès rapides et spectaculaires. Mettre le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Fusion_nucl%C3%A9aire" soleil en bouteille, ce n’est pas demain la veille ! L’âge des énergies dites « nouvelles » se compte en millénaires, pour les plus récentes. Il n’y a pas d’alternative aux énergies actuellement connues dans un avenir prévisible. L’énergie solaire, sauf à la stocker pendant des mois, ne peut guère contribuer au chauffage nécessaire sous nos climats tempérés pas plus qu’à la production d’énergie électrique car elle est la moins abondante au moment ou elle serait la plus nécessaire alors qu’il y a une certaine concomitance dans les pays du Sud entre l’énergie solaire disponible et les besoins de rafraîchissement et de force motrice. Sous un climat tempéré comme le nôtre les pointes de consommation électrique se produisent en hiver, le matin et le soir (pas de soleil), quand le temps est particulièrement froid parce qu’anticyclonique (pas de vent). Les éoliennes et les panneaux solaires installés ne contribuent aucunement à la couverture de ces pointes. Installer 1000 kW sous forme d’éoliennes ou de panneaux solaires ne dispense donc pas d’installer la même puissance sous forme conventionnelle pour tenir compte des périodes sans vent ou sans soleil. Installer 1000 kW sous forme d’éoliennes permet de bénéficier en moyenne de 200 kW disponibles de façon non corrélée avec les besoins du réseau. S’il s’agit d’énergie solaire la puissance moyenne disponible tombe à 100 kW. On introduit sciemment une distorsion trompeuse quand on compare le coût du kW installé d’une centrale solaire ou éolienne avec celui d’une centrale conventionnelle. Les installations éoliennes ou solaires ont donc une valeur économique très faible, uniquement liée au coût du combustible économisé dont il faut déduire les frais de construction, de conduite et d’entretien des nouvelles installations. Si l’énergie qu’elles produisent se substitue à de l’énergie électrique d’origine nucléaire, l’économie est quasiment nulle, le combustible nucléaire étant très bon marché. L’énergie renouvelable est actuellement considérée comme prioritaire par les gestionnaires des réseaux électriques. Ceci réduit d’autant la part des autres productions, ce qui peut compromettre leur rentabilité. La valeur économique réelle de l’énergie électrique « verte » est donc le plus souvent très inférieure au prix auquel, sous la pression des écologistes, le réseau électrique général est tenu de l’acheter. La différence, souvent époustouflante, est payée par le consommateur, le contribuable ou l’actionnaire. Seul cet effet d’aubaine peut inciter les industriels des pays tempérés à investir dans l’éolien ou le solaire. Ils sont sans illusions sur la pertinence de ce qu’ils construisent mais se disent que si ce n’est pas eux qui en profitent, d’autres le feront. Un homme politique quant à lui est prêt à tous les sacrifices (des autres) pour attacher son nom à une réalisation. Ce ne sont pas les besoins du réseau électrique de distribution qui dictent la production des éoliennes et des panneaux solaires, mais Eole et Phébus. Il y a là un renversement des perspectives. Ce ne sont plus les besoins des consommateurs qui gouvernent la production mais les possibilités des producteurs qui gouvernent les appels de puissance des consommateurs. Un tel changement ne va pas sans imposer des contraintes très lourdes aux consommateurs. Certains écologistes prétendent qu’il est possible de sortir de ces difficultés grâce à des réseaux de distribution d’énergie électrique dits « intelligents », mais ils n’esquissent aucune solution technique crédible à l’appui de cette assertion allant au-delà de banals signaux tarifaires, tant pour les consommateurs que pour les producteurs et de compteurs intégrant le produit prix du kWh multiplié par les kWh produits ou consommés. Dans quelle mesure un gestionnaire d’un réseau peut-il, de façon discrétionnaire et imprévisible modifier le prix de ce qu’il vend ou achète ? Pour sortir de cette difficulté certains écologistes ont imaginé que les prix pourraient être négociés directement entre consommateurs et producteurs. Il faudrait pour cela créer une bourse d’échange où, à chaque instant, le prix serait négocié entre des millions de clients et peut-être un jour des millions de producteurs ; Le résultat de la négociation devrai être pris instantanément pris en compte pour piloter les besoins des consommateurs et la puissance fournie par les producteurs alors que les uns et les autres n’ont aucune souplesse. Les consommateurs ont des appareils à alimentés et les producteurs souhaitent fournir toute l’énergie dont ils disposent. Les écologistes se félicitent du fait que ces installations occuperont beaucoup de monde, ce qu’on peut croire sans peine. Mais le fait même qu’il faille beaucoup de monde pour les construire et les exploiter montre que cette solution sera forcément chère. Elle fera par ailleurs appel à beaucoup de matériels étrangers. D’autres écologistes avancent qu’il est possible de stocker l’énergie électrique quand sa production est excédentaire et de la restituer au réseau quand la production est insuffisante. Vous ne trouverez nulle part d’indication fiable sur le coût et le rendement des différents procédés de stockage envisageables. Le concept des réseaux intelligents n’est pas une brillante idée technique, c’est une brillante idée marketing qui a été proposée pour fournir une pseudo solution au problème de l’intermittence des énergies renouvelables. Il s’agit d’égarer l’opinion publique pendant un temps suffisant pour que les énergies éoliennes et solaires se développent de façon importante. L’opinion publique sera ensuite mise devant le fait accompli des prix exorbitants et des coupures de courant. Les écologistes ont parfaitement assimilé le fait que pour arriver à ses fins il faut raconter aux gens de belles histoires. Même dans un cas de figure particulièrement favorable qui est celui de l’Iles de la Réunion, dans l’Océan Indien, la part des énergies solaires et éoliennes est restée très faible et ne fait l’objet d’aucune publicité. Le réseau électrique de cette île n’est pas suffisamment puissant pour masquer les insuffisances des énergies solaires et éoliennes. L’accident de Fukushima qui a provoqué la mise à l’arrêt volontaire des centrales nucléaires japonaises a amputé de 30% la puissance électrique disponible pour les consommateurs japonais, ce qui les oblige à des économies très pénibles. Ils doivent se passer par exemple de climatisation en été alors que le climat local est chaud et humide. Leurs villes qui, la nuit, étaient éclairées a giorno sont comme assujetties aujourd’hui à un couvre-feu. Voilà ce qui attend, en pire, les consommateurs français si nous entreprenons d’arrêter nos centrales nucléaires car nous en sommes encore plus dépendants que les japonais. Il semble aujourd’hui acquis que les japonais vont redémarre leurs centrales nucléaires. Certains écologistes proposent que des installations de production et stockage d’énergie électrique soient mis en œuvre massivement au niveau individuel. Imaginez-vous un père de famille revenant fourbu du travail dans son petit pavillon de banlieue et obligé de dépanner une installation complexe avant de mettre les pieds sous la table, pour économiser quelques malheureux kWh ? L’espoir inavoué des écologistes, c’est que, par amour de l’écologie, les gens renonceront spontanément à leurs activités favorites dés que le soleil se couchera ou que le vent faiblira. Cependant, on n’arrêtera pas un TGV entre deux gares et on n’attendra pas dix heurs du soir en hiver pour allumer la lumière ou la télévision. Au temps où EDF était maîtresse de son destin, elle offrait aux auto producteurs susceptibles de fournir de l’énergie de façon aléatoire comme c’est le cas le l’énergie solaire et de l’énergie éolienne une rémunération quasi symbolique. Avez-vous déjà lu une étude sérieuse concernant la rentabilité des énergies d’origine éolienne ou solaire évaluées dans un cadre précis et concret ? Non, et pour cause. Ne parlons pas de l’impact paysager de forêts d’éoliennes et de pylônes. C’est dans les pays où l’énergie éolienne a été la plus développée que l’électricité est la plus chère et c’est là où l’énergie nucléaire a prévalu qu’elle l’est le moins. Un réseau électrique supraconducteur capable de mutualiser à l’échelle de la planète les énergies solaires et éoliennes paraît une possibilité encore lointaine, et dangereusement fragile. Sans un tel réseau, il faudra se contenter sous nos climats, si les énergies renouvelables devenaient prépondérantes, de travailler les jours de grand soleil ou de grand vent, d’être exposés à des coupures d’électricité aux heures de pointe et de battre la semelle en hiver ! Ces remarques de simple bon sens ne sont jamais faites par les écologistes et on comprend bien pourquoi. Elles ne sont pas faites non plus par leurs adversaires qui attendent sans doute que les écologistes se cassent la figure. Subventionner les énergies renouvelables, hors hydraulique et biomasse, en vue de produire de l’électricité au delà de quelques opérations d’évaluation apparaît comme une erreur dans la mesure où c’est faire croire au public que ces énergies sont prêtes à prendre le relais des énergies fossiles alors que les seules solutions économiquement et écologiquement viables sont le recours à l’énergie nucléaire et la sobriété. Comparées aux pollutions chimiques, les pollutions radioactives souvent citées comme un obstacle majeur sont faciles à détecter. De plus elles s’affaiblissent avec le temps. Il y a quelque chose comme 10.000 accidents domestiques mortels chaque année en France alors que, depuis cinquante ans qu’elle existe, l’énergie nucléaire n’y a fait pratiquement aucune victime. Votre appartement est infiniment plus dangereux qu’une centrale nucléaire ! HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bpa.doc"  L’accident de la centrale nucléaire de Fukushima représente le pire accident qui se puisse imaginer. Cependant, la surface rendue temporairement inhabitable par un accident de cette nature ne dépasse pas 1.000 ou 1.500 km2. C’est beaucoup en valeur absolue, mais peu à l’échelle d’une nation et il faut ajouter qu’après un tel accident qui suspend dans la zone affectée toute présence et toute activité humaines la végétation et la vie sauvage reviennent en force comme on a pu le constater à  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Catastrophe_de_Tchernobyl" Tchernobyl. En installant les centrales en bord de mer, on divise cette surface par deux, d’où la tentation d’aller encore plus loin et de les installer sur des presqu’iles ou des îlots. Une autre solution est d’installer des centrales nucléaires intrinsèquement sûres comme l’est, paraît-il, l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9acteur_pressuris%C3%A9_europ%C3%A9en" \l "Diff.C3.A9rences_en_termes_de_s.C3.A9curit.C3.A9" EPR. Le risque zéro n’existe pas, nulle part. On prend en naissant un risque de mourir égal à 100%. Ceux qui se sont rendus à Hiroshima peu après 1945 ont sans doute acquis la conviction qu’il fallait absolument interdire la production d’armes atomiques. C’est pourtant à elles que nous sommes probablement redevables de soixante dix années de paix entre les grandes puissances et nous espérons que ceci va continuer. A l’heure où l’énergie est de plus en plus rare et de plus en plus chère, on n’a pas le droit de demander la « sortie du nucléaire » sans dire précisément par quoi on le remplace et à quel prix. Pour un pays comme la France, conserver l’énergie nucléaire c’est s’exposer à faire face en cas d’accident majeur à des dépenses très importantes mais situées dans un avenir tout à fait hypothétique; l’abandonner c’est s’exposer à des dépenses très importantes, certaines et immédiates. Diviser par deux le nombre de centrales diminue le danger mais ne le supprime pas. Ceux qui, dans un esprit de compromis proposent simplement de diminuer la part du nucléaire le font pour des raisons tactiques bien plus que pour des raisons techniques ou économiques. Ils prennent ainsi le risque de se faire contrer sèchement par les partisans du statu quo. Une centrale nucléaire présente en effet des avantages et des inconvénients par rapport à ses concurrentes les mieux placées. Ou bien les avantages l’emportent sur les inconvénients et il faut en installer le plus possible dans la limite des besoins permanents car le coût d’une centrale nucléaire diminue avec le nombre d’unités similaires construites, ce qui renforce l’intérêt d’en construire un nombre important. Ou bien les inconvénients l’emportent sur les avantages et il faut stopper immédiatement la construction d’installations nucléaires nouvelles. Bien que ce raisonnement puisse paraître un peu schématique je suis persuadé qu’une étude détaillée en confirmerait les grandes lignes. Ce qui semble anormal, c’est qu’une telle étude économique ne semble pas avoir été entreprise récemment. Si EDF avait les coudées franches comme par le passé elle n’aurait laissé à personne le soin de la mener à bien. Maintenant que cette société est saucissonnée, menacée de privatisation et utilisée à des fins politiques plus personne ne fait ce genre de calcul qui, bien que très complexe, n’en demeure pas moins indispensable.
La France n’a pas les moyens de se priver d’un de ses rares points forts. Il ne faut pas compter sur nos voisins européens pour combler nos déficits de production du fait qu’ils sont soumis aux mêmes contraintes que nous et que certains d’entre eux envisagent même d’arrêter progressivement leurs centrales nucléaires. Les allemands veulent faire croire qu’ils vont remplacer l’énergie nucléaire par des énergies renouvelables, mais ceci ne trompera que ceux qui veulent bien être trompés. La réalité est que les allemands envisagent le remplacer leurs centrales nucléaires par des centrales dont ils maîtrisent parfaitement la technique telles que les centrales au charbon (ce qui devrait faire se dresser les cheveux sur la tête de tous les écologistes) ou les centrales électriques à  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cycle_combin%C3%A9" cycle combiné, cycle associant une turbine à gaz alimentée en gaz naturel, une chaudière de récupération et une turbine à vapeur. Ce dernier type d’installation ne manque pas d’atouts (excellent rendement, rapidité de construction, souplesse d’exploitation, coût relativement faible, moitié moins de gaz carbonique émis qu’une centrale charbon de même puissance électrique). Même si cette solution présente des avantages indéniables elle ne peut être que transitoire car elle ne résout qu’imparfaitement le problème des émissions de CO2 et pas du tout celui de la pérennité et du prix de la ressource en combustible fossile. Simplement, le mistigri est repassé aux générations suivantes.
On comprend bien la stratégie allemande. Il s’agit dans un premier temps d’investir dans des installations de production d’électricité à partir d’énergies renouvelables, avant tout l’éolien, en surpayant le courant électrique produit. Puis, quand ces installations seront amorties, de payer le courant qu’elles produisent au prix de l’énergie fossile économisée, ce qui devrait être suffisant pour couvrir leurs frais de conduite et d’entretien, pas forcément de renouvellement. Evoquons pour mémoire l’éventualité d’un Fukushima des éoliennes qui serait provoqué par une tempête exceptionnelle, celle-là même que les climatologues nous promettent pour les années à venir. Le recours massif à l’éolien est une solution que seuls peuvent s’offrir les pays très prospères. A moins d’accepter des restrictions de fourniture, voire des coupures de courant il faut en effet installer en production deux fois la puissance de pointe du réseau, une fois en renouvelable, une autre fois en conventionnel. Même avec ce schéma le recours aux énergies fossiles est loin d’être négligeable. Il ne peut être retenu dans un pays où l’énergie nucléaire est prépondérante. D’une part parce que le combustible économisé est trop bon marché et d’autre part parce que l’utilisation d’énergie renouvelable n’apporte rien dans ce cas en ce qui concerne les émissions de CO2 puisque les centrales nucléaires n’en émettent pas. C’est ce qui rend les écologistes enragés contre l’énergie nucléaire car, par rapport à cette énergie, leurs chères éoliennes et leurs chers panneaux solaires n’apportent rigoureusement rien. Les allemands tablent sur la disponibilité du gaz russe mais cette disponibilité ne sera pas éternelle. Son prix élevé menace déjà la stratégie allemande. Contraintes par les énergies renouvelables prioritaires à ne fonctionner que peu d’heures par an les centrales à cycle combiné sont menacées de fermeture. Ne resteraient alors que les centrales charbon chères, peu souples et produisant du CO2 en abondance. Quand on fait aux allemands ce genre de remarque ils en sont réduits à dire que l’écologie est leur religion ! Les américains misent tout sur le gaz et le pétrole de schiste, une méthode dont l’innocuité est si peu évidente qu’il a été interdit en France d’y recourir. Maintenant qu’ils pensent retrouver par ce biais leur autonomie énergétique les décideurs américains oublient les conséquences de ce choix sur le réchauffement climatique auquel ils avaient jusqu’alors fait mine de s’intéresser. Les français qui ont une base nucléaire installée très importante n’ont rien à attendre de la construction de centrales éoliennes ou solaires puisque celles-ci ne leur éviteront pas l’installation de moyens de production insensibles aux aléas climatiques à mesure que les moyens existants seront frappés d’obsolescence et puisque qu’elles ne réduiront pas sensiblement les émissions de CO2. Elles entraîneront par contre des investissements et des frais d’exploitation très importants se traduisant pour les usagers par un relèvement sensible du coût de l’énergie électrique. I’impact de ces fantaisies écologistes est déjà visible sur les factures actuelles. Il est tout de même paradoxal qu’un pays lourdement endetté envisage de se lancer dans des investissements très lourds et non rentables. Sur le chapitre des risques il ne faut pas oublier ceux qui pèsent sur le gaz naturel dont le prix peut s’envoler et la disponibilité être mise en cause par des évènements économiques, politiques ou sociaux. Ceux qui envisagent d’arrêter leurs centrales nucléaires demain s’exposent à les redémarrer après-demain, ce qui ne sera ni facile ni gratuit après une longue période de mise en sommeil. Pour la plupart des politiciens l’essentiel il est vrai, est de tenir jusqu’à la prochaine élection.
Un autre problème souvent cité est celui de l’élimination des déchets nucléaires. S’ils sont enfouis à mille mètres de profondeur dans un terrain stable et imperméable, ils seront devenus depuis longtemps inactifs s’ils ils ressortent un jour au bout d’un temps à l’échelle géologique. Le danger principal que présentent les installations nucléaires est celui d’une guerre entre puissances majeures qui pourrait faire de chaque réacteur bombardé un nouveau Tchernobyl. L’atome militaire n’est pas compatible avec l’atome civil, ni avec quoi que ce soit d’autre d’ailleurs. Je pense en particulier à son incompatibilité avec les mégas cités que l’on s’obstine à créer ou étendre. La pollution radio active est un phénomène très grave mais local, temporaire et de faible probabilité. La pollution par émission de gaz à effet de serre est un phénomène global, persistant et certain. Il est d’autant plus grave qu’il s’avance sournoisement et peut s’amplifier brutalement de manière irrémédiable. Essayer de convaincre un écologiste de la non dangerosité relative de l’atome civil, c’est comme essayer de convaincre un catholique pratiquant que le corps du christ n’est pas présent dans l’hostie.
Pour satisfaire autant d’exigences contradictoires, il faut explorer activement toutes les voies nouvelles qui s’offrent à nous concernant la production d’énergie et déployer en leur faveur les méthodes qu’on réserve d’ordinaire en temps de guerre aux programmes de développement des nouvelles armes. On peut même imaginer de travailler 24 heures sur 24 sur ces programmes en répartissant sur plusieurs fuseaux horaires des équipes de recherche et d’ingénierie qui échangeraient leurs fichiers par Internet, et en travaillant également 24 heures sur 24 dans les usines et sur les chantiers liés à ces programmes. Il faut inciter les meilleurs esprits à s’intéresser à ces questions qui peuvent parfois leur apparaître comme banales. La recherche américaine dispose dans le domaine militaire de crédits vingt fois plus importants que ceux qu’elle consacre à l’énergie ce qui apparaîtra certainement dans l’avenir comme la marque d’une incompréhension totale de la hiérarchie des dangers. Un rééquilibrage serait particulièrement bienvenu. Il faut toutefois se garder de l’illusion selon laquelle il suffit de chercher pour trouver. La vitesse commerciale des avions a peu évolué dans les cinquante dernières années et rien n’indique qu’elle le fera dans les cinquante prochaines. La vitesse des automobiles est étroitement limitée aujourd’hui par une réglementation qui bride d’ailleurs la liberté d’automobilistes jugés irresponsables. Elle le sera bientôt par l’obligation d’économiser les carburants. Depuis le premier choc pétrolier il y a prés de quarante ans, les recherches concernant les énergies renouvelables se sont intensifiées sans aboutir à des solutions véritables, c'est-à-dire des solutions économiquement viables sans le soutien permanent des pouvoirs publics. Il est tout à fait possible qu’il n’existe jamais de moyens de produire et de stocker l’énergie fondamentalement plus efficaces que ceux que nous connaissons actuellement ; mais l’inverse est également possible, raison pour laquelle il faut continuer à chercher. C’est dans le domaine du vivant que semblent résider les meilleures chances de percée. Au vingt deuxième siècle, le vingtième risque d’apparaître comme l’Age d’Or à jamais révolu où l’énergie coulait à flots et le vingt et unième comme celui où des irresponsables ont continué à saloper la planète en dépit des avertissements les plus explicites. Il n’est pas besoin d’insister sur la nécessité absolue de disposer d’énergie pour mettre en œuvre les différentes technologies qui nous sont devenues indispensables. La technologie peut presque tout si elle dispose d’énergie. Sans énergie elle est pratiquement impuissante. Depuis près de deux cents ans qu’elle existe la civilisation industrielle repose sur l’utilisation des combustibles fossiles. Contrairement aux autres matières premières les combustibles ne sont pas recyclables. Ce sont des cadeaux de la nature à usage unique. La terre toute entière risque donc de connaître le sort de l’île de Pâques dont la démographie et la civilisation se sont effondrées une fois que ses habitants eurent dilapidé toutes leurs ressources dans la construction de statues géantes représentant leurs dieux. Pendant ce temps-là les habitants des îles d’Océanie qui se contentaient de divinités plus modestes coulaient des jours heureux. Le défi lancé aux sociétés industrielles est sans précédent. Il n’est que de voir la panique qui s’en empare lorsque, pour une raison ou pour une autre, les pompes à essence sont à sec ou l’alimentation électrique interrompue.

On avance, on avance, on avance
C’est une évidence
On a pas assez d’essence
Pour faire la route dans l’autre sens
Alors on avance
(Alain Souchon)

Dans cette perspective de disparition des énergies fossiles disponibles la conception du parc mondial de transport doit être entièrement revue, la production de l’électricité entièrement reconsidérée, le parc immobilier des pays froids ou tempérés entièrement réhabilité. Un exercice salutaire consisterait à examiner comment notre société pourrait survivre dans l’hypothèse où sa technologie en resterait là où elle en est et n’aurait plus à sa disposition que des énergies renouvelables ou même pseudo renouvelables comme le nucléaire classique. Il serait très vraisemblablement constaté qu’un changement aussi radical, pour s’effectuer avec un minimum de casse, nécessite une longue préparation. Ignorer cette réalité, c’est prendre le risque d’un conflit mondial à échéance d’une ou deux décennies. Comment se fait-il qu’aucune étude sérieuse n’ait été publiée sur le scénario « zéro combustibles fossiles » et qu’aucun cinéaste n’ait été tenté de le mettre en images ? Il serait pourtant intéressant d’étudier ce cas limite qui représente l’éventualité la plus pessimiste, mais aussi hélas la plus probable à long terme. Bien entendu, la solution qui se dégagerait d’une telle étude ne serait pas la seule possible, ni sans doute la meilleure, ni certainement celle qui se réalisera. Il semble néanmoins plus judicieux de chercher à améliorer progressivement une solution imparfaite que d’avancer dans l’inconnu sans fil conducteur. C’est sur la base de telles études que les partis politiques devraient élaborer leurs programmes : « voici où nous vous proposons d’aller, voilà le chemin que nous vous proposons d’emprunter». Lorsque toutes les assiettes ou presque sont remplies, il paraît possible d’intéresser les citoyens à des objectifs à moyen et long terme. C’est l’honneur de la politique de se préoccuper en priorité du sort des générations futures.
Le jour où les combustibles fossiles seront épuisés ou le jour où les nuisances qu’ils occasionnent seront devenues insupportables, il faudra envisager l’utilisation de véhicules électriques. Il ne faudra pas oublier dans ce cas que, si l’énergie électrique nécessaire à leur alimentation est produite à partir de combustibles fossiles, on ne résout pas le problème du réchauffement climatique, on ne fait qu’en déplacer l’origine géographique. Ces véhicules devront être légers et aérodynamiques pour limiter la consommation d’énergie liée à la propulsion et bien isolés pour limiter la consommation d’énergie liée au confort thermique des passagers, Notre mode de vie et nos infrastructures devront être adaptés à leurs caractéristiques. On peut imaginer par exemple d’équiper les autoroutes et les liaisons principales de caténaires analogues à ceux des anciens trolleybus permettant aux véhicules électriques d’y rouler à bonne allure tout en rechargeant leurs batteries, ce qu’elles pourraient faire également à leurs emplacements habituels de parking. On peut imaginer aussi de construire des véhicules électriques munis de remorques comportant un moteur thermique, une génératrice, un réservoir de carburant et un espace suffisant pour les bagages. Sans leurs remorques ces nouveaux véhicules seraient des véhicules électriques quasi standards utilisés pour les petits trajets quotidiens et rechargeant leurs batteries sur le secteur en heures creuses. Avec leurs remorques ils deviendraient véhicules hybrides pour les longs trajets. On peut encore imaginer pour améliorer les performances aérodynamiques et thermiques de minimiser la plupart des surfaces vitrées et de les remplacer par des cameras et des écrans ou des lunettes donnant une vision 3D plus précise et plus dégagée, spécialement la nuit. Il se peut également qu’au bout du compte on trouve plus expédient de fabriquer des carburants de synthèse à partir d’énergie non carbonée, de gaz carbonique et d’eau ou de l’hydrogène sous forte pression produit par électrolyse de l’eau. Stocker ainsi sous forme de combustibles aisément utilisables l’énergie excédentaire produite par les éoliennes, les panneaux solaires et les centrales nucléaires est un schéma plausible. Rendre les transports urbains et périurbains gratuits est une option intéressante qui aurait de très nombreuses retombées positives. Les automobilistes délivrés des embouteillages paieraient avec bonheur un surcroît d’impôts et économiseraient assez de carburant pour faire rouler tous les autobus. Relancer l’usage de la bicyclette résout plusieurs problèmes : la pénurie de pétrole, le coût des transports motorisés, l’encombrement des voies publiques, les pertes de temps dans les embouteillages, les accidents de la circulation et le taux croissant des maladies cardio-vasculaires. L’exercice matinal « esbaudit les esprits animaux » comme le disait le bon docteur  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Rabelais" Alcofribas Nasier et rend donc plus intelligent pour toute la journée ! Il faut pour cela multiplier les pistes cyclables à l’instar de ce qui se fait chez nos voisins de l’est et du nord. Un économiste dissident a calculé que lorsqu’on prenait en compte le temps de travail nécessaire pour payer une voiture, son carburant, les infrastructures et tous les coûts indirects qui lui sont liés, la bicyclette était plus rapide que le voiture. En substituant la voiture à la bicyclette il est possible que les chinois perdent une bonne partie de leur compétitivité !
Les logements neufs et anciens devront être isolés de manière à se contenter, pendant une bonne partie de l’année, des apports solaires et de ceux dus à l’occupation et, pendant les jours froids,  d’un chauffage d’appoint de faible puissance. La chaleur d’appoint pourra provenir alors de la combustion de biomasse ou, à l’aide de pompes à chaleur, de l’énergie contenue dans l’air extérieur quand sa température est suffisante ou, quand celle-ci est trop basse, d’énergie emmagasinée pendant l’été dans le sol. La complexité de ces procédés incite à regrouper les habitations en îlots desservis par une seule installation, ce qui aurait l’avantage complémentaire d’éviter le « mitage » des paysages périt urbains. Pourraient être accolés à cette installation de chauffage d’éventuelles installations de production et de stockage d’énergie électrique. Par l’isolation on peut ramener de 20 à 10 kW thermiques environ la puissance maximum nécessaire au chauffage d’une maison de dimensions moyennes. Avec une pompe à chaleur on ramène cette puissance à 3 kW électriques, ce qui devient gérable. L’énergie électrique utilisée par un tel système ne doit pas provenir de combustibles fossiles, faute de quoi on remplace des procédés simples par un procédé compliqué et coûteux sans diminution des émissions de gaz carbonique. Compte tenu du caractère indispensable et continu des besoins de chauffage cette énergie ne pourrait être que d’origine nucléaire dans l’état actuel des techniques. Néanmoins, les pointes de chauffage coïncidant sous nos climats avec les pointes de consommation électrique l’énergie utilisée proviendra de centrales de pointe, lesquelles utilisent des combustibles fossiles. Il n’y a donc guère aujourd’hui à disposition, pour limiter les émissions de gaz carbonique liée au chauffage, que l’amélioration de l’isolation des bâtiments et l’utilisation de biomasse comme combustible. Si le temps ou les moyens manquent pour mener à bien les travaux d’isolation nécessaires dans l’habitat existant, il faudra se résigner à porter en hiver à l’intérieur de ces bâtiments, comme aux temps joyeux de l’occupation, gants, bonnets et gros lainages, avec le regret de ne plus pouvoir deviner aussi aisément, de celles que nous côtoyons, les formes admirables ! Les efforts de désescalade énergétique faits actuellement dans ce sens sont très insuffisants, mais l’appétit vient en mangeant, et les premiers succès encouragent ! Il faudra vraisemblablement proscrire les résidences secondaires car elles occasionnent des dépenses énergétiques très importantes tant en chauffage qu’en transport. Il en sera de même pour le chauffage électrique des logements sans utilisation de pompe à chaleur. Il ne semble pas qu’il soit nécessaire pour les activités agricoles de revenir à l’utilisation d’animaux de trait car un moteur thermique utilisant un biocarburant paraît plus efficace. Aujourd’hui déjà certains paysans remplissent les réservoirs de leurs engins avec une huile qu’ils ont fabriquée avec les produits de leur récolte. Il est même arrivé qu’ils se chauffent en brûlant du blé, ce qui a dû faire se retourner dans leur tombe bon nombre de leurs ancêtres pour lesquels il était sacrilège de jeter ne fut-ce qu’un morceau de pain ! Mais, de grâce, commençons par utiliser la biomasse là où elle pose peu ou pas de problèmes et où sa valeur énergétique est la mieux utilisée, c'est-à-dire pour l’alimentation des chaudières industrielles et domestiques. Réservons les hydrocarbures liquides d’origine fossile à l’alimentation des équipements mobiles et substituons leur d’autres sources pour l’alimentation des équipements fixes. Les biocarburants, au-delà des quantités nécessaires à l’amélioration des carburants traditionnels, peuvent attendre qu’il n’y ait plus que les transports à utiliser des produits pétroliers. Les développer actuellement, c’est jeter par les fenêtres l’argent qu’on emprunte sans autorisation à nos petits-enfants. C’est céder aux injonctions d’un lobby agricole qui utilise l’écologie comme paravent. C’est, par contrecoup, renchérir artificiellement les produits alimentaires au risque d’affamer les populations les plus fragiles et de provoquer la déforestation massive des pays tropicaux, ce qui va à l’inverse du but recherché. Quand on parle de la biomasse comme source d’énergie il faut fermement exclure celle qui est utilisable pour l’alimentation animale ou humaine. Les transports aériens et maritimes et la pêche en haute mer où les carburants liquides sont indispensables risquent de connaître des jours de plus en plus difficiles. Pourquoi dans ces conditions construire de nouveaux aéroports ? Multiplions plutôt les lignes de trains à grande vitesse. Peut-être faudra-t-il construire des cargos à voiles ou des cargos à propulsion nucléaire de très forte capacité. Habituez-vous à cette situation en choisissant de préférence, à prix et qualités équivalents, un produit fabriqué près de chez vous. Les populations devront s’accoutumer à une diète essentiellement végétarienne si les cultures à vocation énergétique devaient prendre la place de l’élevage. A moins que, d’ici-là, on ait trouvé le moyen de fabriquer des protéines animales sans passer par les animaux. Si on évalue à l’équivalent d’un demi litre d’hydrocarbures par jour et par habitant l’énergie nécessaire à l’alimentation d’un être humain et à cinq litres l’énergie nécessaire pour satisfaire ses autres besoins, il est clair que la plus grande partie des surfaces agricoles devrait être consacrée à des cultures énergétiques si nous voulions conserver le même mode de vie et des équipements techniques comparables. Une telle disproportion paraît peu réaliste. Il nous faudrait plusieurs planètes ! Les écologistes ont beau jeu de faire remarquer que l’énergie nucléaire ne représente qu’une faible fraction de la production énergétique totale, même dans un pays nucléarisé comme la France. Ce faisant, ils additionnent des choux et des carottes. Un kWh électrique n’est pas la même chose qu’un kWh de combustible fossile. Même si elles comptent le même nombre d’hommes on ne peut escompter le même service d’une troupe disciplinée (l’énergie électrique) et d’une foule désordonnée (l’énergie thermique). Compte tenu du rendement des équipements qui permettent la conversion, il faut environ 2,5 kWh de combustible pour fabriquer un kWh électrique. Le chauffage électrique par simple effet Joule est donc une aberration, particulièrement quand la source primaire d’énergie est un combustible fossile. Par rapport aux autres pays développés la France a cette particularité que la part du nucléaire dans la production d’électricité et celle de l’électricité dans le chauffage domestique sont plus élevées que partout ailleurs. Il serait probablement plus rentable, en dépit des difficultés de réalisation, de remplace les équipements électriques de chauffage par des équipements alternatifs fournissant le même service que de construire de nouvelles centrales produisant la puissance électrique susceptible d’être ainsi économisée. Les pointes de consommation d’électricité sont en effet assez largement dues au chauffage électrique, ce qui veut dire que le chauffage électrique sollicite les centrales électriques de pointe qui sont économiquement les moins performantes, et elles utilisent des combustibles fossiles. Pour économiser 1 kWh de combustible fossile brûlé dans une chaudière individuelle, on va donc dépenser 2,5 kWh de combustible fossile brûlé dans une centrale de production de pointe. Si les kWh nécessaires au chauffage électrique sont importés c’est encore pire car durant les périodes de pointe l’énergie électrique est vendue à des prix tout à fait prohibitifs. Les détracteurs de l’énergie nucléaire pointent également le coût excessif de la dernière génération de réacteurs  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9acteur_pressuris%C3%A9_europ%C3%A9en" \l "Diff.C3.A9rences_en_termes_de_s.C3.BBret.C3.A9" (EPR). Ils oublient que le coût d’un prototype n’a rien à voir avec celui d’un équipement de série. Les prototypes actuels ont été particulièrement malchanceux du fait que les pressions écologistes et l’accident nucléaire de Fukushima ont entraîné de multiples modifications et la multiplication des contrôles. Tous les responsables d’opérations vous diront que les modifications décidées en cours de réalisation sont toujours génératrices de délais supplémentaires et facturées au prix fort ! Ces détracteurs oublient également que la durée de vie d’une centrale nucléaire peut être prolongée en remplaçant la cuve du réacteur, le seul équipement important soumis aux radiations car, pour les autres équipements, une centrale nucléaire ne se distingue en rien d’une quelconque installation industrielle dont la vie peut être presque indéfiniment prolongée. Une installation industrielle est arrêtée parce que sa technologie est dépassée ou parce que son marché a disparu. Les centrales nucléaires, tant qu’il y aura de l’uranium disponible, devront donc fournir en France l’essentiel de la production d’énergie électrique nécessaire, en l’absence de moyens nouveaux plus performants de stockage ou de transport de cette énergie car la production des énergies dites « nouvelles » est par trop soumise aux variations journalières et saisonnières et aux aléas climatiques. Par l’installation de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/R%C3%A9acteur_%C3%A0_neutrons_rapides" réacteurs à neutrons rapides qui utilisent près de 100% de l’uranium au lieu de 1% environ pour les réacteurs actuels à neutrons lents, le spectre de la disette énergétique serait éloigné de plusieurs centaines d’années. De plus ce type de réacteur réduit considérablement le volume des déchets radioactifs et facilite leur élimination. Un scénario complémentaire « zéro combustibles fossiles et zéro uranium » donc tout renouvelable doit être également envisagé parce qu’il se réalisera inévitablement un jour et parce que les écologistes voudraient qu’il soit réalisé dés demain. Ce que nous pouvons dire aujourd’hui sans grand risque de nous tromper, c’est que l’arrêt de l’utilisation des combustibles fossiles pose des problèmes de substitution extrêmement difficiles si nous acceptons le recours temporaire à l’énergie nucléaire et que, sans cette énergie, la difficulté est décuplée. Faisons l’éloge de la sobriété, voire de l’avarice.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Diog%C3%A8ne_de_Sinope" Diogène avait raison. Mieux vaut n’avoir ni or, ni bijoux, ni objets précieux plutôt que vivre dans la crainte de se les faire dérober. Dans certaines civilisations, l’homme riche et considéré était celui qui avait fait don de tout ce qui lui était superflu.

Oh la la la vie en rose
Le rose qu’on nous propose
D’avoir des quantités d’choses
Qui donnent envie d’autre chose
On nous fait croire
Que le bonheur c’est d’avoir
D’en avoir plein nos armoires
Dérision de nous dérisoire
Foule sentimentale, on a soif d’idéal
Attiré par les étoiles les voiles
Que des choses pas commerciales
(Alain Souchon)

Dés aujourd’hui des produits extraordinairement sophistiqués comme les montres à quartz, les calculettes, les appareils photo et les caméras numériques, les GPS, les récepteurs radio et TV, les téléphones portables et même les ordinateurs personnels, imprimantes et liaisons Internet sont à des prix qui les rendent accessibles au plus grand nombre. Ces faibles coûts sont rendus possibles par l’utilisation de procédés de copie, comme pour la reproduction des êtres vivants. Une bonne chaussure de sport est plus stable, légère, confortable et robuste qu’une classique chaussure de cuir, pour un coût souvent moindre. Les animaux n’ont qu’un seul vêtement par saison. Pour nous le short et la chemisette en été, la fourrure polaire en hiver constituent la façon de se vêtir à la fois la moins chère et la plus agréable à porter. Les produits trop bon marché disparaissent souvent des étals. Ceux-ci y ont par bonheur échappé. Dans un avenir un peu plus lointain on peut imaginer le territoire couvert de gros bourgs bénéficiant d’une certaine autonomie alimentaire et énergétique et munis chacun de tous les moyens nécessaires pour que leurs habitants aient accès à tous les savoirs et puissent participer à toutes les activités intellectuelles qu’il s’agisse de recherche, d’enseignement, d’ingénierie ou d’administration. Des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Rabelais" \l "La_morale_de_Rabelais:_le_th.C3.A9l.C3.A9misme" abbayes de Thélème en quelque sorte additionnant les avantages de la ville à ceux de la campagne grâce à l’utilisation des techniques modernes de communication. La culture est en effet de plus en plus virtuelle ; rien n’est plus facile que de la faire voyager quasi gratuitement. Vous pourrez bientôt sans quitter votre fauteuil embrasser la Joconde et caresser la Vénus de Milo. L’activité de chacun des habitants de ces lieux de vie serait modulée en fonction de la météo car les prévisions sont devenues suffisamment fiables pour qu’il soit possible de s’organiser avec un temps d’avance. Plus de dimanches pluvieux à la maison ni de lundis au travail quand le soleil brille ! Il serait tenu compte pour orienter le choix des activités proposées à la population de la disponibilité locale des différentes formes d’énergie. Ces bourgs auraient tous les équipements collectifs nécessaires y compris des équipements appropriés pour que les retraités encore alertes puissent prendre en charge les jeunes enfants et les personnes dépendantes afin de libérer les actifs plus jeunes pour des tâches plus exigeantes. La solidarité pourrait s’y exercer pleinement et à moindre coût grâce à un bénévolat de proximité comme elle l’a fait de tous temps dans nos campagnes ce qui devrait beaucoup faciliter la solution des problèmes de chômage et de handicap. Les activités industrielles, artisanales et de service y naîtraient, s’y développeraient, y mourraient sans que les travailleurs aient à se déplacer contre leur volonté, ce qui garantirait la pérennité des liens affectifs indispensables au bonheur de chacun. L’expérience professionnelle des parents pourrait bénéficier aux enfants alors que de nos jours elle est souvent perdue. C’est dans un tel contexte que la race humaine a été façonnée. C’est là qu’elle peut retrouver son équilibre. Une telle organisation serait moins énergivore que l’organisation actuelle et beaucoup plus résiliente en cas de crise sérieuse toujours possible. Sans que nous en ayons bien conscience, notre civilisation est devenue extraordinairement fragile. Les efforts déployés pour la réalisation du « Grand Paris » risquent fort de tomber à plat quand on cherche par ailleurs, et à juste raison, à déconcentrer l’habitat et à revitaliser les provinces. Ce projet dont la puissance publique n’a pas le premier sou semble avant tout destiné à satisfaire les groupes financiers à la recherche de placements sûrs, les promoteurs en mal d’opérations juteuses, les perceurs de tunnels et les marchands de béton. C’est le dernier avatar de l’urbanisme des années soixante. Il tourne résolument le dos à l’avenir en accentuant pour la population concernée une dépendance alimentaire et énergétique déjà préoccupante. Souvenons-nous des difficultés de ravitaillement de l’agglomération parisienne durant la deuxième guerre mondiale à une époque où l’urbanisation était beaucoup moins avancée qu’aujourd’hui. La France est en retard non pas d’une mais de plusieurs guerres.
Il faudrait connaître dans ces conditions de déconcentration quelle est la taille maximum de la population mondiale compatible avec la satisfaction de ses besoins essentiels en nourriture, confort climatique, soins médicaux et information. Il semble que ce soit un domaine où il soit inconvenant d’aller au fond des choses, comme, de manière inattendue, en matière de religion. Dans les deux cas, il pourrait s’agir d’une certaine répugnance à regarder la réalité en face. Rassembler dans une même tour, et les tours dans un même quartier, des activités tertiaires qui pourraient parfaitement être décentralisées constitue une sorte de provocation quand on se souvient du 11/9. On les délocalise bien jusqu’aux Indes malgré les différences de langue, de culture et de fuseau horaire. Qu’attendons-nous pour abandonner toutes ces pratiques nocives dont on sait que, de toutes les façons, elles ne pourront s’éterniser ? Au lieu de cela les principales puissances économiques s’apprêtent à exploiter jusqu’au dernier atome de carbone les puits de pétrole et de gaz, les mines de charbon et de lignite, les carrières de sables bitumineux, les formations de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Schiste_gazier" schistes riches en gaz ou en pétrole et les dépôts d’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Hydrate_de_m%C3%A9thane" hydrate de méthane. Pour prolonger le plus longtemps possible leur façon de vivre les nations sont prêtes à recourir aux pires solutions. Comme disait la du Barry au pied de la guillotine, « encore un instant, Monsieur le Bourreau » ! Les émissions de gaz à effet de serre ne cessent de battre de nouveaux records en dépit des engagements formels pris par les principales puissances économiques à Rio 1 (1992). Le sommet Rio 2 (2012) tenu quarante ans après le premier  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sommet_de_la_Terre" Sommet de la Terre n’a pu que constater cet échec spectaculaire. Le coût de l’énergie est encore trop faible pour que les actions d’économie d’énergie aient des rentabilités suffisantes selon les critères financiers usuels. Il conviendrait pour qu’elles deviennent rentables de prélever un droit sur chaque tonne de carbone extraite à la sortie des lieux de production. Ceci présuppose bien entendu une autorité internationale reconnue par tous. Comment répartir le produit de cette taxe hypothétique ? Plutôt qu’un système parfaitement juste mais complexe il faut adopter un système simple et efficace. La tendance naturelle des hommes politiques et des fonctionnaires ne va pas dans le sens de la simplicité car elle les prive à la fois d’activité et d’influence. Les américains sont les seuls qui pourraient entraîner les autres par leur exemple à adopter de telles mesures. Malheureusement ceux qui élisent le congrès ne croient pas à la réalité de ces menaces car, de toute façon, God bless america ! Dans ce domaine vital nous avons malheureusement atteint le niveau d’incompétence de la démocratie qui interdit au personnel politique de demander à ses électeurs des efforts qui ne leur bénéficient pas directement et rapidement.
A quelle échéance aurons-nous brûlé tout ce qui peut l’être et dans quel état seront alors la société et l’environnement ? L’homme qui se croyait le favori des dieux et le roi de la création, se révèle à l’usage comme un insecte nuisible qui boulotte sa planète. Ce n’est que très récemment que l’Eglise a entrepris de se préoccuper de ce problème aigu suivant ce principe bien connu selon lequel un chef est obligé de suivre ceux qu’il commande... Attendait-elle avec gourmandise une apocalypse qui aurait justifié à posteriori ses prises de position hostiles à la science et qui aurait ramené vers elle les brebis égarées ? S’est-elle enfin rendu compte qu’elle-même, malgré ses bonnes relations avec le Très-Haut, n’échapperait pas au désastre général ? Sainte Trouille, priez pour nous ! L’écologie est une chose trop sérieuse pour qu’on y mêle la religion. Une référence à Dieu dans un traité d’écologie fait le même effet qu’une fausse note dans un concert. Comment ceux qui utilisent une telle référence imaginent-ils qu’il puisse y avoir le moindre rapport entre une croyance purement spéculative et la brutalité des faits ? Nous touchons là un point particulièrement sensible et préoccupant. Comment des personnes qui attendent tout du ciel peuvent-elles sentir le sol se dérober sous leurs pas ? Elles espèrent gagner pour l’éternité une place privilégiée auprès du Seigneur en l’aimant bien fort, Tout le reste leur paraît d’importance secondaire. Le mieux que l’on puisse attendre d’elles, c’est qu’elles ne s’opposent pas trop farouchement aux mesures excessivement douloureuses qui nous attendent. Si l’on pense à la droite religieuse américaine ça n’est pas gagné ! Le «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Tea_Party_(mouvement_politique)" Tea Party » semble avoir encore de beaux jours devant lui ! Le fossé qui se creuse dans la société américaine entre la gauche intellectuelle et la droite réactionnaire, entre les partisans du cortex et les fanatiques du bulbe, est un sujet majeur de préoccupation. La doctrine propagée par le président Bush junior a réussi à rendre folle toute une population au point que la crainte inspirée par un adolescent grièvement blessé et traqué par plusieurs milliers d’hommes surentraînés et surarmés a suffi à paralyser pendant plusieurs jours l’activité d’une grande ville américaine. Le pire n’est jamais certain mais il est de plus en plus probable.
La faiblesse du mouvement écologiste provient de ce qu’il n’a pas été en mesure jusqu’à présent de proposer de façon techniquement convaincante un modèle de développement durable prenant en compte tous les aspects de la réalité, et encore moins d’indiquer le cheminement à suivre pour assurer une transition harmonieuse avec la situation actuelle. Que constate-t-on ? Une activité brouillonne qui multiplie études cent fois refaites sur les mêmes thèmes, articles, revues, ouvrages, documentaires, reportages, concours d’idées, opérations de démonstration, stages de formation, conférences, voyages d’études, symposium, etc... Il y a par contre très peu de réalisations dont on puisse dire qu’elles constituent un modèle reproductible et économiquement viable sans subvention. Il continuera d’en être ainsi tant que n’aura pas été instituée une taxe carbone substantielle et universelle. Que reste-t-il du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Grenelle_Environnement" Grenelle de l’environnement ? Une nouvelle taxe, et quelle  HYPERLINK "http://vosdroits.service-public.fr/professionnels-entreprises/F31213.xhtml" taxe ! Il n’y a pas beaucoup d’activités plus papivores, budgétivores et finalement plus énergivores que l’écologie. ! Cette bulle née d’un effet de mode finira par crever. L’écologie est une chose trop sérieuse pour être confiée aux seuls écologistes ! Les écologistes seraient bien inspirés de se préoccuper un peu moins d’idéologie et un peu plus d’ingénierie. La faiblesse de leurs analyses contamine toute la gauche. Certains écologistes, et non des moindres, affichent leur confiance dans l’apparition de nouvelles techniques permettant de recourir quasi exclusivement et de façon économiquement supportable aux énergies renouvelables. Ils ne répondent jamais à la question relative à ce qui se passerait si leurs espoirs étaient déçus. En fait, ils ne se la posent même pas ! Un écologiste internationalement connu consacre, dans un ouvrage de 400 pages, un petit paragraphe au problème de l’intermittence des énergies renouvelables, sans le résoudre comme on s’en doute, alors que c’est le problème essentiel. La solution qu’il avance repose sur « cinq piliers », à savoir : recours quasi exclusif aux énergies renouvelables, production décentralisée par micro centrales, stockage d’énergie au niveau de chaque unité d’habitation, réseau électrique d’interconnexion utilisant la technologie Internet (??), véhicules électriques. Cette description n’est pas accompagnée à titre d’exemple par un minimum de données techniques et économiques concernant ces cinq piliers. Tout ça n’est pas très sérieux. Lui et ses pareils apparaissent comme les héritiers de la pensée magique selon laquelle il suffit de prier selon les règles pour être exaucé. Songez qu’aujourd’hui et pour la première fois depuis des temps immémoriaux le progrès matériel se heurte à une barrière dont nul ne sait avec certitude comment elle pourra être franchie. Les citoyens, absorbés par des problèmes qui leur paraissent plus pressants, semblent rester indifférents. Les discours des hommes politiques n’intègrent pas de manière suivie les nouvelles contraintes. Les vieux réflexes les font retomber chaque fois dans l’ornière des discours habituels par lesquels chacun cherche à tirer la couverture à soi, comme si rien de fondamental n’avait changé. Une crise quelconque, même de courte durée, qu’elle soit économique, sociale, politique ou financière relègue au second plan la crise écologique permanente que nous connaissons.

Sept milliards de petits terriens
Et moi, et moi, et moi
Comme un con de parisien
J’attends mon chèque de fin de mois
J’y pense et puis j’oublie
C’est la vie, c’est la vie
(D’après Jacques Lanzmann & Jacques Dutronc)

Un vote s’effectuant le plus souvent au ras des comptoirs en zinc (c’est pourquoi cafetiers et restaurateurs ont pu bénéficier, sans même un semblant de contrepartie, de baisses de TVA), il est à craindre que les changements radicaux nécessaires s’opèrent uniquement sous la pression d’une catastrophe. Les riches eux-mêmes ne pourront s’en préserver, mais seulement en retarder les effets. « Mon royaume pour un cheval » ! Cette exclamation du roi d’Angleterre Richard III illustre les limites du pouvoir de l’argent. Elle me rappelle aussi un jour où je trottinais dans une des allées cavalières du Bois de Boulogne dont le sable meuble est plus indulgent pour les articulations que la terre battue des autres allées. J’y rencontrai ce jour-là une petite fille et sa mère et, comme j’arrivais à leur hauteur, je vis la petite fille tirer sa mère par la manche et l’entendis s’écrier Maman ! Regarde le Monsieur, il a perdu son cheval ! Sans royaume et sans monture qui vaille un homme n’a aucun prestige, même aux yeux d’une petite fille de six ou sept ans.
Une politique écologique efficace réclame des règles internationales contraignantes. Nous en sommes à cent lieues. Où allons-nous trouver les sommes gigantesques nécessaires à la mise en œuvre de stratégies opérationnelles quand la plupart des états sont déjà lourdement endettés ? Seule une législation bannissant tous les gaspillages, dont en premier lieu les dépenses liées à la guerre et au développement de nouvelles armes, paraît de nature à permettre de dégager les moyens nécessaires. Son adoption simultanée par tous les grands pays industriels dans les délais requis semble des plus problématique. La question posée par l’augmentation du prix du pétrole, dont le prix de vente est presque entièrement dicté par les abus de position dominante, devrait être porté devant le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Conseil_de_s%C3%A9curit%C3%A9_des_Nations_unies" Conseil de Sécurité avant qu’il ne soit trop tard. L’inquiétude touche toutes les matières premières et, ce qui est particulièrement grave, les denrées alimentaires les plus essentielles. Cependant nous restons plantés là sans rien faire comme des affidés de la secte du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Ordre_du_Temple_solaire" Temple Solaire attendant leur dernière heure. Qui veut prendre les paris sur l’année de la Grande Panique, celle où l’énergie sera devenue brusquement si chère, notamment à cause de la spéculation, que l’activité économique en sera paralysée ? La seule issue sera alors d’avoir recours à une économie de guerre en faisant, souhaitons-le, l’économie d’une guerre… La seule nation dont l’influence soit suffisante pour nous éviter ce sort peu enviable est la nation américaine. Malheureusement, comme dit précédemment, l’américain moyen ne croit pas que quoi que ce soit de véritablement fâcheux puisse lui arriver. Le pire n’est jamais certain, c’est vrai, mais il est de plus en plus probable. Pour la première fois depuis de nombreuses générations il n’est nullement évident que les enfants vivront mieux que leurs parents. L’ascenseur social descend rarement à vide aujourd’hui et il est souvent en panne. On pourrait espérer au moins que les sommes prodigieuses engrangées du fait du renchérissement du pétrole, soient utilisées pour le bien commun. Or une grande partie est utilisée à des dépenses somptuaires, ridicules, voire dangereuses. Les ressources financières qui pourraient être dégagées font défaut à la recherche scientifique, au soulagement des plus démunis et au règlement des crises. Elles sont au contraire reversées en partie à Allah, à Jéhovah et à leurs propagandistes, assurant ainsi la prospérité de tous les mouvements religieux, y compris des plus obscurantistes et des plus violents. C’est l’argent du pétrole qui a financé directement ou indirectement le terrorisme islamique. Les intérêts pétroliers et gaziers sont déjà étroitement associés aux gouvernements russes et américains, pour ne pas dire qu’ils les contrôlent. Compte tenu des moyens financiers croissants dont ils disposent, il y a tout lieu de croire qu’ils n’en resteront pas là. Ils ont les moyens de racheter une bonne partie du monde ! Il n’est pas surprenant que ces intérêts cherchent à témoigner leur reconnaissance au Créateur qui a tant fait pour eux et soutiennent à proportion les institutions religieuses. Je suppose que tous les princes de la terre, tous les riches héritiers nourrissent des sentiments comparables. C’est ce qui explique les succès, notamment politiques, de tous les mouvements intégristes. Les hasards de la géologie ont conféré à des bédouins et à des fermiers texans des pouvoirs qu’ils n’étaient pas forcément préparés à assumer. Il paraîtrait raisonnable de considérer que les retombées économiques des activités d’extraction constituent un dédommagement déjà appréciable pour ceux qui vivent au dessus de ces richesses, quitte à prélever un impôt sur les pays tempérés au titre de l’eau qui leur tombe du ciel !

Crise de la sélection naturelle


Songez que les exploits de la médecine provoquent le vieillissement des populations avec de lourdes conséquences sur l’équilibre des comptes sociaux ainsi qu’une dérive génétique potentielle par contournement du système épurateur que constituait la sélection naturelle. C’est une question éthique fondamentale. L’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Eug%C3%A9nisme" eugénisme a mauvaise réputation pour des raisons historiques connues, mais quels sont les parents qui ne souhaiteraient léguer à leurs enfants le meilleur de leur patrimoine génétique au lieu de laisser au seul hasard le soin d’en décider ? Une espèce se perpétue et progresse lorsque les plus aptes ont de meilleures chances de se reproduire que les autres. Il y a dans la nature au moins deux facteurs qui concourent à ce résultat : l’élimination physique des plus faibles avant qu’ils aient eu une chance de se reproduire et la préférence sexuelle accordée aux meilleurs. La fille qui se choisit un bon mari fait de l’eugénisme comme  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Bourgeois_gentilhomme" Monsieur Jourdain faisait de la prose. On ne peut que s’interroger sur les conséquences à long terme des changements radicaux intervenus depuis la fin du néolithique dans les processus de sélection affectant l’espèce humaine. Si la préférence sexuelle joue encore son rôle, il n’est pas absurde de se demander si la sélection naturelle par élimination des moins bons ne s’exerce pas actuellement à rebours. Jadis les fauves dévoraient les faibles qui restaient à la traîne. Les récents conflits armés semblent avoir été au contraire plus favorables aux malins qui savent se planquer qu’aux braves gars solides et courageux qu’on envoie en première ligne, plus favorables aux collaborateurs et aux trafiquants qu’aux résistants héroïques. Une longue période de paix est peut-être nécessaire pour raccommoder nos gênes, en espérant que les femmes accepteront plus volontiers les hommages des braves types un peu mariolles et leur donneront plus volontiers des enfants. La protection sociale qui compense les handicaps peut également être mise en cause, même s’il paraît politiquement très incorrect d’évoquer cette éventualité. Aucun effort visible n’est entrepris pour préserver et si possible améliorer le capital génétique humain. Il faudrait à mon sens créer un observatoire de la qualité génétique de la population pour que nous ayons au moins un instrument de mesure capable d’évaluer le phénomène. S’il permet de constater qu’il n’y a pas de dérive dans un sens défavorable, tout le monde sera content. Les spécialistes paraissent en tout cas convaincus que l’évolution de l’espèce humaine s’est considérablement accélérée dans les derniers millénaires et que cette tendance va encore se renforcer dans les siècles à venir.
Songez aussi à la natalité insuffisante ici, surabondante là. La population des pays développés se stabilisera-t-elle un jour, recommencera-t-elle même à croître du fait de la surreprésentation à chaque génération des descendants des individus les plus prolifiques et de la sous-représentation des descendants des gays et des lesbiennes, si toutefois ces différentes caractéristiques intéressant le renouvellement des générations sont héréditaires ? Faut-il craindre au contraire une surreprésentation des étourdis et des négligents ou de ceux qui dépendent fortement de l’aide sociale accordée aux familles nombreuses? Les personnes mariées bénéficient d’avantages divers, notamment fiscaux, qui sont une reconnaissance du service fondamental que représente la perpétuation de l’espèce. Ceux qui ne rendent pas ce service ne devraient pas normalement bénéficier des mêmes avantages. Cependant la vie ne doit pas être facile pour tous ceux qui ont hérité de tendances homosexuelles. Une compensation ne serait pas pour cette raison tout à fait inéquitable. Doit-on envisager la même chose pour les pas beaux, les pas malins, les pas vernis ? On ne peut exclure le cas où, dans un avenir plus ou moins proche, la terre étant devenue incapable de supporter tous ses enfants, l’homosexualité deviendrait une vertu à encourager !
Songez que les micro-organismes s’habituent aux médicaments forçant à en inventer sans cesse de nouveaux. Songez à la création par l’homme de dizaines de milliers d’espèces chimiques nouvelles dont les effets à long terme sur le vivant commencent à peine d’être étudiés. Songez au sort des populations animales, oubliées depuis toujours par la plupart des religions et qui, si proches de nous du fait qu’elles sont dotées d’une conscience, devraient pourtant bénéficier de notre sollicitude. Non seulement elles ont une conscience mais elles ont aussi une morale et un cœur gros comme ça ! Il est vrai que les religions ne se sont pas toujours préoccupées non plus du sort des populations humaines réduites en esclavage ou martyrisées. Les générations futures porteront vraisemblablement sur nous autres, mangeurs d’animaux, le même regard que celui que nous portons sur les anthropophages !
En dépit de ces difficultés l’espoir d’un progrès de la race humaine existe en raison des avancées de la connaissance du vivant. Une première période dans l’évolution du monde vivant qu’on peut qualifier d’âge  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Le_Hasard_et_la_N%C3%A9cessit%C3%A9" du hasard et de la nécessité a été celle où des atomes se sont assemblés pour constituer les premiers êtres vivants encore inconscients : êtres unicellulaires, végétaux, animaux végétatifs. Une seconde période qu’on peut qualifier d’âge de l’appétence sexuelle a vu apparaître toutes les espèces supérieures que nous connaissons, première manifestation d’un effet feed-back de l’évolution par choix préférentiel conscient des partenaires les plus « appétissants ». Une troisième période qui est l’âge de la sélection opérée par l’homme, a commencé sous une forme rudimentaire et empirique au néolithique et se poursuit encore de nos jours. Elle concerne essentiellement les races animales mais pas seulement. La quatrième période est celle de l’ingénierie génétique. C’est la manifestation d’un effet feed-back encore bien plus radical que les précédents. Progressivement, le hasard a été remplacé par l’intention, ce qui s’est traduit par une formidable accélération de l’évolution, mais la nécessité manifestée par la sélection naturelle subsiste et sera aussi présente et rigoureuse demain qu’elle l’a été hier, même si elle se manifeste plus tardivement. Il convient d’effectuer la sélection en amont pour éviter qu’elle ne s’effectue douloureusement en aval. Je ne sais si nous sommes tous des juifs allemands, mais je crois savoir que nous sommes tous des organismes génétiquement modifiés, et ceci depuis l’origine de la vie. Que ce soit naturellement ou artificiellement ne change rien à l’affaire. Même si c’est l’homme qui introduit des modifications, peut-on dire que l’homme soit artificiel ? Une molécule de synthèse ne se distingue en rien d’une molécule trouvée dans la nature. Elle n’est pas frappée du sceau de l’infamie. C’est le programme génétique qui compte, pas la manière dont il a été écrit. Nous serions bien aises que des plantes destinées à fournir des matières combustibles pour un monde à court d’énergie ou des aliments pour des populations affamées voient leur rendement multiplié par dix, même si c’est par manipulation génétique. La sélection naturelle fera le tri entre les organismes génétiquement modifiés par l’homme comme elle l’a toujours fait pour les organismes modifiés naturellement. Si l’écologie n’est pas toute la politique elle en est par ses aspects positifs la caution morale, le surmoi en quelque sorte. Parce qu’elle est altruiste elle incline à gauche, ce qui se vérifie dans toutes les sociétés démocratiques. L’écologie est une préoccupation acceptable par tous à condition de la débarrasser de ses tendances dogmatiques, passéistes et sectaires selon lesquelles l’énergie nucléaire et les organismes génétiquement modifiés représentent le diable en personne…

Crise de l’intelligence


Songez à la publicité télévisée, aux jeux débiles et aux feuilletons à bon marché qui ruinent la cervelle de nos chers bambins. «  HYPERLINK "http://www.abnihilo.com/" Panem et circences » est devenu RSA + TF1. Les soucis mercantiles et la publicité polluent tous les outils de diffusion de l’information menaçant leur utilisation même. Songez que la plupart des moyens d’information ont perdu leur nécessaire indépendance, ne devant leur survie qu’à des groupes financiers dont les motivations ne sont certainement pas tout à fait innocentes. Un esprit un peu informé décèle aisément dans certains commentaires l’écho des luttes commerciales dans lesquelles ces groupes sont engagés. Les lecteurs, auditeurs et téléspectateurs n’ont cependant rien à faire de ces querelles. Suite à ces changements de propriétaires et aux desideratas des annonceurs solidaires des mêmes intérêts la presse a été progressivement mise au pas, le ton des médias s’est adouci, leurs aspérités se sont estompées, leurs commentaires se sont faits plus complaisants, des incidents techniques sont arrives à point nommé pour limiter la diffusion d’opinions critiques. Dormez braves gens, l’Argent veille ! Il est manifeste que les journalistes de la télévision publique comme privée avaient peur d’être écartés par des directions favorables au pouvoir conservateur en place s’ils lâchaient la bride à leurs sentiments véritables. Petit à petit les virus de la propagande se sont insinués dans leurs productions. La plupart des médias se sont faits les complices objectifs de ces pouvoirs en distillant toutes les peurs. Cette mainmise de la sphère financière sur les médias est un phénomène des plus inquiétants pour la démocratie. Une télévision publique sans publicité, c’est bien, sans ingérences c’est mieux. Sans ressources publicitaires hier elle se serait vue sommer d’y avoir recours aujourd’hui tant nous étions dans le royaume du caprice d’un seul. L’exposé des motifs de bon nombre des lois auraient pu se terminer par une formule empruntée à l’ancien régime : « car tel est notre bon plaisir ». Un autre phénomène préoccupant fut la mainmise de la sphère politique sur l’histoire, ce qui rappelle de fâcheux souvenirs et crée un dangereux précédent dont des régimes encore plus autoritaires ne manqueraient pas de se prévaloir. Laissons donc les hurluberlus négationnistes sortir du bois et s’exprimer afin qu’ils se ridiculisent aux yeux de tous et incitent les historiens à encore plus de rigueur et d’exhaustivité dans le rassemblement des preuves. Ces délires sont pour tous un rappel du contrôle vigilant que chacun doit exercer sur les informations dont il est sans cesse bombardé. « Je défendrai mes opinions jusqu’à ma mort, mais je donnerai ma vie pour que vous puissiez défendre les vôtres » (Voltaire). Il est pour le moins étrange que les lois mémorielles ne soient pas déclarées contraires à une constitution qui garantit la liberté d’expression. Il est resté toutefois nombre de journalistes pour lesquels la passion de dire leur vérité est plus forte que la crainte de compromettre leur carrière. Les patrons de presse savent bien que c’est cette passion qui attire et fidélise la clientèle, mais leurs sponsors ? La liberté d’expression est celle qui conditionne toutes les autres. Toute vérité officielle est par nature suspecte. Si les lecteurs ne privilégient pas systématiquement la presse demeurée libre, seul anticorps efficace contre les dérives autoritaires, celle-ci disparaîtra. C’est déjà presque fait.
L’Eglise catholique en a profité pour reprendre la main de façon insidieuse dans la plupart des grands médias faisant renaître chez les incroyants un sentiment d’urgence inquiète. Les partisans d’une laïcité sans concession qui représentent l’opinion majoritaire étaient le plus souvent ignorés par les faiseurs d’opinion qui n’avaient pas au contraire de colonnes assez larges ou de plages horaires assez longues pour faire la promotion de toutes les manifestations de la foi chrétienne. Ayant acquis un véhicule neuf, j’avais eu la surprise de constater que son autoradio était calé sur la fréquence de  HYPERLINK "http://www.radionotredame.com/" Radio Notre-Dame, excellente radio au demeurant ! J’y ai vu un peu plus qu’une simple coïncidence. Ce parti pris était d’autant plus dérangeant qu’il touchait une nation qui paraissait assez largement dégagée de l’emprise religieuse.
Certains organes de presse cherchent à occulter les sympathies du pape Pie XII à l’égard de l’Allemagne nazie et son inaction face à l’antisémitisme. Ils veulent accréditer l’idée que les Eglises ont toujours été fermement opposées à tous les fascismes en général et au nazisme en particulier, alors que la pratique constante de ces Eglises a été d’assurer de leur soutien le plus fort quel qu’il soit pourvu qu’il ne leur soit pas hostile et qu’il ne pratique pas un athéisme militant. Une presse vraiment constructive comporterait une partie purement informative et la reproduction de débats par mails entre personnalités d’opinions diverses. Les débats électoraux devraient utiliser le même procédé. Ceux auxquels on assiste aujourd’hui à la radio ou à la télévision ne sont que le choc de deux intuitions s’exprimant difficilement sans colère. Ils n’ont pas pour objet la recherche de la vérité, mais la mise en valeur des qualités vocales, de vivacité d’esprit ou de culot des uns et des autres, le bon peuple attendant de connaître le meilleur « communicateur » pour se ranger sous sa bannière. C’est comme attendre d’un duel qu’il désigne celui qui a raison dans la contestation qui est à son origine. Comme a dit Montaigne « l’obstination et ardeur d’opinion est la plus sûre preuve de bêtise ». A cette aune là, que valent nos politiciens, spécialement les plus jeunes qui sont les plus dogmatiques et les plus péremptoires ? Ignorer les arguments de l’autre, lui couper la parole, lui envoyer des épithètes malsonnantes à la figure ne fait pas avancer les problèmes. Il faut dépasser la colère et révéler les intérêts sous-jacents car, comme l’a dit Alain, les intérêts transigent toujours, les passions jamais. Les religions et les opinions politiques appartiennent bien évidemment au domaine des passions. Des débats plus utiles seraient organisés comme des tournois d’échecs. Chaque compétiteur pourrait se faire aider et aurait droit au même temps de réflexion et d’exposition pour formuler les différentes étapes de son argumentation : état des lieux, critique de l’état des lieux produit par l’adversaire, thèse, critique de la thèse de l’adversaire, etc.…quitte à réduire le champ de la discussion aux sujets les plus essentiels. Dans les joutes verbales toute prise de parole de l’un des jouteurs devrait être suivie d’une période de silence permettant aux auditeurs d’assimiler ce qui vient d’être exposé et à l’adversaire de préparer sa réponse. C’est la seule façon de révéler les véritables enjeux et même de susciter des rapprochements inattendus, car celui qui sera désigné pour gouverner devra gouverner pour tous. La vie politique et sociale est devenue trop compliquée pour s’accommoder de discours à l’emporte-pièce. Les débats seront longs et deviendront vite techniques, mais qu’y faire ? Nous vivons dans un monde technique et complexe, et il ne faut pas sous-estimer les capacités de jugement de nos contemporains. Quand on va au fond des choses, souvent elles se simplifient, ce qui peut fâcher ceux qui vivent d’ambiguïtés et d’obscurités. La seule difficulté sera la nécessaire transparence, le recours au non-dit devenant plus difficile, mais c’est dans cette nécessité de dire les choses comme elles sont et de se focaliser sur l’essentiel que réside le principal intérêt du procédé. Les critiques adressées aux débats télévisés s’appliquent tout autant aux débats publics tels qu’ils sont pratiqués en séance par l’Assemblée Nationale…
Songez à la dégénérescence des arts, à l’unification et à l’appauvrissement des cultures, à l’américanisation envahissante qui transmet à la jeunesse des traditions qui ne sont pas les nôtres. Nos ancêtres les Gaulois  seront bientôt remplacés dans l’esprit de collégiens gavés de télévision par nos ancêtres les cow-boys. La culture populaire et paysanne, qui était aussi savoureuse que la cuisine du terroir, a presque complètement disparu. L’esprit et l’accent faubouriens ou parigots qu’on retrouve avec délices dans les films en noir et blanc et les disques 78 tours se sont perdus, remplacés qu’ils sont par des inflexions venues d’outre méditerranée. La France, ce n’est pas  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Madame_du_Barry" ton café qui fout le camp, c’est ton âme ! Les jeunes générations adoptent sans discernement les modes alimentaires, vestimentaires et comportementales venues des Etats-Unis et transmises par des feuilletons télévisés achetés en solde, rires préenregistrés en prime (LOL). Elles adoptent tout naturellement ce qu’il y a de plus facile, de plus commun, dans la civilisation américaine. Jusqu’à présent ses modèles étaient plutôt la société aristocratique d’Ancien Régime ou la société bourgeoise entichée de noblesse dépeinte par Marcel Proust. Les jeunes ne se rendent pas compte qu’ils hypothèquent ainsi gravement leur avenir parce que si un produit typiquement français a quelque chance de s’exporter, la pâle copie d’un produit américain n’en a pratiquement aucune. Quarante années après sa mort la môme Piaf remplit encore les salles aux Etats-Unis et « Les Misérables » devenus comédie musicale y comptent déjà plusieurs milliers de représentations.
L’attachement des jeunes aux marques commerciales remplit d’étonnement les gens de ma génération. Ayant à choisir entre deux produits je retiens, toutes choses égales, celui pour lequel il n’est pas fait de publicité, remerciant ainsi son fabricant de ne pas avoir inclus son coût dans le prix qu’il me réclame, de ne pas m’avoir fait perdre du  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Il s'agit du temps de cerveau des téléspectateurs vendu par les chaines de télévision aux agences de publicité" temps de cerveau ni d’avoir participé à la déstructuration de mon esprit en le faisant perpétuellement sauter du coq à l’âne… Sans cette précaution je pourrai bientôt chanter avec Boris Vian :

« A mesure que je deviens vieux
Je m’en aperçois mieux
J’ai le cerveau qui flanche
Franchement voyons disons le mot
C’est même plus un cerveau
C’est comme de la sauce blanche »

La « grande musique » contemporaine est inécoutable. Mahler considéré par beaucoup comme un très grand musicien me laisse froid et dubitatif la plupart du temps. Dans un autre domaine je ressens la même incompréhension à l’égard de Céline. La musique populaire a remplacé la mélodie par un bombardement rythmique accompagné souvent d’un bombardement visuel propre à décourager toute réflexion. Ne parlons pas de certains styles de musique qui ont substitué à l’harmonieuse douceur héritée des chants religieux les frustrations monocordes de jeunes gens en colère, une colère d’ailleurs bien compréhensible vu l’état du monde. La peinture a été tuée par la photographie. La peinture abstraite ne parle ni à l’intelligence ni au cœur car elle ne se rattache aucunement à ce que l’individu a pu enregistrer comme images sympathiques au cours de son existence. Un fouillis de couleurs et de lignes ne génère aucune émotion particulière. C’est comme si une œuvre musicale se réduisait à un accord indéfiniment plaqué, fut-ce sur le clavier d’un grand orgue. Un peintre peut accentuer certains aspects de la réalité pour en faire ressortir tel ou tel aspect singulier ; il ne peut s’en abstraire complètement. Les impressionnistes les plus appréciés sont ceux qui ne se sont pas trop éloignés de la facture classique. Une œuvre d’art doit communiquer à celui qui la reçoit l’émotion ressentie par son auteur lorsqu’elle a été conçue. Pensez-vous qua la simple vue d’une partition puisse susciter une émotion artistique quelconque chez celui qui n’a pas reçu une éducation musicale approfondie ? Pensez-vous qu’un animalcule suivant le sillon spiralé d’un disque en vinyle puisse avoir le sentiment de parcourir un chef d’œuvre ? Prenez au hasard un millimètre cube de vide. Est-il en rien affecté par les milliers ou les millions de messages hertziens qui le traversent, que ceux-ci soient triviaux ou sublimes, destinés au public ou d’ordre intime ? Le plus obscur des poètes veut faire partager les nouvelles vibrations qu’il croit avoir découvertes en lui-même. Les neurones de l’auditeur ou du spectateur doivent être titillés de manière comparable à ceux du créateur. Sans cette coïncidence l’art n’est qu’un jeu intellectuel sans grand intérêt. Le manque de communication entre le public et l’artiste semble malheureusement une caractéristique assez générale de l’art contemporain. Citez-moi un chef d’œuvre incontestable en littérature, musique, architecture ou peinture qui aurait vu le jour dans les trente dernières années ! La question se pose d’ailleurs de savoir s’il est possible de multiplier à l’infini les genres artistiques ou s’ils se trouvent en nombre limité. Dans cette dernière éventualité les artistes seraient plus ou moins condamnés à se répéter ou à disparaître. Je comprendrais que des musiciens, après avoir entendu les chefs d’œuvre classiques, jettent au feu les partitions les plus récentes. Les musées de plus en plus nombreux financés par les collectivités n’ont souvent d’intérêt que pour ceux qui ont rassemblé les collections. Les mauvaises herbes de la religiosité importée ont étouffé les plantes délicates et salutaires de la pensée  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Libertaire" libertaire autochtone. La poésie s’était un moment réfugiée dans la chanson avec des succès éclatants pour cette floraison tardive, mais les derniers chanteurs poètes ont les tempes grisonnantes et leurs successeurs se font attendre, ou pis chantent en anglais. Les chansons récentes calquées sur des modèles anglo-saxons ne peuvent être véritablement appropriées par le public français. En témoigne le fait que presque toutes les chansons de fin de banquet ont vu le jour avant la deuxième guerre mondiale. « Je reviendrai à Montréal dans un grand Boeing bleu de mer » ainsi que le chante  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Robert_Charlebois" Robert Charlebois est une des rares exceptions à l’incompatibilité qui semble exister entre poésie et technologie, même s’il existe quelques exemples de poésie automobile ou ferroviaire. Nul poème épique n’a été écrit sur la conquête de la lune. Notre monde technologique est désenchanté dans tous les sens du terme. Les arts vont-ils être tués par la science  comme l’ont été les religions et les philosophies traditionnelles ? A cause des moyens modernes de reproduction des ouvrages de l’esprit les musiciens, les cinéastes et bientôt les écrivains, ne pourront plus vivre de leur art. Les peintres et les sculpteurs s’en tireront un peu mieux, parce que leurs ouvrages, interdits de reproduction à l’identique, peuvent faire l’objet de spéculations, facilitent la constitution d’un patrimoine et bénéficient d’un régime fiscal privilégié. Leurs œuvres sont des placements plus ou moins sûrs et des niches fiscales ; c’est devenu leur principal intérêt. Rien au contraire n’est plus difficile à vendre qu’une idée. Si vous êtes salarié d’une organisation publique ou privée, votre idée appartient d’abord à cette organisation et la tendance la plus habituelle d’une hiérarchie est de s’en attribuer la paternité sans même songer à vous remercier, ni à fortiori à vous récompenser. Si, étant indépendant, vous la gardez par devers vous, elle ne vaut rien le plus souvent. Si vous la rendez publique, ce qui est la seule façon d’en faire reconnaître la valeur, elle cesse de vous appartenir. Les droits d’auteur sont donc fortement menacés par les lacunes du droit de propriété intellectuelle et par les nouvelles technologies. Si vous ne voulez pas attendre la retraite pour exercer une activité non salariée, il vous reste une solution qui est le mécénat auquel on doit les plus grandes œuvres du passé. Des entreprises ou des fondations, voire l’Université ou l’Administration pourraient prendre en charge des artistes qu’elles sélectionneraient parmi les amateurs les plus prometteurs, auxquels une activité étudiante ou professionnelle normale ménage déjà assez de temps libre pour se former. On ne voit pas que la sécurité ainsi acquise pourrait nuire à la production d’un artiste authentique. Ce serait en tout cas pour les entreprises une façon plus honorable de se faire connaître, qui pourrait être, comme l’action humanitaire, aidée par une fiscalité adaptée qui ne favorise pas la spéculation. Il sera de plus en plus difficile de faire admettre à l’opinion que l’information puisse être imposée comme dans le cas de la publicité ou payante comme c’est le cas de la plupart des livres, disques et journaux.
De nos jours la science fournit des explications de plus en plus convaincantes dans un domaine de plus en plus étendu de sorte que le domaine spécifique des religions se réduit comme peau de chagrin. Les sciences physiques, petit à petit, occupent le terrain réservé jadis à la métaphysique soit qu’elles avancent la résolution des problèmes que cette dernière se posait (mythes concernant la création du monde ou le mouvement des corps célestes), soit qu’elles montrent qu’il s’agit de faux problèmes (libre-arbitre). Cependant, les difficultés de la science dues pour une bonne part à la façon dont elle est enseignée en découragent plus d’un. Les possibilités des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Didacticiel" didacticiels qui pourraient être aussi ludiques que des jeux sur consoles vidéo sont presque systématiquement ignorées du monde enseignant en dépit des gains de temps évidents concernant la recherche et la manipulation des documents. A l’heure des grandes mutations technologiques l’enseignement reste un artisanat. Quelle en est la raison, conservatisme, élitisme, corporatisme de la part des enseignants, peur d’être moins performants que leurs élèves dans l’utilisation des nouvelles technologies, peur de la concurrence, peur de ne plus maîtriser leurs classes, jalousie à l’égard de ceux qui pourraient acquérir trop facilement un savoir qui leur a coûté tant d’efforts ? La crédibilité de l’enseignement religieux repose presque exclusivement sur le prestige des maîtres qui transmettent la tradition. L’usage de didacticiels ne ferait que rendre plus apparentes les difficultés rencontrées dans l’élaboration des catéchismes. Dans les autres domaines les didacticiels envisagés permettraient à la plupart des élèves d’assimiler n’importe quelle discipline intellectuelle, notamment scientifique, n’importe où, n’importe quand, au rythme qui leur est propre, sans être perturbés par leurs petits camarades, et en bénéficiant d’un contrôle continu grâce à des questionnaires à choix multiples et à des exercices intégrés. Tous les conscrits apprenaient à démonter et remonter leur fusil sans erreur. Idem pour tous les savoirs professionnels. Les surdoués, libres de choisir eux-mêmes leur allure, ne seraient plus freinés dans leurs progrès. Il est important que les meilleurs esprits parviennent rapidement aux frontières de la connaissance afin de s’attaquer aux problèmes nouveaux avec l’énergie, l’enthousiasme et la vivacité d’esprit de la jeunesse. Il est facile de fixer tel ou tel objectif à l’enseignement; si on ne dit pas comment l’atteindre, on n’a rien dit. Ces logiciels pourraient être assortis de toutes sortes d’animations illustrant les concepts évoqués et en facilitant la compréhension, ou peut-être de séquences vidéo ou musicales, de liens avec des sites pertinents, de poèmes, de bandes dessinées, de comptines ou de chansons fixant la mémoire, de jeux en réseau favorisant la socialisation à l’intérieur d’une classe. Ils devraient le plus possible conduire les élèves à redécouvrir par eux-mêmes les idées principales comme conséquences nécessaires d’un contexte déterminé. Si peu d’hommes sont capables d’ouvrir de nouvelles voies, beaucoup sont capables de les répéter s’ils sont bien guidés et si on multiplie les points d’assurage dans les passages difficiles. Ainsi, les élèves agiraient au lieu de subir, ce qui est toujours mieux ressenti et renvoie à l’enseignement de Socrate, interactif par excellence. Les grands penseurs du passé ont pu bénéficier de précepteurs de qualité. Il faut donc fournir à tous l’équivalent d’un excellent professeur particulier à un prix abordable en utilisant toutes les possibilités de l’outil informatique.
Un nouveau concept ne tombe pas du ciel. Il est destiné à résoudre un problème. Le parachutage doit être évité pour les idées comme pour les hommes. Il vaut mieux peu d’idées parfaitement intégrées que beaucoup d’idées mal arrimées et par conséquent en instance d’oubli ou inutilisables. Ce principe conduit à enseigner tous les savoirs selon l’ordre historique de leur apparition, chaque génération s’étant élevée en grimpant sur les épaules de la précédente. L’école primaire correspondrait aux apprentissages essentiels de la lecture, de l’écriture et du calcul, de la logique élémentaire, de son application à l’informatique et de la morale naturelle dont l’élève apprendrait à reconnaître en lui-même les racines, en même temps qu’à la découverte de l’environnement immédiat, puis lointain et, de proche en proche et de façon schématique, du cosmos et de son histoire telle que reconstituée aujourd’hui par la science. Le but de cet exposé panoramique initial est de permettre au jeune enfant de tirer parti de tout ce qu’il peut entendre à l’école et surtout en dehors de l’école. D’autres apprentissages essentiels et qui devraient être effectués dés que possible concernent l’usage du tableur et celui du traitement de texte. Un traitement de texte suffisamment perfectionné devrait permettre d’apprendre assez rapidement et sans douleur l’orthographe et la grammaire et continuerait à servir de garde-fou pendant le reste de l’existence. Un tableur permet de faire facilement et rapidement toutes sortes de simulations et évite qu’un raisonnement correct ne soit entaché d’erreurs de calcul. La légitimité pratique de cette approche vient de ce que, plus tard, dans sa vie professionnelle, l’élève d’aujourd’hui aura à utiliser des outils, des règles, des techniques, un mode de pensée en conformité avec cette vision du monde et avec les réactions des objets qu’il aura entre les mains. Sa légitimité morale vient de ce qu’elle respecte sa liberté d’appréciation alors qu’il peut être par ailleurs endoctriné par ses parents, ou à leur instigation, dans une foi religieuse ou politique particulière. On ne repasse pas un cerveau qui a un faux pli comme on repasse un pantalon. C’est la liberté future de l’enfant qu’il convient de préserver, avant même celle des parents. L’élève pourra être également instruit pendant ce premier apprentissage de ce que nous savons de la préhistoire. La préhistoire qui s’étend sur au moins 100.000 ans n’a pas la place qu’elle mérite dans l’enseignement. Son étude constitue pourtant une bonne occasion de rendre à nos ancêtres un culte civil célébrant le courage et l’ingéniosité dont ils ont su faire preuve pour survivre avec très peu de moyens dans un monde hostile. L’enfant des campagnes ou le petit citadin en vacances disposent à peu près des mêmes outils que l’homme préhistorique : des pierres et des bâtons, quelques liens, un arc en noisetier, une sarbacane en bambou…C’est la suite naturelle des pâtés de sable et des jeux de construction qui ont occupé ses premières années. Il peut facilement imaginer quelle a été la situation à laquelle ses ancêtres ont du faire face. La précarité de cette situation lui permet de mieux comprendre comment est née la croyance aux esprits et aux dieux qui a été un moyen de combattre la dépression résultant des nombreux coups du sort auxquels ses ancêtres ont été exposés. Expérimentant sur l’arc et la sarbacane l’enfant pourra s’incorporer intuitivement, charnellement, si son attention est convenablement guidée, les notions physiques élémentaires de trajectoire, de vitesse, d’accélération, de masse de poids, de force, de levier, de couple, de pression. C’est aussi pendant cette période que l’enfant doit apprendre à nager, à faire de la bicyclette et à conduire sur simulateur. L’abondance de matière pourrait inciter à augmenter quelque peu la durée de l’enseignement primaire. L’enseignement secondaire verrait chaque grande période de l’histoire décrite selon ses principales phases de déroulement avec l’état correspondant des sciences, des techniques, des arts et des croyances. Par exemple l’antiquité en 6ème, le moyen âge en 5éme, la renaissance en 4éme, l’âge classique en 3ème, le 19ème siècle en seconde, le 20ème siècle en première et terminale. Ayant ainsi rattrapé le train en marche les élèves pourraient ensuite bénéficier d’un enseignement supérieur spécialisé.
Le professeur doit résister à la tentation qu’il peut avoir, pour boucler à temps le programme de l’année, de sauter à cheval sur les équations sans avoir auparavant fait pleinement comprendre à l’élève le contexte du problème à résoudre et ce que représentent exactement les différents termes reliés par ces équations. Ces logiciels laisseraient aux élèves tout le temps nécessaire à une bonne compréhension là où la parole du professeur pressé par le temps conserve le même rythme, que l’idée soit facile ou difficile à saisir. Ils pourraient être multipliés sur un même sujet pour tenir compte des différents dons et tournures d’esprit rencontrés chez les élèves. Les mêmes sujets pourraient être repris à différents niveaux : élémentaire, supérieur ou recherche. Ils pourraient bénéficier de la contribution des meilleurs esprits et des meilleures idées en s’inspirant des exemples de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Linux" Linux ou de  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" Wikipedia et, au fil des révisions, des améliorations suggérées par leur usage. Ils devraient être gratuits, simples, robustes, non pollués par des préoccupations commerciales qui finiront par tuer la poule aux œufs d’or. Des institutions désintéressées qui se consacreraient à la réalisation de tels logiciels devraient bénéficier de l’aide de la puissance publique (dont sont dépourvus Linux et Wikipedia). Il est frappant de constater combien les explications d’un homme au sommet de son art sont simples, claires et évidentes, comme le geste parfait de l’athlète qui paraît, de façon trompeuse, si facile à imiter. A les écouter, vous vous sentez tout de suite plus intelligent ! S’il n’est pas possible d’affecter à chaque élève un professeur particulier doué de toutes les qualités nécessaires il est relativement aisé de lui fournir des didacticiels performants et indéfiniment perfectibles. Rechercher une information auprès de celui qui la détient mobilise deux personnes. Si la même information est recherchée dans un livre ou dans un système informatique, elle n’en mobilise plus qu’une seule. Il ne faut pas se priver de ce facteur d’efficacité. Dans la mesure du possible, il faudrait s’inspirer pour élaborer ces didacticiels des écrits des découvreurs car ceux-ci ont dû faire l’effort nécessaire pour se faire comprendre. Il faut aussi donner de la chair aux notions nouvelles par des exemples tirés de la vie courante. Pour intéresser tous les élèves, et pas seulement les binoclards, il faut rester concret. Rien n’est plus pénible que d’entendre les explications de quelqu’un qui n’a pas parfaitement compris lui-même ce qu’il expose ou qui veut faire croire qu’il dispense un savoir ésotérique réservé à quelques initiés. C’est aussi désagréable qu’une mauvaise traduction. Il faut, pour bien comprendre un sujet des explications logiques et claires, une ambiance calme et décontractée, et que le temps ne soit pas compté. Dans le temps imparti aux études le chemin parcouru par chacun pourrait être bien entendu plus ou moins long, encore que la progression soit plus rapide lorsque chaque pas est assuré, mais au moins serait-t-il solidement balisé, contribuant à former des esprits cohérents. Les esprits incohérents, qu’on peut aussi bien dire fêlés, se caractérisent par des manques dans leur réseau d’explications. Ils redoutent de se heurter à des esprits cohérents à cause d’un son émis déplaisant. Ceci les rend irritables, malheureux, insatisfaits, et méchants à l’occasion. Tout esprit normalement constitué est à même de tout comprendre pourvu qu’on l’informe correctement et qu’on lui en laisse le temps, de la même façon qu’un ordinateur universel, comme mon PC ou le vôtre, peut traiter n’importe quel problème calculable s’il est correctement programmé. « Chacun est juste aussi intelligent qu’il veut » (Alain). Ecrits sous forme d’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Hypertexte" hypertextes ces logiciels permettraient de faire apparaître efficacement les liaisons logiques existant entre les différentes notions, qu’il s’agisse de mots, de faits, de principes, de théorèmes, etc. « La difficulté de suivre les subtilités du géomètre vient de la difficulté de saisir et de maintenir les définitions » (Alain). Ils permettraient aux concepteurs de ces logiciels de s’assurer simplement qu’aucune notion n’est utilisée qui n’ait été précédemment explicitée dans le cours lui-même ou dans un cours situé en amont dans l’arborescence des programmes. Ils permettraient aux élèves de s’assurer qu’ils n’ont pas fait l’impasse sur des notions indispensables et, s’ils butent sur un mot, le dictionnaire en ligne leur permettrait d’être renseignés quasi instantanément, alors qu’il faut un peu de temps et d’efforts pour consulter un dictionnaire usuel, vestige comme tous les annuaires papier d’un passé révolu. Le malaise qui règne actuellement dans l’éducation nationale paraît lié pour une bonne part au contraste observé par les élèves entre la modernité du monde dans lequel ils vivent et l’archaïsme des outils et des méthodes mis à leur disposition par l’enseignement. Apprendre n’est pas seulement enregistrer un certain nombre de faits, c’est aussi et surtout mémoriser les liaisons logiques qui existent entre ces faits. Ces hypertextes permettraient à chacun de monter et descendre commodément les échelles du savoir, de ne pas se sentir irrémédiablement isolé des connaissances accumulées par l’humanité au cours de son histoire à cause des lacunes de son éducation. Vous ne vous désolez pas de ne pas connaître tous les pays, mais vous vous sentiriez frustré si certains vous étaient interdits. Les possibilités pour un individu d’explorer tous les savoirs ne seraient limitées que par le temps dont il dispose et par sa propre motivation. La montagne toujours plus haute des connaissances serait en quelque sorte couverte de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Via_ferrata" via ferrata permettant de la parcourir rapidement en tous sens et en sécurité. Il est concevable de donner à certaines de ces voies le nom de ceux qui se sont illustrés dans leur exploration de façon à rendre les exposés plus naturels et plus vivants en les intégrant dans leur contexte historique. Il y aurait ainsi la voie Euclide, la voie Galilée, la voie Newton, la voie Carnot, la voie Darwin etc. Ces voies parcourraient le domaine des sciences dures telles que mathématiques, physique, chimie, et les disciplines directement rattachées telles que biologie, médecine, informatique, sciences de l’ingénieur. Les sciences humaines ne peuvent être incluses facilement dans ce système par manque de rigueur déductive et les voies correspondantes risquent d’être souvent sujettes à révision. La structure d’hypertexte qui caractérise cette présentation est une modélisation assez grossière, mais efficace, des liaisons qui existent entre les neurones représentant dans le cerveau de façon explicite êtres, objets, ou concepts. Comprendre, c’est prendre avec soi, s’incorporer une idée, c’est établir des relations neuronales (logiques) entre un fait ou un concept nouveau représenté par un certain nombre de neurones mobilisés à cette occasion et l’ensemble des neurones représentant déjà d’autres faits ou d’autres concepts. La naissance d’une idée est un phénomène analogue à celui de la cristallisation qui fait s’agglomérer des éléments compatibles. On parle de la cristallisation d’une idée, d’un projet, d’une décision ou d’une passion amoureuse. L’idée est pour ainsi dire un modèle informatique du comportement d’une fraction de la réalité. Elle peut être de type descriptif, narratif, explicatif ou prédictif. L’idée est juste si le modèle qui la traduit décrit avec une bonne approximation le comportement d’une fraction de la réalité telle que l’individu peut l’appréhender avec l’aide de ses cinq sens. Le plus important des modèles, c’est le langage. Cependant les animaux ont des idées sans langage; nous aussi d’ailleurs. L’élève doit prendre la bonne habitude de repérer les idées essentielles et de les intégrer dans sa structure d’explications, seule façon de les conserver durablement en mémoire. Ce que vous retenez de vos lectures, ce sont les éléments qui peuvent être intégrés dans votre structure mentale. L’oiseau va chercher les brindilles propres à renforcer son propre nid. Chacun « suit son idée » comme on dit. On peut parcourir un journal ou un magazine sans mémoriser aucune des informations qu’il contient jusqu’à ce qu’on bute sur un élément insolite, point de départ de nouvelles réflexions, ou sur une idée confortant notre vision des choses. C’est pourquoi il existe un journalisme d’opinion. C’est aussi pourquoi nous croyons si aisément toutes les vilénies colportées sur nos adversaires. Un candidat peut tenir des discours électoraux adaptés à chaque auditoire et globalement incompatibles : chacun écoutera ce qu’il a envie d’entendre. Seuls les maniaques de la logique s’en offusqueront. Le seul remède à des préjugés c’est le doute, un doute universel et bienfaisant. Seuls les fous ne doutent jamais.
Le présent essai s’est élaboré sans réel effort grâce aux différents outils informatiques disponibles. Des idées rencontrées au fil du temps et flottant éparses dans la mémoire de l’auteur sont venues enrichir les quelques pages de la rédaction initiale qui bénéficiait elle-même du robuste tuteur que constitue le texte de Diderot. Ces idées en ont éveillé d’autres et celles-ci d’autres encore, formant comme une marée qui envahit progressivement la plage. Arrivant en ordre dispersé elles ont été incorporées par touches successives selon une méthode qu’on peut qualifier de pointilliste. Quelques lectures stimulantes ont complété le tableau. Beaucoup de ces idées ce sont que des intuitions fortement ressenties. Elles sont proposées dans l’espoir que d’autres s’y reconnaîtront, les confirmeront, les bonifieront…ou les rejetteront pour de bonnes raisons…
J’envie ceux qui sont capables de tout retenir de leurs lectures, ceux dont les souvenirs sont bien rangés dans des tiroirs dûment étiquetés parce qu’ils ont un logiciel de  défragmentation  performant, de sorte qu’ils peuvent débiter ces souvenirs à la demande, sans erreur ni hésitation, comme une question de cours bien apprise. Mon esprit, autant que j’en puisse juger, dispose d’un assez bon squelette mais sa chair est parcimonieuse, diffuse, difficile à exploiter. Si, dans un livre de plusieurs centaines de pages, il trouve ne fût-ce qu’une seule idée qui puisse concourir à sa construction il s’estime satisfait. Il apparaît à l’usage que la plus grande partie des informations qui accèdent à notre conscience à un moment ou à un autre ne sont pas conservées en mémoire sous une forme utilisable, car elles ne trouvent pas d’emplacement où se raccrocher. L’exemple type est celui des faits divers. Par plusieurs canaux nous allons rencontrer dix fois la même information, mais les liens qui nous permettraient de l’intégrer dans la structure de notre esprit font défaut. Si cette information a laissé une trace, elle n’est jamais réactivée et elle finit par s’effacer. Il est important de ne pas se laisser envahir par la profusion des informations inutiles ou hors de propos (comme la publicité ne cesse de nous l’infliger) mais de se donner les moyens de trouver rapidement l’information pertinente. D’où l’intérêt de disposer d’un corpus de connaissances fiable et aisément accessible.
La compacité de leur support permet de conserver commodément ces logiciels d’apprentissage de telle façon que leur utilisateur pourra continuer de s’y référer quand il aura depuis longtemps quitté l’école, retrouvant alors les chemins qui lui ont été familiers. Ils seront disponibles année après année, 24 heures sur 24, 365 jours par an. Ils pourront également rester présents sur Internet. Ils pourront constituer pour un faible coût et sous un faible encombrement le vecteur qui rendra disponible le savoir le plus élaboré jusque dans les villages africains les plus reculés. Une clé USB valant une dizaine d’euros peut contenir plusieurs milliers de bouquins de cinq cents pages.
Consacrer un temps appréciable à chacun de ses élèves, vérifier qu’ils ne souffrent d’aucun handicap particulier, discuter avec eux, leur apprendre à s’exprimer correctement, oralement et par écrit et à rechercher l’information, former leur jugement, aiguiser leur esprit critique, vérifier que leurs connaissances essentielles sont bien structurées, les habituer à aller au fond des choses, les débloquer quand ils sont en panne, les remettre sur les rails quand ils s’égarent, renouer le fil des explications là où il s’est cassé, repérer leurs erreurs et leurs lacunes et leur indiquer les moyens d’y remédier, leur faire prendre conscience de leurs forces et de leurs faiblesses, les encourager, les suivre dans leurs progrès, leur montrer qu’un échec n’est jamais irrémédiable et peut même faire grandir, les initier à l’esprit d’équipe et à la citoyenneté, cerner leur personnalité, comprendre leurs problèmes personnels et familiaux, bref se comporter avec eux en entraîneurs plutôt qu’en professeurs serait semble-t-il beaucoup plus agréable et valorisant, mais aussi plus exigeant, pour les enseignants que de rabâcher toujours les mêmes sujets et de faire de la discipline. Lorsque je veux taquiner un enseignant, je lui propose d’être remplacé par un binôme constitué d’un ordinateur et d’un berger allemand ! Un même professeur suivrait plusieurs élèves. Il pourrait suivre le même élève plusieurs années de suite, jusqu’à ce que l’un des deux éventuellement se lasse. Il devrait être à l’aise dans toutes les disciplines sans qu’il soit nécessaire qu’il soit un puits de science dans chacune d’elles puisque le savoir existe avec rigueur et précision dans les manuels informatisés et qu’il peut être complété aisément par des recherches dans les bases de données existantes. Ce professeur serait l’interlocuteur naturel des parents et partagerait avec eux les soucis de l’orientation de l’élève. Un œil extérieur et averti est le meilleur juge des possibilités d’un élève qu’il voit à l’œuvre depuis plusieurs années. Sans vouloir transformer d’aucune manière les professeurs en auxiliaires de la police ou en représentants d’un quelconque ordre moral il est permis d’espérer que le suivi personnalisé de tous les jeunes jusqu’à leur insertion professionnelle permettrait d’éviter que ne s’amorcent des parcours de délinquance. Les cours magistraux seraient avantageusement remplacés par des heures d’études surveillées entrecoupées de périodes de détente sportive ou artistique. Les élèves travailleraient en suivant les indications du didacticiel, soit isolément, soit par petits groupes, sous la direction du professeur. De ces groupes naîtraient des amitiés pour la vie entière. Le professeur deviendrait en quelque sorte la « hot line » de ses élèves. L’élève pourrait acquérir de cette façon le réflexe de voir dans un responsable hiérarchique, non pas un adversaire, mais quelqu’un qui, sans être pour autant infaillible ni omniscient, a la responsabilité et la capacité de l’aider dans son travail. Rien n’est plus dérisoire que de constater que la seule personne à faire des efforts dans une classe…c’est le professeur ! Ecouter son professeur sans le comprendre est pour l’élève d’une inutilité absolue, sinon pis. Un étudiant qui prend péniblement des notes à la vitesse petit v lorsque le professeur parle à la vitesse grand V ne peut saisir immédiatement les parties difficiles du cours. La seule vertu de cette pratique est qu’il se tient tranquille pendant ce temps-là ! C’est le travail personnel qui présente de très loin le meilleur rapport des connaissances acquises au temps passé. L’élève doit apprendre à se « débrouiller » tout seul le plus possible en allant chercher les informations qui lui font défaut, en les vérifiant, en les recoupant. Il remarquera ainsi que les informations chiffrées fournies par les journaux comportent souvent des erreurs d’ordre de grandeur ou des contradictions internes. Millions et milliards sont souvent confondus. Il devra apprendre également à démêler les véritables motivations des uns et des autres. Il devrait être clair pour tous que les seules références d’un enseignant en tant que tel résident dans les succès de ses élèves. Le savoir est maintenant dévalorisé parce que, grâce à l’extraordinaire abondance des informations disponibles sur le Web et à des moteurs de recherche d’une efficacité tout à fait prodigieuse (et gratuits, au moins en apparence ), il n’est jamais plus éloigné que d’un clic de souris. Ces moteurs de recherche préfigurent ce que pourrait être une intelligence artificielle à la dimension de l’humanité. Le prestige doit désormais s’attacher au savoir-faire. Il faut s’entraîner au cours des études à résoudre des problèmes, ce qui peut être aussi plaisant que de faire des mots-croisés ou de jouer au bridge. Une nécessité pratique, comme celle de parler la langue du pays où votre métier vous a conduit, ou le plaisir du jeu doivent remplacer le plus possible la nécessité scolaire de passer des examens. Lors des examens et des concours les candidats devraient pouvoir accéder librement à toutes les bases de données disponibles, comme c’est le cas dans la vie réelle. Ne pas réinventer ce qui a déjà été trouvé est la première des sources d’économies en tous domaines. Chacun a pu remarquer à quel point les enfants sont à l’aise avec l’outil informatique. Il faut profiter de ces bonnes dispositions avant que l’âge ne les ait affaiblies. D’ailleurs il est devenu aussi indispensable dans le monde actuel de savoir utiliser cet outil que de savoir conduire une voiture ou parler anglais. Paradoxalement, l’enseignement français est insuffisamment présent dans les deux premières disciplines et en manque de réussite dans la dernière. L’enseignement privé moins centralisé et plus riche paraît le mieux capable de s’intéresser à des méthodes aussi nouvelles. Espérons qu’il entraînera par son exemple l’enseignement public. S’il faut commencer par les enfants à mobilité réduite, pourquoi pas ? La seule justification de l’enseignement privé est de constituer pour l’enseignement public une alternative et un aiguillon. Il est néanmoins à craindre que la France ait perdu toute ambition d’originalité dans ce domaine comme dans tant d’autres et qu’elle attende que les Etats-Unis aient amorcé une évolution dans ce sens (ce qui est le cas) pour s’y intéresser. De tels logiciels seront nécessaires si nous voulons envoyer dans l’espace, aux fins de colonisation, des êtres humains en état d’hibernation prolongée ou des embryons congelés. Ils seraient également indispensables si, d’aventure, une catastrophe naturelle ou provoquée réduisait la race humaine à une poignée d’individus réfugiés dans un bunker pendant les quelques centaines d’années nécessaires à ce que la planète terre retrouve un semblant d’équilibre. L’enseignement dispensé dans les entreprises pourrait également bénéficier de ce genre d’outil, en gardant à l’esprit le fait qu’un outil efficace est immédiatement récupéré par la concurrence ! Je crois assez peu à la formation professionnelle dispensée en dehors de l’entreprise. La meilleure façon d’apprendre un métier, c’est encore de l’exercer. Il vaudrait mieux allouer à chaque salarié un contingent d’heures qui lui permette, de sa propre initiative et dans le cadre de l’entreprise, de satisfaire sa curiosité intellectuelle et de se perfectionner. C’est bien sûr pendant la morte-saison qu’il faut affûter ses outils.
Eduqués de la façon qui vient d’être proposée les élèves seraient mieux préparés à leur future vie active parce que placés d’emblée dans des conditions similaires. Ce sera particulièrement vrai lorsque le télétravail se sera répandu, économisant transports individuels et frais généraux des sociétés et des institutions, revitalisant les campagnes, fluidifiant la circulation aux heures de pointe et facilitant la garde des jeunes enfants. La déconnexion des vacances des salariés avec les rythmes scolaires rendue ainsi possible contribuerait à une meilleure utilisation des infrastructures de tourisme et de transport. Le travail à domicile qui a très longtemps été la norme procure un degré supplémentaire de liberté et d’efficacité économique. Travailler semble plus naturel quand on a vu ses parents faire de même. Les systèmes d’enseignement actuels habituent les élèves à la passivité, d’où par contraste les succès étonnants des autodidactes. Il y aurait certainement intérêt par ailleurs à ce que les jeunes, tous les jeunes, entament leur vie professionnelle plus tôt qu’aujourd’hui et plus progressivement, sur cinq ou dix ans, pour réduire le choc psychologique du à l’entrée dans la vie professionnelle, pour habituer chacun à l’idée qu’il est nécessaire de continuer d’apprendre tout au long de la vie, et de le faire de préférence dans des disciplines susceptibles d’être d’une réelle utilité pratique pour l’exercice de la profession choisie. Pendant cette période de transition la part réservée à l’activité professionnelle passerait progressivement de 0 à près de 100% tandis que la part réservée à l’enseignement suivrait le chemin inverse. La finalité de l’enseignement ne peut être de gaver les candidats de connaissances qu’ils oublieront le lendemain de l’examen et qui, de toute façon, ne leur auraient été d’aucune utilité dans leur activité de producteurs. Ne faudrait-il pas au surplus distinguer nettement ce qui est enseignement (comment le monde fonctionne-t-il ?) et ce qui est éducation (comment faut-il se comporter dans le monde ?), voire consacrer un ministère à chacune de ces fonctions ? Il me semble que la part réservée à l’éducation est actuellement trop faible. Un ministère de l’éducation aurait en charge l’entraînement physique et sportif, le chant et la danse, la pratique orale des langues vivantes, l’improvisation et le théâtre, l’éducation artistique, l’éducation civique, sanitaire et sociale Il gèrerait les après-midi des élèves tandis que le ministère de l’enseignement gérerait leurs matinées. L’école doit donner à chacun les moyens de trouver et d’exercer un emploi et le goût de la culture générale. La culture elle-même est l’affaire de chacun, selon ses moyens, ses aspirations et le temps dont il dispose. Le corps professoral resterait donc présent pendant toute la phase d’insertion dans le monde professionnel. C’est une façon d’établir entre le monde de l’entreprise et celui de l’enseignement et de la recherche le lien solide qui manque actuellement, particulièrement en France. Même si cette façon d’enseigner n’était pas plus efficace que la méthode traditionnelle, au moins gagnerait-on à l’utiliser de ne pas gâcher les meilleures années des générations à venir. Les enseignants se plaignent, peut-être à juste titre, de la baisse de niveau de leurs élèves. Une part de l’explication peut être liée à ce que ces élèves ressentent comme une injustice de devoir faire les mêmes efforts que ceux des générations précédentes alors que les efforts physiques et intellectuels demandés aujourd’hui aux autres travailleurs ont été allégés soit par la mécanisation, soit par l’informatique et que les loisirs se sont multipliés. Les logiciels envisagés ne font jamais, à l’inverse de certains professeurs, de remarques désobligeantes. Au contraire ils félicitent l’utilisateur de toute réponse appropriée. La connaissance doit-elle obligatoirement s’enfanter dans la douleur, selon un tropisme proprement chrétien ? Il est normal que la réponse d’un élève soit erronée, qu’un coup manque sa cible. Il faut relever le coup bien ajusté et en féliciter l’auteur. L’action collective nécessite la création de hiérarchies. Pour les rendre supportables il faut accepter les critiques et même les moqueries qui vont du bas vers le haut et encourager les compliments qui vont du haut vers le bas. Je me fais reproche aujourd’hui de ne pas avoir assez complimenté ceux que j’ai côtoyés. La nécessaire attention aux choses peut occulter la nécessaire attention aux personnes. Blâmer ne sert à rien. A peine peut-on hasarder parfois un conseil. Rare est celui qui a toutes les qualités, rare également celui qui n’en a aucune (précepte bouddhique). Si un élève ne révèle aucun don particulier, qu’on en fasse un philosophe ! L’élève n’a pas d’inhibition devant une machine comme il peut en avoir vis à vis d’un adulte. Il n’éprouve pas plus de honte à se tromper en l’utilisant qu’il n’en éprouve à taper à côté de la tête du clou qu’il essaye d’enfoncer. L’instantanéité de la réponse qui évite à l’élève de garder par devers lui des idées fausses est un avantage supplémentaire. Les nuls en math sont aussi intelligents que n’importe qui. Leur problème est qu’ils se sont faits une trop haute idée d’eux-mêmes pour admettre qu’ils puissent être pris en défaut. Ils se sont brûlés une fois, on ne les y reprendra plus ! Pour les mathématiques comme pour tous les arts il faut briser l’os avant de sucer la substantifique moelle. Demandez ce qu’ils en pensent aux danseurs d’un corps de ballet ou aux instrumentistes des grandes formations orchestrales. Il faut privilégier les domaines où l’esprit humain est encore supérieur à la machine, celui des raisonnements flous. L’esprit humain est ridiculisé du point de vue de l’étendue de son savoir quand on le compare aux bases de données existantes. L’enseignement doit faire acquérir le réflexe de les consulter avant de tenter de résoudre un problème quelconque. Le maître mot de l’éducation doit être le plaisir, pas n’importe lequel bien entendu, mais le plaisir de la découverte par le jeu. Il faut donc, autant que faire se peut, alléger le travail de la mémoire et renforcer le plus possible celui de l’imagination et du jugement. Les petits des animaux apprennent en jouant. Pourquoi en irait-il autrement des petits d’hommes ? Une enfance heureuse est essentielle à l’équilibre du futur individu. Enfance heureuse ne veut pas dire enfance dorée. C’est même souvent l’inverse. C’est une enfance libérée des contraintes que l’enfant ne peut pas comprendre.
Dans les conditions actuelles, découragés par le caractère ingrat des études, nombre de nos contemporains se satisfont encore d’explications mythiques qui, acceptées sans examen, ne requièrent guère d’effort intellectuel, car il s’agit de simples leçons de choses. Pour ceux qui ont perdu le fil des explications rationnelles, les idées religieuses comblent un vide. Et les mythomanes qui les colportent n’encouragent jamais leur examen, on comprend bien pourquoi. Ceux qui ne sont pas parvenus à assimiler les acquits de la science, et qui s’en irritent, versent dans une forme ou une autre d’intégrisme, c’est-à-dire de totalitarisme religieux. C’est ce qui doit arriver en ce moment à la fraction la moins éduquée de la population américaine exposée de plein fouet aux révolutions scientifiques et techniques et qui cherche à se raccrocher à des règles simples et facilement compréhensibles. Le néo créationnisme prospère aux Etats-Unis car il est soutenu avec cynisme par des pécheurs en eaux troubles dotés de très gros moyens financiers.
Dans le domaine industriel, on constate que la qualité des produits s’améliore constamment quand ils sont fabriqués de façon automatique. Un bon exemple est la qualité des automobiles qui durent de plus en plus longtemps et ne tombent pour ainsi dire plus jamais en panne quand elles sont convenablement conduites et entretenues. Par contre les erreurs tendent à se multiplier dans les activités où l’homme intervient directement - malgré l’apport de l’informatique. D’où les usines qui explosent, les trains qui déraillent, les navires qui sombrent avec leur chargement, les bâtiments qui s’écroulent, les avions qui s’écrasent…La NASA elle-même envoie dans l’espace un télescope myope et rate un corps céleste par suite d’une grossière erreur d’unités de mesure … Rien ne remplace l’expérience professionnelle du responsable qui, éveillé ou endormi, confronte en permanence dans son esprit tous les éléments d’un dossier, pour tout dire  HYPERLINK "http://www.lafontaine.net/lesFables/afficheFable.php?id=83" l’œil du maître. Combien en ai-je vu de ces jeunes ambitieux qui arrivent dans une entreprise avec l’intention proclamée de tout réformer ? Leur action se révèle le plus souvent calamiteuse le jour où quelqu’un s’avise de faire les comptes. Briller dans les surprises-parties de Neuilly, Auteuil ou Passy est une chose. Mener à bon port le bateau qui vous a été confié en est une autre. Afficher une confiance inébranlable lorsque l’argent n’est pas compté est une chose. Délivrer un objet, un système ou un service de qualité dans le délai imparti et pour un prix de revient minimum en est une autre. S’occuper de tout, c’est ne s’occuper de rien. L’agitation perpétuelle et bruyante qui vise à monopoliser l’attention est une fuite en avant devant les vrais problèmes. Rien n’est plus facile que de diriger une entreprise ou une collectivité quelconque si la dernière ligne du bilan peut être ignorée et si les traites sont émises à échéance de plusieurs années. Les grands créateurs d’entreprises maîtrisaient tous les aspects de leur activité, qu’ils soient techniques, commerciaux, financiers, juridiques, ou politiques. Et ils savaient se montrer discrets. Il est plus facile de passer de la technique à l’organisation, au commerce ou à la finance que l’inverse mais, si on s’en tient à l’aspect strictement comptable des choses, un bon conseiller fiscal est souvent plus précieux qu’un bon ingénieur et donc mieux récompensé. «Ill y a trois manières de se ruiner pour un industriel: je jeu, les femmes - et les ingénieurs. Les deux premières sont plus agréables - mais la dernière est plus sûre ». Il ne faut pas prendre au pied de la lettre cet aphorisme de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Auguste_Det%C5%93uf" Detoeuf mais le considérer comme un avertissement utile. La société moderne a tendance à oublier l’aspect physique des choses et ne plus s’intéresser qu’aux signes qui les représentent. Aussi voit-on aujourd’hui les jeunes gens les plus prometteurs se diriger vers la finance ou le barreau plutôt que vers l’usine ou le labo, ce qui à la longue ne sera pas sans conséquences.
Tous les documents importants du point de vue de l’esprit devraient être écrits ou réécrits sous forme d’hypertextes accompagnés de glossaires permettant à chacun, même non-spécialiste, de s’y retrouver, et ils devraient être disponibles sur Internet. Il n’y aurait pas de difficulté, à ce que je crois, à rassembler dans une même somme logique l’ensemble des savoirs et des règles qui correspondent à la vie scientifique comme à la vie de tous les jours. Il serait plaisant de procéder au même travail sur les textes sacrés et sur bien des écrits philosophiques…Ce serait la façon de révéler le caractère arbitraire ou absurde de certaines liaisons entre ces systèmes philosophiques ou religieux et le tronc commun du savoir scientifique et factuel. Quand un croyant occidental doit arbitrer un conflit douloureusement ressenti entre science et religion, il tranche en faveur de la science, à de rares exceptions près. Quand un musulman doit procéder au même arbitrage, il tranche le plus souvent en faveur de la religion. Dans ses profondeurs le monde musulman n’a pas encore été atteint par les Lumières. Il a pris semble-t-il quelques siècles de retard. Méfions-nous cependant des apparences.
Les philosophes qui écrivent de façon obscure devraient être montrés du doigt, même si c’est leur vocation de faire prendre conscience de l’étrangeté des spectacles les plus familiers. Il ne suffit pas d’être obscur pour être un grand philosophe. N’est pas Héraclite qui veut ! C’est vraiment la moindre des choses que de tenter d’expliquer clairement ce qu’on croit avoir compris. Diderot n’a jamais dérogé à cette obligation. Si un jargon soi-disant spécialisé est utilisé par la plupart des philosophes contemporains c’est parce qu’aux yeux de beaucoup un docteur  HYPERLINK "http://www.site-moliere.com/pieces/malad205.htm" Diafoirus passera toujours pour plus savant qu’un prix Nobel de médecine qui a su rester simple ! Les idées obscures s’enveloppent à dessin de mystère. D’un philosophe à l’autre les mêmes mots prennent des sens différents. Ce ne sont plus les mots qui donnent du sens au texte, c’est le texte qui confère leur sens aux mots. Dés lors HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Fran%C3%A7ois_Revel"  pourquoi des philosophes ? La philosophie n’a pas de langage propre mais doit s’efforcer de parler toutes les langues. On confond volontiers aujourd’hui philosophe et spécialiste de l’histoire des philosophies. Dieu, l’Infini, l’Absolu, l’Eternel, le Sublime, l’Idéal, l’Etre, le Libre-Arbitre, la Transcendance, la Spiritualité, l’Essence, la Finalité sont les trous noirs de la pensée occidentale : rien n’en est jamais sorti. Qui veut faire l’ange fait la bête ! Il faut prendre l’homme à son véritable niveau qui est celui d’un animal « un peu plus parfait que les autres », comme l’assure Diderot, un animal qui a trouvé une niche écologique qu’il occupe seul, n’ayant plus d’autre ennemi à sa taille que lui-même. Le «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cogito_ergo_sum" cogito », le « je pense donc je suis », n’est qu’une mémorable  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Tautologie" tautologie car la notion même de « je » est inséparable de celles d’être et de penser. Aucun autre axiome fondateur ne peut être invoqué à sa place, même pas celui de Parménide d’une insurpassable concision : l’Etre est ! Il est en effet impossible d’avancer quelque proposition que ce soit sans prendre en compte l’environnement général dans lequel cette proposition se situe et l’instrument cérébral qui en est le support. Les métaphysiciens de l’époque classique tels Spinoza ou Leibniz s’y sont essayés. Tous leurs systèmes tournent à vide faute de grain à moudre. C’est une véritable punition que d’essayer de suivre leurs raisonnements tant les termes qu’ils utilisent sont mal définis et leurs suppositions gratuites. On ne peut manquer de faire le parallèle avec ce que nous avons dit de la théologie et du catéchisme. Cette langue, cette manière de penser, nous sont devenues totalement étrangères, alors que Diderot ou même Lucrèce et Démocrite restent nos contemporains comme tous ceux qui ont participé au progrès des sciences. On peut être cartésien ou spinoziste ou leibnizien, on ne sera jamais « diderotiste ». On adoptera le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Rationalisme" rationalisme en philosophie et le HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Radicalisme"  radicalisme en politique. Si ces deux « ismes » ne sont plus guère à la mode, la raison n’en est pas qu’ils sont dépassés, c’est qu’ils ont été intégrés dans la pratique quotidienne de la plupart des gens. Le bon sens n’est jamais sectaire. Nous sommes très prosaïquement condamnés à prendre un train depuis longtemps en marche et à tenter de découvrir l’ordre sous-jacent du paysage qui défile devant nos yeux. En d’autres termes, il s’agit de construire un modèle de la réalité qui obéisse aux règles de la logique car le monde est ainsi fait et qui rende compte aussi fidèlement que possible de toutes nos observations sensorielles. Une idée est vraie si, et uniquement si, elle est opérationnelle ce qui implique aussi qu’elle soit logique. Le tronc commun de toutes les sciences n’est pas la métaphysique comme cela a été longtemps cru mais la logique. Les règles de la logique sont matérialisées dans le cœur des ordinateurs, outils universels par excellence, comme elles le sont au cœur de la matière. Une idée cependant a une durée de vie finie. Au bout d’une durée variable mais suffisante pour que l’idée ait été utile, la réalité s’en détache à cause de petites imprécisions. Aucun modèle construit par l’esprit humain ne peut prétendre représenter tous les aspects de la réalité. Le seul modèle parfaitement fidèle de la réalité, c’est la réalité elle-même. D’une façon générale, il semble que le développement de la philosophie devrait être repris là où les philosophes des lumières se sont arrêtés, même si des travaux ultérieurs à caractère d’ailleurs plus scientifique que philosophique, notamment ceux des grands démystificateurs que furent Freud, Marx et Darwin qui méritent d’être incorporés à ce corpus fondamental. La philosophie est une étape intermédiaire entre la pensée religieuse et la pensée scientifique. Le philosophe se contente d’observer de loin la réalité. Le savant, qui n’a pas peur de se salir les mains, la manipule. L’esclavage a longtemps retardé l’émergence d’une science véritable. C’est la philosophie des lumières plus que toute autre qui façonne encore notre façon de vivre et de penser. Nous avons besoin de penseurs toniques et non de penseurs nostalgiques, désespérés, déconnectés des progrès scientifiques, retombés dans les ornières de la croyance et de la foi ou perdus dans la contemplation de l’Etre. Comment peut-on être métaphysicien sans être d’abord, peu ou prou, physicien ? Il faut partir du connu pour aller vers l’inconnu. La métaphysique ne peut fournir d’explication mais des tentatives d’explication ouvrant la voie dans le meilleur des cas à des explications véritables. Qui veut dresser la liste des problèmes métaphysiques non résolus à ce jour et les formuler en termes compréhensibles par tous, c'est-à-dire rattachés à des réalités constatables ? La philosophie doit accompagner la résolution de ces problèmes, non les détourner ou les obscurcir. Son rôle n’est pas de se substituer de façon d’ailleurs peu convaincante à des religions en difficulté, ni de rassembler comme jadis la totalité du savoir humain, c’est d’être à l’interface entre la science qui se construit et la politique qui se décide. A ce titre elle se doit d’être une « groupie » des sciences. Ce fut vrai de tout temps. C’est encore plus vrai maintenant que la science s’approche chaque jour davantage des mystères les plus profonds de la nature et gouverne tous les aspects de notre quotidien. La philosophie intervient lorsque certains choix ne peuvent être effectués en toute rigueur parce que le nombre des paramètres à prendre en compte est trop important, parce qu’ils ne sont pas connus avec suffisamment de précision ou parce que leurs interactions sont incertaines. C’est d’une certaine manière la science du flou. Son domaine de prédilection c’est la politique qui consiste à édicter des règles précises et durables dans un monde incertain et mouvant, Elle se garde bien de dire « je suis la vérité et la vie », ce qui serait inconséquent de sa part. Elle professe cependant que toutes les observations montrent que le monde réel obéit aux règles de la logique et que la méthode scientifique qui est la mise en œuvre de ce principe sous le contrôle de l’expérimentation est la seule méthode utilisable pour la recherche de la vérité. Elle considère que l’éthique et l’esthétique ne sont que deux chapitres du grand livre de l’évolution par sélection naturelle. Ces deux disciplines désignées par des termes étroitement apparentés échangent volontiers leurs vocabulaires puisqu’on parle d’un acte beau ou laid et d’un tableau bon ou mauvais. L’imagerie populaire associe bonté et beauté, méchanceté et laideur. La beauté physique ou morale est favorable au développement de l’espèce que la laideur contrarie. Des hanches larges et une poitrine généreuse sont appréciées parce qu’elles permettent à la femme de mieux porter et nourrir son enfant. Quand on dit à cette femme : « t’as de beaux yeux, tu sais » c’est qu’on a reconnu chez elle la présence d’un instrument binoculaire de haute précision capable d’appréhender l’environnement avec exactitude et de découvrir avant les autres la nourriture à demi cachée sous les feuilles… « Beauté est promesse de bonheur» a dit Alain. Un paysage est beau s’il y fait bon vivre. Il en est de même d’une belle demeure. Un bel animal ou une belle plante expriment l’appétit de vivre de leur espèce. N’est-ce pas au moment des moissons que la campagne est la plus belle ? La montagne sous l’orage et la mer démontée ne satisfont notre sens esthétique que s’ils sont une occasion pour nous de démontrer notre capacité à survivre dans des conditions difficiles. Personne n’aura envie de trouver beau le spectacle d’une tempête pulvérisant sur des rochers un vaisseau et son équipage ou celui d’une avalanche entrainant vers l’abime toute une cordée d’alpinistes. La beauté où qu’elle se trouve est un hymne à la vie. La bioéthique est une des spécialités les moins contestables de la philosophie, l’étude de l’esprit également, en particulier de cette propriété étrange qu’on appelle la conscience. Cependant, petit à petit, la philosophie, même sur ces sujets, abandonne le terrain à la science et les religions seraient bien inspirées de suivre son exemple. Les grands humoristes sont des moralistes souriants. En matière de philosophie, HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Fr%C3%A9d%C3%A9ric_Dard"San-Antonio est à mon goût plus pertinent que St Augustin. Je trouve dans San-Antonio des petites pilules de sagesse qui me ravissent à chaque fois. St Augustin me tombe des mains car  HYPERLINK "http://www.abbaye-saint-benoit.ch/saints/augustin/index.htm" ses écrits comportent peu d’argumentation, mais beaucoup de citations, de déclarations d’amour au tout-puissant et d’imprécations à l’égard de ses contemporains. Ceci étant, je comprends les philosophes traditionnels qui, tout comme les religieux, s’accrochent à leur gagne-pain ! Il devient de plus en plus difficile, l’âge venant, de s’intéresser à ces fictions philosophiques ou religieuses dénuées d’humour, tant la réalité paraît plus riche et plus variée. Une certaine forme d’identification est aussi nécessaire, raison pour laquelle je goûte modérément les courses de chevaux  et les histoires « gaies » à moins qu’elles ne soient franchement burlesques ! L’homme arrivé à maturité ne s’intéresse plus qu’à des faits avérés qui font honneur à son espèce et il déteste les histoires qui finissent mal.


Crise du sens moral


Songez à l’insécurité et aux violences croissantes dans les villes, les banlieues et les campagnes. Les médias en général et la télévision en particulier ont une bonne part de responsabilité dans cette banalisation. Comment voulez-vous que les jeunes dont la télévision est souvent l’unique point de repère ne tiennent pas pour acquis que la violence est le moyen le plus naturel de résoudre les conflits et de se procurer sans effort les biens convoités ? Mon père changeait de chaîne chaque fois qu’il voyait un revolver apparaître à l’écran ! Autant que d’un refus de la violence, il s’agissait pour lui, je suppose, d’un refus de la facilité. Les seules professions d’avenir sont-elles celles de policier, de gendarme, de CRS, d’agent de sécurité, de vigile, de détective privé, de juge, d’avocat, de geôlier, de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Barbouze" barbouze, de poseur de micros espions et de bretelles téléphoniques, d’installateur ou de visionneur d’écrans de surveillance ? On utilise désormais des caméras pour surveiller les radars cinémomètres de peur du vandalisme et les policiers au travail de peur des « bavures » ! Il faudra bientôt installer suffisamment de caméras pour qu’elles puissent se protéger mutuellement comme les bastions des fortifications à la  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Ingénieur militaire sous Louis XIV" Vauban ! Cette protection sera d’ailleurs illusoire hors des beaux quartiers. Dans tous les autres, le citoyen honnête et courageux équipé d’un téléphone portable est le meilleur auxiliaire de la police. On devine aisément ce que deviendrait un pays où ces moyens modernes de surveillance seraient utilisés à des fins personnelles ou partisanes : un état fasciste au service des plus riches. Il existe certainement quelques nostalgiques de l’heureux temps où l’on pouvait impunément dénoncer son voisin à la kommandantur ! La police et la gendarmerie sont certes de bons auxiliaires des surmoi défaillants, mais une société dans laquelle les activités d’espionnage, de coercition et de répression apparaissaient comme le seul recours possible contre les désordres peut-elle se dire sur la bonne voie ? C’est plutôt remplacer par des traitements coûteux une bonne hygiène de vie. Le prisonnier ne paie nullement sa dette à la société en restant enfermé. Il ne fait au contraire que l’aggraver car sa détention coûte fort cher. Cessant de travailler, il ne paie plus ni impôts ni charges sociales. Il ne paie pas davantage sa dette à la victime. Il en est même empêché. Cette idée de rédemption par le châtiment est une résurgence de la loi du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_du_Talion" Talion selon laquelle, lorsque l’effondrement d’une maison tue le fils du maître des lieux, le fils de l’architecte responsable de la construction doit être mis à mort.
Faut-il augmenter indéfiniment le nombre et la taille des prisons, car le nombre de prisonniers est directement proportionnel à la pression sociale qui s’exerce à l’intérieur d’une société ? Y verrons-nous un jour une moitié de la population gardée par l’autre moitié ? La plupart des gens admettront qu’il faut utiliser pour lutter contre la délinquance répression et prévention. Tout est question de dosage. Souhaitons-nous une violence omniprésente, ce qui serait le cas si nous suivions la politique américaine du tout répressif ? Souhaitons-nous 400.000 détenus dans les prisons françaises (au lieu de 65.000 actuellement et en constante augmentation pour 50.000 places disponibles) ce qui serait l’équivalent pour la France, proportionnellement à sa population, des 2.300.000 détenus des prisons américaines. Un système politique qui incarcère une proportion aussi considérable de ses citoyens ne saurait être pris comme modèle. Jouer sur les peurs pour se faire élire, passe encore, mais il arrive un moment où il faut cesser ce jeu malsain. En ajoutant les prisonniers et leurs gardiens à la cohorte des chômeurs on s’aperçoit que le taux d’inoccupation d’un pays ultra libéral comme les Etats-Unis n’est pas très différent de celui d’un pays comme la France qui l’est moins, et la souffrance et la peur y sont sans doute plus répandues si on se réfère à la consommation qui y est faite de drogues et de religions et à la longévité moyenne de ses habitants. Les prisons ne sont pas autre chose que des garages financés par la collectivité dont les pensionnaires, victimes d’une panne de surmoi ou d’un mauvais réglage de leurs pulsions, devraient au moins sortir réparés. Le contribuable aurait toutes les raisons d’exiger ce résultat. Aujourd’hui on se contente de faire quelques bosses supplémentaires à des voitures déjà déglinguées. Ce qui est fait est fait, malheureusement. Les mesures correctives ne doivent pas être prises en fonction du passé que rien ne pourra changer, mais en fonction de l’avenir. Il doit exister une justice réparatrice comme il existe une chirurgie réparatrice. Une justice qui répare les victimes, cela va de soi, mais aussi les coupables, ce qui est plus difficile. Il faudrait selon moi dire au prisonnier : « Monsieur, il n’est plus possible de vous laisser plus longtemps aller où bon vous semble car vous faites trop de sottises. Cette mesure d’enfermement n’est pas une punition, mais une précaution que la société est obligée de prendre à votre égard. Nous ne vous reprochons rien car il serait absurde de vous demander d’avoir été un autre que celui que vous étiez à l’époque des faits qui vous ont amené ici, mais nous allons nous occuper de vous pour vous remettre d’aplomb afin que vous cessiez d’être un danger pour vous-même et pour les autres ». Aux éventuels récidivistes il faudrait s’adresser sur le ton qu’un médecin utilise pour dire à son patient : « Vous avez encore attrapé une angine, il va falloir envisager un traitement de fond ». Au lieu de cela, que lui dit-on ? : « Nous avons soigneusement examiné votre cas. Nous savons tout de vos antécédents et des circonstances dans lesquelles se sont produits les faits qui vous sont reprochés. Nous sommes assurés du diagnostic que nous avons posé. Cependant, nous n’allons pas vous prescrire de traitement mais vous infliger dix ans de quarantaine et d’inactivité. Si, au bout de ces dix années, vous êtes guéri, vous pourrez remercier vos parents de vous avoir doté d’une solide constitution ! ». Avec un peu de mauvais esprit on pourrait avancer que justice et police conjuguent leurs efforts pour maintenir un volant de délinquance suffisant pour justifier leur activité, qu’il s’agit en somme de corporatisme. Les centres de détention devraient être au contraire transformés en centres de remise en forme physique et mentale. Les leçons élémentaires de morale naturelle apprises à l’école devraient y être reprises et approfondies puisque elles ne semblent pas avoir été comprises et assimilées par le prisonnier. Dans le domaine médical on s’oriente de plus en plus vers le renforcement des défenses naturelles de l’organisme en remplacement de traitements plus classiques qui présentent trop souvent des effets secondaires indésirables. Aucune tentative sérieuse n’a été faite à ma connaissance pour comparer l’utilité d’une même somme d’argent selon qu’elle est dépensée en répression ou en prévention. Il en résulte que, dans ce domaine particulièrement, les décisions prises sont purement aléatoires, opportunistes ou démagogiques. Comme le faisait remarquer mon professeur de philosophie, nos meilleures garanties résident dans la conscience de nos contemporains. Non seulement ce sont les meilleures mais ce sont aussi, et de beaucoup, les moins chères. Un exemple qui devrait être médité est celui donné par la ville de New York. En deux décennies le nombre de crimes violents y a été réduit de 80%, sans augmentation importante des forces de police, sans modification de la législation, sans modification de la situation économique ou de la composition ethnique de la population, sans efforts particuliers dans le domaine des drogues ou de la prostitution et tout en diminuant le nombre des incarcérations. Le secret semble résider principalement dans le fait que les forces de police ont été rendues plus visibles et qu’elles ont été concentrées sur les points chauds. Financièrement et humainement le bilan est donc très positif. Quand un problème est pris au sérieux par des professionnels compétents disposant du temps nécessaire et de la confiance de leurs mandants, il a quelques chances d’être résolu. En France la police a au contraire déserté les zones sensibles et on y emprisonne à tire-larigot. Au-delà de ces améliorations purement techniques il faut essayer d’alléger le travail de la police par des progrès en matière d’éducation, de solidarité et de partage. La sagesse populaire dit qu’il vaut mieux prévenir que guérir ; mais qui s’en soucie ? Il est plus facile d’agir sur les statistiques que sur la criminalité, sur les préfets que sur les délinquants, sur les journalistes que sur les évènements, plus facile d’ajouter un article à la constitution que de réformer de mauvaises habitudes.
Rendre la justice c’est réparer ce qui peut l’être et éviter les récidives. Punir n’est qu’un moyen qu’il faut utiliser avec les plus extrêmes précautions. Avant toute chose il faudrait soumettre chaque prisonnier à un examen pour trouver la racine de son comportement, et négocier avec lui l’application de sa peine. Autrement dit, il faudrait le considérer comme un homme ayant des qualités et des défauts, des droits et des devoirs, et, peut-être pour la première fois, une dignité à respecter. On pourrait lui proposer des travaux assez exigeants physiquement, au dessous toutefois du seuil de pénibilité car il ne faut pas user prématurément la mécanique ni dégoûter de l’effort (le critère est qu’il faut être capable durant l’effort de penser à autre chose qu’à l’effort). La plupart de ceux qui sont enfermés seraient restés dehors s’ils avaient été obligés de labourer leur champ pour survivre. Quelle que soit la rentabilité réelle de ces travaux leur bon accomplissement permettrait aux prisonniers, selon une convention préétablie, de bénéficier d’une libération anticipée. Un jour travaillé efficacement vaudrait par exemple un jour de liberté («  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Arbeit_macht_frei" arbeit macht frei » ricaneront les mauvais esprits). Ceci donnerait aux personnes enfermées un but tout à fait clair et les réhabituerait à l’effort. On ne voit pas pourquoi le dicton selon lequel l’oisiveté est mère de tous les vices ne s’appliquerait pas en prison également. Faire croupir pendant des années des délinquants dans la même cellule exigüe ne peut que les rendre enragés ; entre autres inconvénients. Alain cite le cas de ces prisonniers russes complètement démoralisés et retrouvant soudain toute leur énergie quand on leur demande de déblayer la neige, travail utile à tous et d’abord à eux-mêmes. Le « julot » entretenu par ces dames et tous ceux qui croient déchoir en travaillant, s’ils veulent sortir plus tôt, seraient obligés de trimer comme les copains au lieu de rouler des mécaniques. Sans compter que l’effort physique qui active la circulation du sang est bon pour le cerveau aussi et que la fatigue physique a un effet calmant certain. Constater l’amélioration de son état général physique et mental serait pour le prisonnier un puissant motif d’encouragement à réformer sa conduite. La réduction de la durée des peines dégagerait les moyens nécessaires à une meilleure prise en charge de ceux qui sont enfermés. Nous n’allons pas précisément dans cette direction ! Cette nouvelle approche des problèmes de délinquance devrait concerner par priorité les jeunes qu’il faut faire participer, d’une manière ou d’une autre, à la réparation de ce qu’ils ont cassé ou, si c’est matériellement trop difficile, les inciter à effectuer à titre de compensation une prestation d’utilité collective. C’est ainsi que les jeunes délinquants pourraient demander à l’armée de terre d’y être incorporés, étant entendu qu’à la première incartade sérieuse, ils feraient retour à la case prison. C’est ainsi que les jeunes délinquantes pourraient demander aux services hospitaliers d’être utilisées comme personnel de service. Après ces épisodes purificateurs, les casiers judiciaires retrouveraient leur virginité. Celui ou celle qui travaillerait de bon cœur et élaborerait un projet de vie tenant la route pour le moment de sa sortie serait sauvé. Bien entendu, les condamnés resteraient sous contrôle judiciaire jusqu’au terme nominal de leur peine et même au-delà. La victime d’une maladie grave subit longtemps des contrôles réguliers, même si elle a été déclarée guérie...
Quant aux agressions sexuelles, elles sont probablement trop sévèrement réprimées. Il peut y avoir une extrême disproportion entre la lourdeur de la sanction et la réalité du dommage. Nous devons cela à l’influence conjointe des pères-la-pudeur, des chiennes de garde, de l’obsession sécuritaire et d’une tradition importée des Etats-Unis où l’on a longtemps lynché les malheureux noirs qui avaient eu un geste déplacé à l’égard d’une femme blanche. Qui plus est la répression de ces agressions entraîne des erreurs judiciaires grandioses du fait que des inculpations et des condamnations peuvent être prononcées en l’absence de preuves matérielles suffisantes. Comment savoir après coup avec certitude s’il y a eu provocation ou non, consentement ou non, traquenard ou non ? Une telle certitude est d’autant plus nécessaire que la législation est plus répressive. On n’envoie pas quelqu’un derrière les barreaux pour plusieurs années, voire plusieurs dizaines d’années, sur de simples présomptions. Ce n’est plus l’importance du dommage qui définit le degré de la punition dans ce cas, mais c’est le degré de la punition qui définit l’importance du dommage. Comment voulez-vous que la victime d’une agression sexuelle ne se sente pas souillée à tout jamais quand elle constate la sévérité inouïe avec laquelle son agresseur a été puni ? Aurait-elle la même honte si la société ne s’en mêlait pas ? N’est-ce pas cette honte qui peut la pousser au suicide ? Et si son agresseur voulait un jour se venger du mauvais traitement subi ? Un viol est la chronique d’une double faiblesse : faiblesse de l’homme par rapport à ses pulsions, faiblesse de la femme devant la supériorité supposée de l’homme en force physique et en détermination. On a souvent reproché aux forces de police d’accueillir les victimes d’un viol avec une certaine désinvolture et on attribue cette attitude à un machisme incorrigible. Ne faut-il pas au contraire y voir l’effet d’un bon gros bon sens qui pousse les policiers à dédramatiser la situation. Le machisme ordinaire sert bien souvent de paravent à une réelle affection pour la gent féminine. Toute relation sexuelle entre personnes majeures devrait être réputée librement consentie, sauf pour celle qui se dit victime à apporter des preuves irréfutables du contraire Quel homme sensé irait risquer une partie particulièrement sensible de son anatomie entre les incisives d’une fille qui est farouchement contre? Une bonne administration de la justice veut que le doute profite à l’accusé. Beaucoup de femmes s’estiment bafouées par cette règle et y voient une manifestation insupportable de l’inégalité entre les sexes. Elles oublient qu’il y a bien d’autres inégalités. Veulent-elles partir à la guerre et exercer les métiers les plus dangereux à la place des hommes ? Souhaitent-elles mourir cinq ou dix ans plus tôt ? La parole de la plaignante doit pouvoir être mise en doute. Il est inadmissible que, faute de preuves matérielles suffisantes, le sort d’un homme dépende aussi directement de l’habileté respective des avocats des deux parties. Il est inadmissible que, sur simple dénonciation, la réputation et la carrière d’un homme puissent être ruinées, qu’il puisse être interpellé, menotté, et mis en détention avant même tout examen de sa culpabilité, Constitue-t-il une menace si immédiate pour l’ordre public qu’il faille sans délai l’arracher à ses devoirs habituels ? Ce qui est urgent, c’est d’écouter, de rassurer et de réconforter la plaignante. Un viol est un vol avec violence commis sous l’empire d’une drogue naturelle, testostérone ou autre, dont la sécrétion échappe à tout contrôle, comme échappe à tout contrôle la bouffée de colère qui soudain peut vous saisir. Pensez si ceci vous arrive à cet accessoire suranné qu’est un anti-monte-lait. Chez des êtres frustres la colère ou le désir deviennent rapidement ingérables. La victime d’un viol court plus de danger aujourd’hui du fait de l’alourdissement des sanctions exercées à l’encontre des violeurs. Un violeur conséquent ne prendra pas le risque de laisser en vie le seul témoin d’une voie de fait qui par la-même aboutit à un crime. L’utilisation d’un préservatif devrait être une circonstance atténuante reconnue par la loi. Mieux vaut cent femmes violées avec préservatif qu’une seule assassinée. Messieurs les violeurs, protégez-vous ! Un indice corporel minime abandonné sur le lieu de l’offense peut suffire à confondre le coupable. Les femmes, tant qu’elles sont à la merci de leur agresseur, auraient tout intérêt à considérer cette mésaventure comme un hommage non sollicité rendu à leurs charmes. Des conseils devraient être prodigués aux jeunes filles pour qu’elles aient un maximum de chances de sortir à peu près indemnes de ces situations périlleuses. Doivent-elles faire semblant par prudence d’y prendre du plaisir ? Je n’ai pas remarqué que les femmes que leur physique expose plus particulièrement à ce genre de risque soient celles qui réclament les punitions les plus sévères, mais plutôt que les plus acharnées sont celles qui ont un compte à régler avec la gent masculine. Un parangon de féminité fait plus pour la cause des femmes qu’une féministe acerbe. Pour un moment d’égarement on va retirer et pour longtemps un père à ses enfants, un fils à ses parents, un époux à sa femme, un travailleur à son entreprise et ajouter un pensionnaire à la communauté carcérale, pensionnaire qu’il va falloir nourrir, loger, blanchir, soigner, garder aux frais du contribuable tandis qu’il n’y aura pas un sou pour aider la victime à oublier l’épreuve qu’elle vient de traverser.
On veut maintenant condamner à une amende vexatoire les clients des travailleuses du sexe oubliant qu’il y a beaucoup d’hommes dont la femme est absente, ou souffrante ou, comme disait plaisamment Montaigne, n’y va que d’une fesse, comme s’il n’y avait pas assez de procès devant les tribunaux, pas assez d’emplois délocalisés et trop de touristes étrangers. La prostitution haut de gamme ne sera pas affectée. Ceux qui en ont les moyens iront se fournir de sexe et de cigarettes à nos frontières, au grand dam de la balance commerciale de la France et de son petit commerce. Les autres déshérités du sexe, ceux qui n’ont pas les moyens de payer, n’auront plus qu’à se la mettre sous le bras. C’est encore et toujours « salauds de pauvres ». Imaginez un peu ce que deviendra la vie des policiers obligés de se cacher dans les fourrés et de se transformer en voyeurs pour prendre les délinquants en flagrant délit ! On se croirait revenu au 19ème siècle quand un commissaire alerté par un mari jaloux pénétrait dans la chambre des amants sans y avoir été invité, vérifiait de la main que le lit était encore chaud et dressait un constat d’adultère. Observez que les meilleures actrices n’ont pas dédaigné les rôles de courtisanes au grand cœur. Leurs clients sont dépeints comme de pauvres bougres un peu ridicules mais néanmoins respectueux de leur partenaire d’un moment. Celles qui se livrent à cette activité dans la vie réelle ne vendent pas leur corps; elles le louent pour une durée limitée et en retrouvent la pleine possession après une prestation dont le contenu et le terme ne souffrent d’aucune ambiguïté. Il faut être un brin névrosé et tout à fait oublieux des traditions nationales pour vouloir empêcher tout ce petit monde de vivre tranquillement sa vie comme il l’entend ! Irait-on jusqu’à condamner de façon humiliante un Georges Simenon qui ne se cachait pas d’avoir connu bibliquement des milliers de ces dames ou un Victor Hugo octogénaire qui prenait la peine de noter pour chacune de celles qu’il avait honorées les spécialités et le rapport qualité prix ? Faisons plutôt en sorte que toutes les mères célibataires puissent subvenir à leurs besoins et à ceux de leurs enfants, aidons à s’en sortir celles qui exercent cette activité contre leur gré, mettons hors d’état de nuire ceux qui les brutalisent et les rackettent et conférons un statut à celles qui ont la vocation d’infirmière du sexe.
Il est à la portée du premier venu d’instituer des châtiments toujours plus rigoureux et c’est toujours populaire. Ceci ne constitue pourtant même pas le début du commencement de l’amorce d’une solution aux problèmes de délinquance et ne sert qu’à donner au bon peuple l’illusion que ceux qui ont décidé ces aggravations ont agi. Les hommes politiques laissent ensuite aux magistrats le soin de se débrouiller avec une législation mal adaptée et des moyens insuffisants. Faire baisser la délinquance sans accroître la somme totale des malheurs ni mettre à mal les libertés individuelles et sans dépenser plus d’argent, c’est autrement plus coton ! Personne n’a jamais dit qu’il ne fallait pas se préoccuper des victimes. La querelle porte sur la meilleure façon d’agir pour éviter qu’il y en ait de nouvelles. La balance, emblème de la justice, rappelle aux magistrats qu’ils doivent rendre des sentences équilibrées, non pas imprévisibles et aléatoires. Elle ne doit pas leur faire oublier l’autre balance qui réside dans le cerveau de chaque justiciable. Lorsqu’ils se préoccuperont moins du passé du criminel que de son avenir et de celui de sa victime, les magistrats pourront enfiler enfin la blouse blanche du médecin et raccrocher définitivement leur hermine au portemanteau. Cette nouvelle approche ne recueillera pas nécessairement leur adhésion car il est beaucoup plus confortable de noter de relaxe à perpétuité les fautes d’un prévenu que d’être jugé sur la réussite d’une réinsertion.
Ce qui vient d’être dit sur le traitement de la criminalité peut surprendre et choquer et va à rebours de réflexes immémoriaux. Sans vouloir faire de rapprochement abusif, il faut remarquer que les premiers à avoir dit que le mouvement apparent du soleil était dû à ce que la terre tournait sur elle-même et autour du soleil ont rencontré la même incompréhension de la part de leurs contemporains. D’autres évolutions sont déjà intervenues dans la façon d’évaluer les comportements individuels. Il n’y a pas si longtemps, les déficients mentaux faisaient l’objet de toutes les moqueries. Maintenant que l’on sait que leur comportement résulte le plus souvent d’une maladie génétique, on ne rit plus du tout, mais on essaie de les aider et de les soigner, espérant que, dans un avenir plus ou moins proche, la thérapie génique aura raison de leur handicap. Nous avons donné précédemment d’autres exemples d’évolution des mentalités à propos de certaines pratiques sexuelles. Ce n’est pas en refusant de regarder la réalité en face et en gardant obstinément les mêmes schémas de pensée qu’on a une chance de faire avancer la solution du problème de la criminalité ou celui de l’indépendance de la magistrature qui ne peut pourtant, si elle ne dépend que d’elle-même, rester éternellement en état d’apesanteur. La puissance publique ne peut se contenter de fournir le support matériel et législatif de l’action des magistrats. Elle doit aussi donner son aval à leur organisation hiérarchique. C’est sur un Président de la République aux fonctions mieux délimitées que le pouvoir judiciaire doit être en mesure de s’appuyer pour résister aux pressions d’où qu’elles viennent.
Nous avons assiste récemment à l’abandon de beaucoup d’acquits des républiques précédentes. Liberté, Egalité Fraternité, ce slogan n’avait plus cours. Contraintes, Inégalités, Méfiance, telle semblait être la nouvelle devise républicaine. L’obsession « sécuritaire » promue par des pécheurs en eau trouble envahissait les esprits. Ce néologisme montre bien que cette obsession allait très au delà du souci légitime de sécurité et qu’il s’agissait d’une idéologie destinée à contraindre les gens, à les faire rentrer dans un moule choisi par les plus frileux ou les plus tordus, et surtout à gagner les suffrages d’électeurs mal informés ou pusillanimes. On condamne un journal pour avoir publié des informations vitales pour les citoyens au nom d’une législation d’inspiration bourgeoise qui ne veut pas que l’on sache que le grand-père couchait avec la bonne ni qu’il a fait fortune en trahissant ses associés. Certaines condamnations valent mieux qu’une légion d’honneur. Il est grand temps qu’une législation protège les lanceurs d’alerte comme  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Julian_Assange" Julian Assange ou  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Edward_Snowden" Edward Snowden. Le fichage systématique de tous les citoyens qui se distinguent d’une façon ou d’une autre est particulièrement inquiétant. On demande de la transparence aux citoyens, fort bien. Mais il faudrait que l’administration joue aussi le jeu et qu’elle transmette leurs fiches aux citoyens concernés afin que ces derniers puissent faire part de leurs observations sur les faits ou les opinions qui y sont rapportés et que ces observations soient mentionnées sur ces mêmes fiches. Selon toute vraisemblance ces observations qui auraient valeur de témoignage seraient plus intéressantes que les informations de départ lesquelles auraient néanmoins valeur d’avertissement sans frais. Si les fiches concernant un possible délinquant lui étaient communiquées au fur et à mesure de leur établissement il hésiterait peut-être davantage, se sachant repéré, au moment du passage à l’acte. Doit-on soupçonner policiers et politiciens de préférer le spectaculaire d’une arrestation, source de dividendes médiatiques et carriéristes, à l’efficacité anonyme ? Le chasseur déteste qu’on alerte le gibier et le pécheur qu’on effraie les poissons. Un état bien policé n’est pas un état ou les taux d’élucidation des crimes sont élevés mais celui ou les taux de criminalité sont bas. Pour l’heure, ces procédés souterrains ont bien failli transformer un état qui fut jadis républicain en état policier, sans autre justification que partisane. L’obsession sécuritaire touche tous les domaines. Sur certaines portions d’autoroute les limitations de vitesse imposées transforment à certaines heures le flot des voitures en convoi mortuaire. La multiplication anarchique des ralentisseurs, sponsorisée croirait-on par les fabricants d’amortisseurs, va dans le même sens. Le respect des limitations de vitesse tourne à l’obsession chez celui qui s’est fait surprendre plusieurs fois par un radar. Il en vient à focaliser son attention sur les panneaux de signalisation et sur son compteur de vitesse au lieu de chercher un chemin sûr et une vitesse adéquate dans le flot des voitures, ce qui ne va pas précisément dans le sens de la sécurité, d’autant que la gestion de ce paramètre supplémentaire accroît sa fatigue. S’il utilise un régulateur de vitesse pour alléger cette fatigue, c’est encore pis car il a une tendance naturelle à lui laisser la main alors qu’il faudrait mieux qu’il module la vitesse de façon continue en fonction des aléas de la circulation. Ces contrôles radar ne détectent pas les comportements véritablement dangereux. Ils ne sanctionnent jamais celui qui slalome entre les files de voitures un jour de grand départ, qui déboîte sans regarder ni prévenir ou double sans visibilité, ni celui qui est devenu inapte à la conduite ou qui conduit sous l’emprise de l’alcool, de la drogue ou des médicaments ou simplement celui qui s’endort au volant. Ils ne sanctionnent pas davantage les motards supersoniques, ni les conducteurs de BMW ou d’AUDI qui se fichent éperdument des limitations de vitesse et plus encore du sort de l’industrie automobile nationale. Le grand banditisme routier échappe le plus souvent à la police. L’instauration de radars mobiles pourrait modifier quelque peu cet état de chose, mais à quel prix ? Imposer une vitesse maximum qui reste la même quels que soient la densité du trafic, la visibilité, l’état de la chaussée, du véhicule et du conducteur ne peut correspondre à un optimum. Dans ce domaine comme dans bien d’autres c’est l’appel au sens des responsabilités qui est le plus efficace et le moins cher. Il faut, bien entendu, consacrer quelques efforts pour le promouvoir et le contrôler intelligemment. Tout responsable d’un accident, quel qu’en soit la gravité, devrait faire l’objet d’une sanction pénale de principe et d’un suivi personnalisé.
Songez à cette impudence qui a conduit tel ou tel à revendiquer un ministère pour des raisons purement personnelles ou qui a conduit tel ou tel autre à faire état de sa fonction pour promettre à ses électeurs un traitement préférentiel s’ils lui faisaient à nouveau confiance !? Ne parlons pas de ceux qui cherchent à se faire élire ici ou là pour éviter d’aller en prison ! Qu’est devenue la nécessaire impartialité de l’Etat ? Que dire de la multiplication des lois d’exception liées au terrorisme ? Il y a déjà une anomalie dans l’association de ces deux mots : loi et exception. Mais surtout cette anomalie conduite à réserver un traitement exceptionnellement sévère à toute personne seulement soupçonnée, c’est à dire, potentiellement, à n’importe qui et permet à une police de l’ombre d’agir de façon incontrôlée tant dans ses objectifs que dans ses méthodes. Ce peut être un premier pas vers une police politique, mais il y en a eu d’autres, comme l’utilisation des moyens de l’Etat et de l’argent des contribuables pour espionner d’honnêtes citoyens. Le responsable d’un soupçon injustifié ne sera jamais mis en cause. C’est une régression sans précédent des droits de l’homme, un retour aux lettres de cachet, à la justice de l’ancien régime. Notre conducator se plaint aujourd’hui d’avoir été écouté par des juges qui ont en l’occurrence agi de façon parfaitement légale. Est-il sûr de ne jamais avoir ordonné ou laissé pratiquer des écoutes parfaitement illégales ? N’est-ce pas l’histoire de l’arroseur arrosé ?
Songez à l’ubiquité de la corruption et des pratiques mafieuses. Songez à l’argent de provenance douteuse qui s’investit dans les activités les plus respectables. Que ce soit dans les affaires, la politique, ou même le sport il est difficile d’accéder aux premières places sans enfreindre quelque loi ou règlement. Je me souviens d’avoir faut sourire le PDG d’une grande société en lui disant qu’une certaine affaire avait été gagnée de façon tellement régulière que c’en était presque suspect. Quand vous serrez la main d’un individu d’apparence prospère, il y a une bonne chance pour que ce soit celle d’un fraudeur du fisc. Dire de quelqu’un qu’il est honnête, c’est presque dire qu’il est inapte à exercer de hautes fonctions. Parmi tous les postulants qui ont l’équipement intellectuel nécessaire, ce sont souvent ceux qui bénéficient d’un sens moral à géométrie variable qui parviennent aux premières places et s’y maintiennent. Qui utiliser ? Qui écarter ? Qui tromper ? Qui calomnier ? Qui trahir ? Voilà les questions qu’ils se posent. Le phénomène est particulièrement visible en politique où les électeurs ne redoutent nullement de réélire des représentants qui ont été condamnés par la justice. Sans illusions sur ce qu’ils sont et sceptiques quant à ce qu’ils peuvent faire, ils recherchent un homme de spectacle capable au moins de les distraire ou un débrouillard capable de les favoriser, fut-ce de façon illégale. Ils blackboulent des politiciens honnêtes et réélisent triomphalement des tricheurs et des voleurs. Des scientifiques américains et canadiens ont cherché à savoir s’il existait une relation entre niveau éthique et réussite matérielle. Les résultats statistiques convergents des diverses méthodes utilisées montrent que le niveau éthique des individus varie en raison inverse de leur réussite matérielle. Il est ainsi confirmé que l’honnêteté est un handicap social dont sont souvent victimes les classes inférieures. Les fraudes commises au détriment de la sécurité sociale par les employeurs sont beaucoup plus lourdes de conséquences que celles commises par les salariés et elles sont bien sûr beaucoup moins réprimées. Les religions voudraient que nous soyons honnêtes par calcul, alors que c’est la générosité de notre cœur qui le demande et que c’est la société qui nous en dissuade.
Les salaires extravagants que se sont octroyés certains dirigeants et auxquels s’ajoutent encore des avantages multiples et conséquents font apparaître ces dirigeants comme des loups prédateurs plus que comme des bergers, à l’instar de ces tyranneaux africains qui alimentent des comptes en Suisse aux dépens de leurs compatriotes misérables. Ces largesses ne récompensent pas la réussite, le travail ou le talent, mais le pouvoir et les connivences. Comment ces dirigeants peuvent-ils demander sans rougir des sacrifices financiers à leur personnel en ces temps de rigueur ? Comment osent-ils se présenter devant lui à visage découvert ? Il leur faut absolument des parkings réservés et des ascenseurs particuliers. Que ne dirait-on pas si des conditions analogues étaient faites aux hommes politiques dans nos pays démocratiques ? Par une « votation » le sage peuple suisse vient d’interdire ces pratiques abusives. Celui qui sait dissimuler son indifférence au sort de la collectivité à laquelle il appartient dispose automatiquement d’une marge de manœuvre supplémentaire. « Tout temps passé à travailler est du temps perdu pour faire avancer sa carrière » comme l’a noté un humoriste clairvoyant. Comment le bon citoyen qui constate ces abus ne serait-il pas à la fois découragé et moralement déboussolé ? La chute du communisme soviétique a fait oublier toute pudeur (mais pas le goût du secret) aux détenteurs du capital et à leurs mandataires. Certains vous diront que la Loi du Marché justifie ces inégalités qui existent aussi pour les artistes et pour les sportifs. S’il est vrai que plusieurs poètes associés n’écriront pas forcément un meilleur poème, il est certain que vingt deux bons footballeurs amateurs, simplement défrayés de leurs déplacements, disposeront aisément de onze vedettes surpayées. Dans les affaires comme en politique, le nombre de joueurs n’est pas limité et les dirigeants sont aisément interchangeables, cf. la valse des PDG et des ministres. Admettrait-on que le commandant en chef d’une grande armée touche une solde exorbitante et des primes de destruction faramineuses pendant que ses soldats se feraient trouer la peau pour pas un rond ? Les fonctions suprêmes exigent une éthique appropriée. Le seul argument qui pourrait justifier de tels avantages, c’est que leurs bénéficiaires soient capables d’y renoncer.
Songez à la judiciarisation galopante qui gagne tous les rouages de la société, cette judiciarisation que provoque la recherche de la réussite à tout prix, au mépris du droit. Il est normal que le droit se complique car les progrès des sciences et des techniques suscitent sans cesse de nouveaux problèmes. Cependant, les conflits qui en résultent ne peuvent pas continuer d’être traités avec les moyens et les méthodes du droit romain. Le premier Etat qui consentira à un effort de modernisation, qui procédera à une synthèse concise et organisée de tous les textes, servira de modèle à tous les autres. Les modifications ultérieures devront être signalées typographiquement pendant un certain temps, invitant à les examiner d’un œil critique. Une disposition qui résiste au temps et aux alternances politiques a des chances d’être une bonne disposition.
Crise économique et sociale

Toutes les barrières s’opposant à la libre circulation des hommes et des capitaux ont été levées en urgence, particulièrement en Europe, y assurant ainsi le triomphe sans partage du libéralisme. Or, tout enfant qui se livre sur la plage avec son seau et sa pelle à des travaux d’hydraulique appliquée sait bien que l’on ne peut sans désordres majeurs ouvrir une brèche dans un barrage tant que les niveaux d’eau ne sont pas sensiblement égaux de part et d’autre. Les habiles profitent de ce qui reste de dénivellation pour faire leurs affaires. Est-ce une bonne pratique que d’abattre des cloisons étanches quand il y a un avis de tempête ? Les travailleurs manuels et intellectuels français sont concurrencés à la fois par les progrès de l’automatisation et de l’informatisation et par le dumping social et environnemental des pays d’Asie ou d’Europe de l’Est. Ils sont donc de plus en plus souvent frappés par un chômage dont le chiffre réel va très au-delà de ce qui est avoué par les statistiques officielles. Comment le chômage des jeunes pourrait-il cesser d’augmenter en France quand la croissance économique est nulle ou négative, quand des pans entiers de l’industrie disparaissent, quand des sociétés financières font faillite (sans que leurs dirigeants en soient affectés), quand les postes disponibles dans l’administration, l’enseignement et l’armée diminuent, et quand la loi fait en sorte qu’un employeur a intérêt à faire travailler en heures supplémentaires les salariés qu’il a sous la main plutôt que de procéder à de nouvelles embauches ? Qu’elle souffre du chômage ou de la guerre, la jeunesse a toujours été un âge difficile. Heureusement, elle ne dure pas ! Il ne suffit plus de donner à ses enfants une formation convenable pour leur garantir un emploi. Il faut en plus disposer des relations nécessaires pour leur trouver le tout premier. Qu’y a-t-il de plus désolant et contreproductif que de contraindre à l’inactivité des jeunes hommes et des jeunes femmes au moment même où ils disposent d’un maximum d’énergie ? La France pourrait bien ne pas se relever d’un tel gâchis. Le droit constitutionnel à l’emploi semble plus facile à faire respecter que le droit constitutionnel au logement qui suppose des infrastructures adéquates. Comment des hommes politiques peuvent-ils inscrire dans le marbre de la loi des objectifs qu’ils savent inaccessibles ? Un tel cynisme est proprement accablant ! Ayant pris goût semble-t-il à ces pantalonnades certains veulent inscrire maintenant dans l’airain de la Constitution la « règle d’or » de l’équilibre budgétaire. Il s’agit là d’un serment d’ivrogne caractérisé de la part de ceux qui n’ont cessé de gonfler les déficits ! De toute manière, ce type d’engagement ne sera qu’un chiffon de papier devant les nécessités du moment comme on l’a vu du droit au travail, du droit au logement ou de la règle européenne limitant les déficits à 3% du PIB ! Une telle règle ne peut avoir de sens qu’une fois que l’équilibre budgétaire aura été effectivement rétabli. Dans les circonstances actuelles, elle serait immédiatement violée. On peut sauter sur son siège comme un cabri en criant « règle d’or, règle d’or, règle d’or », si on ne précise pas la façon dont on compte la respecter, on n’a rien dit. D’aucuns voudraient assortir le non-respect de cette règle de sanctions financières automatiques. Autant tendre à l’homme en train de se noyer un gilet de sauvetage lesté de plomb! Il y a en Europe une poignée de personnes sérieuses capables de la respecter et une bonne vingtaine de rigolos qui ne voient pas plus loin que la prochaine échéance financière ou électorale. Dans d’autres enceintes on crie « le climat ! le climat ! le climat ! » avec la même conviction et les mêmes résultats. La solution la plus naturelle serait que les pays européens renoncent à l’Euro qui crée plus de problèmes qu’il n’en résout et renégocient simultanément leur dette, faute de quoi nous sommes partis pour une longue galère. Il est plus facile de changer la monnaie que le tempérament national. Il ne faut pas oublier que les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Trente_Glorieuses" Trente Glorieuses ont coïncidé en France avec une monnaie nationale, des droits de douane conséquents, une forte inflation et une implication très directe de l’état dans la vie économique, c'est-à-dire une situation aux antipodes de celle que l’Europe made in england nous a imposée. Une politique dérogeant au dogme libéral européen ne peut être mise en œuvre qu’en constituant une forme ou une autre d’union sacrée allant du parti communiste au front national et excluant seulement les mouvements politiques qui ont fait trop visiblement allégeance aux intérêts financiers anglo-saxons. A l’heure actuelle le tissu économique européen et particulièrement français continue de dépérir. Des sociétés se sont spécialisées dans le rachat des entreprises en difficulté. Elles les vident de leur substance puis les liquident, ce qui épargne à leurs anciens propriétaires la peine de faire le sale boulot d’équarrissage. Au travers de sociétés opaques, de l’argent sale rachète des sociétés saines. Des délocalisations et des licenciements à la hache sont pratiqués au seul profit d’actionnaires qui laissent à la collectivité le soin de réparer les dégâts. Certains font valoir que le coût salarial lié à la production est souvent assez faible par rapport au prix payé par le client final, prix constitué essentiellement du coût des matières premières, des frais d’études, des taxes et impôts, des frais d’assurance et de transport, des frais de contentieux et des marges commerciales. Ce raisonnement valable au niveau d’une entreprise est toutefois pris en défaut au niveau général si on observe qu’en remontant jusqu’à la source les facteurs constitutifs des différents postes du prix de revient on aboutit de toute façon à des heures travaillées et payées, directement ou indirectement. Délocaliser des usines largement robotisées ne présente aucun avantage économique quand ce déménagement les éloigne de leurs clients. La véritable motivation de ces délocalisations qu’aucune contrainte technique ou économique ne justifie n’est-elle pas de pouvoir, par un jeu d’écritures et de ventes croisées, concentrer les profits là où la fiscalité est la plus réduite, siphonnant ainsi les richesses des pays à fort taux d’imposition vers les pays à faible taux ? C’est l’astuce favorite des sociétés multinationales qui gagnent tellement d’argent par ce biais qu’elles vont jusqu’à rémunérer grassement tous leurs actionnaires. Leur capacité de produire bon marché étouffe les entreprises seulement nationales qui ne bénéficient pas des mêmes facilités. Délocalisations et paradis fiscaux, même combat ! Pour la collectivité nationale privée ainsi et d’emplois et de rentrées fiscales un travail insuffisamment efficace est toujours plus efficace que pas de travail du tout. Ces règles de bon sens élémentaire ne sont-elles pas ce qui différencie de la France un pays comme l’Allemagne qui s’en tire plutôt bien ? Nul ne peut reprocher à des entreprises de chercher à faire le profit maximum. C’est quasiment dans leurs statuts et les actionnaires sont vigilants quant à la défense de leurs intérêts. Sauf irrégularité dûment constatée il est donc absurde de vouloir mettre en cause personnellement les représentants du monde financier qui nous ont mis dans la panade. Ils n’ont fait qu’appliquer les règles d’une société orientée vers le profit. Les banquiers font leur métier qui est de gagner un maximum d’argent sans enfreindre la loi autant que possible. S’il faut y ajouter une motivation personnelle je dirais qu’ils le font plus par goût du sport que par goût du lucre. C’est le système et non les personnes qu’il faut mettre en cause. Des garde-fous législatifs auxquels le libéralisme répugne doivent être installés pour que la collectivité ne fasse pas les frais de tous ces dysfonctionnements. La crise économique cesserait aussitôt si chacun payait ce qu’il doit à qui il le doit. Si chacun remboursait à l’Etat tout ce qu’il lui a volé, les comptes publics seraient instantanément excédentaires. Cette crise économique a des racines politiques et morales. Il est étonnant que des idées aussi simples ne soient presque jamais exprimées, ni par les hommes politiques ni par les commentateurs les plus en vue. Je suppose qu’ils les trouvent puériles, mais ne dit-on pas que la vérité sort de la bouche des enfants ? « Indignez-vous ! » dit HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/St%C3%A9phane_Hessel"un vieil homme chargé d’honneurs et les jeunes de Madrid et d’ailleurs lui font écho. Chacun tend au mieux sa voile sans se demander si, collectivement, il ne serait pas possible de changer les règles de la régate. Tout progrès vers une société plus harmonieuse exige que le plus grand nombre et particulièrement les décideurs prennent conscience de cette situation. Voyez les embouteillages qui se produisent à un carrefour où s’engagent sans pouvoir le traverser des automobilistes égoïstes et pressés d’aller gagner de l’argent. C’est une assez bonne image du libéralisme institué par Reagan et Thatcher, un histrion et une boutiquière, et qui s’est répandu depuis sur toute la planète. Ce libéralisme permet aux plus chanceux de faire prévaloir leurs intérêts au détriment des plus nombreux. Les états qui se sont laissés tenter par ces mirobolantes  HYPERLINK "http://en.wikipedia.org/w/index.php?title=Reaganomics&oldid=182263378" Reaganomics en paient aujourd’hui le prix, menacés qu’ils sont pour la plupart de faillite. Ils sont obligés aujourd’hui d’appuyer à la fois sur l’accélérateur de l’endettement pour maintenir l’activité économique et sur le frein des dépenses publiques pour réduire des déficits devenus insupportables. C’est un moyen assez sûr de faire caler le moteur de l’économie. Depuis vingt ans qu’on libéralise et qu’on privatise l’économie française devrait marcher comme sur des roulettes si l’on en croit la pensée économique dominante ! Depuis que j’ai l’age de m’intéresser à ces questions j’ai toujours entendu les hommes politiques s’engager à « redresser » l’économie. A l’heure qu’il est, suite à tous ces efforts, l’économie française devrait être plus droite que droite ! Les anglo-saxons, même quand il s’agit des démocrates américains ou des travaillistes anglais, sont persuadés que c’est le libéralisme qui assure la prééminence de leur pays et refusent par nationalisme de mettre ce système en cause alors que leurs peuples respectifs en sont aussi les victimes. Il faut dire que les anglo-saxons sont soumis depuis longtemps à un pilonnage continu pour leur faire entrer cette idée dans le crâne, un pilonnage qui n’a d’égal que le pilonnage pro religieux auquel ils sont soumis par ailleurs en permanence. L’importance de la masse monétaire détenue par les plus riches fait que les taux d’intérêt sont aujourd’hui au dessous parfois des taux d’inflation. Compte tenu des progrès gigantesques de l’efficacité des processus de production une politique d’austérité devrait être le dernier des remèdes envisagés. Que des difficultés sérieuses surviennent et ce libéralisme vole en éclats comme on vient de le constater lors de la crise de 2008. Il ne peut être question de laisser ouverts les casinos financiers lorsque sonne l’alarme. La régulation par le marché est par nature instable dés que des spéculateurs interviennent massivement. Tous ceux qui sont à l’affût du profit achètent lorsque les prix commencent à monter et vendent dés qu’ils amorcent une descente, ce qui amplifie évidemment la moindre oscillation. Comment stabiliser un bateau dans lequel marins et passagers se précipitent à la vitesse de la lumière du côté où il penche ? Il en résulte la formation de bulles financières qui gonflent sans mesure et éclatent en faisant toutes sortes de dégâts économiques et humains. Il existe de plus des bulles négatives encore plus graves qu’on appelle dépressions. Seule la puissance publique peut introduire dans la régulation par le marché les termes d’amortissement indispensables. Le monde financier devenu planétaire est un cheval fou que personne ne peut plus maîtriser, et surtout pas des cavaliers qui sont presque aussi fous que lui.
Songez à l’appauvrissement de l’Etat qui vend ses plus beaux actifs et s’endette de façon déraisonnable. Les privatisations auxquelles s’est livrée la puissance publique ont eu pour conséquence immédiate la cartellisation des banques, des télécommunications, des sociétés de service aux collectivités locales en attendant le gaz et l’électricité, ce qui ne saurait tarder, avec le renchérissement des prestations correspondantes pour le particulier sans défense, sous le prétexte fallacieux d’ouvrir le marché à la concurrence ! En réalité, il s’agit d’affaiblir suffisamment les entreprises détenues par l‘Etat pour que des intérêts privés puissent les racheter à vil prix. Les meilleures de ces entreprises nationales seront rachetées par des intérêts étrangers, à moins que l’action conjuguée des écologistes et des libéraux, en leur imposant des charges insupportables, ne les aient fait bien avant basculer cul par-dessus tête. Quel sens cela a-t-il, dans une économie qui se veut libérale, d’obliger EDF à se faire concurrence à elle-même en vendant sa production à ses concurrents à un prix très inférieur à celui que ceux-ci pourraient obtenir en produisant eux-mêmes ou à leur acheter leur production à un prix très supérieur à celui auquel elle pourrait elle-même la fabriquer. ? Est-ce même légal ? La sidérurgie remise sur pied à grand frais grâce à l’argent des contribuables français est rachetée pour une bouchée de pain par des intérêts étrangers alors qu’elle allait enfin recommencer à gagner de l’argent. Les compétences scientifiques et techniques dans ce domaine, fruit de plusieurs siècles d’activité métallurgique, ne tarderont pas à être perdues pour la communauté nationale, de même que la perspective de nouveaux investissements et la pérennité des rares emplois qui y subsistent. Dire que la privatisation des entreprises publiques est nécessaire à leur développement est une aimable plaisanterie. On veut en réalité dire par là qu’une entreprise publique peut difficilement conclure des ententes occultes visant à limiter la concurrence. Le fardeau imposé à une entreprise par un actionnaire qui exige que son investissement lui rapporte 15% chaque année est évidemment très supérieur à celui imposé par un banquier qui se contente d’un intérêt de 5%, à fortiori à celui imposé par un Etat qui ne demande rien du tout ou presque. Un niveau de profitabilité de 15% est d’ailleurs inaccessible sans une forme ou une autre de monopole ou de connivence. On a observé dans certains secteurs qu’un nouvel arrivant peut briser une entente occulte et faire baisser certains prix de moitié. Quel est le banquier qui refuserait un prêt à EDF ou l’aurait refusé à feu GDF ? Quel industriel du secteur de l’énergie refuserait un partenariat avec ces entreprises unanimement appréciées ? Est-ce que la défunte Régie Renault a construit de moins bonnes voitures ou fait de plus mauvaises affaires que ses homologues du secteur privé ? Les opérations de concentration réalisées ces dernières années ont augmenté la profitabilité des grandes entreprises de façon spectaculaire pour des raisons qui n’ont que très peu à voir avec les conditions techniques de production, mais beaucoup à voir avec la possibilité d’échapper aux fiscalités nationales et aux règles de bonne conduite concernant la concurrence. S’il est possible de lutter efficacement contre la formation des trusts, les ententes occultes bénéficient le plus souvent de l’impunité. Dire qu’on peut durablement imposer ses prix de vente à une entreprise privée est une autre plaisanterie. Tout monopole public démantelé donnera naissance à terme à des ententes ou à un monopole privé, au détriment du consommateur qui se trouvera payer plus cher un service souvent dégradé. Avant qu’on ne parle de privatisation des réseaux ferroviaires les trains ne tombaient pour ainsi dire jamais en panne et arrivaient presque toujours à l’heure. La conséquence la plus visible des privatisations est l’explosion des grandes fortunes et une relative paupérisation des classes moyennes. Une autre conséquence est l’affaiblissement des syndicats qui pourraient freiner cette dérive. Il y a des monopoles naturels. Tout ce qui est réseau en fait partie et doit rester sous le contrôle direct de la puissance publique. Pourquoi avoir dénationalisé des activités qui avaient été nationalisées il y a soixante ans à la satisfaction générale ? Pourquoi avoir multiplié par trois, bientôt par quatre, des infrastructures de télécommunication dont l’innocuité a été mise en cause quand les prestations et les prix d’ailleurs excessifs proposés par trois des quatre sociétés correspondantes sont tout à fait comparables ? Il vaudrait mieux, à l’instar de ce qui se passe en Allemagne, développer les régies municipales qui prennent en charge, avec toutes les aides techniques nécessaires, l’exploitation de tous les réseaux, qu’il s’agisse d’électricité, de gaz, d’eau potable, d’assainissement, de chauffage urbain ou de télécommunications avec des synergies intéressantes dans les domaines technique, administratif et social. Un abonné qui éprouve des difficultés pour régler sa facture d’électricité à sûrement des problèmes avec les autres ! On assiste aujourd’hui à l’évolution inverse, c’est à dire à la privatisation des services municipaux. Cette privatisation est populaire auprès des élus car elle leur donne le pouvoir de choisir l’entreprise adjudicataire, avec les facilités que ceci peut procurer, et elle atténue leurs responsabilités, notamment pénales. Il est toujours plus confortable d’être donneur d’ordres que de faire soi-même le travail. Les banques de dépôt elles-mêmes sont un service public. Que des banques d’affaires gagnent ou perdent des fortunes, c’est leur problème quand elles jouent avec leur propre argent ou avec de l’argent qui leur a été confié par des personnes désireuses de jouer. Mais qu’elles mettent en péril la vie économique toute entière, qu’elles fassent perdre à leurs clients leurs économies, leur travail, leur logement ou leur retraite, c’est rigoureusement inadmissible. Les sociétés nouvellement privatisées se sont lancées dans le mercantilisme, si ce n’est l’escroquerie, avec le zèle des néophytes. A la suite de la concentration monopolistique de certaines activités par les multinationales, certains ne manqueront pas de demander, non plus leur nationalisation devenue impossible, mais leur « mondialisation » pour laquelle la législation internationale est inexistante et la volonté politique des gouvernements nulle. Dans un champ libre et sans règles ne peuvent subsister que des féodalités s’appuyant sur des forteresses. C’est ainsi que le pouvoir politique qui, en démocratie, appartient à tous est confisqué dans le système actuel par le pouvoir économique qui appartient à quelques uns. La logique de l’intérêt des actionnaires poussée à ses limites aboutit à la disparition de tous les concurrents à l’exception d’un seul dans un monde où les barrières et les distances ont été abolies. Dans le meilleur des cas, il peut en subsister deux ou trois qui s’entendent de façon occulte. Cette pseudo concurrence, qui ne profite qu’au marché de la publicité, sert avant tout à donner le change. Pour éviter cela, dans chaque domaine d’activité où il y a des profits excessifs, des tractations suspectes ou des soupçons d’entente, une solution pourrait consister à conserver, racheter ou créer une entreprise nationale garante de la régularité des pratiques et de la vérité des prix et qui pourrait servir par ailleurs de laboratoire social. C’est particulièrement vrai d’activités dont le bon fonctionnement est vital pour la plupart des citoyens telles que la grande distribution, le système bancaire ou le système de santé. On pourrait songer également pour remplir ce rôle à des sociétés coopératives dont l’objet social serait défini dans ce sens. Il n’est ni possible, ni même souhaitable d’empêcher les professionnels d’un même secteur de se parler. En cas d’entente illégale dûment constatée l’amende infligée pourrait contraindre un industriel à vendre son entreprise laquelle pourrait être alors, selon son importance, nationalisée ou confiée à une coopérative ouvrière. On ne peut pas dire que l’économie chinoise soit pénalisée du fait qu’elle ait conservé un grand nombre d’entreprises publiques dans les secteurs les plus vitaux.
Songez que certains souffrent de la faim pendant que d’autres luttent contre l’obésité, que certains sont accablés de travail pendant que d’autres sont privés d’emploi, que des SDF meurent de froid sous les fenêtres d’appartements douillets et inoccupés. Sans le génie de Coluche ils mourraient de faim. Bien entendu les individus sont inégalement doués, mais les inégalités génétiques d’aptitude à la production de richesses ne doivent pas être très supérieures aux inégalités physiques que l’on peut observer par ailleurs. Si on admet que la différence au départ est comme un et deux, les plus doués, encouragés par leurs succès, se perfectionneront tandis que les moins doués se décourageront. A la fin du processus les inégalités se seront fortement accrues. La société, bien loin de gommer ces inégalités, s’applique à les amplifier. Dans une société idéale, les plus doués aident les moins doués, ils ne cherchent pas à les exploiter. Le christianisme est clairement en faveur de l’aide, beaucoup de ceux qui se disent chrétiens ont tendance à l’oublier. On ne peut manquer d’être frappé par l’existence simultanée de dépenses somptuaires extravagantes et de misères noires non secourues. La paupérisation croissante, non seulement des chômeurs, mais d’un grand nombre de travailleurs de base ne résulte pas de circonstances physiques objectives, du moins dans l’immédiat. On devrait normalement s’attendre à ce que le progrès des techniques qui augmente la productivité augmente aussi dans les mêmes proportions la prospérité générale. En particulier la maîtrise des techniques issues de l’informatique, passé la phase d’apprentissage ce qui est aujourd’hui à peu près le cas, améliore considérablement la qualité des produits et en réduit le coût. Les gains de productivité qui en résultent ne doivent pas être accaparés et gaspillés par le petit nombre des nantis. Au cours des dernières décennies la part des travailleurs dans la totalité des richesses produites a diminué de 10% tandis que celle captée par le système financier augmentait d’autant. Il n’y a que le 1% le plus riche de la population qui a vu son sort s’améliorer durant cette période. Nous ne pouvons pas accepter les reculs actuels avec fatalisme comme on accepte une catastrophe naturelle. C’est purement et simplement une question d’organisation de la vie en société et de comportement des uns et des autres. C’est un défi que l’intelligence peut et doit relever. On a pu mesurer après la crise de 1929 ce qu’il en coûte de ne pas le faire. Cette situation est d’autant plus insupportable qu’il s’agit d’une conséquence directe de l’enrichissement excessif et souvent frauduleux de certains agents économiques qui pourraient très aisément se passer de ce surcroît de richesse. La mondialisation permet de soustraire à l’impôt des revenus qui y étaient auparavant assujettis, et les sommes correspondantes sont le plus souvent stérilisées par l’usage qui en est fait. Il existe certainement des moyens pour mettre fin à cet état de chose. Si un monde sans émulation est triste et gris, un monde conçu comme un jeu de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Monopoly" Monopoly ou tout avantage acquis par le passé donne un avantage décisif dans la compétition à venir incitera toujours les joueurs malchanceux lors de leurs débuts à renverser la table de jeu. Quel serait l’intérêt d’une compétition sportive dans laquelle des points gratuits ou des points de pénalités seraient attribués aux joueurs en fonction du classement bon ou mauvais obtenu par leurs parents ? On imaginerait plus facilement de rééquilibrer les chances comme dans les courses à handicap. Les athlètes sont modestes parce qu’ils ont tous les mêmes chances au départ. Il y a déjà suffisamment de différence entre les talents des uns et des autres. Il ne faut pas que la société en rajoute. La répartition des qualités naturelles suit une  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Loi_normale" courbe de Gauss ou courbe en cloche. La plupart des gens disposent en conséquence de qualités moyennes mais les qualités « moyennes » de l’homo sapiens sont déjà très remarquables. C’est ce qui frappe souvent certains représentants des classes dites supérieures lorsque des circonstances exceptionnelles telles que guerre ou catastrophe naturelle les mettent en contact avec des représentants des classes les plus humbles/ Ils découvrent alors avec étonnement un courage, une noblesse d’âme, une qualité de jugement, une résilience qu’ils ne soupçonnaient même pas. Il paraîtrait relativement normal que la répartition des revenus et des patrimoines soit le reflet de la répartition des talents naturels, mais il n’en est rien. Dans la plupart des sociétés la répartition des responsabilités et des revenus qui en découlent obéit au principe hiérarchique pyramidal nécessité par l’action collective. Sa représentation comporte une pointe très effilée et une base très large. Les deux courbes ne peuvent donc se superposer. Il en résulte que peu de gens ont des responsabilités et des rétributions qui correspondent à leurs qualités naturelles mais que des gens en petit nombre ont plus et qu’un très grand nombre de gens ont moins que leur part légitime. C’est ce qu’on peut voir sur le graphique de la page suivante où la courbe des revenus (en rouge) est tassée vers la gauche par rapport à celle des qualités naturelles (en vert) sous l’effet de la pression hiérarchique. Le phénomène est encore plus accentué quand on considère la répartition des patrimoines (en bleu) pour la raison que l’épargne, ce qui reste du revenu après les dépenses courantes, croit proportionnellement plus vite que le revenu et s’accumule au fil du temps et des générations. Chacune de ces courbes décrit la répartition de la population en fonction du paramètre considéré. Le petit schéma annexé indique que la surface dS (en grisé) représente la fraction de la population dont le paramètre caractéristique est compris entre p1 et p2. L’aire comprise entre une des courbes et l’axe horizontal représente donc la population totale. Aux imperfections près de cette représentation, les 3 aires sont égales. La courbe représentative correspondant aux patrimoines n’a pu être représentée en totalité car les 30% les plus pauvres possèdent moins de 1% de la totalité du patrimoine, ce qui envoie la courbe dans la stratosphère (tandis que les 10% les plus riches en détiennent la moitié). La vie économique ressemble au jeu de l’assiette au beurre ; ceux qui sont près du sommet s’y maintiennent aisément, mais ceux qui s’en éloignent quelque peu sont irrémédiablement éjectés par la force centrifuge. Si l’on examinait l’évolution des revenus au cours des dernières années on constaterait que leurs courbes représentatives ne cessent de se tasser de plus en plus vers la gauche. Ces trois courbes à elles seules illustrent et expliquent le malaise profond de toutes les sociétés où un capitalisme libéral débridé a prospéré. Si un jour il apparaissait sur la courbe des patrimoines un creux au niveau des classes moyennes délimitant deux populations distinctes, l’une riche et l’autre pauvre, ce serait le signe que la société a changé de caractère, que, de démocratique, elle est devenue  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Ploutocratie" ploutocratique. D’autres inconvénients majeurs seront apparus bien avant.

A l’occasion de l’élection présidentielle de 1995 à laquelle il était candidat Jacques Chirac a baptisé «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Fracture_sociale" fracture sociale » ce phénomène. Une fois élu il a malheureusement négligé d’en corriger les causes et les effets. C’est la richesse aujourd’hui qui constitue le facteur principal de différenciation entre les individus, Lorsque c’était la force ou le talent militaire qui faisaient la différence, comme ceci a pu être le cas après la chute de l’empire romain ou durant l’aventure napoléonienne, la fracture sociale a donné naissante à deux classes sociales spécifiques : noblesse d’ancien régime ou noblesse d’empire d’une part et tiers-état des citoyens ordinaires d’autre part. Il restait le clergé pour assurer un minimum de cohésion sociale. Ce dernier est maintenant assez largement marginalisé dans ce rôle Il serait assez déprimant, deux siècle après l’abolition des privilèges, de constater l’apparition d’une nouvelle classe sociale liée à l’argent et se perpétuant grâce aux lois existantes sur les héritages.
Dans une organisation hiérarchisée la place si convoitée de N°1 est l’une des plus faciles à occuper. La preuve en est que les monarchies, systèmes politiques particulièrement stables, se sont contentées de monarques dont l’intelligence n’a jamais semblé très au dessus de la moyenne. L’esprit acéré su duc de Saint-Simon jugeait que Louis XIV, grand roi s’il en fut, avait un esprit « au dessous du médiocre ». Certains rois furent même carrément fous sans que ceci conduise à remettre en cause le principe monarchique. Je crois qu’on peut en dire autant de beaucoup de gens très riches Il n’y a nulle difficulté à occuper les meilleures places ; les occuper à la satisfaction générale, c’est une autre paire de manches. N’est-ce pas d’ailleurs le même mot de fortune qui désigne le hasard et l’extrême richesse ? Pour faire fortune, il existe trois moyens principaux en dehors des moyens clairement illégaux : le premier, honnête, mais difficile et aléatoire consiste à innover de façon positive, le second, un peu plus aisé et un peu plus sûr mais un peu moins honnête, consiste à rechercher les ententes pour se répartir les marchés ou instaurer un monopole, ce qui exige d’établir une forme ou une autre de connivence. Le troisième qui couronne les deux premiers consiste à ne plus payer d’impôts en profitant de toutes les facilités ouvertes aux fortunes déjà constituées. Dés lors, la richesse se nourrit d’elle-même. Que resterait-il des plus grandes fortunes si l’on en ôtait tout ce qui est dû aux héritages, aux intrigues matrimoniales, à la stratégie de l’enfant unique, à la galanterie, à l’effet « Monopoly », à la chance, à l’évasion fiscale, à la spéculation, aux trafics en tous genres y compris de drogues et d’êtres humains, à la corruption, aux promesses non tenues, aux accords occultes, au favoritisme, à l’abus de confiance, à la fraude, aux manœuvres déloyales, aux pratiques anti-concurrentielles, à la violation des règlementations, aux informations piratées, aux commissions frauduleuses, aux interventions occultes, à l’escroquerie, au mensonge, au chantage, au vol, au pillage, à la délation, aux enrichissements douteux suivant les privatisations, les nationalisations ou les malheurs de la patrie, à la collaboration avec l’ennemi, à la trahison de ses amis, quelquefois au crime ? Ces faits st méfaits sont effectivement ce qu’on découvre très souvent lorsque le hasard soulève un coin du voile. Pour s’enrichir aux dépens d’autrui il faut évidemment le tromper. Je crois qu’une des méthodes les plus répandues et les plus efficaces consiste à feindre l’amitié, ce qui endort la vigilance de la future victime, puis d’avancer ex abrupto la proposition scélérate. Prise au dépourvu et soucieuse de ne pas décevoir cette soudaine amitié, la victime choisie accepte la proposition et tombe dans le piège qui lui a été tendu. Pendant longtemps l’usage de la violence a été le mode le plus habituel d’enrichissement. Il l’est encore en bien des pays et en bien des circonstances (spoliation des juifs déportés par exemple). Connaissez-vous beaucoup d’hommes riches qui aient éprouvé le besoin de raconter dans le détail la manière dont ils avaient fait fortune ? Même chez les américains pour qui la richesse n’a rien de honteux aucun ne l’a fait de façon marquante. Ce serait le plus souvent une longue liste de tromperies. Ma belle-mère qui avait pu constater, du fait de son activité professionnelle, les ravages provoqués dans les familles par les questions d’argent priait pour que ses enfants ne deviennent jamais riches. Je l’adjurai, mais en vain, de cesser ses prières…Ceci me rappelle une conversation que j’avais eue avec un ingénieur américain, fort sympathique au demeurant, avec lequel je travaillais en binôme. A la fin d’un repas il me montre des photos de sa maison, de sa voiture, de son chien et de sa femme. Pour ne pas être en reste je sors de mon portefeuille une photo de mon épouse. Il la regarde et dit « Oh, elle est jolie ! » puis il me regarde plus attentivement et ajoute « vous devez être riche ! ». Alain faisait remarquer à juste titre qu’on se déplace volontiers pour applaudir un artiste, un sportif, un savant, un bienfaiteur, mais jamais pour saluer un homme riche. Il doit bien y avoir une raison à cette froideur. La raison, c’est un doute raisonnable sur l’origine de sa fortune. Transformer la réalité par le travail, manuel ou intellectuel comporte des risques dont les plus malins savent s’exonérer. On s’enrichit moins en créant soi-même de la richesse qu‘en captant celle qui a été créée par d’autres. Une justice immanente fait qu’il est heureusement beaucoup plus gratifiant de créer de la richesse que de se l’approprier. L’homme riche est un malin et quand on parle de malin, le Diable n’est pas loin ! Malgré l’intérêt évident que ceci pourrait présenter pour leur entreprise les dirigeants ne font jamais pratiquer de tests de quotient intellectuel à leurs salariés de peur qu’on ne leur demande de s’y soumettre également. Il y a très peu de discussions paritaires à l’initiative du patronat sur l’organisation du travail de peur de constater que les salariés ont d’aussi bonnes idées que les patrons. Vous avez le droit d’avoir de bonnes idées dans une entreprise à condition que le patron puisse en revendiquer la propriété. Si les créateurs qui réussissent savent forcément de quoi ils parlent, il n’en va pas toujours de même de leurs héritiers. Pour les héritiers désargentés l’esbroufe, l’intimidation et l’escroquerie restent encore les plus sûrs moyens de s’enrichir rapidement. Vous apprendrez qu’untel a fait fortune pour avoir acheté sur un quai de gare le manuel d’un auteur américain expliquant comment on peut réussir dans la vie en se rangeant toujours du côté du plus fort ! Deux tempéraments dés lors s’opposent : ceux qui courtisent tous les pouvoirs dans l’espoir d’être cooptés et ceux qui préfèrent rester en retrait pour conserver leur autonomie de jugement. Comme disait Fénelon : « Les princes ont un pouvoir infini sur ceux qui les approchent ; et ceux qui les approchent ont une faiblesse infinie en les approchant. » L’absence d’éthique est une cause majeure d’enrichissement pour qui sait dissimuler. Je n’en veux pour preuve que les salaires et avantages exorbitants que s’allouent sans aucune retenue les dirigeants des grandes sociétés au moment même où ils demandent à leurs employés de réduire leurs salaires, voire de prendre la porte. Cette attitude, rémunératrice pour celui qui l’adopte, est ruineuse pour l’action collective attachée au maintien des équilibres. L’un des premiers devoirs des états est de lutter contre la concentration spontanée mais excessive des fortunes et des pouvoirs. L’opinion publique le sait bien qui est toujours du côté de guignol contre le gendarme, symbole de l’abus de pouvoir toujours menaçant.
La guerre a disparu, du moins pour le moment, dans les pays développés et nul ne s’en plaindra, et les révolutions sont passées de mode. Ce sont toutefois ces bouleversements qui brassaient les biens et les personnes et leur disparition laisse à la société le temps de se décanter. Comme dans toute décantation il se produit une stratification. Ajoutez à cela les inégalités croissantes engendrées par la technologie qui privilégie l’excellence mécaniquement reproductible et un libéralisme conçu comme celui du renard dans un poulailler. Toutes ces causes réunies conduiront un jour ou l’autre à un véritable système de castes, de fait sinon de droit. Un système ploutocratique où l’argent permettra tout et excusera tout. Un système où les plus riches vivront entre eux dans des zones sécurisées coupées du reste du monde et se déplaceront entre ces zones dans des 4-4 blindés surpuissants ou des hélicoptères, et où les plus pauvres seront tenus à l’écart dans des ghettos gouvernés par la violence et le fanatisme religieux. Ces ghettos, dont nous avons déjà un avant-goût, sont pourtant les plus grands réservoirs d’une énergie qui ne demande qu’à s’exprimer. C’est certainement là que se situe l’avenir. Les trois personnalités les plus appréciées de français taxés souvent de racisme sont un métis, un noir et un kabyle. Cherchez l’erreur. Certains réactionnaires impénitents ont la nostalgie d’un monde où la richesse conférait la noblesse, permettait d’échapper à l’impôt et donnait aux votes un poids prépondérant. Nous retournerons inévitablement à cette situation si nous ne réagissons pas. Avons-nous oublié les drames qui se sont produits lorsque nous nous sommes débarrassés de l’Ancien Régime ? Quelle sera la place de l’homme pauvre lorsque des machines intelligentes feront tout mieux que lui et pour moins cher ? Quelle sera celle du violoniste lorsqu’un robot exécutera à la perfection, de jour comme de nuit et pour trois fois rien, toutes les œuvres du répertoire, celle du Grand-maître d’échecs battu par une petite boite tenant dans la poche, celle du polytechnicien payé au SMIC
Songez à la montée en puissance d’immenses pays, avides comme nous de produire et de consommer, et pas plus préoccupés que nous des conséquences. Dans l’état actuel des techniques il est difficilement concevable que les populations de l’Inde et de la Chine adoptent le mode de vie occidental sans épuiser rapidement la planète Terre. Songez aussi aux innombrables pays où règnent la famine, les maladies épidémiques et endémiques, l’oppression et la concussion, les guerres tribales ou religieuses, les guerres extérieures ou intestines et les exactions de toutes sortes, ces pays qui ont été distancés dans la course au progrès et que l’usage de la violence aveugle peut tenter. Ce sont leurs ressortissants à bout d’espoir qui viennent buter sur les barrières de fils barbelés édifiées à la hâte aux frontières du monde développé. Le problème que posent ceux qui sont parvenus à les franchir ne comporte pas de solution satisfaisante à court ou moyen terme. Vous remarquerez que ceux qui supportent le moins bien leur présence sont souvent, contrairement à toute logique, des personnes seules, des ménages sans enfants ou des habitants de régions reculées sans immigration notable. Ils me font penser à ces naufragés qui repoussent à coups de rames ceux qui veulent monter à bord de leur chaloupe. Nul ne devrait avoir le droit de se plaindre de l’immigration qui n’ait fait au moins trois gosses ! Certes beaucoup préfèreraient que nos banlieues soient peuplées de bretons et d’auvergnats mais il se trouve que les bretons et les auvergnats n’ont pas fait suffisamment d’enfants ce qui a obligé les entrepreneurs à rechercher ailleurs la main d’œuvre dont ils avaient besoin. Aucun pays ne peut accueillir toute la misère du monde. La sainteté ne peut être rendue obligatoire. La plupart d’entre nous répugnent à voir expulsées des familles immigrées déjà installées, mais peu souhaitent un fort accroissement de leur présence. La générosité de notre accueil dépend d'un équilibre entre notre désir de résoudre leurs difficultés et celui de ne pas nous en créer à nous-mêmes de trop importantes. Le point d’équilibre dépend de l’appréciation de chacun et il faut en la matière éviter les anathèmes. Ceci dit il n’est pas tout à fait équivalent de limiter l’immigration en s’excusant d’avoir à le faire ou de s’en glorifier en jetant l’opprobre sur les nouveaux arrivants et l’on a déjà connu des procédés plus élégants que celui qui consiste à se refaire une santé électorale en tapant sur la tête des plus malheureux, On a pu constater au cours de l’histoire que c’est rarement en vain que l’Autorité Suprême fait appel aux instincts les plus vils de la multitude. Que beaucoup en soient encore là après deux mille ans de christianisme ne plaide pas en faveur de l’efficacité pratique de cette doctrine. Les nouveaux arrivants ont une tendance naturelle à se regrouper par affinités. Cette tendance est bien entendu exacerbée s’ils se sentent rejetés par la société où ils cherchent à se faire une place. Ils se réfugient alors dans un communautarisme ethnique ou religieux qu’il serait mal venu de leur reprocher. Accorder le droit de vote aux étrangers en situation régulière, c’est faire un geste en faveur de leur intégration et donc lutter contre le communautarisme. Nous devons tirer vers le haut les populations immigrées déjà établies de crainte qu’elles ne nous tirent vers le bas et traiter de préférence sur place la misère endémique. L’immigration choisie, si elle n’est pas d’abord un contrat de formation complémentaire limité dans le temps, est la plus égoïste de toutes les solutions car elle prive de leurs rares compétences les pays qui ont assumé les frais de la formation initiale de leurs élites. Un bilan économique honnête reste à faire en ce qui concerne la présence des immigrés sur notre sol. Certes certains les accusent de profiter de notre système de protection sociale mais la comparaison doit être faite entre un immigré qui arrive en France à vingt ans et repart à soixante avec un français de souche exerçant la même activité. Il faut observer que le travailleur immigré a certainement coûté globalement moins cher à la communauté nationale puisqu’il n’a pas fallu l’élever et qu’il ne sera pas nécessaire d’assurer intégralement ses vieux jours. Attendons que l’accroissement du coût de l’énergie rende les pays du Sud plus attrayants, ce qui permettra à un rééquilibrage de s’opérer naturellement. Il faudra bien en effet se rapprocher du soleil lorsque celui-ci sera devenu une des dernières sources d’énergie disponibles.
Songez aux activités qui gonflent la richesse apparente des nations mais sont sans profit réel pour les individus. En voici quelques exemples :
produire des articles de luxe qui coûtent dix ou cent fois leur valeur d’usage (à moins qu’ils ne constituent un banc d’essai pour des productions moins élitistes). Préparés avec de bons produits, l’omelette aux fines herbes et le filet de hareng pommes à l’huile seraient unanimement considérés comme des sommets de la gastronomie s’ils étaient vendus au prix de la truffe et du caviar !
consacrer des sommes importantes à la publicité, payée in fine par le consommateur, alors que les informations se voulant objectives restent payantes. C’est la même disproportion qui existe entre la surabondance d’une littérature d’inspiration religieuse et la rareté et la confidentialité des ouvrages d’inspiration rationaliste. Les rêves glorieux sont toujours privilégiés par rapport à la triste réalité des choses. La plupart des publications commerciales et des encarts publicitaires vont directement de la boite aux lettres à la poubelle, et c’est pour ce résultat qu’on rase des forêts. En favorisant une consommation sans réelle nécessité la publicité se révèle être l’ennemie à la fois du bien-être et de l’environnement.
prodiguer des soins médicaux et autres dans le seul but de corriger les maux suscités par les désordres de l’activité économique elle-même. On met la pression sur le salarié dans l’espoir de le rendre plus productif, mais la crainte le paralyse, lui fait commettre des sottises, éventuellement des malhonnêtetés, ou bien le rend malade. En font les frais les entreprises elles-mêmes, leurs clients, le salarié bien entendu et la collectivité par le biais des différentes formes d’assurances. Or le salarié comme jadis le poilu est le plus souvent plein de courage et de bonne volonté. Il suffit de le mettre en confiance en étant loyal avec lui et de bien le former, l’informer, le guider et le complimenter quand il le mérite. Il faut aussi lui laisser suffisamment de liberté dans l’exécution pour qu’il prenne son travail à cœur. Quand il s’agit de jouer la 9ème symphonie de Beethoven il n’y a pas de feignants dans l’orchestre. Les difficultés actuelles de l’industrie française sont dues pour unir bonne part au fait que ses dirigeants n’ont pas toujours su entretenir avec leur personnel des relations suffisamment confiantes.
- dépenser des fortunes pour assurer la sécurité de biens ou de personnes qu’il vaudrait mieux éviter de mettre en péril.
construire des résidences qui restent vides, des bateaux qui restent à quai, des voitures surpuissantes et des véhicules tous-terrains pour des chaussées quasi parfaites où la vitesse est limitée. Faire construire un luxueux chalet à Courchevel et passer l’hiver aux Maldives…Les rivages espagnols ont vu se multiplier des résidences touristiques fort bien conçues, fort bien réalisées, mais où il n’y a pas âme qui vive. Qui va payer l’addition ?
construire des millions de mètres carrés à La Défense et délocaliser aux Indes l’activité bureautique …
construire à grands frais sur le site de Tolbiac la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Biblioth%C3%A8que_nationale_de_France" \l "Site_de_Tolbiac_.28Fran.C3.A7ois-Mitterrand.29" Très Grande Bibliothèque alors que les documents et ouvrages qui y sont entreposés peuvent être numérisés et rendus ainsi instantanément accessibles à tous et en tous les points du globe
transporter inutilement des personnes ou des marchandises. Le coût du transport de celui qui se rend à son travail est comptabilisé dans sa richesse supposée alors que ce transport réduit sa richesse réelle en réduisant son temps libre. Pourquoi faut-il que les retraités et tant d’autres se ruent sur les voyages lointains, grands consommateurs de kérosène, alors que les plus beaux voyages se font dans la tête et dans le cœur, ou à la voile ? Manda et  HYPERLINK "http://www.allocine.fr/film/fichefilm_gen_cfilm=1103.html" Casque d’Or allant faire une promenade en barque sur la Marne étaient-ils moins heureux que les amoureux qui font aujourd’hui le tour du monde ? Est-on huit fois plus heureux sur un yacht de soixante mètres que sur un yacht de trente parce qu’il coûte huit fois plus cher ? Je suppose que son propriétaire l’est en réalité moins car il doit se donner la peine de montrer qu’il est au moins deux fois plus heureux sur le plus grand que sur le plus petit ! « En ce temps de vacances, le monde est plein de gens qui courent d’un spectacle à l’autre, évidemment avec le désir de voir beaucoup de choses en peu de temps. Si c’est pour en parler, rien de mieux ; car il vaut mieux avoir plusieurs noms de lieux à citer ; cela remplit le temps. Mais si c’est pour eux, et pour réellement voir, je ne les comprends pas bien. Quand on voit les choses en courant, elles se ressemblent beaucoup. Un torrent, c’est toujours un torrent. Si je vais de torrent en torrent, je trouve toujours le même torrent. Mais si je vais de rocher en rocher, le même torrent devient autre à chaque pas. » Alain, Propos. Pourtant mon grand-père maternel, arrivé à Paris de son Berry natal tiré par des chevaux et qui avait vu les premiers pas de l’homme sur la lune, qui avait connu deux guerres mondiales et qui en voyait une troisième se profiler à l’horizon, jugeait que les voyages de ses petits-enfants dans les pays d’Europe et du monde apportaient à la paix leur petite pierre. Je crois qu’il avait raison, surtout lorsque ces voyages ont été effectués sac au dos. Ce qui doit frapper lors de ces voyages, ce ne sont pas les différences pittoresques mais, au-delà des apparences, les ressemblances profondes. Pourquoi ne pas remplacer les innombrables conférences, séminaires, et autres symposiums par des téléconférences et des échanges de documents plus efficaces et moins dispendieux ? Pourquoi ne pas considérer pour toutes les professions tertiaires qui s’y prêtent que le télétravail est la règle et les rendez-vous au siège ou chez les clients l’exception ? Les contacts d’homme à homme peuvent mettre de l’huile dans les rouages, bien entendu, mais ils ne sont véritablement indispensables que pour conclure des ententes illégales ou des pactes de corruption. La négociation la plus profitable est évidemment celle où l’on a réussi à acheter le négociateur d’en face.
considérées du point de vue de Sirius la palme de l’inutilité et même de la nocivité revient sans conteste aux dépenses militaires
La force de travail nécessaire pour produire les biens est de plus en plus réduite. Celle qui est utilisée pour se disputer les fruits de la production ou pour se livrer à des activités périphériques est de plus en plus importante. Depuis un certain temps déjà les gains de productivité ne profitent plus qu’aux détenteurs de capitaux et aux spéculateurs dans la plupart des pays développés. Aux Etats-Unis, sur les trente dernières années, les gains de salaires ont pris 15% de retard sur les gains de productivité. La différence a pour conséquence l’endettement des classes moyennes et l’enrichissement sans mesure des classes les plus favorisées. C’est, oubliant deux millénaires de christianisme et deux siècles de luttes syndicales, un retour à la loi du plus fort. On ne voit pas bien l’intérêt qu’il y a à faire connaître à toute une génération les affres de l’insécurité, de la précarité et du manque de logements, la dissuadant ainsi d’assurer le renouvellement normal des générations. On ne voit pas bien l’intérêt qu’il y a de donner raison à Marx à titre posthume. Ceux qui pourraient apporter les remèdes ne sont pas bien évidemment ceux qui souffrent de tous ces maux. L’industrie, la grande oubliée en France des trente dernières années devrait être défendue pied à pied. Or il semble que l’on trouve plus facilement de l’argent pour soutenir l’activité culturelle que pour soutenir l’activité industrielle, pour sauver une église, un château, un festival que pour sauver une usine et les emplois qui vont avec. Il arrive de plus en plus souvent qu’une activité industrielle disparue soit remplacée par le musée qui lui est consacré. Faute d’industrie, le sous-développement ne tardera pas à s’installer. Un emploi industriel qualifié et un emploi de livreur de pizza ou d’aide ménagère ce n’est pas la même chose, même si ces différentes activités sont équivalentes pour les statistiques du chômage. De la même façon il n’est pas équivalent d’investir dans un outil de travail ou dans une Marina pieds dans l’eau. Ce n’est pas grâce aux petits boulots qu’on pourra régler les factures de pétrole, de gaz, de matières premières ni celles de tous les produits de haute technologie que nous avons cessé de fabriquer. Celui qui a un emploi industriel ou lié à la construction est généralement plus content de son sort qu’il ne veut bien le dire car il satisfait ainsi ses instincts d’homo faber et participe avec ses camarades à une œuvre collective qui lui fait honneur. Les salariés de l’industrie et du bâtiment sont en conséquence peu syndiqués et donc mal défendus. Dans les confrontations ces salariés sont toujours perdants faute d’un syndicalisme suffisamment puissant, uni et responsable. Faute aussi de temps et d’argent. Pourquoi l’agriculture a-t-elle été par comparaison privilégiée ? Pourquoi les syndicats paysans peuvent-ils se livrer impunément aux manifestations les plus violentes et obtenir satisfaction quand d’autres, par les mêmes moyens, ne récoltent que des charges de CRS ? Parce que les paysans votent «  bien » alors que les ouvriers votent « mal » ! Pourquoi est-ce lentement en train de changer ? Parce que le poids démographique et donc électoral des paysans s’est effondré ! Le milieu agricole se scandalise d’être jeté dans le grand bain de la compétition internationale; il oublie que le monde industriel est depuis longtemps confronté à cette même situation. Le pouvoir dissuasif des ouvriers a pratiquement disparu, celui des paysans s’est affaibli, celui des professions intellectuelles s’écroulera dés que l’intelligence artificielle aura atteint un niveau de développement suffisant. Les ouvriers seront remplacés par des robots, les fonctionnaires par des ordinateurs, les experts de chair et de sang par des experts en silicium. Ne subsistera à terme si nous ne réagissons pas qu’une poignée de détenteurs de capitaux assistés de quelques personnels hyper qualifiés qui régneront sur une armée de traîne-savates vivant de la charité publique et s’occupant à amasser des fortunes imaginaires, gagner des batailles virtuelles et gouverner des empires fictifs sur leur console de jeu ! Les procédés de fabrication ont fait de tels progrès qu’il faut maintenant axer les efforts non sur la production mais sur la répartition des marges dégagées entre les riches et les pauvres laquelle conditionne les possibilités de commercialisation des différents produits. Si rien ne vient entraver ces progrès les problèmes de répartition deviendront beaucoup plus faciles à résoudre compte tenu de la prospérité générale. Il ne sera plus nécessaire d’appauvrir les riches mais seulement d’éviter qu’ils ne s’enrichissent davantage. Sans compter, et les précédents conflits armés sont là pour nous le rappeler, qu’il existe d’énormes réserves de main d’œuvre, de productivité et de créativité qui dorment, mais qui pourraient être mobilisées si le besoin s’en faisait sentir. La faiblesse des taux d’intérêts actuels traduit l’immensité des ressources financières immédiatement mobilisables. L’ampleur du taux de chômage actuel traduit la pléthore de travailleurs disponibles. Il y aurait suffisamment de richesses pour tous si toutes les occasions de gâchis étaient éliminées et si tous pouvaient se mettre au travail sans entraves. C’est à quoi toutes les institutions devraient consacrer l’essentiel de leurs efforts. Elles se contentent de procéder à un traitement social du chômage qui est forcément limité dans le temps et dont le financement est reporté sur les générations futures. Un certain égalitarisme semble aujourd’hui nécessaire pour diminuer l’agressivité des individus. Naguère indispensable à la survie d’une humanité faible et clairsemée vivant dans un monde hostile cette agressivité est devenue nuisible et dangereuse pour la survie d’une humanité proliférante et surpuissante. Or, l’homme d’aujourd’hui est fondamentalement le même qu’il y a 20.000 ans même si ses conditions d’existence n’ont plus rien à voir. La vitesse d’évolution des technologies et la vitesse d’évolution du génome humain ne sont pas du même ordre de grandeur. L’humanité n’a pas eu le temps de s’adapter génétiquement à ses nouvelles conditions d’existence. D’où l’ampleur des efforts d’éducation à consentir pour combler cet écart en modifiant les comportements. Imaginez les économies qu’il serait possible de faire si ces efforts aboutissaient à pouvoir se passer d’armée, de police, de justice.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Imagine_(chanson)" Imagine, Imagine… Une autre raison plus cachée du freinage de l’activité économique provient de la crainte, consciente ou non, d’épuiser les ressources naturelles et d’endommager encore plus gravement l’environnement si la production était débridée. D’où la nécessité pour régler les problèmes économiques de régler auparavant les problèmes d’environnement et de pérennité des ressources naturelles, notamment énergétiques. Ces problèmes réglés, les entrepreneurs pourraient faire preuve de moins de frilosité et de plus de solidarité confraternelle en se montrant plus généreux avec leur personnel, car les salariés des uns sont les clients de tous les autres. La part des rémunérations liée à la prospérité de l’entreprise pourrait de ce fait être considérablement augmentée, de façon analogue à ce qui se pratique à bord des bateaux de pêche. Le capitaine et les marins sont sur le même bateau ce qui les rend solidaires. Alain faisait déjà remarquer que pendant la guerre la dignité du matelot était mieux respectée que celle du fantassin. Il ne serait pas plus absurde de distribuer uniformément les stock-options aux salariés qu’il ne l’est de donner aux citoyens des pays démocratiques le même droit de vote. Il n’est pas dit que cette forme de distribution serait moins favorable aux actionnaires, car la prospérité d’une entreprise dépend tout autant, sinon davantage, des multiples microdécisions prises par son personnel que des orientations générales choisies par ses dirigeants. Pour gagner une course hippique il faut que le cheval en ait autant envie que le cavalier ! Les dirigeants sportifs qui organisent les rencontres et s’occupent de la partie financière sont-ils plus importants pour un club que les joueurs qui sont sur le terrain ? Ces modes de répartition motivants sont une garantie que tout le monde tire dans le même sens et que ceux qui ne le font pas sont rappelés à l’ordre par leurs petits camarades. Avec de telles dispositions les tâches inutiles ou insuffisamment efficaces auraient tôt fait d’être repérées et supprimées. Le succès des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Soci%C3%A9t%C3%A9_coop%C3%A9rative_de_production" sociétés coopératives de production qui s’inspirent de ces principes est encourageant. Ce type d’organisation est à rapprocher de celui adopté pour certains grands projets scientifiques où il n’y a pas de direction au sens habituel du terme mais uniquement des structures de décision qui ont pour but de retenir les meilleures solutions, sans référence aucune aux rangs et aux titres de ceux qui les ont proposées. Ceci revient à introduire des règles démocratiques dans le fonctionnement des entreprises. Les sociétés renflouées par l’Etat, les sociétés dépendant d’une holding où a été concentré l’essentiel des capitaux et les sociétés publiques en voie de privatisation devraient adopter ce statut quand c’est possible. Ce partage de la valeur ajoutée entre les détenteurs du capital et les salariés devrait être étendu aux ressources affectées aux investissements et donner lieu à la création d’actions nouvelles au profit des salariés. Les salariés se sentiraient en effet lésés par tout investissement qui augmenterait la valeur de l’outil de travail au seul bénéfice de ses propriétaires. Ils seraient donc hostiles par principe à l’achat de nouveaux équipements et ne les accepteraient que de mauvaise grâce. Avec les nouvelles règles proposées pour la répartition de la valeur ajoutée le patriotisme d’entreprise pourrait renaître et, en cas de difficultés, les salariés accepteraient de se serrer la ceinture plutôt que de voir certains de leurs collègues jetés à la rue. Une société pourrait disparaître, non parce qu’elle aurait fait faillite, mais parce qu’elle n’aurait plus trouvé de travailleurs désireux de partager son sort. La toute puissance d’héritiers plus ou moins compétents, plus préoccupés de leurs problèmes de succession que des problèmes de direction de l’entreprise comparée à l’absence de tout droit de salariés qui y ont consacré le meilleur de leurs capacités pendant toute une vie de travail, paraît comme une survivance de l’Ancien Régime, sans même parler du cas où, du fait de l’age ou de la maladie, le détenteur de l’autorité légale n’est plus capable de l’exercer. Il a quelques raisons de s’indigner celui à qui on vient de refuser dix centimes d’augmentation de son salaire horaire et qui s’aperçoit qu’on a fait cadeau d’un milliard à un escroc de haut vol. A ces difficultés déjà considérables s’ajoute chez certains acheteurs un déplorable snobisme qui consiste à préférer des produits étrangers à des produits autochtones de qualité comparable. Je me demande si, dans l’esprit de certains de ces acheteurs il ne s’agit pas de la joie mauvaise de punir une classe ouvrière qui a l’impudence de réclamer sa juste part. Avec de grandes inégalités les français n’ont jamais été en moyenne aussi riches. Ils n’ont pourtant jamais été aussi nombreux à se sentir menacés de tout perdre. Comment se résigner à un tel paradoxe ? Il paraît à peu près évident que le chômage disparaîtrait en cas de guerre, mais à qui déclarer la guerre ? Au chômage pardi ! A quoi utiliser les chômeurs qui sont volontaires ? A la réhabilitation de l’habitat, des infrastructures, des sols, de l’air et des eaux, des espaces naturels et des paysages, à l’accueil des étrangers, bref à tout ce qui peut donner d’un pays une image positive et conviviale mais souffre d’une rentabilité trop diffuse pour pouvoir être financée par des moyens conventionnels. Une telle image est tout à fait indispensable pour un pays comme la France qui a une vocation touristique affirmée. Les chômeurs pourraient aussi être mis partiellement à disposition de ceux qui travaillent pour les aider dans l’entretien et l’embellissement extérieur de leurs demeures, ce qui profite à tous, ou encore contribuer à la prise en charge des personnes âgées, à la sauvegarde des biens et des personnes et, pour ceux qui ont les qualifications nécessaires, au soutien scolaire des élèves en difficulté.
Reprendre l’argent accaparé abusivement par les plus riches sans qu’ils bloquent le système et le donner aux plus pauvres est une façon de réamorcer rapidement la pompe de l’économie. C’est plus facile à dire qu’à faire. Geler ou même effacer les dettes est un autre moyen plus facile à mettre en œuvre, mais son équité est discutable. Qui dit emprunteur dit aussi prêteur et c’est probablement dans cette direction qu’il faut rechercher la solution. Il faudra bien, d’une manière ou d’une autre, débusquer l’argent là où il est pour relancer la machine économique. La bataille semble inégale entre un monde politique aux abois et un monde financier toisant tous les autres pouvoirs assis sur son tas d’or. C’est pourtant le défi qu’a relevé le petit peuple islandais et qu’il semble sur la voie de gagner. Le monde financier ne doit pas se conduire comme en terrain conquis en oubliant que ce n’est pas lui qui dispose de l’appareil d’Etat en général et de la force publique en particulier.
On ne peut espérer le salut d’une relance financée par augmentation des dépenses publiques pour au moins deux raisons :
les états vidés de leur substance au profit d’intérêts privés n’ont plus les ressources nécessaires
cette méthode a montré ses limites au cours de la grande dépression de 1929 car il n’a pas fallu moins qu’une guerre mondiale pour en sortir définitivement. Compte tenu de l’évolution des armements ceci voudrait dire que les pays riches et nucléarisés devraient écraser sous les bombes les pays pauvres et dépourvus de l’arme atomique. C’est ce qui se pratique actuellement mais à une échelle insuffisante
On ne peut espérer le salut d’une relance financée par augmentation des impôts car, disent les bons apôtres, les plus gros contribuables partiraient à l’étranger. On peut faire plusieurs objections à cette thèse :
la plus évidente est qu’elle porte un mauvais coup à la justice sociale
la seconde est que la diminution des impôts réalisée en France dans les dernières années n’a pas fait revenir les contribuables déjà partis. En fait l’hémorragie continue
la troisième plus cachée est qu’en maintenant les impôts au niveau actuel la richesse des plus riches ne cesse de s’accroître, donc le nombre des candidats à l’exil, donc le nombre des fraudeurs et le montant de la fraude. Si au contraire on les dépouille, ils n’auront plus de raison de s’expatrier !
Les riches perdraient leur motivation disent certains. Ce n’est pas sûr car l’enrichissement personnel n’est heureusement pas la seule motivation de ceux qui recherchent l’excellence. On peut même dire que des chiens efflanqués courent plus vite que des chiens trop bien nourris. J’adore ces rencontres ou onze vedettes surdouées, surentraînées et surpayées sont tenues en échec par onze amateurs animés seulement par l’amour du jeu. Mozart et Balzac auraient-ils produit autant de chefs-d’œuvre s’ils n’avaient été poursuivis par la meute de leurs créanciers ? Il est prudent de tenir les créateurs à l’abri des soucis matériels trop prégnants et la gestion d’une grande fortune en est un. C’est faire injure aux plus prospères que d’affirmer qu’ils ne travailleraient pas aussi dur s’ils étaient moins bien payés. C’est pour une question de prestige qu’ils ne veulent pas être moins bien payés que les autres dirigeants qui ont des responsabilités comparables. Les salaires extravagants sont une mode assez récente, liée en fait à la chute du communisme. Ce qui est sûr c’est que les inégalités de revenu excessives dégoûtent et démoralisent les moins riches qui sont de loin les plus nombreux.
Certains se sont émus du sort des sportifs et des artistes en raison de la brièveté ou du caractère aléatoire de leur carrière. Cette inquiétude n’est pas tout à fait dénuée de fondement, mais elle peut être facilement apaisée si on donne à ces professionnels de l’art ou du sport la possibilité de déposer sur un compte les sommes qu’ils peuvent économiser durant la période la plus fructueuse de leur carrière. Ces sommes ne seraient pas taxées lors du dépôt et le compte pourrait être géré comme un compte épargne. Elles pourraient être ensuite récupérées à la demande selon les besoins du détenteur du compte et seraient alors considérées comme un revenu et taxées en conséquence. Les hauts dirigeants d’entreprise qui se sentent exposés à des accidents de parcours pourraient bénéficier du même dispositif. Les gros salaires aussi ont droit à la sécurité.
Pour surmonter la crise le recours à l’inflation via la planche à billets ou ce qui en tient lieu semble pour le moment exclu car trop contraire à la sensibilité allemande, mais les choses peuvent changer. Qu’est-ce qui empêche la banque européenne d’émettre des Euros comme la banque fédérale américaine émet des dollars ? C’est en définitive la seule méthode qui paraisse praticable parce que la moins douloureuse et la moins injuste. Elle ne pénaliserait, encore n’est-ce pas sûr, que ceux qui ont des avoirs importants en Euros. Ils ne figurent pas parmi les plus malheureux Il résulte des considérations précédentes qu’il est impossible de résoudre l’équation économique actuelle sans en changer au moins un des termes, c’est à dire sans une forme ou une autre de révolution redistributrice... Même si l’idée peut être formulée de façon moins provocante, c’est bien dans leur propre intérêt qu’il faut voler les riches. Ne seront-ils pas heureux de voir leurs produits s’apprécier de nouveau, leurs chaînes de production redémarrer à pleine capacité ? Est-ce que ceci ne vaut pas mieux pour eux que de constater qu’il y a des armes dans les banlieues et des gens disposés à s’en servir ? C’est de nouveaux Robins des Bois dont nous avons besoin ! Des milliardaires se sont chargés de renforcer ce point de vue en réclamant d’être imposés davantage ! Ils se sont rendus compte que leur intérêt à long terme était que le système qui leur a permis de prospérer reste supportable pour le plus grand nombre. Comment peut-on hésiter entre la mauvaise humeur passagère d’une personne fortunée à qui on retire quelques-uns de ses jouets les plus coûteux et la détresse de familles entières que sa fortune permettrait de secourir ? Le véritable critère de la richesse consiste à ne plus payer d’impôts dans le pays qui a fait les frais de votre éducation et qui vous a mis le pied à l’étrier. La liste de ceux qui s’exonèrent ainsi de leurs obligations contributives ne devrait-elle pas être rendue publique ? Ne devraient-ils pas faire l’objet d’une sorte d’embargo ? Ne pourrait-on écarter des appels d’offres publics les entreprises dont les actionnaires principaux se sont fiscalement exilés, comme ce fut fait après la guerre pour les entreprises dont les propriétaires s’étaient engagés dans la collaboration avec l’occupant ? On ne peut cependant leur reprocher de chercher à échapper à ce qu’ils ressentent comme une spoliation. Les menaces proférées à l’encontre de ces contribuables fraudeurs auront pour seul effet en l’absence d’une législation internationale contraignante soit de les faire partir, soit de faire tourner leurs fortunes entre les divers paradis fiscaux les rendant ainsi insaisissables. Les services fiscaux des différents états seront toujours en retard d’une astuce financière sur les sociétés multinationales tant qu’une autorité internationale largement reconnue ne sera pas parvenue à contrôler les principaux flux financiers et à unifier toutes les règles. Une autre approche serait d’offrir des compensations aux contribuables les plus sollicités. Ces compensations pourraient être honorifiques sous forme de décorations, de fondations diverses portant leur nom, d’établissements charitables parrainés, etc. Enfin on pourrait envisager d’établir quelques  HYPERLINK "http://translate.google.com/" \l "fr|en|De%20fait%20la%20religion%20qui%20pr%C3%A9sente%20comme%20r%C3%A9eles%20des%20histoires%20invent%C3%A9es%20pr%C3%A9pare%20le%20terrain%20au%20politique%20qui%20lui%20aussi%20est%20tenu%20de%20d%C3%A9guiser%20la%20%20r%C3%A9alit%C3%A9%20pour%20maintenir%20son%20emprise%20sur%20les%20esprits.%20" lois somptuaires, par exemple exempter d’impôts la construction de logements sociaux de sorte que ça devienne une activité profitable de construire et de gérer ce type d’habitat et au contraire renforcer les taxes sur tous les produits de luxe. Il se trouve que les actions susceptibles d’être efficaces sont incompatibles avec les règlements européens actuels. Il faut donc changer la Communauté Européenne ou la quitter.
Les hommes politiques veulent entretenir l’illusion auprès de leurs électeurs qu’ils peuvent réellement influencer la performance économique nationale dans un monde libéralisé alors qu’ils se sont débarrassés des quelques outils dont ils disposaient. Incapables de renflouer les caisses de l’Etat et de remplir les poches de leurs concitoyens, ils en viendront bientôt à reprendre à leur compte la boutade de Coluche : « Ecrivez-nous ce dont vous avez besoin et on vous expliquera comment vous en passer ». En réalité, le fond des choses leur échappe toujours car il se résume pour un industriel à ces seules questions : comment produire plus et mieux pour moins cher, comment neutraliser la concurrence, comment soustraire les marges dégagées à la voracité de l’impôt ? Ils feraient peut-être mieux de dire aux représentants du monde économique « Messieurs, la productivité, c’est votre affaire ! » C’est là où une entreprise ayant l’état pour actionnaire principal pourrait jouer un rôle pilote en assurant un lien technique et commercial au sein de chaque profession et en prenant en charge certaines recherches communes. Ce serait la contrepartie de ce qu’elle n’aurait pas, ou peu, la charge de rémunérer son actionnaire. Ce n’est pas une loi qui peut rendre plus intelligents ou plus efficaces les différents agents économiques, mais elle peut les inciter à coopérer.
Qu’ont-ils donc dans l’esprit ceux qui, à la tête de grands pays développés, les privent de ressources en favorisant leur clientèle par des largesses fiscales, laissant filer ainsi la dette publique au delà du raisonnable ?
- « Après nous le déluge ».
« Nous sommes tenus de tenir les engagements que nous avons pris à l’égard des catégories sociales influentes qui nous ont ouvert la voie du pouvoir.
« Nous sommes dans les mains de lobbies confessionnels, pétroliers, patronaux, financiers, mafieux » (supprimer les mentions inutiles dans chaque cas particulier»).
« Nous représentons moins les intérêts de notre pays que ceux de ses créanciers »
«  Le pays est surendetté, c’est une affaire entendue mais, grâce à nous, l’eau, le gaz et l’électricité n’ont pas encore été coupés».
- « Les évènements ont échappé à notre contrôle, nous en sommes sincèrement désolés ».
- « Nous avons atteint notre niveau d’incompétence car nous sommes fâchés avec les chiffres. Nous appartenons à la nouvelle école des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sophiste" sophistes ; notre domaine d’expertise est celui de la controverse et de la manipulation des esprits ».
- « Nous laissons aux générations futures le soin d’apurer la dette »
- « Les sommes empruntées ne seront jamais remboursées, ou le seront en monnaie de singe ».
« C’est la façon pour les puissances financières dont nous défendons les intérêts de contrôler étroitement le pouvoir politique, de faire en sorte que tout pouvoir concurrent du nôtre ne puisse se maintenir durablement car il se brisera inéluctablement sur le mur de l’argent ». C’est ce qui peut menacer le président Obama à plus ou moins long terme. En réalité, le danger pour les Etats-Unis vient plus des désordres sociaux que de la guerre étrangère ou du terrorisme. Une guerre civile aux Etats-Unis serait particulièrement meurtrière car beaucoup des citoyens de ce pays sont armés jusqu’aux dents. La crise économique ou financière est, comme la guerre, un rempart contre des revendications jugées trop pressantes. L’état, dépouillé de ses biens et endetté, n’est plus qu’une coquille vide, comme peut l’être une société industrielle ou commerciale privée de tous ses actifs au profit d’une société holding et qui se trouve exposée sans matelas amortisseur à tous les aléas de la concurrence. Aussi pauvre soit-il le citoyen ordinaire pouvait encore se sentir riche de son appartenance à une nation possédant de nombreux biens. Cela même lui a été retiré. L’argent emprunté aux plus riches sera pour les classes moyennes la corde qui servira à les ligoter et à les étrangler, celle-là même que les capitalistes devaient soi-disant vendre pour qu’on les pende. C’est pourquoi les gens fortunés ne redoutent nullement l’endettement de l’Etat. En tant que prêteurs ils y trouvent encore une source de profits supplémentaires et le moyen de tenir le pouvoir en lisière !
«Le problème sera réglé par un coup d’état, légaliste ou non. L’une des premières décisions des nouvelles autorités sera d’acheter ou d’interdire le peu qui reste de médias libres et de contrôler l’accès à Internet. Ainsi vous n’aurez plus de raisons de vous inquiéter puisque vous ne saurez plus rien ».Ce coup d’état peut aller dans deux directions. S’il va vers le fascisme il bénéficiera ipso facto de la sympathie des puissances financières (et de l’Eglise). S’il va vers une forme ou une autre de collectivisme il bénéficiera de la sympathie des intellectuels. L’état des forces en présence montre clairement que le fascisme a les meilleures chances de s’imposer. Avec la crise la tentation fasciste s’est répandue sur la quasi-totalité des pays développés, y compris aux Etats-Unis. « Le ventre est encore fécond, d'où a surgi la bête immonde ». Il est parfaitement imaginable que des organisations mafieuses disposant du pouvoir de l’argent et de celui de la terreur trouvent ou suscitent dans la classe politique des  fondés de pouvoir prêts à mettre en place une dictature à leur service. Dans certains pays nous n’en sommes plus très loin. Belle opération financière en tout cas que de faire cadeau au travers de niches fiscales et autres faveurs d’un million de dollars ou d’euros à un homme riche pour aussitôt les lui emprunter ! La quatrième république si décriée n’a jamais traité les finances publiques avec une telle désinvolture alors qu’elle a eu à faire face aux séquelles de la seconde guerre mondiale et à deux guerres coloniales longues et douloureuses. L’Italie qui a conservé un régime analogue, sinon pis, a-t-elle pris tellement de retard par rapport à la France malgré des ressources naturelles plutôt moindres, la gangrène mafieuse et une tradition fasciste encore bien présente ? C’est essentiellement la quatrième république qui, appliquant le programme du Conseil National de la Résistance, a procédé aux grandes HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Nationalisation" \l "France"nationalisations-restructurations dont la cinquième a pu profiter pleinement une fois les guerres coloniales terminées. Avec de Gaulle et Pompidou la France était partie sur une bonne trajectoire économique. Les évènements de mai 1968 et la construction européenne l’ont fait exploser en plein vol. Depuis quelque temps déjà l’Etat français ne cesse de s’appauvrir pour que des français proches du pouvoir puissent continuer de s’enrichir. S’il s’agissait d’une entreprise privée, l’Etat Français serait depuis longtemps en faillite, à la recherche d’un repreneur, lequel exigerait de pouvoir licencier les individus les moins performants, vieillards, malades, handicapés, etc.… Il ne se maintient que parce qu’il bénéficie de la caution implicite de ses citoyens. Ceux qui militent pour la diminution des impôts se gardent bien d’indiquer précisément les économies compensatoires qu’ils comptent faire sur les dépenses de l’Etat, et les rares propositions qu’ils émettent sont le plus souvent inapplicables, ou socialement insupportables, ou anticonstitutionnelles, ou contraires aux règles européennes, ou sans réelle portée, ou confondent l’intention et le résultat. Les hommes politiques ne sont pas les derniers à toujours proposer plus de police, plus de justice, plus de soins, plus de contrôles, plus d’équipements, plus d’enseignement, plus de culture, plus de recherche, plus d’aides de toute nature. Il est impossible que les impôts cessent d’augmenter et la dette de s’alourdir tant que le jeu de l’économie libérale continuera de creuser les inégalités entre les citoyens et que la politique sociale sera chargée de combler le trou. Les libéraux purs et durs ont une réponse simple : « cessons de combler le trou ! Instituons des plafonds pour les impôts des plus riches et des planchers pour les punitions des plus pauvres, conformément aux racines chrétiennes de la civilisation occidentale. Rabotons les salaires, les pensums et les aides sociales jusqu’aux niveaux les plus bas du marché. Distribuons les allègements de charge, les subventions et les commandes publiques à ceux qui nous soutiennent. Privatisons à tour de bras. Après les biens industriels, vendons à prix d’ami les routes, les ports, les voies ferrées, les voies navigables. Vendons les réseaux électriques et les réseaux téléphoniques. Vendons les châteaux, les musées et leur contenu. Vendons les hôtels de luxe et les casernes. Laissons partir les cerveaux, les usines et les fortunes. Vendons notre espace rural et nos friches industrielles. Vendons nos chais et nos vignobles. Remplaçons par des milices privées l’armée et la police. Construisons de nouvelles prisons sur fonds privés grassement rémunérés pour accueillir ceux que notre politique ne manquera pas de multiplier. Que les officiers achètent leur charge pour que nous soyons toujours assurés de leurs sentiments. Confions à des fermiers généraux le soin de collecter les impôts en épargnant les plus fortunés. Vendons la justice au plus offrant pour que la raison du plus fort soit toujours la meilleure. Grâce aux aménagements apportés à la loi de 1905 il restera toujours à l’Etat quelques édifices religieux coûteux à entretenir ». La ruine de l’Etat ouvre une voie royale au fascisme comme on l’a déjà vu dans le passé. Le langage des nantis, des multinationales et de tous ceux qui peuvent jouer à saute-frontières est des plus clairs : si vous ne nous faites pas les meilleures conditions du marché, nous irons nous installer ailleurs. Et les Etats s’inclinent au nom du réalisme économique. Si les frontières sont ouvertes tout système économique évolue donc inévitablement vers la dérégulation, le moins-disant social et les délocalisations. La patrie d’Astérix a longtemps résisté à cet entraînement fatal mais elle vient de capituler. Il semble qu’on ait oublié l’adage selon lequel tout pouvoir doit être borné par un autre pouvoir. C’est la menace du communisme qui freinait les ardeurs libérales et maintenait le système capitaliste dans des limites acceptables. Depuis sa disparition les puissances financières ont oublié toute retenue et l’économie mondiale ne parvient plus à sortir du cercle vicieux suivant :
la prospérité économique exige des capitaux abondants et prêts à s’investir
ces capitaux fuient les pays qui refusent la dérégulation ainsi que l’allègement des impôts et des charges
la dérégulation et l’allègement des impôts et des charges s’imposent donc partout par la force des choses.
la dérégulation et l’allègement des impôts amplifient encore des inégalités sociales déjà excessives
les inégalités sociales excessives sont un obstacle à la prospérité économique générale car elles réduisent le pouvoir d’achat du plus grand nombre et favorisent les activités improductives. Ces inégalités sont par elles-mêmes choquantes. Elles le sont encore davantage quand on réalise qu’elles sont le fruit d’agissements coupables et qu’elles conduisent au gâchis. Suivant la logique de ce processus en effet les états en arriveront à supprimer complètement les impôts, les charges et les régulations imposées aux entreprises multinationales et seront obligés d’accorder les mêmes facilités à leurs ressortissants. De quoi alors vivront-ils ? De l’emprunt. Combien de temps cela durera-t-il ? Comme pour les ménages surendettés : quelques années au mieux avant de s’inscrire aux «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Restaurants_du_coeur" Restaus du cœur ».... Les cercles vicieux comme celui-ci, éventuellement réduits à une boucle de rétroaction amplificatrice, existent en grand nombre dans le domaine économique (et ailleurs) :
un chômeur trouve plus difficilement du travail qu’un travailleur encore salarié d’une entreprise
un chômeur indemnisé augmente les charges sociales pesant sur toutes les entreprises, ce qui renchérit les produits, réduit les débouchés et crée ainsi un chômage supplémentaire
une diminution de la production, quelle qu’en soit la raison, renchérit les biens produits avec les mêmes conséquences
les clients s’éloignent d’une entreprise ou d’un pays en difficulté, ce qui empire encore leur situation
une variation spontanée de la valeur des actions ou des matières premières est amplifiée par la spéculation
une augmentation des impôts incite les entreprises à délocaliser, d’où une diminution de l’assiette des impôts et la nécessité de les augmenter encore davantage,
une cure d’austérité destinée à alléger les dépenses d’un état endetté pénalise son économie, réduit ses recettes fiscales ce qui nécessite un nouveau renforcement de l’austérité
une appréciation négative de la part d’une agence de notation à l’égard d’une entreprise ou d’un pays en difficulté provoque l’augmentation des taux d’intérêts auxquels cette entreprise ou ce pays peuvent refinancer leur dette, d’où une accélération de leur endettement, etc., etc.…
Tous ces facteurs s’additionnent et finissent par étouffer l’économie comme on l’a constaté durant la grande dépression qui a précédé la deuxième guerre mondiale. Seul un événement extérieur peut mettre un terme à cette spirale négative. Ecoutez ce que la rapacité et l’inconscience des possédants a inspiré à Alain pendant cette grande crise (il feint ici de rapporter le discours d’un président de conseil d’administration): « Mais enfin, Messieurs, de quoi s’agit-il ? Il est clair que le ralentissement de beaucoup d’affaires, la ruine aussi de bon nombre de novices, enfin la pénurie où se trouvait le Trésor Public, devaient incliner les ministres à violer la grande loi d’inégalité, d’après laquelle ceux qui ont le plus sont aussi ceux qui paient le moins. Inutile de vous dire, à vous, que par ce chemin le socialisme tout entier nous envahissait. Car à quoi sert-il que les entreprises paient mieux l’actionnaire que l’ouvrier si, sous prétexte d’impôts, on fait ensuite payer l’actionnaire ? Et pour qui, pour quoi ? Pour les chômeurs, pour les mutuelles, pour les coopératives pour l’assistance, pour les retraites pour les pensions. C’est prendre d’une main ce qu’on donne de l’autre ; Halte-là, Messieurs. De toute évidence le moment était venu d’une révolte des riches, et nous l’avons eue. Cette révolte ne devait point parler des dividendes ; elle n’en a point parlé. Elle a crié au voleur, et c’était le vrai cri ; car, un peu de négligence, et l’Etat prenait dans nos poches. Elle a crié patrie, ordre, défense, ce que nous approuvons. »  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bj.doc" \o "Rien de neuf sous le soleil." Nihil novi sub sole.
On salue d’avance le courage du responsable qui, s’étant persuadé que les inégalités excessives de revenus et de patrimoines constituent le principal obstacle au bon fonctionnement de la société de marché, osera proposer à la communauté internationale les objectifs suivants :
analyser tous les comptes ouverts dans les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Paradis_fiscal" paradis fiscaux et bloquer toutes les sommes dont les détenteurs restent anonymes ou qui ne peuvent être justifiées par des détenteurs connus. Ceci peut rendre nécessaire de couper toutes les communications avec les paradis fiscaux qui refusent de coopérer. Les tentatives vite avortées qui ont été faites dans ce sens montrent que beaucoup de politiciens influents ont intérêt à ce qu’on n’aille pas y voir de trop près.
supprimer les billets de banque et les remplacer par une monnaie électronique traçable. Limiter à l’équivalent de un ou deux Euros la valeur des pièces de monnaie. Ceci est de nature à rendre plus difficiles nombre de fraudes et de trafics, soulageant d’autant la tâche de la police et de la justice.
exiger que toutes les matières précieuses, œuvres d’art, etc.… soient déclarées et qu’elles ne puissent être vendues sans avoir satisfait à cette obligation.
retirer leur passeport aux exilés fiscaux, leur interdire le territoire national et saisir leurs biens demeurés sur ce territoire. Par une utilisation judicieuse des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Niche_fiscale" niches fiscales, les gens fortunés payent déjà moins d’impôts que les gens simplement aisés, proportionnellement à leurs revenus. Ils trouvent que c’est encore trop et recourent à l’évasion fiscale ou carrément s’exilent. Leur véritable patrie, c’est l’argent. Il y a là une forme de détestation du pays qui leur a donné le jour. C’est un sentiment de voyou. Pourquoi devrait-on ménager ceux qui n’ont aucun souci des intérêts de leur pays ? Est-ce qu’on prend des gants avec ceux qui, lors d’un conflit armé, refusent de payer l’impôt du sang ou qui désertent ? Or, nous sommes en état de guerre. Un licenciement sec est aussi grave qu’une blessure reçue au combat. Un chômage prolongé est aussi grave qu’un internement dans un camp de prisonniers. Remarquons que les américains sont d’une extrême sévérité envers les fraudeurs du fisc et qu’ils continuent d’imposer ceux qui se sont expatriés comme s’ils résidaient encore aux Etats-Unis, une disposition dont la France pourrait utilement s’inspirer,
interdire les produits financiers composites propices à toutes les arnaques, laissant subsister uniquement actions et obligations.
Interdire les prêts à taux variables
instaurer une durée minimum de détention des titres, un an par exemple. Ce serait revenir ainsi aux sources du capitalisme quand l’achat d’un titre manifestait la confiance que l’on éprouvait pour la solidité d’une entreprise, la valeur d’un projet et la fiabilité d’un emprunteur. Derrière un morceau de papier ou même une simple ligne sur un écran, il y a des outils, du savoir-faire et des travailleurs. Quel sens cela a-t-il d’acheter un tableau sans prendre le temps de le regarder, encore moins de l’accrocher dans son salon ?
interdire d’acheter ou de vendre des matières premières ou des produits agricoles à tous ceux qui n’interviennent pas directement dans les processus physiques de production, transformation, distribution, ou utilisation de ces biens. Limiter les quantités commercialisées à celles qui feront effectivement l’objet de ces processus.
Interdire aux banques d’être à la fois banques d’affaires et banques de dépôt
Démanteler les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Holding" holdings existantes et interdire la création de nouvelles. La création d’une holding manifeste en effet la volonté de ses propriétaires de placer en cas de difficultés leur intérêt personnel au dessus de l’intérêt général directement lié à la pérennité des entreprises concernées.
Les entreprises qui licencient alors même qu’elles font des bénéfices devraient être tenues de compenser les dommages causés aux individus et aux collectivités, ces dommages étant appréciés par des magistrats professionnels.
Nationaliser pour une bouchée de pain les établissements financiers qui ont besoin à un moment ou un autre d’un soutien public
Ne remplacer qu’un banquier sur deux partant en retraite
Toutes ces réformes, pour être réellement efficaces, doivent être adoptées par les principales puissances économiques (G20). Il n’est pas besoin d’être devin pour prédire qu’il ne sera pas facile de faire lâcher son os au bouledogue anglo-saxon. Il est évident qu’il faudra prendre certaines précautions avant de mettre en oeuvre ce type de réforme. Faute toutefois de ces réformes indispensables les financiers montreront très rapidement une fois la crise passée, si elle passe, qu’ils n’ont rien oublié et rien appris. Pourquoi se gêneraient-ils alors qu’ils viennent de s’offrir à nos frais la confirmation éclatante de leur pouvoir ? Moins d’un an après avoir appelé à leur secours les banques centrales des plus grands états et mobilisé des centaines de milliards de dollars d’argent public, les banques privées ont dégagé des profits comme jamais. De qui se moque-t-on ? Pourquoi ces banquiers abandonneraient-ils leur conduite à risques puisque les profits miraculeux qui en résultent se retrouvent dans leurs poches et que les pertes abyssales qui sont la conséquence d’achats inconsidérés de produits financiers faisandés sont compensées par des prélèvements effectués dans le portefeuille des clients ou des contribuables ? C’est tout de même par excellence le rôle d’un banquier que d’évaluer correctement les produits qui lui sont proposés. Comment de telles erreurs ont-elles pu se multiplier sans qu’il y ait eu corruption ou collusion? Qu’et-ce qui peut justifier les bonus faramineux accordés aux traders ? Est-ce pour leur donner la possibilité d’acheter des informateurs ou de récompenser des connivences sans compromettre les hauts dirigeants ? Est-ce pour les aider à résister à la tentation de monnayer leur pouvoir décisionnaire ? Comment la société Enron ou celle de Bernard Maddox ont-elles pu occasionner toutes deux des pertes de cinquante milliards de dollars à leurs partenaires et clients sans bénéficier de complicités à tous les niveaux ? Comment un Jérôme Kerviel a-t-il pu plus modestement fait perdre quatre milliards d’Euros à la banque Société Générale sans que sa direction soit alertée, une banque qui, comme toutes les banques, a pour occupation exclusive de compter les sous, les siens et ceux des autres? Il est exact que le « flair » d’un trader peut faire des différences considérables. Prenons le cas de celui qui durant les dix dernières années aurait joué sur le taux de change Euro/Dollar et qui aurait toujours acheté au plus bas et vendu au plus haut. Parti avec 100 Euros, il se trouverait au bout de ces 10 années et de 25 transactions avec 400 Euros en poche si on néglige les frais de change ! Si dans le même temps il avait joué avec le même bonheur la même somme sur l’indice CAC 40 il se retrouverait au bout de 10 ans et 50 transactions, et grâce aux ondulations savamment entretenues de l’indice sur lesquelles surfent les traders, à la tête de 4.000 Euros si on néglige les frais de courtage qui, pour une banque, sont très faibles. S’il avait joué à chaque fois non sur l’indice mais sur les valeurs les plus chahutées, son gain serait encore bien supérieur. Aucune activité productive ne peut bien entendu se prévaloir de pareils résultats. C’est ce qui explique le fait que dans les échanges internationaux l’essentiel des transactions soit non plus commercial mais financier. Dans le même temps l’indice CAC 40 est passé de 6500 à 3000 ce qui veut dire que le non initié a perdu plus de la moitié de sa mise, dividendes et érosion monétaire exclus. De quoi tirent-elles donc leur substance ces banques qui se livrent à du BAO (boursicotage assisté par ordinateur) ? Sur le dos de qui les mirobolants traders ont-ils fait fortune ? On voit bien que c’est sur celui des petits porteurs ! Placés près d’un gros robinet, il leur suffit de détourner un filet d’eau pour remplir rapidement leur citerne car la science économique se limite le plus souvent à des problèmes de robinets comme ceux qui nous étaient proposés à l’école communale ! Qui par contre est sommé de voler au secours des banques en difficulté sinon le contribuable ordinaire? L’argent qu’ont perdu les banques au cours de la crise leur a été remboursé par les contribuables qui ont l’impression de s’être faits voler comme dans un bois. Un banquier ou un industriel exigent que le  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bk.doc" \o "temps nécessaire pour que les économies d'exploitation réalisées compensent l'investissement effectué" temps de retour de leurs investissements ne dépasse pas quelques années. Il faut donc avoir recours pour des durées plus longues à la puissance publique ou au petit épargnant, le plus souvent grugés dans l’opération. Un banquier s’efforcera toujours de garder pour lui les bonnes valeurs et, faute d’une meilleure solution, de vendre à ses Clients sous un habillage idoine les actifs pourris qu’il peut détenir ! Pourquoi l’Etat américain et quelques autres prêtent-t-ils de l’argent aux banques en difficulté à des conditions plus qu’avantageuses plutôt qu’à leurs débiteurs insolvables avec le résultat que ces débiteurs se retrouvent à la rue, leurs maisons si chèrement acquises inhabitées et dépréciées, leurs économies envolées ? A quel optimum économique une telle situation peut-elle bien correspondre ? On sait que le marché est le lieu où s’exerce la sélection naturelle des agents économiques. Sa main invisible a parfois de fâcheuses distractions. Comment se fait-il que les victimes de ce massacre ne se soient pas révoltées ? Le citoyen américain à qui on enlève sa maison se révèle à l’usage plus passif que le paysan chinois qu’on veut éloigner de sa terre, ce qui tendrait à prouver que trente ans de capitalisme débridé asservissent davantage les populations laborieuses que soixante ans de communisme à la sauce Mao. Les états trouvent rapidement des centaines de milliards de dollars pour sauver des spéculateurs imprudents. Ils ne trouvent rien pour sauver des travailleurs consciencieux privés d’emploi ou des petits propriétaires ruinés par le renchérissement insupportable de leurs crédits à taux variables. Il y a quelque chose de pourri dans le royaume de  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bsa.doc" \o "citation de Hamlet" Danemark. L’état chinois punit les spéculateurs de manière radicale. Ce n’est probablement pas sans rapport avec la bonne santé de son économie. Le monde financier anglo-saxon est un parasite qui étouffe la plante dont il se nourrit. La meilleure chance de reprise rapide de l’économie est que les gnomes de Wall Street et d’ailleurs dénouent rapidement les cordons de leur bourse encore bien garnie, comme ils ont su le faire en d’autres temps en faveur de Hitler. On demande aux pécheurs de suspendre temporairement leur activité pour laisser à la ressource halieutique le temps de se reconstituer. Ne pourrait-on de la même manière demander aux actionnaires d’abandonner leurs dividendes et aux dirigeants de limiter leurs prélèvements au bénéfice de l’investissement et des salaires pendant le temps nécessaire à la relance de l’activité économique ? Peut-être faudra-t-il un jour réunir en conclave les mille hommes les plus riches de la planète sous la présidence de  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Bill_Gates" Bill Gates, le premier d’entre eux et l’un des plus conscients de ses responsabilités, et leur interdire de se séparer tant qu’ils n’auront pas accouché d’un remède à la crise non plus bancaire, mais économique et sociale ! Périodiquement éclatent des scandales financiers où l’on découvre que telle ou telle société a perdu des sommes considérables dans des opérations financières hasardeuses. Cependant ces opérations sont des jeux à somme nulle. Ce qui a été perdu par les uns a été forcément gagné par d’autres. Ces « autres » ne sont jamais clairement identifiés. Si nécessaire leurs noms disparaissent dans des incendies, comme les archives des premiers chrétiens…Ceux qui ont des besoins n’ont pas d’argent et ceux qui ont de l’argent n’ont pas de besoins. Là est la source de la langueur dont souffre l’économie à l’exception attendue de l’industrie et du commerce de luxe. Toute politique visant à rendre les riches encore plus riches est donc largement contreproductive car elle a pour effet pervers de remplacer dans beaucoup de cas des dépenses utiles par des dépenses somptuaires, des investissements à l’étranger ou pas de dépenses du tout lorsqu’il y a thésaurisation. Tous les industriels ou presque vous diront que leur problème n’est pas de produire, mais de vendre. Ils disposent très généralement en effet en surabondance des outillages, des matières premières, des crédits et de la main d’œuvre nécessaires pour produire davantage. Ce qui les freine c’est le manque de clients. Ceci provient de ce que la richesse est répartie de façon trop inégale. La richesse se concentre de plus en plus chez un petit nombre de gens qui, ne manquant de rien, utilisent leur argent pour investir dans des biens dont la rareté garantit la valeur durable, c’est à dire essentiellement le foncier, l’immobilier, l’or (dont le cours a quadruplé en dix ans), les matières précieuses et les œuvres d’art ou prétendues telles. Il en résulte un renchérissement artificiel de ces biens qui a pour conséquence de priver d’un logement décent ou d’un outil de travail efficace un grand nombre de citoyens. L’argent sale accumulé sous forme de billets de banque est stérilisé. Trop souvent aussi cet argent est investi à l’étranger jugé plus profitable ou dissimulé dans des paradis fiscaux ce qui provoque l’étiolement de l’économie nationale. Où vont l’or et les diamants qui chaque jour sont extraits de la croûte terrestre ? Servent-ils principalement de contrepartie matérielle au produit de toutes les malversations dissimulées dans des paradis fiscaux ? L’argent indûment accaparé inflige des dommages supplémentaires aux citoyens ordinaires par l’utilisation qui en est faite. C’est la pierre-refuge qui fait les sans-abri ! C’est l’or des bas de laine qui fait les sans-le-sou ! Lorsque l’argent n’a pu trouver de placement sûr, reste la possibilité de le prêter, et c’est pourquoi certains accumulent des créances qui finissent par rendre insolvables des individus ou des états qui n’ont plus qu’à faire une cure d’austérité dont l’effet maléfique n’est que trop connu. Reprendre cet argent par l’impôt irait dans le sens de la justice sociale et de l’efficacité économique. Les financiers ont prospéré en tondant la laine sur le dos des producteurs et maintenant ils ne savent plus quoi faire de la laine ! Ils ont pressé le citron jusqu’à la dernière goutte et ils ne savent plus quoi faire du jus !
Pour renouer avec le progrès économique il faut éviter un certain nombre d’écueils :
croire que le travail est un gâteau que l’on partage. De fait, le travail appelle le travail comme l’argent appelle l’argent. Un homme industrieux manque rarement d’ouvrage. On comprend que celui qui a du mal à garder la tête hors de l’eau soit avant tout sensible à son sort personnel. L’effort profitable à tous doit donc être demandé d’abord à ceux qui ont une réserve de flottabilité suffisante. Les patrons et les cadres doivent être les premiers à mouiller leur chemise car l’augmentation de la production dépend en premier lieu de leur action. Il ne s’agit d’ailleurs pas tant de travailler plus que de travailler mieux. La semaine de quarante heures a été adoptée en France il y a plus de soixante-dix ans. Depuis lors, la productivité s’est accrue de disons 400%. Il n’est pas hors de proportion que la durée annuelle de travail ait été réduite dans le même temps de 20%, Si disproportion il y a, ce n’est pas dans le sens qu’on accuse. L’allongement des périodes de l’existence consacrées à la formation et à la retraite qu’on accuse également doit avoir été à peu près compensé par le fait que la proportion de femmes exerçant un emploi a considérablement augmenté. Il est illusoire de reculer l’age de la retraite tant que les salariés seront bien souvent écartés dés 55 ans. C’est en réalité une façon déguisée de diminuer le montant des pensions car cette disposition ne fournira pas une seule heure de travail supplémentaire. C’est, à la façon du HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Sapeur_Camember"sapeur Camember, creuser un trou dans les caisses de chômage pour combler celui des caisses de retraite. C’est remplacer un jeune retraité heureux par un vieux chômeur rempli d’amertume ou par un jeune travailleur désespéré de ne pas trouver d’emploi. La régulation par le suicide des travailleurs exclus, certains dirigeants y ont presque ouvertement pensé : Ce qui a été baptisé réforme est en réalité un retour en arrière, une contre-réforme. Résolvons d’abord le problème du chômage et nous pourrons envisager ensuite de reculer l’âge de la retraite. S’il était possible d’assurer à chacun 35 heures de travail hebdomadaire jusqu’à ses 60 ans, ce serait déjà un beau succès. Si certains veulent et peuvent travailler plus longtemps pour améliorer leur situation, il faut évidemment leur laisser la liberté de le faire. Le problème véritable auquel nos sapeurs ne semblent pas vouloir s’attaquer est celui de la compétitivité de l’économie française, celle de son industrie en particulier. La faible compétitivité de son agriculture est actuellement camouflée par des aides dont la fin est programmée dans un futur proche. On ne fera pas renaître sauf exception des activités qui ont périclité. Dans un monde globalisé une nation en difficulté ne doit pas s’attacher à tout faire mais se concentrer au contraire sur ses points les plus forts ou les moins faibles car les entités économiques, comme les êtres vivants, se développent par continuité. Dans le cas de la France, ces points forts sont :
l’agriculture et l’agroalimentaire
les vins et spiritueux
l’automobile et le ferroviaire
l’aérospatial
- l’énergie nucléaire, absolument nécessaire pour desserrer le carcan énergétique
- les Grands Travaux
- les services aux collectivités locales
- la grande distribution
- la santé
- les produits de luxe
- la culture et l’artisanat d’Art
- le tourisme, la gastronomie et les loisirs
Si on y ajoute les activités nécessaires pour adapter le parc immobilier et les équipements industriels aux nouvelles contraintes énergétiques et environnementales et tous les oublis de cette liste on voit que nos travailleurs ont largement de quoi s’occuper. Il faut se pénétrer de l’idée que l’activité industrielle est, comme la guerre selon Napoléon, un art tout d’exécution où les exécutants doivent tenir en conséquence le premier rôle. La puissance publique ne crée pas de richesse, elle peut seulement en modifier la répartition. C’est en associant les hommes de terrain qu’il faut analyser les situations et répartir les efforts de recherche et de développement, les investissements, le « bench marking » et l’action commerciale. En un mot, il faut aller ensemble au fond des choses, à l’encontre du chacun pour soi traditionnel, pour avoir une chance de faire quelque chose d’utile. Peut-être faudrait-il que la puissance publique entame ce dialogue, secteur par secteur pour rechercher les améliorations possibles qui aillent au-delà de l’habituelle litanie sur la baisse des salaires, des charges sociales et des impôts. Je ne crois pas que les allemands se soient contentés de faire baisser le coût du travail pour améliorer leur compétitivité de façon aussi spectaculaire. L’ouvrier d’aujourd’hui, lorsqu’il a du travail, est mieux soigné, a plus de confort, de loisirs, de distractions, moins de soucis, moins de stress, roule dans une meilleure voiture sur de meilleures routes que le petit patron d’avant la guerre de 40. L’homme n’est heureux ou malheureux que par comparaison. Ne nous plaignons pas que la France soit en avance pour ce qui est de la qualité de vie. Travailler mieux pour produire autant de richesses et générer moins de gaz carbonique serait un slogan écologiquement plus acceptable. Il faut éviter dans la mesure du possible les tâches qui ne sont pas productrices de biens directement utiles au consommateur final. Il est clair que les activités spéculatives où les gains des uns ne peuvent qu’être inférieurs aux pertes des autres, la sécurité sécuritaire, les transports lointains, le traitement des déchets évitables, l’ultra concurrence, la corruption, la publicité effrénée, les réunions lointaines ou pléthoriques n’en font pas partie. Or, ces tâches non directement productives tendent à prendre de plus en plus d’importance dans la vie des entreprises et plombent leurs résultats alors que la part des tâches directement productives décroît régulièrement. C’est une des raisons pour lesquelles il est devenu très difficile de rentabiliser les activités manufacturières dans les pays développés. Pendant qu’un ouvrier manie la pelle et la pioche, quatre contrôleurs discutent, critiquent, commentent et rédigent des comptes-rendus pour se couvrir. Quand on rapporte l’ensemble des coûts à l’heure d’ouvrier, on trouve que celui-ci est beaucoup trop cher et qu’il faut donc le supprimer. Il a été démontré expérimentalement qu’une entreprise ou une administration peuvent parfaitement fonctionner en circuit fermé sans jamais rien produire d’utile. La valeur ajoutée d’une entreprise dépend bien entendu du total des heures de travail effectuées par son personnel, mais au moins autant de la continuité, de l’intensité et de la qualité du travail fourni. Les heures travaillées sont évidemment ce qu’il y a de plus facile à contrôler…Plus une entreprise est importante et plus il est difficile de déterminer les mérites de chacun. Napoléon avait un truc pour éclairer ses choix. Quand on lui proposait tel ou tel pour un poste à pourvoir, il demandait si cette personne avait de la chance… Je ne crois pas que Napoléon ait été particulièrement superstitieux mais plutôt qu’il jugeait que la chance apparente dépend souvent de qualités qui échappent à un examen superficiel.
Croire que les efforts consentis dans le domaine de la recherche et de l’éducation peuvent avoir des effets autres qu’à moyen et surtout à long terme. Ce n’est pas parce que les entreprises font de la recherche qu’elles gagnent de l’argent. C’est parce qu’elles gagnent de l’argent qu’elles font de la recherche, car il vaut tout de même mieux préparer l’avenir que payer des impôts. Il n’y a pas d’incertitude sur qui est l’œuf et qui est la poule. C’est une illusion dangereuse de penser que l’augmentation des crédits de recherche va engendrer mécaniquement des innovations fructueuses car ceci revient à supposer que nos chercheurs seront plus performants que ceux de la concurrence, alors qu’ils partent le plus souvent avec un temps de retard. Dans son action quotidienne une entreprise est toujours à la recherche de la meilleure façon de faire les choses. Il vaut mieux qu’elle s’attache à régler les problèmes difficiles de façon satisfaisante et s’inspire de ce qui se fait de mieux ailleurs. C’est dans ces conditions que des idées originales ont une chance de se faire jour. A court terme les progrès ne peuvent provenir que d’un changement d’état d’esprit ou d’alliances nouvelles. L’amélioration du climat social n’est pas contraire à l’intérêt des entreprises. Il est absolument nécessaire que patrons et salariés suspendent leurs querelles, que les salariés ne considèrent plus les patrons comme des ennemis de classe et que les patrons réalisent que les salariés sont autant attachés qu’eux-mêmes au succès de leur entreprise. Ils le sont même davantage dans la mesure où un patron peut toujours vendre son entreprise pour tenter sa chance ailleurs tandis que le salarié dépend souvent de son entreprise de façon vitale, surtout lorsque celle-ci est éloignée des grands bassins d’emploi. Les salariés sont au même titre que leur patron responsables des succès d’une entreprise. Le patron doit en conséquence leur fournir une information loyale et leur prêter une oreille attentive. Si les classes possédantes faisaient preuve d’un peu plus de générosité et si les classes laborieuses retrouvaient un peu d’entrain et de joie de vivre, le salut ne serait pas loin. Une nouvelle  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Nuit_du_4_ao%C3%BBt" nuit du 4 août est nécessaire.
Il ne devrait pas être possible de s’approprier le terre qui est un bien commun comme l’air que l’on respire, mais seulement de le louer à la puissance publique. La création du bouclier fiscal a été justifiée entre autres par la valeur considérable prise par certains terrains agricoles devenus constructibles mais dont les propriétaires avaient de petits revenus. Apitoyons-nous sur le sort de ces pauvres malheureux qui se sont enrichis du jour au lendemain sans avoir à lever le petit doigt ! C’est d’ailleurs un procédé constant utilisé par les groupes de pression représentant les grandes fortunes que de s’opposent à toute action redistributrice en prétendant que cette action léserait les petites gens de manière inacceptable. Les gros contribuables, les gros héritiers affectent de prendre la défense des plus petits, les gros céréaliers celle des petits éleveurs de montagne, les multinationales celle des PME que bien souvent elles rançonnent. C’est aussi la thèse dite du «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Th%C3%A9orie_du_ruissellement" ruissellement » selon laquelle l’enrichissement apparemment excessif de certains profite en fait à tous, thèse controuvée par beaucoup d’experts tels que le prix Nobel d’économie  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Joseph_Eugene_Stiglitz" Joseph Stiglitz. On ne fera croire à personne que les progrès de la société passent par un accroissement des inégalités. Toutes ces tentatives de duperie transitent par le canal de médias liés à ces groupes de pression ou par les canaux plus subtils de la rumeur et du bouche à oreille. Beaucoup d’enrichissements spectaculaires correspondent en fait à la captation d’une valeur ajoutée créée par d’autres. Les privilèges liés à la  HYPERLINK "http://www.aujourdhuilachine.com/article.asp?IdArticle=2560" possession de la terre pourraient disparaître à l’occasion des successions, la puissance publique devenant suite à leur règlement l’unique propriétaire du sol, Ceci suppose bien entendu une réforme profonde des droits de succession. La puissance publique pourrait reprendre par ce biais le contrôle du foncier en quelques décennies. Faute de cette réforme la terre de France, bien inaliénable du peuple français, finira par passer toute entière dans des mains étrangères. Le prix de la location des terrains libérés dépendrait de leur constructibilité, de leur fertilité, de leur proximité des équipements collectifs, de leur intérêt touristique et des nuisances dont ils peuvent être affligés. L’achat d’un bien immobilier serait assorti de l’obligation de louer le terrain correspondant. Un loyer pourrait devenir négatif, c'est-à-dire correspondre en fait à une subvention, là où il est souhaitable de maintenir vivante une activité telle que l’agriculture de montagne. La création d’un nouvel équipement collectif pourrait être financée par l’augmentation du loyer des terrains en bénéficiant tandis que la suppression d’un équipement existant entraînerait leur diminution. Ainsi serait mis fin à des enrichissements et des appauvrissements sans cause. Les biens détenus par des étrangers posent un problème spécifique et nécessiteraient certainement des négociations. La lenteur de la mise en place du système doit permettre d’affiner les règles en fonction du retour d’expérience. Personne n’a proposé récemment de plafonner les biens transmis à chaque héritier ce qui pourtant inciterait les couples les plus riches à faire beaucoup d’enfants dans le but de léguer la plus grande partie possible de leur fortune. Une famille nombreuse deviendrait ainsi un signe extérieur de richesse ce qu’elle n’aurait jamais du cesser. Le montant maximum héritable pourrait être calculé de telle façon que le rendement de l’impôt sur les successions nouvelle formule soit le même pour le Trésor Public que ce qu’il est actuellement. Le montant maximum que pourrait recevoir un héritier direct devrait être suffisamment élevé pour encourager chez le plus grand nombre l’esprit d’économie et d’épargne et suffisamment bas pour éviter la perpétuation de dynasties financières qui sont indifférentes pour la plupart au sort de la société dans laquelle elles ont prospéré. Les biens matériels ne sont pas ce que des parents peuvent transmettre de plus important à leurs enfants. L’héritage génétique, éducatif et affectif est beaucoup plus fondamental. « Donne un poisson à un homme, il mangera un jour. Apprends-lui à pêcher, il mangera toute sa vie ».
Faute de dispositions particulières visant à un meilleur partage des richesses il n’y a aucune raison pour que le capital cesse de se concentrer dans un nombre de mains de plus en plus réduit. Il y a bien sûr les partages qui interviennent au moment des successions, mais les mariages les concentrent à nouveau et les hommes fortunés se sont rarement signalés comme étant particulièrement prolifiques. Ce serait plutôt l’inverse. Dans la lignée d’une famille fortunée il me semble que les enfants sont de plus en plus beaux, car on y épouse de préférence les plus jolies filles, mais pas forcément de plus en plus intelligents. Regardez les filles qui sortent d’une « boite à bac » des beaux quartiers et vous verrez tout de suite ce que je veux dire. Dans le même registre vous pouvez également vous intéresser au physique des jeunes gens qui militent dans les partis conservateurs. Peut-on réputer égaux comme le voudrait l’esprit républicain deux individus dont l’un commence sa vie sans un sou en poche et dont l’autre dispose dès le départ de plusieurs millions d’Euros ou davantage ? Ce qui est plus grave c’est que l’héritier d’un outil de production n’éprouve pas forcément d’intérêt pour l’activité professionnelle correspondante et préfère consacrer son temps et ses ressources, à ses plaisirs, ses amours, ses lubies. Il ne se ruinera pas pour autant, tellement sont favorables les conditions faites aux fortunes acquises. Sera-t-il seulement surpris de constater avec quelle facilité ses avoirs font des petits ? Les études montrent que ta plupart des patrimoines importants ont le même taux de croissance, supérieur à 5% par an, quelle qu’en soit l’origine. Exempter de l’impôt sur la fortune l’outil de travail peut avoir un sens du point de vue économique aussi longtemps que le chef d’entreprise l’exploite effectivement lui-même, mais pas au moment de sa succession. Bill Gates l’a bien compris qui a volontairement limité l’héritage de ses enfants. Un système politico-économique atteint ses limites lorsque ceux qui en sont les principaux bénéficiaires commencent à avoir des doutes sur son bien-fondé, comme ceci a pu être observé en France dans les années précédant la révolution de 1789. Les nouvelles règles proposées sur la propriété de la terre et sur les successions apparaîtront à beaucoup comme fantasmagoriques, voire contre nature. Ce sont pourtant elles qui ont prévalu jusqu’à l’invention de l’agriculture, c'est-à-dire pendant l’essentiel de la période durant laquelle l’espèce humaine a été façonnée par la sélection naturelle. J’entends déjà les clameurs et les sarcasmes de ceux pour qui, Dieu merci, tout va bien, mais avons-nous le choix ? Pouvons nous rester longtemps sans rien faire d’innovant si les solutions connues se révèlent irrémédiablement inefficaces ? Attendrons-nous sans réagir d’être étouffés par la Chine ? Pendant combien de temps un taux de croissance de 10% en Chine pourra-t-il coexister avec un taux de 1% ou moins dans les pays occidentaux ? La CIA a-t-elle les moyens de déstabiliser la Chine comme elle a déstabilisé l’Union Soviétique ? Un Judoka peut-il déstabiliser un Sumo qui pèse deux ou trois fois son poids et sur lequel il n’a aucune prise ? Le collectivisme pur a échoué. Le libéralisme pur a montré ses limites. La Chine a-t-elle réussi l’impossible alliance du dynamisme individuel et de la solidarité collective, une sorte de communisme de marché sur lequel il suffirait de greffer les gènes de la démocratie ? Je comprends d’une certaine manière la réticence des dirigeants chinois à pratiquer cette greffe. Ils craignent de faire entrer dans la bergerie le loup de la discorde. Néanmoins l’existence d’une opposition est constitutive d’un état démocratique. Les tenants de la philosophie du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Yin_et_yang" Yin et du Yang devraient finir par s’y accoutumer.
Pour une première tentative d’application de nouvelles règles sur les successions et sur la propriété du sol on peut penser aux pays à tendance collectiviste comme on en trouve en Amérique centrale ou du Sud ou à ceux qui ont une expérience relativement récente du collectivisme et qui en ont conservé une certaine nostalgie. On verrait alors si ces nouvelles règles qui labourent profondément le terrain social permettent d’obtenir de meilleures récoltes. Dans le monde capitaliste, occidental, à cause de leur puissance, notamment militaire, il n’y a guère aujourd’hui que les Etats-Unis qui puissent s’affranchir d’un système à bout de souffle, mais les riches de ce pays s’opposent farouchement à toute tentative de redistribution ou même de limitation de leur enrichissement car l’amour de l’argent est une addiction. Une politique visant à renforcer sans contrepartie les privilèges de privilégiés qui en voudront toujours plus ne peut pourtant se poursuivre indéfiniment. Il faudrait au contraire que le seuil au-delà duquel les contribuables sont redevables de l’impôt sur la fortune s’abaisse avec l’age pour inciter ces contribuables à transmettre leur patrimoine de façon contrôlée, pour les habituer à se détacher progressivement des biens de ce monde et pour leur rappeler qu’il est tout à fait vain de vouloir être, comme on dit, le plus riche du cimetière. Ils doivent réaliser que la seule chose qui reste importante pour eux c’est le sort de leur famille et, au delà, celui du pool reproductif dans lequel leurs gènes se conserveront. Si cet impôt n’a pas de vertus fiscales, qu’il ait au moins des vertus pédagogiques ! Chacun devrait recevoir quand il entre dans la vie active une dotation correspondant à l’apport initial nécessaire à l’achat d’un petit logement. Compte tenu de l’allongement de la vie et des règles de succession en vigueur dans la plupart des pays, on devient riche au moment où on ne peut plus en profiter, on hérite d’une maison quand on en a déjà une et d’une entreprise quand on songe à se retirer. Si tous les êtres humains partaient sur la même ligne, comme c’est le cas dans toutes les autres espèces, on verrait rapidement lesquels se détachent sans que ceux qui se sont détachés aient la sensation ou la tentation d’échapper au sort commun.
Crise institutionnelle

Le mandat de Président de la République qui s’est achevé en 2012 a souligné de façon caricaturale les défauts et les vices du système politique baroque mis en place par le général de Gaulle. Il semble en effet tout à fait extravagant qu’un homme seul puisse comme aujourd’hui l’emporter sur mille autres également élus et compétents, alors qu’on sait bien qu’il y a plus de choses dans deux têtes que dans une seule. Un homme peut-il penser à la place de toute une nation ? Une nation peut-elle se laisser ainsi crétiniser ? Comment a-t-on pu tolérer aussi longtemps une frénésie de réformes dont il ne reste au bout du compte que des désordres, des rancœurs, un affaiblissement de la nation et une montagne de dettes? J’attends qu’on m’explique comment ces réformes ont amélioré en quoi que ce soit le sort matériel et moral de la France et des Français. Un hebdomadaire a fait récemment la liste de toutes les réformes, ou supposées telles, qui pourraient être portées à son crédit. En voici la liste commentée
l’interdiction des vêtements qui cachent le visage, simple mesure de sécurité publique à laquelle il était bien inutile de donner une coloration anti-musulmane
l’autonomie des universités. Elle va inévitablement créer une hiérarchie entre les établissements des zones riches et ceux des zones déshéritées, au rebours de tout ce qui s’est fait depuis les débuts de la troisième république. A tout propos des conflits éclatent entre cette autonomie et le désir du pouvoir central d’imposer des règles communes
le renforcement des contre-pouvoirs et des syndicats. Ceci ne saute pas aux yeux, c’est le moins qu’on puisse dire ! Et encore moins après une campagne électorale où le pouvoir en place a violemment mis en cause ces contre-pouvoirs et exprimé son intention de passer outre à leurs recommandations ! Par contre l’hebdomadaire a négligé de mentionner une innovation réellement positive, celle qui consiste à confier certains postes à des représentants qualifiés de l’opposition, même si cette initiative n’était pas dénuée d’arrière-pensées. C’est un vrai geste républicain et qui mérite d’entrer dans la tradition.
la diminution de la publicité télévisuelle, réelle mais insuffisante.
la vente d’une partie du patrimoine militaire, entre autres mesures de privatisation. La vente des bijoux de famille est rarement un bon signe
l’allègement de l’appareil militaire qui laisse le territoire national pratiquement sans protection en cas de conflit classique et réduit à peu de chose ses moyens d’intervention extérieure
l’instauration du Revenu de Solidarité Active qui n’améliore que très marginalement la situation antérieure alors même que le ministre en charge vitupérait l’assistanat
la sécurité routière dont l’amélioration est moins due aux mesures répressives très contraignantes qui ont été prises qu’aux progrès des infrastructures routières, des conducteurs et des véhicules (airbags, ABS, ESP, assistances diverses à la conduite, habitacles renforcés et structures déformables),
les mesures en faveur de l’environnement dont la plupart ont, comme nous l’avons vu, un impact nul ou négatif et un coût exorbitant
la lutte contre la crise financière mondiale. Il se trouve que la France a adopté les mêmes mesures que les autres pays occidentaux. Tirer la couverture à elle ne fait qu’exaspérer ses voisins. De toute façon nous n’avons fait qu’acheter très cher un répit de courte durée. Encore un ou deux succès comme celui-là et nous serons définitivement ruinés
les interventions en Côte d’Ivoire et en Libye. Attendons la fin de ces opérations poux juger de leur opportunité. Les interventions occidentales dans les pays musulmans entraînent généralement des désastres économiques et le remplacement de régimes autoritaires laïques par des régimes autoritaires théocratiques. Est-ce vraiment un progrès, surtout pour la gent féminine ?
le « Grand Emprunt ». On a fait mine de rechercher la meilleure utilisation possible des fonds empruntés. Cette utilisation était cependant connue : il s’agissait de soutenir l’activité économique jusqu’aux élections présidentielles de 2012 ! Comment d’ailleurs remboursera-t-on cet emprunt sinon à l’aide d’un autre emprunt ? Le crédit revolving est le plus sûr moyen de s’endetter de façon irrémédiable. Les investissements envisagés n’ont de rentabilité qu’à long terme, dans le meilleur des cas. Or le problème n’est pas d’être un peu plus riche dans vingt ans mais d’éviter le dépôt de bilan l’année prochaine.
La réforme de la carte judiciaire qui éloigne un peu plus la justice des justiciables sans qu’il soit possible d’identifier une quelconque amélioration de fonctionnement ou de coût
Des mesures diverses d’aide à l’innovation ou à la santé publique qui sont autant de nouvelles niches fiscales
La limitation à deux du nombre maximum de mandats que peut faire un président de la république et ça, c’est indiscutablement un progrès.
Il faut insister sur les inconvénients de la constitution imaginée par de Gaulle, laquelle n’est supportable que lorsque le président élu possède des qualités hors normes, ce qui ne fut pas toujours le cas. C’est pourquoi il paraît utile de revenir avec quelque détail sur la façon dont le dernier mandat présidentiel a été rempli d’autant plus que, malgré son échec final, celui qui l’a exercé est encore populaire parmi ses partisans et peut encore ambitionner de revenir au pouvoir par diverses voies. La presse accablée de soucis financiers est déjà prête à le soutenir. Il peut du reste ne pas avoir d’autre choix que de chercher à reprendre le pouvoir et par là même le contrôle du cours de la Justice. On a eu longtemps l’impression que le Chef de l’Etat Français remercié en 2012 avançait masqué en saturant les médias de messages lancés dans toutes les directions …tantôt thuriféraire de HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Jaur%C3%A8s"Jean Jaurès et tantôt dévot HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Archibasilique_Saint-Jean-de-Latran"Chanoine de St Jean de Latran…. Qu’y avait-t-il derrière le masque ? L’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Opus_Dei" Opus Dei ? Le  HYPERLINK "http://www.medef.fr/main/core.php" Medef ? La  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/CIA" CIA ?  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Deux_cents_familles" Les deux cents familles ? Un projet original qui se serait dévoilé au fil du temps, comme de faire de la France une banlieue huppée de Los Angeles, le charme des vielles pierres en plus, ou de faire résonner l’ « Internationale » jusque dans les sacristies ? L’expérience apprend à se méfier de ceux qui, la main sur le cœur, protestent de leurs bonnes intentions ou qui jouent les compatissants et les repentis. Après quelques déconvenues, il a procédé par petites touches prudentes et utilisé son mandat pour tout verrouiller. Réélu, il eut été à craindre qu’il ne tombe le masque, contamine tout le corps social et rende la France définitivement méconnaissable. Les italiens ont presque réussi à se débarrasser de Berlusconi. A contrario les américains ont réélu le président le plus décrié de leur histoire. Finalement les français n’ont pas pardonné les foucades et le Fouquet’s ni les rodomontades de leur champion toutes catégories de l’autosatisfaction, mais il s’en est fallu de peu !
Le génial  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Cabu" Cabu avait l’habitude de représenter notre conducator avec deux petites cornes. Ne dit-on pas de certains enfants hyperactifs qu’ils ont le diable au corps ? Ajoutez-y une propension juvénile à faire le malin, à vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué ou d’agiter un sabre de bois. Il n’a cessé de dire qu’il avait changé, ce qui est un aveu d’instabilité, d’immaturité ou d’insincérité. S’il a souvent donné l’impression de ne pas livrer le fonds de sa pensée ou de se payer la tête de ses interlocuteurs, c’était l’effet chez lui d’une petite voix qui protestait de façon subliminale ! Ceux qui n’entendaient pas cette petite voix n’avaient guère d’oreille. Il invoquait les mânes du HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Conseil_national_de_la_Resistance"Conseil National de la Résistance mais détricotait soigneusement toute son œuvre jusqu’à la dernière maille. Il fustigeait la dérégulation des activités financières mais oubliait de rappeler que lui et ses amis y avaient longtemps applaudi. A l’abri d’un brouillard de mots il avançait tranquillement ses pions en écartant progressivement et systématiquement tout ce qui pouvait faire obstacle à sa volonté de puissance. Il neutralisait ses adversaires politiques les plus dangereux en leur offrant des postes prestigieux ou en les achetant… avec l’argent du contribuable ! Il jouait sur la peur, arme favorite des dictatures et des religions. Il savait parfaitement où il voulait nous mener, c’est à dire vers un régime de pouvoir personnel hypertrophié, Ce faisant il fuyait autant que faire se peut les interviews sans complaisance, les assemblées indociles, la contradiction publique et les sifflets de la foule. Comme il devait envier l’impunité des prédicateurs ! Certains quartiers lui étaient devenus inaccessibles sauf à s’y rendre nuitamment sous escorte policière renforcée. Presque partout ailleurs il ne pouvait apparaître sans déclencher une bronca. On ne peut manquer de relever la différence entre cette impopularité et la gaullâtrie ou la tontonmania dont bénéficièrent certains de ses prédécesseurs. Les préfets qui ne prenaient pas les moyens nécessaires pour camoufler cette impopularité se voyaient écartés sans ménagement. Il évitait soigneusement de se confronter directement à ses adversaires politiques comme ce devrait être le cas dans un régime parlementaire. Voyez plutôt ce qui se passe en Grande-Bretagne à la Chambre des Communes. Il préférait s’adresser à des journalistes intimidés ou complaisants, à des assemblées réduites au silence, ou à des citoyens ordinaires peu familiers des joutes oratoires. C‘est délibérément qu’il provoquait l’hostilité de ses adversaires pour montrer qu’il pouvait en triompher, ce qui n’est pas trop difficile quand on bénéficie de l’appui des milieux économiques et financiers et qu’on est disposé à user sans retenue de tous les moyens de l’Etat. Son aplomb et sa tchatche ne sauraient tromper des professionnels aguerris et je suppose que, durant sa brève carrière d’avocat, il s’est fait plus d’une fois reprendre de volée par des magistrats exaspérés par ses oublis, ses approximations et ses mensonges, ce qui expliquerait qu’il leur ait gardé depuis un chien de sa chienne. Il a en tout cas rencontré au tribunal des adversaires peu disposés à accepter sans réagir ses affirmations assénées de façon péremptoire. C’est également ce qui s’est passé lors du débat entre les deux tours de l’élection qui lui fut fatale. Il a été certainement très surpris de ne pas avoir eu le dernier mot lors de cette confrontation. Il a toujours rêvé d’une Justice Assistée par Ordinateur où il suffirait d’appuyer sur un bouton pour délivrer automatiquement la sentence désirée et ou le programme utilisé pourrait être modifié à tout moment au gré de ses intérêts ou de ses lubies. Le principe d’un juge d’instruction indépendant mais unique n’a peut-être pas toutes les vertus mais son remplacement par un parquet sous la dépendance directe du pouvoir exécutif aurait donné la parfaite image d’une justice spectacle et d’une justice aux ordres. Il n’est pour s’en persuader que d’avoir entendu des procureurs de la république pérorant devant des journalistes, étaler complaisamment tous les détails d’une enquête qui venait seulement de commencer et mettre directement en cause des personnes dont la culpabilité n’avait nullement été démontrée. Des morceaux choisis des dossiers étaient communiqués aux médias complaisants au mépris des règles les plus élémentaires concernant le secret de l’instruction. Ces procureurs ne faisaient, il est vrai, que suivre un exemple qui venait de haut ! Un procureur pouvait continuer à instruire un dossier alors qu’il apparaissait lié à l’une des parties et être déjà intervenu en sa faveur ce qui est proprement inconcevable dans un état de droit…Félicitons-nous si les parquets n’ont pas profité des enquêtes préliminaires pour faire le ménage dans les dossiers les plus sensibles au point de rendre vaine toute recherche ultérieure de la vérité. Bien sûr, ces mauvais coups ont été perpétrés durant les vacances estivales lorsque l’opinion publique est anesthésiée ! Il s’agissait manifestement de renforcer encore les moyens du pouvoir pour neutraliser ses adversaires et assurer l’impunité de ses amis. Une opposition en état de marche est pourtant indispensable au bon fonctionnement d’une démocratie, ne serait-ce que pour avertir des inconvénients et des obstacles et attester qu’il n’y a pas eu de bourrage des urnes. Il faut saluer en tout cas le courage et l’abnégation des nombreux magistrats qui ont résisté. Il est pour le moins paradoxal qu’un Chef de l’Etat que la Constitution fait garant de l’indépendance de la magistrature n’ait eu de cesse de l’affaiblir tant par la promotion de nouvelles lois qui la ligotaient que par l’interprétation très personnelle qu’il faisait des lois existantes dans sa pratique quotidienne. Le sacro-saint principe de la séparation des pouvoirs était bafoué sans vergogne.
Ce chef de l’Etat a toujours semblé indifférent à l’image qu’il laisserait à la postérité mais il jouissait intensément de cette boulimie de pouvoir qui peut entraîner des indigestions. Ceux qui le regrettent font penser à la fable des  HYPERLINK "http://www.lafontaine.net/lesFables/afficheFable.php?id=47" grenouilles qui demandent un roi ! Aucun pays véritablement démocratique n’a jamais confié le pouvoir à un tel autocrate qui s’occupait de tout et singulièrement de favoriser sa clientèle. Il faisait bénéficier de remises d’impôts ses soutiens fidèles et ses riches donateurs. Il faisait des cadeaux à certaines catégories de contribuables supposées électoralement influentes et prétendait négocier des contreparties après coup ! Impavide, il présidait au dépeçage des biens de la nation. Non seulement la dette de la France d’est accrue de six cents milliards d’Euros sous son mandat mais ses actifs ont continué à diminuer de façon importante du fait de ventes et privatisations diverses. Il semble avoir eu quelque difficulté à s’intéresser à la question brûlante qui est de savoir comment faire pour que son propre pays échappe à la banqueroute, On a attendu avec curiosité et impatience qu’il propose un « business plan » indiquant le processus envisagé pour rétablir les différents équilibres financiers. Le mot même de dette était absent de son vocabulaire. Il en avait une sainte horreur, comme de tout ce qui pouvait limiter son pouvoir. Je ne l’ai pas souvent entendu employer des mots tels que guerre, chômage, liberté, égalité, fraternité, patrie, solidarité, justice sociale, éthique, avenir, jeunesse; compétitivité, balance commerciale. Un bon sujet de thèse consisterait à rechercher les mots qu’il n’a jamais employés ou très rarement dans ses discours publics. Ainsi sa véritable nature et ses véritables projets auraient pu se lire en creux en toute clarté. Il préférait détourner l’attention de ses concitoyens de toutes les réalités pénibles et l’orienter vers des sujets émotionnels tels que les faits divers violents, le terrorisme, l’islamisme ou la laïcité,. Sa politique extérieure erratique a conduit à tirer au canon sur nos clients les plus fidèles, ce qui n’est pas forcément la meilleure façon de les conserver ni d’en trouver de nouveaux. Les allemands le savent bien qui évitent soigneusement tout aventurisme en la matière. Sa politique européenne a consisté à dire aux autres leaders européens ; « poussez-vous, c’est moi qui conduis le camion ». Sur quoi le camion est allé au fossé. Comment se fait-il qu’avec les qualités intellectuelles hors du commun qu’on lui prête il n’ait pas fait d’études plus brillantes ? Je soupçonne qu’il a en réalité plus d’appétits que d’idées ou de convictions personnelles, que c’est en quelque sorte un politicien chimiquement pur ! Que lui importe le sort de la France et des français. La plupart de ses déplacements sur le territoire national n’ont eu qu’un but électoral. Le seul objet de ses soins et de son admiration, c’était lui-même. Si c’était un conducteur d’autobus il se retournerait après chaque virage vers ses passagers pour leur faire admirer sa maestria ! Les rares préoccupations morales dont il ait fait état sont apparues dictées par ses intérêts plus que par sa conscience. Il a préféré flatter les bas instincts de ses électeurs plutôt que de les exhorter à la vertu. Elevé dans un milieu privilégié, ayant fait ses premières armes en politique dans la gestion d’une ville et d’un département parmi les plus riches de France, il s’était habitué à dépenser sans compter l’argent public ce qui a encore conforté ce culot en béton armé qui fait la plus grande partie de son charme. Les soucis financiers lui ayant été jusqu’alors épargnés, il a semblé peu soucieux de se charger de ce fardeau nouveau pour lui. Il est plus difficile il est vrai de redresser les finances publiques et de lutter contre le chômage que de se livrer à des rodomontades sécuritaires ou de défier physiquement, alors qu’on est protégé par cinq cents CRS, un citoyen ordinaire qui manifeste verbalement son hostilité! Prudemment, il n’est jamais allé au fond des choses en évoquant les problèmes économiques ou financiers devant ses concitoyens de peur d’être obligé de dire ce jour-là le contraire de ce qu’il disait la veille ! Selon un mécanisme bien connu il laissait le soin à ses ministres de commenter une situation difficile, des ministres qu’il réduisait d’ailleurs le plus souvent au rôle de perroquets à qui il faut fournir des « éléments de langage » ! Il n’y a presque aucune de ses initiatives qui ne se soit traduite par une augmentation des dépenses de l’Etat  ou par une diminution de ses recettes, aucun incendie qui n’ait été éteint sans utiliser la Pompe à Phynances chère au père  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Ubu_roi" Ubu! Ce Président qui était venu avec la mission d’accentuer encore davantage la domination du capitalisme libéral, a été pris à contre-pied tant par la crise financière et économique que par l’élection du président Obama et l’affaiblissement relatif du modèle américain, Contraint de brûler aujourd’hui ce qu’il adorait la veille, il ne lui restait plus que la légitimité de la girouette, toujours fidèle au vent dominant. Cette conversion tardive au dirigisme le plus traditionnel me rappelle la conversion au capitalisme libéral d’un chanteur et acteur célèbre, longtemps compagnon de route des communistes, qui avait eu le malheur de faire fortune !
Il a adoré la puissance et la richesse selon un réflexe quasi pavlovien, et ceci dés son plus jeune âge. Il aurait voulu que le culte du  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Veau_d%27or" Veau d’Or soit célébré par tous ses concitoyens ; c’était le fond de son programme politique. Il rêvait en fait de faire triompher le trio infernal constitué par l’argent, le pouvoir et la religion. Il faut reconnaître que son allégeance au président Bush, abrégée par la fin du mandat de ce dernier, a permis à des français de recevoir coup sur coup un Oscar, une Palme d’Or et des prix Nobel en médecine et en littérature, alors que les français étaient depuis longtemps écartés de ces récompenses ! Ceci l’autorisait-t-il pour autant à favoriser l’américanisation à marche forcée de la société française, qu’il s’agisse d’organisation des pouvoirs publics, de culture ou de prise en compte du phénomène religieux ? Il flattait ainsi, il faut bien le reconnaître, les penchants américanolâtres de la jeunesse pour laquelle la vie rêvée se déroule comme dans les feuilletons télévisés dont elle est abreuvée entre le campus, les anniversaires des copains et des copines, les « psys », les avocats, le drapeau étoilé, l’église et le tribunal. Ce ralliement culturel et le retour dans l’ HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Organisation_du_trait%C3%A9_de_l'Atlantique_Nord" OTAN n’ont pas eu de retombées positives clairement perceptibles dans le domaine économique. Après ça il a voulu nous faire le coup de la défense de l’identité française alors qu’un des dangers les plus immédiats qui la menacent est très évidemment celui de son américanisation. L’amour du vin est une caractéristique importante de l’identité française. « Bon homme ne hait le bon vin » disait déjà Rabelais et Alain ajoutait que « plus d’un mauvais diable imbibé de fiel a mouillé prudemment son vin, par crainte de se découvrir aux autres et de s’enlever le moyen de les tromper ».  HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bl.doc" \o "la vérité est dans le vin" In vino veritas. Finalement, la seule caractéristique authentiquement française de ce buveur d’eau c’est qu’il ne parle pas anglais couramment!
Il faut toujours être reconnaissant envers les dirigeants de tout le mal qu’ils pourraient faire et qu’ils ne font pas mais, tout de même, qu’est-ce qui l’a autorisé à compromettre la paix civile en remettant en cause le juste équilibre si laborieusement acquis il y a plus de cent ans entre croyants et incroyants ? A quels engagements cela correspondait-il, envers qui et en échange de quoi ? N’y avait-t-il pas de tâches autrement plus urgentes ? De temps en temps, aidé par des médias complaisants, il lançait un sujet sensible inspiré par l’actualité, comme on lance un ballon dans l’arène et chacun de s’évertuer sottement à donner son coup de pied personnel. Parmi ces sujets la laïcité a occupé une place de choix puisqu’il y est sans cesse revenu malgré les résultats consternants de ses premières tentatives. Etait-ce une simple opération de diversion pour camoufler des difficultés hélas bien réelles ? Pendant que les commentateurs parlaient de laïcité ou d’identité nationale, ils ne parlaient pas d’endettement, de chômage, de pauvreté, de précarité, de désindustrialisation, d’affaiblissement national. A quelques mois de l’élection présidentielle il a lancé mille projets controversés ou d’intérêt douteux ce qui lui a évité d’avoir à parler de son bilan et de sa vision à long terme de l’avenir du pays. Que de temps, de salive et d’argent perdus à discuter de fadaises au moment même où la banqueroute était à notre porte ! Il a dévoilé ainsi sa véritable nature de bonimenteur, ce mot qui commence si bien et qui finit si mal ! Il a d’abord voulu une laïcité qui soit « positive » à l’égard des religions. Elle consisterait, si on l’a bien compris à considérer que les activités religieuses doivent être encouragées et soutenues par la puissance publique au même titre que les activités éducatives, caritatives, sportives ou artistiques. C’est se moquer du monde, c’est ignorer le sens des mots. La laïcité véritable n’encourage ni ne décourage les activités religieuses, mais les enferme dans un cadre strict. La laïcité traduit trois préoccupations. La première est d’empêcher les religions de diviser et de nuire. La seconde est de leur permettre de réconforter matériellement et moralement les personnes qui en ont besoin. La troisième est liée au fait que leurs prescriptions rejoignant le plus souvent celles de la morale naturelle, elles peuvent concourir au bon ordre de la société. C’est ainsi que la république française accepte volontiers sur son territoire les étrangers qui viennent remplir dans nos paroisses des fonctions sacerdotales pour les mêmes raisons qu’elle accepte ceux qui viennent s’occuper des malades ou ramasser les poubelles. Quelles seraient les conséquences de la laïcité positive ? L’interdiction de critiquer les religions ? L’interdiction de faire circuler le présent essai ? L’introduction dans la législation française du délit de blasphème ? On pourrait dire alors « France, qu’as-tu fait de ton Voltaire ? ». Il n’y avait aucun motif avouable de rouvrir un débat qui avait été clos il y a plus d’un siècle. On se demande si ce président reflétait bien la sensibilité moyenne des français. La France, ce n’est pas Neuilly en plus grand ! Voulait-il en faisant financer par l’argent public la construction de nouvelles mosquées s’assurer l’appui électoral des musulmans ? Peu de contribuables auraient été d’accord pour financer des ferments de division. Rien du reste n’aurait empêché des musulmans intégristes de prendre la direction des nouvelles communautés ainsi crées car ils auraient été les seuls à disposer des ressources financières allouées par les monarchies pétrolières. Il n’est que de contempler la mine réjouie du clergé musulman pour comprendre qu’il y aura bientôt en France plus de monde dans les mosquées que dans les églises ! Le succès de l’Islam, ici et ailleurs, semble provenir de ce qu’il est capable de procurer à chaque musulman si misérable soit-il une esclave potentielle en la personne de son épouse ! Les intégristes juifs et chrétiens sont sur la même ligne quand ils remettent en cause les conquêtes féministes du dernier siècle. Les seules dépenses admissibles à la rigueur par les contribuables laïques consisteraient à prendre en charge l’entretien des mosquées dont la qualité architecturale aurait été reconnue. Je mets quiconque au défi de démontrer que le culte de la boite de camembert est moins légitime que tout autre. Irait-on jusqu’à construire aux frais du contribuable des lieux de culte pour les adorateurs de la boite de camembert ? Au reste, la multiplication des cultes ne fait que confirmer le caractère éminemment douteux des « vérités » qui y sont proclamées, ce qui renforce d’autant les partisans de la laïcité. Affirmer publiquement comme il l’a fait que la morale du prêtre sera toujours supérieure à celle de l’instituteur est tout à fait contraire à ce que le présent essai a la prétention de démontrer. Cette supériorité arbitrairement invoquée est incompréhensible pour tous ceux qui ont été, sont ou seront victimes du sectarisme religieux. La peur est le ressort essentiel qui permet de gouverner les sociétés pour tous ceux qui se réclament de l’Ancien Testament. D’ailleurs le mot même de morale ne figure ni dans l’Ancien ni même dans le Nouveau alors que cette notion était HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_l%27%C3%A9thique"parfaitement connue des grecs et des romains. Le dénigrement par le Chef de l’Etat là de ses propres fonctionnaires, qui plus est en public et en terre étrangère, a quelque chose de proprement ubuesque. Il aurait du pourtant savoir qu’on ne gouverne pas par le mépris. L’éthique, rappelons-le, est un instinct naturel que la société se doit de cultiver, ce que l’instituteur, représentant de la morale des Lumières, la dernière et la plus aboutie de toutes les morales, s’emploie à faire de son mieux. L’instituteur fait de l’éducation lorsqu’il explique les fondements naturels de l’éthique et apprend aux élèves à reconnaître en eux-mêmes les manifestations de l’instinct moral. Le prêtre qui se borne à édicter des obligations et des interdits assortis de châtiments et de récompenses ne fait pas de l’éducation mais du dressage. C’est à la morale laïque qu’on doit les progrès les plus décisifs en matière de droits des êtres humains, hommes et femmes, et ce sont les religions qui continuent de s’y opposer avec le plus d’acharnement. La laïcité est la contribution française la plus originale, la plus décisive au concert des nations puisque la laïcité peut seule garantir une paix véritable « dans la société entre les citoyens, et dans la famille entre les proches » et, au delà, entre les nations. C’est le dernier combat d’une France privée des premiers rôles et ce combat n’est pas encore gagné. La laïcité est la religion de l’Etat français. Elle est indissociable de la morale naturelle. Elle est une condition essentielle de la paix universelle, et par là même de la survie de l’humanité, Si vous voulez véritablement défendre l’identité française défendez bec et ongles une véritable laïcité, celle qui renvoie dos à dos toutes les religions et qui proclame qu’un logos d’origine inconnue, et pourtant éternel et partout présent gouverne l’univers.
Les vertus de la fonction de président et la sagesse de son entourage semblent avoir fini par le ramener à une conception plus traditionnelle de la laïcité. Quatre ans et demi pour se décider à enfiler le costume présidentiel, certains ne manqueront pas de trouver ça un peu long ! Encore faut-il se demander si ce changement d’attitude n’a pas eu des motivations avant tout électorales. En privé il ne manquait jamais de glorifier l’égoïsme des riches. C’est le credo des voyous mais c’est aussi une monstruosité, tant du point de vue de l’éthique que du point de vue de la science économique. Il faut dire que beaucoup d’électeurs pensent ; » il est sans ambiguïté du côté des riches, moi aussi, donc je suis avec lui. » La Belgique ne s’est jamais mieux portée que pendant l’année où elle n’avait plus de gouvernement. C’est un appel à plus de modestie adressé à tous les réformateurs. Faites-moi de la bonne politique et je vous ferai de bonnes finances comme disait le baron Louis. Mesuré à cette aune le succès de la politique suivie depuis quelques années en France est loin d’être évident. Au reste, le peuple versatile peut parfaitement choisir un président d’une certaine tendance et envoyer au parlement, quelques semaines plus tard, une majorité de la tendance opposée ! L’élection véritablement décisive reste en effet celle de l’Assemblée Nationale puisque c’est elle qui détermine la majorité qui gouverne. Il est anormal que cette élection décisive soit complètement éclipsée par l’élection présidentielle. Il est anormal que le caractère d’une fonction puisse être complètement modifié par le résultat d’un vote. Il est anormal également de faire reposer le sort d’une nation toute entière sur un homme qui est à la merci du geste d’un déséquilibré, d’une maladie grave, d’un banal accident ou d’une simple migraine, un homme qui peut avoir trompé l’électeur sur son véritable caractère, mais qui est doté de pouvoirs exorbitants et qui est pratiquement inamovible pendant toute la durée de son mandat. Comme disait Mitterrand, ce régime était dangereux avant moi, il le redeviendra après ! La preuve est maintenant faite que Mendès-France et Mitterrand avaient vu juste quand ils se sont opposés pour cette raison à l’adoption de la Constitution de la cinquième République.  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Arnaud_Montebourg" Arnaud Montebourg qui appelle de ses vœux une sixième république paraît être le dernier des mendésistes, comme on dit le dernier des mohicans.
La cinquième république a été fondée par un homme qui ne supportait pas la critique. D’ailleurs, il n’y répondait pratiquement jamais. Refusant un régime parlementaire qu’il honnissait il aurait pu opter pour un régime présidentiel, mais il aurait dû dans ce cas se confronter régulièrement à l’opposition, ce à quoi il répugnait. Il a donc inauguré un régime bizarre qui n’a d’équivalent dans aucun autre pays. Le président y décide de tout et n’est responsable de rien pendant toute la durée de son mandat. Le rôle d’un président de la République ne devrait pas être de conduire la politique au jour le jour. Il y a un gouvernement pour ça, dirigé par un Premier Ministre, comme la Constitution d’ailleurs en dispose. Un président qui se substitue au gouvernement doit s’attendre à recevoir plus de coups que de compliments. S’il prend l’initiative de mesures impopulaires, il s’expose à être conspué, ce qui paraît peu compatible avec le respect dû à la magistrature suprême. Son rôle essentiel est d’assurer le fonctionnement régulier des pouvoirs publics et leur neutralité vis à vis des différentes factions, ce qui inclut la protection des magistrats vis à vis de toutes les pressions. C’est l’œil du citoyen sur les affaires de l’Etat. Même s’il est issu du même camp que le gouvernement, il doit cohabiter avec lui et procéder aux mises en garde nécessaires quand il constate laisser-aller, mensonge, corruption, ou tout autre manquement à l’éthique. En tant que premier magistrat de France il doit être l’arbitre qui siffle toutes les fautes, y compris celles de ses amis. Il propose le premier ministre qui ne peut être accepté ou révoqué que par le parlement. Son élection devrait intervenir lorsque les députés de l’Assemblée Nationale ont accompli la moitié de leur mandat pour manifester de façon tant interne qu’externe une indispensable continuité et pour redonner toute son importance à l’élection de cette assemblée. Cinq ans avant de rendre la parole au peuple, c’est trop long. Nul ne devrait être éligible à cette fonction avant 60 ans, un âge où la sagesse commence à prendre le pas sur les ambitions. Nul ne devrait être éligible après soixante dix pour des raisons évidentes de forme physique et mentale. Ceux qui ambitionnent d’être un jour président, c'est-à-dire les meilleurs, seraient obligés pendant toute leur carrière de donner l’exemple de l’impartialité et de la modération. Les régimes politiques où un roi règne mais ne gouverne pas fonctionnent généralement de façon satisfaisante. Un prince éclairé et débonnaire représente peut-être la meilleure forme de gouvernement possible. Malheureusement la monarchie héréditaire ne peut fournir aucune garantie à ce sujet. Le système proposé aurait entre autres avantages par rapport à une royauté constitutionnelle que l’on serait assuré que le roi élu est de bonne qualité, assagi, expérimenté et au mieux de sa forme intellectuelle. Il n’y a pas de raison pour que le Président de la République dispose de prérogatives particulières en matière de politique étrangère si ce n’est d’y être associé pour en discuter utilement avec le gouvernement et signer les traités en connaissance de cause. Il doit garder la responsabilité qu’il n’aura probablement jamais à exercer de donner le feu vert définitif à l’emploi de la force nucléaire, parce qu’il faut bien que quelqu’un se dévoue et que ce quelqu’un dispose du recul nécessaire par rapport aux évènements. Ce Président idéal, ce surmoi du gouvernement, devrait pouvoir s’appuyer sur des services de prospective pour jouer utilement le rôle d’éclaireur en conseil des ministres. Il est en effet le garant de la pérennité de la nation et le porte-parole des générations futures. Libéré du devoir de gérer au jour le jour les affaires de l’Etat il pourrait consacrer l’essentiel de son activité à penser l’avenir. Pour remplir toutes ces fonctions les qualités les plus nobles sont nécessaires, en particulier le jugement, l’imagination et la rigueur, spécialement la rigueur morale. Il doit être ce que de tout temps et en tous lieux on a appelé un Sage. Le bien-fondé de cette conception restrictive de la fonction présidentielle doit être démontré par l’exemple et faire l’objet d’un consensus avant de la figer éventuellement dans des textes.
Selon le principe majoritaire, 51% d’une population contrôlant tous les pouvoirs peuvent, sinon réduire en esclavage les 49% qui restent, du moins les écarter définitivement des leviers de commande. C’est ce qui motive les opérations de séduction ou d’ouverture auxquelles il a été donné d’assister ici ou là. Il est même possible d’envisager un scénario plus noir, celui où l’un des deux camps, disposant d’une très large majorité comme cela s’est déjà produit dans la vie de la 5ème république, peut alors, à cause de l’effet amplificateur du mode de scrutin, réformer la constitution de manière que plus rien ne s’oppose à ses caprices. Cet effet est particulièrement pernicieux lorsque le camp en question dispose en même temps du pouvoir économique et médiatique. Il ne faut pas oublier qu’Hitler est parvenu au pouvoir selon un processus d’apparence parfaitement légale.
Songez par ailleurs à l’accroissement vertigineux des lois et des règlements sans qu’il soit fait d’efforts suffisants de compression, de structuration, de formation. Il faudra bientôt mettre un policier derrière chaque citoyen et un avocat derrière chaque travailleur. La plupart des lois importantes émanant de la Communauté Européenne, le législateur français qui veut rester actif en est réduit à édicter des lois mémorielles, à légiférer sur les pédophiles, les femmes voilées et les chiens méchants, à interdire ce qui était autorisé et autoriser ce qui était interdit ou bien encore à voter l’alourdissement des peines et la création de nouvelles prisons. Reviens-nous, Victor Hugo, ils sont devenus fous ! C’est ainsi que se sont multipliées des lois de circonstance votées sous l’empire d’une émotion. Ces lois sont le plus souvent sans utilité réelle car l’arsenal répressif existant, déjà très fourni, permet de traiter pratiquement tous les cas. Cette frénésie législative ne fait que souligner l’échec d’une politique pénale qui, oubliant la prévention, exacerbe en pure perte la répression. Il est à penser que la plupart de ces textes de circonstance seront abrogés à la prochaine alternance politique. Dans ces conditions l’absentéisme parlementaire est parfaitement compréhensible, je dirais presque qu’il est sain. Les lois se sont multipliées, mais la capacité du cerveau humain n’est pas indéfiniment extensible. Quelques textes fondamentaux périodiquement révisés devraient remplacer l’empilage des textes actuels où les spécialistes eux-mêmes ont du mal à se retrouver. Peut-on imaginer que le constructeur d’un appareillage compliqué fournisse sous forme de feuilles volantes, au fur et à mesure des problèmes rencontrés ou des modifications apportées à son matériel,  le manuel d’utilisation et d’entretien qui permet de l’exploiter correctement ?
Les agents publics s’attirent des critiques qui ne sont pas toujours injustifiées : la Télévision n’appartient pas à ses journalistes ni à ses techniciens, l’Ecole n’appartient pas aux enseignants, les chemins de fer n’appartiennent pas aux cheminots, l’Administration n’appartient pas aux fonctionnaires. EDF est une des rares entreprises publiques qui semble à l’abri de cette critique pour des raisons très particulières. Cette exception insupportable au credo du libéralisme ne sera pas tolérée très longtemps par des intérêts privés qui ne songent qu’à se partager ses dépouilles. La valse de leurs présidents semble être le prélude nécessaire au dépeçage programmé des entreprises nationales. Aucun gouvernement français n’aurait envisagé de démanteler ou vendre des services publics et des sociétés nationales qui fonctionnaient convenablement sans la pression exercée par la Communauté Européenne. La doctrine libérale est inscrite dans les textes qui en régissent le fonctionnement. Sa remise en cause nécessiterait une impossible unanimité. L’espoir de rendre l’Europe authentiquement socialiste paraît donc aujourd’hui des plus minces. Grâce à l’Europe les libéraux ont pu imposer leur idéologie de façon apparemment irréversible, ce qui a pris par surprise la plupart des socialistes français restés obnubilés par leur rêve d’une Europe de paix, de prospérité, de puissance et de prestige ; un rêve plus qu’aux trois quarts déçus, car la paix elle-même doit moins à l’Europe qu’à la bombe atomique. Tout porte à croire qu’un Mitterrand en pleine possession de ses moyens ne se serait pas laissé faire sans résistance. Beaucoup de dirigeants socialistes après lui, oui. On ne voit pas comment il serait possible d’éviter une scission entre ceux des socialistes qui, quitte à abandonner provisoirement les premiers rôles, préfèrent le socialisme libre-penseur à l’Europe libérale et chrétienne et ceux qui préfèrent une Europe même libérale et chrétienne au socialisme. Cette divergence fondamentale entre socialistes explique pour une bonne part leurs difficultés. Je suppose que c’est cette incompatibilité foncière qui a dissuadé  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Delors" Jacques Delors de se porter candidat à la Présidence de la République en 1995 alors qu’il avait les meilleures chances de l’emporter. Il a ouvert ainsi en France et pour longtemps la voie du pouvoir aux libéraux - fussent-ils déguisés en socialistes - qui ont mis la pagaille dans la maison France. Les socialistes doivent dire ensemble et avec force, même si cela fend le cœur de certains, que l’Europe libérale ne les intéresse pas. On ne voit pas comment le socialisme pourrait retrouver sa crédibilité s’il ne parvient pas à faire preuve de clarté à cet égard, à coaliser toute la gauche et à relever le défi écologique.
Remarquons au passage le ridicule qu’il y aurait à se rallier parmi les derniers à un libéralisme rejeté par une majorité de français si celui-ci venait à être un jour abandonné par ses principaux supporters enfin soucieux de sauver la planète ! Ce n’est pas à cause de ses insuffisances que le modèle économique mis en place en France à la libération a été abandonné, mais pour se conformer à l’idéologie libérale dominante. Le partenariat public privé qui faisait la force et l’originalité de l’économie française a été sacrifié sans contrepartie sur l’autel de l’Europe… Or l’Europe est loin d’avoir concrétisé sur le plan économique tous les espoirs qui avaient été mis en elle. C’est d’ailleurs, de tous les continents, celui qui a le plus faible taux de croissance. Il ne faut pas mettre la charrue avant les bœufs. Il faut commencer par rapprocher les politiques économiques et sociales avant d’institutionnaliser un tel rapprochement. On ne couple pas un nouvel alternateur sur un réseau électrique sans l’avoir auparavant synchronisé avec celui-ci. Non seulement l’Europe ne résout pas les problèmes économiques des pays qui la composent mais, en leur liant les pieds et les poings, elle les empêche de les résoudre ! L’idée d’origine n’était évidemment pas que l’union paralyse mais qu’elle rende plus forte chacune des nations qui en sont membres. Dans les conditions présentes une union véritable devrait faire de l’Europe une entité économique « HYPERLINK "../../../Application%20Data/Microsoft/Word/IEUE%20Rév%20bm.doc" \o "trop grosse pour disparaître"too big to fail ». On observe au contraire que, comme un troupeau d’herbivores fuyant devant des prédateurs, les nations européennes à la traîne sont chacune à leur tour attaquées et mises à mal. Ainsi le veut le libéralisme qui est à la base de son organisation. Il y a un cliquet qui empêche l’Europe d’aller dans une autre direction que le libéralisme car des pays aussi nombreux et divers ne peuvent trouver de règle qui convienne à tous. Comment voulez-vous que l’Europe adopte une législation mettant fin à la spéculation financière lorsque celle-ci est la principale source de revenus pour certains des états qui la composent et qu’une telle législation doit être adoptée à l’unanimité ? Aussi n’est-elle même pas proposée. La France et nombre de pays européens n’auraient jamais pu s’endetter autant sans l’Euro. Si toutefois ceci avait été le cas, l’inflation aurait permis d’en limiter l’impact. Il faut réaliser que chaque famille française doit près d’un an de ses revenus aux créanciers de son pays. Combien d’entre elles pourraient faire faee si cette créance répartie se transformait en créance personnelle immédiatement exigible ? Sans l’ouverture des frontières imposée par l’Europe régano-thatcherienne le niveau de vie n’aurait pas forcément été meilleur mais il n’y aurait pas eu un tel accroissement des inégalités ni autant d’emplois industriels détruits. Globalement la nation française aurait été plus heureuse et moins pessimiste. Le côté usine à gaz et le manque de souffle de la constitution dont l’Europe a voulu se doter, le caractère malcommode de sa petite monnaie, sa gestion calamiteuse des grands programmes et l’obscurité de ses textes réglementaires sont autant d’exemples déplorables qui font redouter le pire pour la suite. Associer étroitement des entités territoriales qui ne parlent pas la même langue est une tâche très difficile comme le montre avec éclat l’exemple belge. La tendance naturelle est à l’émiettement des états en régions autonomes beaucoup plus qu’au rassemblement d’états jusqu’alors indépendants à l’intérieur d’une même structure politique. Les responsables français de droite comme de gauche et ceux de nombreux pays européens se sont engagés tête baissée dans l’aventure européenne et y jouent leur carrière. Ils ne sont pas prêts de reconnaître leur erreur et pratiquent en conséquence la fuite en, avant. Le plus probable est que l’Europe va s’enfoncer progressivement dans les profondeurs du classement.

Le pluriel ne vaut rien à l’homme
Et sitôt qu’on
Est plus de quatre on est
Une bande de cons
(Georges Brassens, Pluriel)

Du jour où la Grande-Bretagne, cheval de Troie du libéralisme anglo-saxon, est entrée dans la Communauté Européenne pour empêcher l’Europe de remettre en cause le leadership des Etats-Unis, une certaine idée de l’Europe était sinon morte, du moins moribonde. L’intégration de la Pologne, cheval de Troie du Vatican, n’a rien arrangé! Depuis que les anglais ont été « boutés hors de France », leur stratégie constante a été d’éviter l’apparition en Europe d’une puissance hégémonique. Ils y favorisent donc les dissensions pour garder les mains libres ailleurs. Au bout du compte les stratèges anglais et américains sont arrivés à leurs fins en transformant l’Europe en simple zone de libre échange, terrain de chasse ouvert sans restrictions aux jeux de la finance anglo-saxonne. Si, d’aventure, les anglais choisissaient de se retirer du champ de ruines qu’est devenue la construction européenne, ils pourraient le faire avec le sentiment de la mission accomplie. En acceptant bon gré mal gré la dérive libérale de l’Europe l’Etat français s’est condamné à l’impuissance alors que ses citoyens lui en demandent chaque jour davantage.
La crise actuelle est une occasion unique de prendre un nouveau départ. L’extrême austérité qui s’est déjà abattue ou qui va s’abattre prochainement sur la plupart des pays européens changera-t-elle durablement cette situation ? Je crois que l’opinion publique des nations menacées de faillite pressent qu’il existe des solutions moins douloureuses pour réduire le chômage et la dette. Supposez par exemple que l’Allemagne abandonne un Euro devenu suspect. Aussitôt l’Euro est dévalué par les marchés, ce qui réduit d’autant le poids des dettes libellées en Euro. Ceux qui détiennent ces Euros les sentant fondre entre leurs doigts se dépêchent de les dépenser, ce qui permet à l’économie européenne de retrouver de la vigueur. Si, inspirés par cet exemple, les Etats-Unis laissent à leur tour filer leur monnaie il en résulte une diminution du poids des dettes libellées en dollars et une nouvelle accélération de la croissance mondiale. Les problèmes résultant de l’affaiblissement de ces monnaies devraient pouvoir être résolus assez facilement dans une économie assainie et revigorée. Des solutions de ce type trouveront-elles une expression politique crédible? La crise économique ne semble pas pour l’instant favoriser dans l’opinion la recherche de solutions hardies mais plutôt le recours à des solutions de rentier mieux accordées au déclin économique occidental.
La  HYPERLINK "http://www.cndp.fr/themadoc/defense/txt_citoyennete.htm" professionnalisation des armées s’est généralisée dans les pays occidentaux. Il faut se réjouir bien entendu de ce que la perspective d’une guerre entre l’Est et l’Ouest se soit éloignée, mais on peut se demander si cette professionnalisation n’a pas aussi pour conséquence, sinon comme objectif inavoué, de retirer au citoyen ordinaire la possibilité de faire valoir ses droits. On sait que les rois et les seigneurs évitaient soigneusement d’armer leurs paysans auxquels la chasse même était interdite. La fusion des services de renseignements le rapprochement des différentes forces de maintien de l’ordre, le braconnage des opposants les plus fragiles, l’infiltration des organes d’opposition, la reprise en main de la plupart des médias, le retour des barbouzes et des HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Affaire_des_plombiers"  plombiers, l’utilisation illégale des moyens de l’Etat et de l’argent des contribuables pour espionner et piéger des adversaires, la mise au pas de syndicats divisés et quelquefois compromis et celle, plus difficile, de la justice, toutes ces remises en cause de l’ordre établi perpétrées dans les dix dernières années allaient dans le même sens. Tous ces faits et méfaits avaient une odeur bizarre. En annonçaient-ils d’autres encore pires? Un rouleau compresseur s’était-il mis en marche pour écraser toutes les velléités d’opposition ? Le fait que des réformes, ô combien fondamentales, aient été décidées le plus souvent d’un trait de plume, sans même un véritable débat parlementaire, laisse perplexe. Pourquoi a-t-on institué le procédé du référendum sinon pour trancher ce genre de questions qui intéressent la vie de chacun ? Pour en rester à l’aspect militaire la France d’il y a un siècle, moins peuplée et infiniment moins riche qu’aujourd’hui, était capable de mettre des millions d’hommes sur le terrain. Il faut de nos jours racler les fonds de tiroirs pour envoyer quelques milliers d’hommes ici ou là. La marine nationale ne dispose que d’un seul porte-avions qui nécessite de longues révisions périodiques. La France doit-elle faire la guerre les années impaires exclusivement et se rendre dés que son porte-avion a été frappé par la première torpille ? Nous ne sommes pas les seuls à rogner les budgets militaires puisque, par un étrange retournement de l’histoire, nous nous plaignons de ce que l’Allemagne ne consacre pas suffisamment de ressources à ses forces armées ! Après quelques années de professionnalisation l’état des armées et de leurs équipements paraît pire que jamais comme si, sans appelés, il ne se trouvait plus personne pour accomplir les tâches les plus humbles mais aussi les plus nécessaires ! Les militaires ont le rôle mieux qu’honorable d’assurer l’inviolabilité du territoire national et, dans le cas de guerres étrangères, civiles ou non, de séparer les belligérants et de protéger l’aide humanitaire. S’en contenteront-ils indéfiniment ? Une armée de métier devenue une sorte de police internationale comportant pour ses membres peu de risques personnels majeurs pourrait attirer un certain type d’hommes rebutés par les difficultés de la vie civile, peu représentatifs pour mille raisons de l’opinion moyenne des citoyens, mais non insensibles à certaines tentations et susceptibles d’être noyautés. La tradition démocratique et le respect de la loi ne sont pas partout aussi solidement ancrés qu’ils le sont en Grande-Bretagne. Il y a un risque objectif, même s’il paraît lointain dans les circonstances actuelles -mais ces circonstances peuvent changer- que ce qui doit rester l’armée du peuple ne devienne l’armée d’une faction, et vous pouvez parier en toute tranquillité que cette faction ne sera pas celle des nécessiteux et des laissés pour compte. Il en fut ainsi partout pendant des millénaires et c’est encore vrai en de multiples endroits. La proportion d’intégristes et de nostalgiques du pouvoir personnel est plus importante dans les forces armées que dans toute autre profession. Personne ne choisit la profession militaire pour être tué ou estropié. Ceci me rappelle les propos tenus jadis devant quelques réservistes par un officier de métier, qui a fait depuis une assez belle carrière, selon lesquels nous autres, pauvres pékins, étions vraiment bien stupides d’entretenir des militaires professionnels en temps de paix alors que nous occupions les postes les plus exposés en temps de guerre ! J’ai provoqué moi-même des murmures réprobateurs lorsque je me suis laissé aller à dire devant des camarades que la guerre était une manière de sport. Je comprends ces murmures et j’aurais certainement dû parler d’un sport idiot si les circonstances l’avaient permis, mais j’observe que des combattants qui ont cherché à s’entre-tuer pendant des mois et des années peuvent, le match terminé, la paix revenue, tomber dans les bras les uns des autres. Il leur arrive même de fraterniser sur le champ de bataille ! Les guerres sont déclenchées, dans le seul but de protéger ou d’étendre leur pouvoir, par des clans mafieux parvenus au sommet. Les braves gens s’y trouvent impliqués bien malgré eux. La défense de la nation, garante de la liberté de chacun, contre ces entreprises criminelles est une tâche qui ne devrait jamais être sous-traitée. Il est aussi risqué de confier sa liberté à des militaires de profession que de confier ses économies à des banquiers privatisés. Sans surprise, ces deux corporations pensent d’abord à la défense de leurs propres intérêts. Avant d’aller à l’armée, je ne nourrissais pas des sentiments exagérément chaleureux à l’égard des militaires bien que j’ai passé une bonne partie de mon enfance à jouer à la petite guerre comme c’était fréquent à l’époque. Ayant par la suite mieux connu les civils, j’ai trouvé finalement que les militaires n’étaient pas si mal ! Il faut donc relativiser les choses. On peut concevoir qu’il soit indispensable que la force de frappe soit servie par des professionnels, encore qu’il existe certainement des fonctions subalternes qui pourraient y être tenues par des non spécialistes. Les armes classiques quant à elles peuvent être sans inconvénients servies par des amateurs. L’utilisation de ces armes dans les pays les moins développés n’a pas l’air de poser de problème insurmontable. Nous en avons eu la douloureuse surprise à  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Bataille_de_Di%C3%AAn_Bi%C3%AAn_Phu" Dien Bien Phu. Une sorte de droit de veto est potentiellement donné aux militaires de carrière, seuls détenteurs des armes les plus puissantes, sur toute évolution de la société qui n’aurait pas leur agrément de sorte que le choix des citoyens s’exercerait dans un périmètre de plus en plus étroit. Voyez ce qui a été évité de justesse à la fin de la guerre d’Algérie grâce à la présence du contingent sur le terrain, aux sentiments républicains d’un certain nombre d’officiers et à la présence à la tête de l’Etat d’un homme providentiel, donc rare, qui fut d’ailleurs en cette occasion, il faut malheureusement le rappeler, un pompier quelque peu pyromane. C’est en effet avec son aval que furent sauvagement réprimées en mai 1945 les manifestations nationalistes de Sétif. Beaucoup d’historiens voient dans la violence de cette répression l’origine du sentiment répandu chez les patriotes algériens qu’il leur serait impossible de s’affranchir pacifiquement du joug de la colonisation alors qu’ils pensaient qu’une telle évolution leur était due et qu’elle leur avait été plus ou moins promise en échange de leur soutien dans la bataille contre le nazisme. La France engagea dans cette première répression tous les moyens terrestres, aériens et navals dont ses forces armées disposaient. Le drame de Sétif est expédié en deux lignes dans les mémoires du Général soit, suivant les estimations et les points de vue, quelques milliers ou plusieurs centaines de milliers de morts par ligne. En soutenant le retour au pouvoir du Général de Gaulle en 1958 les français d’Algérie espéraient sans doute qu’il allait rééditer ces hauts faits à plus grande échelle. Dans les années précédant 1958, date de son retour au pouvoir, les diatribes incendiaires de « HYPERLINK "IEUE%20Rév%20bd.doc" \o "Michel Debré"Michel Debré son exécuteur des hautes et basses œuvres, qui considérait que tous ceux qui exprimaient des réserves sur la politique algérienne du gouvernement français ou sur certains aspects du comportement de son armée appartenaient à « l’anti-France », les dérives «  HYPERLINK "http://www.wsws.org/francais/News/2001/avril01/01avril01_algerie.shtml" questionnantes » qui n’ont pas cessé après son retour ainsi que les abandons qui ont suivi sont restés en travers de la gorge de plus d’un. N’étant pas complètement débarrassé de présupposés courants à l’époque le Général a mis un certain temps à réaliser que les musulmans algériens étaient des gens fiers et courageux et que la grandeur de la France n’était pas leur préoccupation première. Il a fini également par comprendre que la France perdait dans ce conflit et ses forces vives et son âme. Lui-même passa par profits et pertes les  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Harki" harkis restés fidèles à la France. Le grand homme a vu clair plus tôt que beaucoup dans cette affaire de décolonisation, mais moins que certains et il était le premier à être conscient de cet échec qu’avec son immense talent de comédien et son autosatisfaction coutumière il a eu l’art de faire passer pour un demi-succès. S’il avait été durablement fait confiance à  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Mend%C3%A8s_France" Pierre Mendés France, vilipendé probablement pour avoir voulu remettre son pays sur les bons rails et pour avoir montré qu’il en était capable, bien des choses auraient changé et pas forcément pour le pire. L’Algérie serait certainement devenue indépendante mais il n’est pas dit que nos compatriotes auraient été contraints de rembarquer. Ce pays serait demeuré prospère et il aurait gardé tous ses enfants. De Gaulle aimait certainement la France, à défaut d’aimer les français, mais c’était un amant jaloux. Nul autre que lui n’avait le droit de la sauver. A avoir voulu trop longtemps une Algérie française, on finit par avoir une France de plus en plus algérienne. L’Afrique du Sud nous a montré l’exemple d’un autre dénouement beaucoup plus économe en vies humaines et souffrances de toutes sortes. S’il y a eu un Mandela algérien, il est mort sous la torture.
C’est Mendés et  HYPERLINK "http://www.lexpress.fr/" l’Express de JJSS, Françoise Giroud et François Mauriac, le plus souvent hostiles au régime mis en place par de Gaulle, qui ont éveillé la conscience politique de beaucoup de jeunes gens de ma génération. Le seul véritable apport de la 5ème république, c’est l’adoption du scrutin majoritaire qui oblige les forces sociales à se rassembler pour agir. Comment prétendre en effet gouverner la société toute entière si l’on n’est pas d’abord capable de se rassembler au sein d’un même camp ? Croire le contraire c’est faire preuve d’une redoutable immaturité. Des valeurs conservatrices, voire réactionnaires, ainsi que l’affairisme se sont abrités sous le vaste manteau du Général, désorientant les intellectuels et artistes français et rognant leur audience internationale. Paris ne fait plus rêver, Paris privé de ses classes populaires n’est plus chanté par les poètes. Paris est devenu une ville musée un peu tristounette et réservée aux touristes. Une chape de tristesse s’est abattue sur le monde du travail. Voyez comme le beau nom d’ouvrier est maintenant dévalorisé malgré la somme de courage, d’abnégation et de noblesse véritable qu’il représente. Le nom lui-même est presque toujours absent des discours des partis de gouvernement. Il me souvient d’un temps à présent révolu où les ouvriers d’usine allaient le matin prendre leur métro en sifflotant et où les gars du bâtiment poussaient la chansonnette sur leurs échafaudages. Comparez l’écriture des générations qui nous ont précédés avec les écritures actuelles et vous constaterez le contraste qui existe entre des écritures larges, fermes, assurées d’elles-mêmes et des écritures gâtées par la hâte, incertaines, resserrées, tremblotantes. Avec la  HYPERLINK "http://www.assembleenationale.fr/histoire/loidebre/sommaire.asp" loi Debré, qui a rallumé la guerre scolaire entre les deux France, le Général a laissé pratiquer dans le mur de la laïcité une brèche qui ne cesse depuis de s’agrandir au point que nous sommes aujourd’hui menacés d’un retour au pouvoir de la famille d’esprits qui s’était illustrée dans les années trente et quarante. Deux générations ont suffi à estomper le souvenir de leurs exploits. Gaullistes et pétainistes sont enfin réconciliés et ils ont trouvé leur champion aujourd’hui déchu, qui était de tempérament apparemment plus pétainiste que gaulliste ! Le gaullisme vieillissant et résigné est devenu un pétainisme mou ! Les deux géants que furent de Gaulle et Mitterrand font encore de l’ombre à leurs successeurs. L’un et l’autre avaient connu la guerre, les camps de prisonniers et les risques physiques aigus, ce qui leur donnait une épaisseur humaine sans égale. Alain prétendait qu’il était capable de reconnaître au premier coup d’œil celui qui avait vécu dans les tranchées. Au cours de ces tribulations Mitterrand avait pris conscience de l’éminente dignité de la famille humaine dans toutes ses composantes. De Gaulle ne s’est jamais complètement départi d’une certaine distance aristocratique. La haute taille de l’un, le profil de médaille de l’autre ajoutaient encore à leur autorité. Le personnel politique français actuellement disponible n’a pas été formé par des circonstances aussi exceptionnelles. Le costume présidentiel taillé aux mesures du général est trop grand pour lui. Ce sont les circonstances exceptionnelles qui font les hommes exceptionnels. Sans les deux guerres mondiales Pétain et de Gaulle auraient fait des carrières honorables certes, mais ils seraient restés d’illustres inconnus. Quand tout va bien ils sont nombreux ceux qui se disputent le pouvoir. Quand les conditions se durcissent leurs rangs s’éclaircissent. Arrivent alors ceux qui, dévoués au bien public, étaient jusque là rebutés par la bousculade. Il y a une sélection par l’arrière, comme dans les étapes de montagne d’une course cycliste. Quand les circonstances sont redevenues normales, les hommes exceptionnels sont promptement éjectés du système. Je me suis demandé pourquoi l’instruction donnée jadis aux enseignants de lire en classe la lettre du jeune résistant Guy Moquet puis celle, heureusement abandonnée, de faire parrainer par de très jeunes élèves les petites victimes de la Shoah évoquaient pour moi des méthodes pétainistes. C’est à priori absurde puisque le régime de Vichy a précisément poursuivi et fait martyriser les résistants et les juifs. Je trouve pourtant deux raisons à ce sentiment étrange. La première est le souvenir que j’ai gardé d’avoir chanté « Maréchal, nous voilà » lorsque nos instituteurs eurent reçu l’ordre gouvernemental d’apprendre à leurs élèves cet hymne conforme au credo du nouveau régime. La seconde est que ces espèces d’exorcismes traduisent pour moi le désir de la droite dure et celui de l’Eglise de France de faire oublier leur passé antisémite et collaborationniste, en fait d’être pardonnées sans avoir à faire de façon trop visible acte de repentance. Ces tentatives doucereuses de privatiser l’histoire de France et d’embrigader la jeunesse, ouvraient la voie à d’autres tentatives moins anodines, faute de quoi elles n’auraient eu aucun sens. La création aujourd’hui abandonnée d’une Maison de l’Histoire de France obéissait sans doute aux mêmes préoccupations, d’autant qu’il était question au même moment de faire entrer le spectre de la torture  dans le temple des gloires militaires françaises! Il s’agissait à l’évidence de faire le jeu «  d'un système d'opinions bizarres … qui encourage au crime par la commodité des expiations ». Vilipender le nazisme après coup comporte au reste peu de risques.

J’ai conspué Franco la guitare en bataille
Pendant pas mal d’années
Faut dire qu’entre nous deux simple petit détail
Y’avait les Pyrénées
(Georges Brassens,)

Le temps qui passe protège encore plus efficacement qu’une chaîne de montagnes.
La nation qui était la valeur suprême pour les générations qui nous ont précédés est aujourd’hui attaquée du haut par la construction européenne et du bas par la régionalisation. L’œuvre centralisatrice poursuivie par les monarchies comme par les républiques est mise au rancart, jusqu’à avoir voulu débaptiser, ultime sacrilège, la Nationale 7 ! Il y a des économies locale, nationale, internationale, il n’y a pas d’économie régionale, ou si peu. La vie culturelle n’est régionale que pour le folklore, et encore, sinon elle est principalement francophone. Ce n’est pas la pratique de l’occitan, du breton ou du basque qui fera bouillir la marmite dans un univers où les frontières s’estompent. Estimons-nous heureux si nous parvenons à sauver la langue française. Le fait que cette régionalisation et cette européanisation aient été décidées en circuit fermé par le monde politique désigne les vrais bénéficiaires de l’opération : ceux qui en sont les auteurs, pour lesquels elle multiplie les places, les pouvoirs discrétionnaires et les tentations. La proposition de supprimer les départements qui aurait eu l’effet inverse a fait l’objet d’un rejet unanime dans les mêmes cercles. Quand ont été conclus froidement à  HYPERLINK "http://translate.google.com/" \l "auto|en|La%20cr%C3%A9ation%20d%E2%80%99une%20Maison%20de%20l%E2%80%99Histoire%20de%20France%20ob%C3%A9it%20sans%20doute%20aux%20m%C3%AAmes%20pr%C3%A9occupations.%20" Lisbonne des accords européens dont le contenu avait été précédemment rejeté sans ambiguïté par le peuple la notion même de démocratie a été vidée de son sens. Or ces accords confortent en Europe le libéralisme économique anglo-saxon, ce qui prive les états européens d’une bonne partie de leur pouvoir dans ce domaine car la législation européenne a priorité sur les législations nationales. Le plus étonnant est que ceci ne soulève même pas d’indignation, tant l’opinion publique est tenue en lisière par les « gens d’en haut ». N’est-ce pas prendre un risque que de faire fi de cette opinion dont le bon sens n’est plus à démontrer ?  Comment le bon citoyen peut-il encore avoir envie d’aller voter quand il constate que son vote le plus solennel a été bafoué ? La Communauté Européenne n’est pour le moment qu’un club. En tant que club, elle n’a pas besoin d’une Constitution, mais d’un règlement intérieur. Si l’Europe doit apporter la misère au lieu de la prospérité promise les peuples européens devront s’interroger sérieusement sur l’opportunité de poursuivre l’expérience.
La régionalisation risque d’aggraver encore les inégalités entre des régions riches et bien en cour et des régions déshéritées ou mal-pensantes, jusqu’à susciter des tentations de sécession comme chez certains de nos voisins. Elle multiplie à coup sûr, tout comme la construction européenne, le nombre des fonctionnaires et les conflits entre les différents niveaux de responsabilité. Ces conflits peuvent vite devenir paralysants quand les diverses autorités compétentes ne sont pas du même bord. Au reste les pouvoirs régionaux font peu parler d’eux. Aucune grande bataille ne paraît se livrer à leur niveau. La meilleure façon d’améliorer la qualité de vie des citoyens serait plutôt d’utiliser les nouvelles technologies pour redistribuer l’activité économique sur l’ensemble du territoire national, permettant ainsi de valoriser l’espace et les beautés de régions actuellement délaissées. Qu’est-il fait de sérieux dans ce domaine ? La création de « zones d’activités » bénéficiant de régimes préférentiels dérogatoires ne profite qu’au marché de la construction. C’est une mauvaise manière à l’égard des entreprises concurrentes qui ne bénéficient pas des mêmes facilités. Dans bien des cas ces zones sont utilisées principalement comme pompes à subventions. Le succès de nouvelles niches fiscales ne s’est jamais démenti. Sous prétexte de soutenir l’activité économique on crée des distorsions qui ne font qu’augmenter les inégalités. On ne fait jamais cadeau aux contribuables que de leur propre argent selon le principe bien connu du canard marseillais qui se nourrissait en se fourrant le bec dans le fondement. C’est encore et toujours la faveur du prince qui octroie la richesse. Les fonds publics vont-ils au plus méritant ou au plus intrigant ? Le solliciteur valorise le sollicité, ce que tous les courtisans savent d’instinct. Il sera donc préféré. Tous les avionneurs du monde prospèrent grâce aux contrats militaires de même que tous les laboratoires pharmaceutiques profitent des programmes de santé publique initiés par l’Etat. Quel industriel ne rêve de voir ses produits achetés par l’Etat ou remboursés par la sécurité sociale? Le pouvoir central trouve surtout dans la régionalisation un moyen de se débarrasser de problèmes gênants. Comme toujours il répond par des mesures administratives à des problèmes qui sont de nature essentiellement technique, qu’il s’agisse de la qualité de l’enseignement et des soins médicaux ou de la compétitivité de l’industrie et de la recherche. Croire qu’il suffit d’accorder des crédits plus importants à l’enseignement supérieur ou à la recherche pour améliorer leur qualité de façon mécanique est du domaine du rêve. Le succès d’une recherche repose sur des équipes stables, enthousiastes et soudées autour de projets mûrement réfléchis, ce qui demande du temps et du savoir-faire. Les mesures qui se contentent de modifier les organigrammes et de construire des locaux supplémentaires sont autant de cautères sur des jambes de bois. Il ne suffit pas de construire des campus à l’américaine et d’en soigner l’engazonnement pour que nos universités rattrapent le niveau de Berkeley, Sandford ou Harvard. Le projet du plateau de Saclay qui doit regrouper les écoles les plus prestigieuses en un même lieu est une ineptie coûteuse dont le seul objectif est d’étaler la toute-puissance du pouvoir politique devant les yeux d’une jeunesse réticente. Quel est le temps de retour de l’argent qui y aura été investi ? Bien sûr ce calcul est inutile puisque, comme chacun sait, la France n’a aucun souci d’argent…De plus elle s’est séparée des moyens qui permettaient de mener à bien un tel calcul. Les bataillons d’experts qualifiés et les batteries de calculateurs surpuissants gorgés de données économiques et statistiques ont été remplacés depuis quelques années par le seul cerveau du Président de la République. Il n’est pas sûr qu’il en résulte à long terme une réelle économie. Est-il normal qu’on attende de rapports extérieurs, quelle que soit la qualité de ces rapports et celle de leurs auteurs, des directives concernant la meilleure manière de conduire la politique économique de la nation alors que celle-ci devrait faire l’objet de soins permanents et vigilants. Imagine-t-on Foch ou Eisenhower sollicitant des conseils extérieurs pour décider de la conduite de la guerre? La légèreté avec laquelle le monde politique traite les questions les plus essentielles et le peu de moyens qu’il y consacre explique sans doute pour une part les difficultés rencontrées dans ce domaine. Le pouvoir technocratique ne va jamais au fond des choses, au cœur des différents métiers et activités. Ce n’est pas sa vocation diront certains. Peut-être, mais ceci exclut qu’il contribue efficacement à la solution d’aucun des problèmes pendants. Ce qu’il pourrait faire de plus efficace c’est de s’en rendre compte, de ne rien changer pour le plaisir et de faire confiance aux hommes de terrain. La productivité est d’abord la responsabilité de tous les agents économiques, quel que soit leur place dans la hiérarchie. C’est de plus un domaine où tout ne peut être mis sur la place publique. C’est ce qu’ont parfaitement compris les allemands, les japonais et quelques autres, ce qui se reflète entre autres dans la qualité de leurs produits et la prospérité de leurs entreprises. C’est la qualité du projet qui emporte le plus souvent la décision du client, et heureusement ! Au lieu de respecter le travail et les travailleurs on donne la priorité en France à ceux qui savent faire le paon dans les salons ou gonfler leur jabot dans les bureaux de direction. La classe sociale dont un postulant se revendique ainsi que ses relations vraies ou prétendues comptent davantage que sa compétence professionnelle. On nommera donc le plus souvent aux premières places des courtisans qui ont fait carrière dans les cabinets ministériels plutôt que des hommes de l’Art qui ont fait leurs preuves dans leur entreprise. «  HYPERLINK "http://michel.balmont.free.fr/pedago/lumieres/figaro.html" Il fallait un calculateur, ce fut un danseur qui l’obtint » comme disait Beaumarchais à la veille de la Révolution. Ce phénomène français ne date pas d’hier comme on voit. Le règne de Louis XIV et des autres rois de droit divin n’est pas encore terminé et le talent nécessaire pour assumer ce rôle n’est pas toujours au rendez-vous. Un ministre accordera sa préférence à une réforme sans lendemain mais qui porte son nom plutôt qu’à une amélioration durable mais anonyme. L’absence de réelle culture scientifique et technique du personnel politique est particulièrement frappante. C’est certainement un domaine qu’il a un peu fréquenté au cours de ses longues études mais qu’il s’est empressé d’oublier sitôt les examens passés. Ignorer délibérément la nécessité d’un minimum de compétences techniques de la part du personnel politique revient à promouvoir l’irresponsabilité de ceux qui gouvernent un monde dominé par la technique. Le même phénomène se retrouve dans les entreprises où les directions ont souvent une légitimité exclusivement financière ou relationnelle et ont tendance à considérer que compétence et imagination technique sont des qualités qui vont de soi, des qualités vulgaires et subalternes. Les universités préparent à la carrière de fonctionnaire. Pour le reste, il y a les écoles, petites ou grandes, mais tout ça va être bientôt chamboulé…Depuis quelques années le gouvernement n’a de cesse de casser ce qui fonctionne à peu près dans le seul but de montrer qu’aucun domaine d’activité n’échappe à son pouvoir de nuisance. Il finira bien par avoir la peau des grandes écoles. Ce n’est pourtant pas en faisant passer de l’argent de sa poche droite à sa poche gauche, en déshabillant Pierre pour habiller Paul que l’Etat crée de la richesse. D’autant qu’il n’oublie jamais de prélever son tribut au passage. L’économie mixte qui faisait cohabiter entreprises publiques et entreprises privées dans un même secteur n’a pas été abandonnée à cause de ses performances insuffisantes, mais par nécessité d’adopter les principes libéraux d’une Europe dominée par l’idéologie anglo-saxonne. L’argent privé redoute par dessus tout la concurrence du secteur public. La prospérité actuelle de la Chine n’est-elle pas liée à une certaine forme d’économie mixte ? La faveur dont jouissent la construction européenne et la régionalisation auprès des politiques, en contraste avec la tiédeur du français moyen et de beaucoup d’européens, s’explique en grande partie par le fait que l’Europe et les Régions demandent toujours plus d’élus et toujours plus de fonctionnaires de haut vol. Où sont les programmes qui doivent prendre le relais de ceux d’Airbus, d’Ariane, du TGV, du nucléaire civil que le centralisme à la française avait permis de mener à bien et grâce auxquels la France tient encore debout ? La source en est tarie et ce n’est pas une Europe, tour de Babel bureaucratique, ni les Régions qui paraissent en mesure de la réalimenter. Estimons-nous heureux si cette politique ne finit pas de casser les programmes qui existent en faisant des rares réussites nationales des échecs européens, sous l’œil goguenard des anglo-saxons. Rappelons-nous que, pour un anglo-saxon, la terre des zoulous commence à Calais ! Franchement, aurait-on l’idée en cas de crise grave de régionaliser la défense nationale ou de laisser à la seule initiative privée le soin de produire les armements nécessaires ? Beaucoup vous diront qu’il ne faut pas aller contre le mouvement général et qu’on ne joue pas au rugby sur un terrain de football, même si on préfère le rugby. Il y a quelque apparence de raison à ce point de vue, égoïstement et provisoirement. Si toute personne, physique ou morale, a le devoir de défendre sa propre vision des choses devant toutes les instances possibles, dans son action quotidienne elle est bien obligée de se conformer aux usages du plus grand nombre. Chaque nation a son génie propre. Celui de la France a été de tout temps centralisateur. Grâce à l’informatique en réseau la centralisation des organisations peut parfaitement coïncider avec une déconcentration physique de leurs agents sans perte d’efficacité, bien au contraire, Espérons que nous n’aurons pas à reprocher un jour à cette république le retour du bonapartisme si toutefois nous n’y sommes pas déjà. Elle a réhabitué les français à tout attendre d’un seul homme, funeste habitude et bien peu digne de leur passé républicain. De là à les réhabituer à tout craindre, il n’y a qu’un pas. L’accent longtemps mis sur la répression beaucoup plus que sur la prévention nous en a rapproché chaque jour davantage.


Crise de la politique internationale

Caste des financiers, caste des militaires, il ne manquerait plus qu’une caste ecclésiastique pour que soient effacées les conquêtes politiques et sociales des deux ou trois derniers siècles ! Les Etats-Unis, précédant comme toujours de quelques longueurs les autres pays développés, dérivent insensiblement dans cette direction. Ce qui s’est passé à  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Prison_de_Guantanamo" Guantanamo et dans d’autres lieux de détention sous leur contrôle a été la première manifestation évidente de cette dérive totalitaire. L’utilisation de drones armés pour éliminer sans risques de supposés adversaires en est une autre. Sous-traiter la violence et délocaliser la torture, voilà des idées d’avenir ! L’attitude des Etats-Unis dans le conflit israélo-palestinien palestinien a longtemps été tout aussi scandaleuse. On voit bien les inconvénients de pareilles pratiques pour l’image des Etats-Unis. On a peine à en discerner les avantages. A quand le prochain épisode de «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Dallas_(feuilleton_t%C3%A9l%C3%A9vis%C3%A9)" Dallas », celui ou JR s’installe à la Maison Blanche? Il faut malheureusement constater que l’américain moyen, travaillé par une propagande populiste intensive, se sent finalement moins proche d’Obama que de ses adversaires. Si les intégristes religieux des deux camps qui se disputent la Palestine ne peuvent être muselés, est-il possible d’arriver à un état stable de cette région sans avoir recours à l’une des deux solutions suivantes :
Réserver aux Palestiniens le sort des indiens d’Amérique parqués dans des réserves minuscules ? C’est peu ou prou ce qui est en train de se produire sous nos yeux. Israël en gardera une tache indélébile. La Shoah est sans doute la principale raison pour laquelle l’installation de colons juifs en Palestine a été tolérée par la communauté internationale. Elle n’autorise pas n’importe quel comportement jusqu’à la fin des temps.
Financer grâce à l’argent du pétrole le retour volontaire des Israéliens dans le pays de leur choix au moyen d’une indemnisation des biens abandonnés et d’un revenu suffisamment généreux servi pendant une période suffisamment longue? Une taxe de quelques dollars par baril, qu’il faudra instituer de toute façon pour des raisons de préservation de l’environnement et de conservation de la ressource, suffirait à alimenter en bonne partie le fond correspondant. La nation allemande pourrait également être mise à contribution de même que d’autres pays européens qui se sont rendus coupables d’antisémitisme. La France en fait partie qui a reconnu la responsabilité de l’état français dans l’arrestation et la déportation de juifs français et étrangers. Ce processus devrait être poursuivi au moins jusqu’à l’évacuation totale des colonies de Cisjordanie. Ainsi serait réparé un siècle d’errements de la communauté internationale qui s’est défaussée des conséquences des  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Shoah" drames éprouvés par les citoyens de confession juive dans certains pays d’Europe sur un peuple palestinien qui n’avait rien à voir avec cette histoire, qui ne demandait rien à personne mais que l’on contraint pourtant à expier un crime qu’il n’a pas commis !! Ces errements - qui n’ont d’égal que ceux qui ont permis à Israël de se doter de l’arme nucléaire- ont mis toute la région du Proche et du Moyen-Orient à feu et à sang, et tout porte à croire que ça continuera tant que des groupes religieux fanatiques continueront d’y dicter leur loi. Par l’utilisation très partielle de la manne pétrolière pour améliorer le sort des palestiniens sa concentration en un trop petit nombre de mains serait quelque peu réduite et le levain que constitue la population israélienne cesserait d’être gaspillé là où il y a si peu de pâte à faire lever. Cette population serait d’ailleurs plus en sécurité dans la plupart des pays développés qu’en Israël même où elle est à la merci du terrorisme et d’un retour du balancier, et rien ne s’oppose aux solidarités transfrontalières. Israël peut bien négocier en tête à tête avec les palestiniens jusqu’à la fin des temps, il n’en sortira aucun accord de paix car les exigences israéliennes sont clairement inacceptables par la partie adverse. Il suffit pour en être convaincu d’avoir entendu un premier ministre israélien revendiquer pour son pays, devant l’Assemblée Générale des Nations Unies, un nécessaire espace vital qui ne peut être acquis qu’au détriment de l’espace palestinien avec une morgue, un cynisme et un sens de la provocation qui siéraient mieux à un fasciste ou à un malfrat qu’au représentant élu d’un pays démocratique. Vous conviendrez que le terme «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Espace_vital_(nazisme)" espace vital » qu’il utilise dans ses discours évoque des souvenirs plutôt curieux … L’utilisation sans complexe par Israël du terme de colonies pour désigner ses annexions les plus récentes du sol palestinien montre bien le délire dans lequel ce pays s’est enfermé. Israël qui a pourtant souffert dans sa chair du fanatisme nazi ne semble pas avoir compris que le fanatisme religieux peut conduire aussi aux pires horreurs. On dit que, parvenus à l’âge adulte, les enfants persécutés ont tendance à répéter le comportement de leurs persécuteurs. On ne voit pas que l’existence de ces colonies puisse jamais être acceptée par la communauté internationale, ni bien entendu par les palestiniens, alors que la décolonisation s’est partout ailleurs imposée. La bande de Gaza qui pose un problème spécifique peut devenir la zone portuaire de la Palestine si on la relie à la Cisjordanie par une voie ferrée circulant éventuellement en tranchée couverte. Le seul risque de cette politique de désengagement pacifique serait de mécontenter certains groupes de pression politico-militaro-industriels pour lesquels la principale préoccupation n’est pas de trouver de l’argent mais de trouver des ennemis à pourfendre et des motifs d’intervention dans les zones sensibles transformées ainsi en autant de terrains d’exercice pour leurs forces armées. Pourquoi Israël a-t-il évacué la bande de Gaza laissant le Hamas y régner en maître ? Pourquoi vient-il de libérer sans crier gare mille anciens combattants du Hamas auxquels aucun engagement ni garantie n‘ont été demandés ? C’est qu’il faut à tout prix maintenir un abcès purulent susceptible de fournir un prétexte pour intervenir en territoire palestinien et saboter les efforts de paix de la communauté internationale largement favorable aux thèses palestiniennes. La poursuite de la colonisation est un camouflet permanent à l’égard de cette communauté. S’il continuait à entretenir l’image d’une Palestine état terroriste, le Hamas apparaîtrait objectivement comme le meilleur allié d’Israël. Israël est un porte-avions nucléaire amarré à quelques encablures des principales sources d’approvisionnement en pétrole, et constitue de ce point de vue un parfait agent provocateur. C’est certainement un élément fondamental, sinon le plus fondamental, qui explique le soutien constant dont a bénéficié jusqu’à présent Israël de la part de la puissance américaine. Il s’agit de maintenir la pression sur le monde arabe pour éviter qu’il ne se laisse aller à réclamer autrement que par des paroles un traitement équitable pour les palestiniens. Il faut, dans les pays pétroliers, maintenir au pouvoir coûte que coûte des clans indifférents à la justesse de la cause palestinienne mais très conscients de la fragilité de leurs privilèges. Les menaces proférées à l’encontre des iraniens obéissent à la même logique. Les Etats-Unis limitent leurs risques en chargeant Israël d’exercer les pressions militaires. La meilleure chance du peuple palestinien réside peut-être dans le développement aux Etats-Unis du gaz et du pétrole de schiste ce qui pourrait permettre aux américains de retrouver leur autonomie énergétique et rendrait moins prégnant leur souci de contrôler étroitement toute évolution politique ou militaire au proche et au moyen-orient. Le peuple palestinien sera également en meilleure position lorsque la Chine sera devenue le N°1 mondial. Il semble anormal que la question israélo-palestinienne, qu’on devrait d’ailleurs appeler la question israélienne car les palestiniens n’ont jamais fait problème, n’ait pas encore reçu de solution et qu’elle continue, malgré son importance quantitativement limitée, d’obnubiler l’attention d’une opinion mondiale qui commence à se lasser. L’intégrisme des uns nourrit l’intégrisme des autres et il faut un singulier aveuglement pour ne pas réaliser que l’exposé public de sa foi chez celui qui détient la puissance militaire crée le besoin chez l’autre d’exprimer la sienne par tous les moyens. Le terrorisme est dans ce cas l’alternative la plus naturelle à l’acceptation de l’injustice. On ne combat pas un intégrisme au nom d’un autre intégrisme. Il faut essayer de le désarmer au nom de la philosophie des Lumières. La paix ne pourra revenir dans cette région du monde aussi longtemps que les principes de laïcité n’auront pas été reconnus par tous, et d’abord par ceux qui détiennent la puissance militaire. Dans ce débat qui devrait la concerner au premier chef compte tenu de ses principes fondateurs, la France, après s’être abstenue courageusement en attendant de voir de quel côté pencherait la balance parait se rallier à l’opinion internationale majoritairement favorable à la cause palestinienne. Le président Bush aurait laissé un souvenir positif dans l’histoire s’il était parvenu à régler cette question avant de quitter le pouvoir. Ce n’était pas forcément la meilleure idée que de le faire aider par un préretraité, sympathique au demeurant mais qui n’est pas neutre, ni politiquement ni religieusement. Il semble qu’il eut mieux valu confier ce rôle à un sceptique notoire. Le fait qu’Obama ait laissé tomber les palestiniens après avoir exprimé l’intention de les soutenir ne peut s’expliquer que par l’hostilité majoritaire de l’opinion publique américaine et de ses représentants élus. S’agit-il d’un repli tactique ou bien a-t-il tellement pris goût au pouvoir qu’il est prêt à se renier pour le conserver ? Espérons qu’il sera plus audacieux ou plus chanceux au cours de son second mandat.
Si les intégristes de tout bord étaient réduits au silence, l’Union Européenne élargie pourrait fournir un cadre propice au développement des deux peuples et éviter qu’ils ne restent en tête-à-tête. Le Liban pourrait également en faire partie. Il faut auparavant que les Israéliens aient pris conscience des droits des Palestiniens sur leur sol et qu’ils fassent l’effort de s’y faire accepter, effort auquel ils risquent de ne jamais consentir tant que les forces en présence seront aussi déséquilibrées. Il faut aussi que les Palestiniens considèrent les Israéliens comme des parents qui ont eu de grands malheurs et réalisent qu’ils peuvent contribuer à les réparer. Encore faut-il qu’on le leur demande poliment et qu’on leur fournisse des compensations sonnantes et trébuchantes. Les peuples arabes ont tout intérêt à ce que leur région devienne une oasis de paix et de prospérité et ils ont les ressources nécessaires pour y parvenir. Il n’y aurait sans doute jamais eu de 11 septembre si la position américaine dans le conflit israélo-palestinien avait été dés le départ plus équilibrée au lieu d’être constamment partisane pour des raisons économiques, stratégiques, religieuses, voire électorales. Il est très probable que la solution du problème israélo-palestinien ramènerait la paix au Proche et au Moyen-Orient, ferait disparaître presque instantanément l’essentiel de ce qui reste de terrorisme et supprimerait les dernières tensions qui peuvent encore subsister entre chrétiens, juifs et musulmans dont les leaders religieux, par réflexe corporatiste, ne demandent qu’à s’entendre pour faire front commun contre les sceptiques et les blasphémateurs. Il est permis d’espérer que cette pacification réussie ferait tache d’huile. Il serait démontré ainsi que le pétrole qui peut déclencher des conflits dévastateurs peut également favoriser la paix. Les pêcheurs en eaux troubles en seraient pour leurs frais et les musulmans cesseraient d’être diabolisés par ceux qui veulent faire main basse sur leur magot. Cet accomplissement mérite bien qu’on lui consacre quelque argent ! Le monde ne pourra pas connaître une paix complète et véritable aussi longtemps que durera une injustice aussi criante que celle qui est faite actuellement au peuple palestinien. Or, une telle paix est indispensable pour résoudre les problèmes vitaux et urgents qui attendent la communauté des nations. De même l’Union Européenne pourrait contribuer à apaiser les rancunes multiséculaires qui règnent dans les Balkans où cohabitent plutôt mal que bien catholiques, orthodoxes et musulmans et permettrait de renouer les liens économiques et culturels qui existaient dans l’ancienne Yougoslavie. Il serait alors possible de tirer parti des multiples talents qui y abondent, même s’ils s’accompagnent parfois d’un petit grain de folie. Ceci vaudrait mieux à coup sûr que d’envoyer chars et avions contre des peuples qui ont fait preuve de tant d’héroïsme dans la lutte contre le nazisme. On voit bien de quel côté penche la Communauté Européenne quand on constate que la Croatie collaborationniste est intégrée avant la Serbie résistante.
Le véritable critère d’appartenance à cette Union ne devrait pas être d’ordre géographique. Les progrès techniques réalisés dans le transport des personnes, des biens et surtout de l’information rendent ce critère de moins en moins pertinent et des territoires situés au-delà des océans lui appartiennent déjà sans problème. Le globe terrestre tout entier se parcourt presque aussi vite de nos jours qu’un département français au temps de Napoléon. Il est possible aujourd’hui, dans les lieux les plus reculés, d’avoir une activité intellectuelle et relationnelle presque identique à ce qu’elle pourrait être dans la région parisienne. L’Australie et la Nouvelle-Zélande sont aux antipodes de la Grande Bretagne. Elles n’en appartiennent pas moins, de façon indiscutable, au monde anglo-saxon. La guerre oppose de plus en plus rarement une nation à ses voisines. On ne se bat bien que contre des gens qu’on connaît mal. Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale les français ont fait la guerre en Indochine et en Algérie, les portugais en Angola, les américains en Corée, au Vietnam, en Irak, en Afghanistan, les anglais aux Malouines ! Ce qui fait la force de l’Union Européenne, c’est que beaucoup veulent y entrer et que personne ne veut en sortir. L’Europe a-t-elle apporté la paix ? Oui en apparence, mais par le biais de l’obligation démocratique imposée aux impétrants, sans même parler de la menace d’un holocauste nucléaire. La démocratie est pourvoyeuse de paix à l’opposé de tous les régimes caractérisés par le pouvoir personnel. Celui qui arrive au pouvoir par la violence ou par l’intrigue a une tendance naturelle à utiliser les mêmes moyens une fois installé, à supposer qu’il n’y soit pas contraint par les évènements. Le citoyen ne confie le pouvoir à des « tueurs » que par inadvertance. L’appartenance d’un état à cette Europe-là doit être plus un label de qualité qu’une caractéristique géographique. Plutôt que de suggérer l’entrée de la Suisse dans l’Union Européenne, il aurait mieux valu demander l’admission des nations européennes dans la Confédération Helvétique, qui est pacifique certes, mais bien décidée également à se faire respecter par l’action conjointe de tous ses citoyens ! Il ne serait pas mauvais que cette Union ait grâce à la Turquie une frontière commune avec les états riches en pétrole pour qu’elle ait autant que d’autres son mot à dire sur ce qui s’y passe et qu’elle assure ainsi davantage la sécurité de ses approvisionnements pétroliers aussi longtemps qu’existeront les ressources.
Les initiatives d’une nation isolée n’ont plus guère de sens dés lors qu’il s’agit de traiter les problèmes dont nous avons tenté l’inventaire : environnement, énergie, génétique, santé, justice, stabilité économique et financière, entraide. L’ONU paraît trop faible et trop tiraillée pour imposer quoi que ce soit. L’Europe semble être le type d’organisation le mieux adapté pour montrer l’exemple à condition de ne pas l’enfermer dans des limites géographiques dépassées par l’évolution des techniques et des mentalités. Ses performances économiques relativement modestes sont peut-être un atout lorsque la protection de l’environnement et des ressources naturelles est devenue le problème le plus critique. L’ambition de pérenniser le monde vivant dans sa diversité pourrait être inscrite dans sa constitution et lui conférer le souffle qui lui fait défaut. Le véritable critère d’appartenance à cette entité c’est la volonté d’en faire partie et d’en respecter les règles. Car cette union qui a vocation à s’étendre à toute la planète s’appellerait plus justement Union des Démocraties de Bonne Volonté, ensemble de nations pacifiées à l’intérieur comme à l’extérieur, inspirées par l’esprit des Lumières, respectueuses de tous les droits de l’être humain et toujours prêtes à donner un coup de main là où le besoin s’en fait sentir. Pourraient s’y agréger ultérieurement le Canada, l’Australie, la Nouvelle Zélande, le Japon, la Corée, la pointe sud des continents américain et africain et, finalement, les Etats-Unis et la Russie, Il existera de plus en plus, du fait de leur stades d’évolution politico-économique similaires et de leurs climats généralement tempérés ou froids induisant des besoins énergétiques comparables, une solidarité de fait entre ces différents pays. Les pays froids ou tempérés seront moins affectés par le réchauffement climatique que les pays du sud alors que leurs émissions de CO2 auront tendance à être plus importantes en raison de leurs besoins énergétiques supérieurs. Cet avantage climatique des pays du sud est déjà sensible et explique pour une part le faible prix de leurs produits manufacturés. Les négociations entre cette union et une union similaire des pays situés entre les tropiques dont la Chine, l’Inde et le Brésil, auraient de bien meilleures chances d’aboutir que les négociations actuelles effectuées en ordre dispersé. L’OTAN, toujours à la recherche d’une mission à la hauteur de ses moyens, pourrait être rebaptisée et devenir l’assurance tous risques d’une telle union en attendant éventuellement un rôle plus global. Il pourrait être nécessaire de prévoir un sas par lequel les nations trop éloignées des conditions moyennes des pays déjà membres devraient passer avant d’intégrer cette Communauté afin d’éviter des mouvements erratiques de populations ou de capitaux. C’est pourquoi l’idée d’Union Méditerranéenne est intéressante mais peut-être un peu trop précoce.
Le monde occidental a rarement été aussi sûr, du moins dans l’immédiat. Pourtant, et j’y vois une nouvelle illustration du phénomène de recentrage de l’aiguille du « satisfactionomètre », les citoyens ordinaires encouragés par des médias soumis à la pression des mâles dominants, jouent à se faire peur avec le terrorisme et l’immigration. Quand il n’a pas sa dose d’angoisse, l’homme grossit à plaisir les quelques dangers qui subsistent. Cependant les véritables dangers ne sont pas là où il croit qu’ils sont.
« J'ai un terrible ennemi, me dit-il. Regarde. Partout il se montre, aussi puissant, aussi attentif, aussi vif que moi. Que me vienne la pensée qu'il me guette, et que je me dresse, je le vois debout. J'en suis à ne plus dormir ; mais lui non plus ne dort pas. Tranquille et résolu autant que moi. J'attends qu'il attaque ; mais je ne puis attendre ; je ne puis lui laisser cette avance; je lève le bras ; regarde ; il était temps ; lui lève aussi le bras. Toutes mes pensées, je croirais qu'elles naissent en lui en même temps qu'en moi. Il me craint, je le vois bien, et, comme je sais ce que c'est que craindre, je sais qu'il me hait. Tous les projets que je forme pour me défendre, il les forme ; et comme je me veux étendre, ce qui est un moyen de me garder, lui le veut aussi. Il est mon semblable, je le savais ; je le sais encore mieux depuis que nous sommes en querelle. Peut-on aimer son semblable ? Bien plutôt n'est-il pas sage de le craindre ? Ce qui est désirable à moi ne l'est-il pas à lui ? On m'a dit autrefois que c'était paix entre ceux qui pensent les mêmes choses. Mais si nos pensées sont nos désirs, et au fond nos besoins, n'est-ce pas guerre, au contraire, si l'on pense les mêmes choses. O mon frère ennemi, tu m'as appris d'amères vérités ! Encore maintenant tu me les confirmes. Par cette allure, par cette attitude, par ce geste désespéré que tu viens de faire, désespéré et en même temps menaçant, je le vois bien. Adieu, fraternité ! »
Ainsi parlait l'homme en me montrant l'homme.
« Mais, lui dis-je, c'est ton ombre. » (Alain)

Ainsi commencent toutes les guerres préventives. L’idée d’utiliser les crédits militaires pour résoudre pacifiquement les problèmes n’effleure que rarement l’esprit des responsables des nations. Sans perdre de vue que, d’un point de vue général, il faut ajouter aux dépenses propres des militaires le coût de tout ce qu’ils cassent ! Comparez le coût d’un pont et celui de la charge explosive qui suffit à le détruire, la valeur d’un homme jeune et instruit, prêt à faire de grandes choses, et celle de la balle qui suffit à le rayer du nombre des vivants. Songez aux armements nucléaires qui se multiplient un peu partout. Au nom de quoi, sinon du droit du plus fort, en dénier la possession à certaines nations ? Pourquoi devraient-elles être privées de ce moyen de se faire respecter alors que leurs plus proches voisines en disposent ? Que les plus puissants commencent par se débarrasser de leur arsenal avant de réclamer que d’autres y renoncent ! Qui se permet de qualifier certains états de voyous doit commencer par balayer devant sa porte ! Les armes nucléaires peuvent être déclenchées à tout moment par des irresponsables avec les conséquences apocalyptiques que chacun connaît, et la force n’est pas un gage certain de responsabilité. D’aucuns peuvent se dire avec le cynisme propre à certains milieux fortunés : « qu’importe que le reste de l’humanité périsse pourvu que nous en réchappions » !  Comment tenir les excités à l’écart du bouton fatal ? Et qui va décider que tel ou tel est un excité ? S’il y a encore des va-t-en guerre lorsqu’il s’agit de l’Iran ou de l’Irak, il y en a heureusement beaucoup moins dés lors qu’il s’agit de la Russie ou de la Chine. Une paix fragile s’est instaurée entre les grandes puissances depuis la fin de la dernière guerre mondiale parce que toutes les catégories de la population sont menacées, y compris les plus fortunées et les plus proches du pouvoir. C’est certainement cette perspective qui a conduit Kennedy et Khrouchtchev à s’entendre in extremis lors de la  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Crise_de_Cuba" crise cubaine. L’arme atomique a plus fait ainsi pour cette paix fragile que toutes les homélies réunies de tous les prêtres de toutes les religions du monde. Le temps semble révolu où les puissants pouvaient dire « armons-nous et partez », où la guerre était décidée par des braillards de soixante ans et faite par des hommes de vingt. D’ailleurs les survivants d’un échange nucléaire, compte tenu des conditions qui régneraient alors, regretteraient de n’être pas morts… Aucun cinéaste n’a été tenté de montrer avec réalisme un tel état du monde, pas plus que celui d’un monde privé d’énergie, les deux pouvant d’ailleurs se combiner. Si, par suite de difficultés économiques ou financières extrêmes, une société part à un moment donné dans tous les sens, si le pouvoir de la classe dominante est menacé, la guerre étrangère constitue souvent l’ultime moyen de resserrer les rangs. Il est plus facile de maintenir la discipline de la troupe au contact de l’ennemi qu’à la caserne. Des intégristes se sentant menacés de perdre leur influence et se croyant à l’abri des représailles, ou bien avides de voir de leurs propres yeux l’apocalypse annoncée par leurs livres sacrés, peuvent être tentés de vitrifier un ou deux continents rétifs pour faire triompher leur « vérité » sur celui qu’ils occupent et régner sans partage. Soyons conscients de ces menaces. L’intégrisme chrétien est de loin le plus redoutable en raison de la puissance des armes dont il pourrait disposer. Un fou à Washington ou à Moscou ou même à Paris ou à Londres est de ce point de vue beaucoup plus inquiétant qu’un fou à Téhéran ! Paradoxalement on pourrait même dire que la bombe iranienne constituerait l’une des rares chances d’établir une paix équitable au Proche et au Moyen-Orient car elle renforcerait en Israël le parti de la paix. Quand la force brutale est réduite au silence par une force équivalente la justice a quelque chance d’être entendue. L’embargo sur le pétrole iranien décidé par les pays européens pour dissuader l’Iran de poursuivre son projet de bombe atomique n’à aucune chance d’être efficace. Il est cependant préférable à toute opération militaire. Il faut se dire qu’avec le temps tout ce qui peut arriver finit un jour ou l’autre par arriver. L’existence de la vie elle-même en est la meilleure illustration. Imaginez un instant que toute la sauvagerie dont l’homme est capable se déchaîne à nouveau et utilise tous les moyens désormais à sa disposition. Il n’est pas impensable que le déclenchement d’une telle guerre se produise par accident ainsi que l’a illustré avec un humour dévastateur le cinéaste Stanley Kubrick dans son film  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Docteur_Folamour" Docteur Folamour. Il n’est pas impensable non plus que le déclenchement d’une telle guerre intervienne si un futur Président des Etats-Unis juge menacés les intérêts vitaux de son pays et s’il a acquis une confiance suffisante dans son bouclier antimissile. Le surarmement a affaibli l’économie de son pays. Il peut être tentant pour lui de récupérer une partie des sommes gigantesques englouties dans ses forces armées en adoptant un comportement prédateur rendu possible par une suprématie militaire incontestée. La seconde guerre d’Irak est le premier exemple flagrant d’un tel comportement dont les Etats-Unis n’étaient pas jusque là coutumiers. Les plus extrémistes du parti républicain penchent dans cette direction et ce bellicisme est contagieux. L’islamisme est en ligne de mire, mais il peut être tentant aussi de se débarrasser de quelques créanciers ! Pour des raisons différentes ses plus proches alliés ainsi que la Russie, seraient épargnés. Les autres nations verraient leurs forces nucléaires détruites par une frappe préventive. Des frappes ultérieures détruiraient les infrastructures des nations qui refuseraient de se soumettre, comme cela s’est passé en Irak et ailleurs. Toutes seraient contraintes de limiter de façon drastique leur consommation d’énergie fossile. Les tankers chinois et indiens seraient contraints de faire demi-tour avant de franchir le détroit d’Ormuz. Le contrôle du réseau Internet, du système GPS, des produits Microsoft, et de bien d’autres productions indispensables permet aux Etats-Unis d’espionner et de paralyser, s’ils le veulent, l’activité économique et militaire des autres pays. Comment se fait-il que l’utilisation d’outils aussi prodigieusement efficaces et coûteux que le réseau Internet ou les moteurs de recherche soit gratuite si ceux qui les développent et les entretiennent n’ont pas les moyens d’en tirer profit d’une manière ou d’une autre? Il y a les profits commerciaux bien entendu mais il y a aussi, et c’est peut-être le plus important, la possibilité d’espionner l’activité des ennemis de l’Amérique et même de ses amis et de fournir des renseignements précieux aux sociétés américaines ! Les victimes d’un tel conflit ne se compteraient plus en millions mais en milliards à cause d’un «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Hiver_nucl%C3%A9aire" hiver nucléaire », qui peut se produire même en cas de conflit limité comme entre l’Inde et le Pakistan. La famine, la guerre civile, les pillages et les épidémies qui en résulteraient achèveraient de tout détruire ramenant la population mondiale à un ou deux milliards d’habitants peut-être. Je ne veux pas imaginer que le dernier homme encore vivant écrira un jour avec son sang sur le dernier pan de mur encore debout «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Omar_Raddad" Dieu m’a tuer » ! C’est ce qui risque d’arriver si la Bible hébraïque et le Coran ne sont pas rangés au fond des bibliothèques. Pourquoi la puissance américaine refuse-t-elle de se joindre à la lutte contre le réchauffement climatique si elle n’a pas quelque part, refoulée au fond d’une arrière-salle de son subconscient, comme expédient ultime,  une option de ce type? Si ses plus allumés ne rêvent pas d’établir un régime théocratique judéo-chrétien et d’éradiquer les autres religions et l’irréligion ? Le dieu de la Bible et celui du Coran servent de caution à tous les fanatismes. L’arriération mentale de l’extrême droite américaine que traduit son adhésion au créationnisme, son négationnisme en matière de risques climatiques et son racisme latent joint à son extraordinaire pouvoir économique, politique et médiatique a quelque chose de profondément inquiétant. Les islamistes ne sont pas moins coupables, mais ils ont des circonstances atténuantes. Les génocides que préparent ces fanatiques n’épargneront personne. Les Etats-Unis sont à la croisée des chemins. Haïs, surendettés, empêtrés dans des guerres sans fin, ils ne s’en sortent que grâce à leur avance scientifique et technologique qu’ils doivent d’ailleurs à des individus talentueux qui ont depuis longtemps renoncé à ces vieilles lunes. Ils peuvent continuer à jouer leur jeu personnel ou bien se joindre avec tous leurs moyens à la communauté internationale. La politique menée par le président Bush junior parait n’avoir eu qu’un seul but qui était de permettre aux plus favorisés de ses compatriotes de continuer à vivre confortablement sans rien changer à leurs habitudes aussi bien matérielles qu’intellectuelles. Qu’en sera-t-il de son successeur ? Sera-t-il capable d’abandonner la vision selon laquelle il y a deux peuples élus dans le monde ; le peuple américain et le peuple juif ? Le fait qu’une fois désigné sans ambiguïté par le suffrage universel l’actuel président continue d’invoquer Dieu, de soutenir Israël malgré ses exactions et de menacer l’Iran ne laisse pas d’inquiéter. Il serait plus juste et plus favorable à la paix universelle d’exercer une pression économique énergique sur Israël qui viole allègrement et pas uniquement par des paroles les recommandations de l’ONU. Il est compréhensible que, quelques soient ses sentiments personnels, l’actuel président soit obligé de tenir compte de son opinion publique et de celle de son Congrès. De par ses origines il risque de devoir apparaître comme plus américain que nature. A quels risques personnels ne s’exposerait-il pas s’il s’écartait radicalement de la politique de son prédécesseur ? L’assassinat des frères Kennedy a de quoi faire réfléchir. Malgré le changement des personnes on ne peut donc tout à fait exclure que la politique étrangère américaine ne perpétue le même formidable contresens issu d’une lecture non distanciée de la Bible hébraïque dont le caractère divin, il faut le répéter après Benoît XVI, ne saute pas aux yeux de l’observateur non prévenu. Du point de vue littéraire, la Bible est très inférieure à l’Iliade ! Les américains soutiennent les israéliens dans leur refus de prendre en compte les droits légitimes des palestiniens pour des motifs politiques et religieux. S’il est possible de discuter des motifs politiques et éventuellement de convaincre, il n’y a aucun espoir d’aboutir concernant les motifs religieux car nous sommes là dans le domaine de l’arbitraire et de l’absurde.
Un autre fait générateur de tension est la montée en puissance des peuples d’Asie. Si l’Occident est schizophrène, tiraillé qu’il est entre son rationalisme scientifique et son irrationalisme monothéiste, l’Orient n’a pas ce handicap et paraît bien parti sur la voie de la suprématie économique. Comment va-t-on expliquer aux peuples chinois et indien qu’ils doivent revenir à leur sagesse et à leur sobriété millénaires après qu’ils aient consenti d’immenses efforts pour se rapprocher des standards occidentaux ? Que se passera-t-il lorsque ces grands corps entreront en ébullition parce que l’Occident aura entrepris, éventuellement par la force, de limiter leur impact devenu intolérable sur l’environnement et les ressources naturelles disponibles ? Les énergies renouvelables, soleil, vent, chutes d’eau, marées, vagues et biomasse ne suffiront pas à elles seules dans un avenir prévisible à répondre aux besoins énergétiques de ces deux géants, notamment en raison de la rareté des terres arables dont ils disposent, Il risque d’être plus tard que tu ne crois. Les conditions actuelles conduiront tôt ou tard si rien n’est fait à une guerre d’extermination qui marquera le début dune nouvelle ère géologique. Qui se sent capable aujourd’hui d’évaluer l’espérance de vie de notre civilisation ? Qui prendrait le pari qu’elle aura à se préoccuper un jour de l’agonie du soleil ?
15. EPILOGUE

N’avons nous pas honte d’en être arrivés à faire cet ensemble de constats désolants ? Car, enfin, de mémoire d’homme, le monde n’a jamais connu des circonstances aussi favorables bénéficiant à une fraction aussi importante des populations. Peu ou pas de guerres dans les pays développés depuis près de soixante ans, plus d’épidémies, plus de famines, plus de bestioles harceleuses, plus de froid noir et glaçant, plus d’esclavage, moins de tyrannies, une durée de vie qui ne cesse de s’allonger, des souffrances soulagées, moins de travaux pénibles, davantage de loisirs, des vieux jours assurés, des progrès incessants et extraordinaires dans tous les domaines, qu’il s’agisse de soigner, de produire, de communiquer, de voyager, de savoir, de comprendre. Ces conditions nouvelles rendent caduques une bonne partie des enseignements qu’on peut tirer de l’histoire. Il se trouve malgré cela que notre satisfactionomètre continue d’être sensible aux variations de tous ces paramètres et non à leur valeur absolue et que les crises dont nous avons tenté l’inventaire nous donnent l’impression d’être arrivés au sommet de la courbe et qu’au-delà la pente va s’inverser, nous entraînant vers le gouffre. La crise actuelle est en effet beaucoup plus grave que celle de 1929 car à la crise économique et financière s’ajoute la crise environnementale et celle due à l’épuisement des ressources naturelles, notamment énergétiques. Il faut y ajouter les contraintes liées à la mondialisation, à la création de l’entité européenne et à l’impossibilité de faire la guerre à une échelle suffisante. Il en résulte qu’il sera encore plus long et plus difficile d’en sortir. En fait il parait à peu près impossible de freiner avant la catastrophe. Pourtant nous sommes tous embarqués et seuls maîtres à bord de la planète Terre. Allons nous rester là à nous disputer la meilleure cabine d’un navire en train de sombrer alors que nous avons encore, peut-être plus pour très longtemps, les moyens d’échapper au naufrage ? N’est-il pas nécessaire que nous prenions le temps de faire le point, de nous interroger sur notre prochaine destination et que nous arrêtions les décisions qui s’imposent ? Au milieu de l’océan et incertains de la direction à prendre, ne pouvons-nous au moins nous mettre d’accord sur la nécessité de faire taire les querelles dans l’équipage et de maintenir le navire à flot ? Ne détournons pas nos yeux des réalités pénibles : l’humanité surpuissante mais menacée n’a plus le choix. Elle ne peut compter que sur ses propres forces pour se préserver et préserver son environnement. Il est désormais en son pouvoir d’utiliser efficacement ou de ruiner à tout jamais la mémoire génétique et le savoir-faire technique accumulés pendant des milliards d’années grâce à l’addition d’un nombre presque infini d’heureux hasards. Pour éviter ce dénouement fatal les vertus désuètes de sobriété, d’économie, d’humilité, d’intégrité, de générosité, de respect de la parole donnée doivent être remises à l’honneur et pratiquées par le plus grand nombre. Le malheur de tous est fait de la somme des égoïsmes de chacun. Le vingt et unième siècle sera vertueux ou ne sera plus. Du moins ne serons-nous plus là pour le contempler. Le génome humain ne devant être modifié qu’avec la plus extrême prudence, c’est sur une modification de l’organisation politique, économique et culturelle de la société engendrant une plus grande justice sociale et sur un effort gigantesque de formation intellectuelle et morale qu’il faut compter pour atteindre cet objectif. Pris à la gorge par les diverses crises, nous sommes tenus d’évaluer toutes les solutions. Une social-démocratie écologique et consensuelle à la scandinave semble cependant à priori la mieux capable de réaliser les ambitions de toutes les religions si elle admet de donner à leurs préoccupations communes, notamment éthiques, un fondement scientifique.
Il serait évidemment contraire au principe de précaution et au simple bon sens d’espérer que les progrès scientifiques et techniques à venir vont régler tous les problèmes. Ces progrès peuvent très bien ne pas se produire, ou pas là où ils sont attendus. Les problèmes actuels doivent être résolus avec les moyens actuels. Si des progrès futurs permettent d’alléger les efforts, tant mieux ; mais ne comptons pas sur eux prématurément. Il faut donc imaginer dés maintenant les processus qui permettront de passer de la situation existante, intenable à moyen terme, à une situation nouvelle plus satisfaisante, plus stable et plus durable, avec un minimum de heurts, de drames, d’injustices. Les ressources nécessaires doivent provenir d’une diminution relative de la part des armements et des produits de luxe dans le total des biens produits et non, bien évidemment, d’une diminution relative des produits de première nécessité sans perdre de vue qu’il est plus rémunérateur et, d’une certaine manière, plus excitant de jouer à Star War que d’isoler des bâtiments, plus amusant de rouler à vive allure dans une voiture de sport que de se trainer dans un véhicule électrique mal chauffé et non climatisé, et que les reconversions nécessaires risquent en conséquence d’être lentes et mal vécues. Il faut ce faisant agir avec prudence, et de façon réversible, car dans le domaine politico-économique les résultats des actions menées sont souvent imprévisibles, et les experts se trompent plus souvent qu’à leur tour. En proposant la plupart du temps plusieurs scénarios possibles, ils ne font qu’étaler au grand jour leurs incertitudes et leurs insuffisances. Depuis des années on les a entendus nous bassiner avec cette affirmation qu’une crise analogue à celle de 1929 ne pouvait plus se produire compte tenu des progrès de la science économique ! Ils avaient oublié de prendre en compte les progrès de la science informatique et ceux des mathématiques financières ! Personne ne sait évidemment résoudre une équation à sept milliards d’inconnus lorsque chaque inconnu est un problème à lui tout seul. Comme a dit je crois le président Giscard d’Estaing, une économie, une société modernes ne se conduisent pas à grands coups de volant. « Continuer, ensuite commencer » (Alain). La vie est un processus continu dans lequel les changements, pour être féconds, ne doivent être introduits qu’à petite dose. Pour qu’on ne continue pas à dire « plus ça change, et plus c’est la même chose ». Le socialisme est un long cheminement. Tout déséquilibre social doit être corrigé en s’inspirant de la régulation des processus industriels. L’action exercée doit être proportionnelle au déséquilibre constaté, elle doit ramener progressivement ce déséquilibre à zéro et elle doit contrer toute variation trop rapide pour éviter l’instabilité. Ceux qui, comme les pays communistes, ont voulu prendre des raccourcis n’ont pas su se protéger des coups qu’ils s’attiraient. On peut donc penser que le marché conservera encore longtemps son rôle indispensable dans l’optimisation des décisions banales. Il est l’expression dans le domaine économique du phénomène de sélection naturelle. Cette espèce de guerre fait des blessés qu’il faut soigner pour qu’ils puissent retourner au combat alors que leur abandon découragerait ceux qui ont été jusque là épargnés. L’aiguillon de la concurrence semble pour le moment irremplaçable même s’il doit être manié avec prudence. La politique commence là où le marché doit se déclarer incompétent. Le bonheur des citoyens doit être désormais recherché dans la simplicité et l’économie des moyens, ce qui n’est pas une mauvaise définition de l’élégance. Il est possible de travailler moins à condition de vivre autrement, ce qui ne veut pas dire plus mal. Travailler mieux pour vivre mieux, tel devrait être le nouveau slogan. Le taux de croissance est le plus mauvais indicateur qui soit dans la mesure où il encourage à produire plus, quelle que soit l’utilité réelle de ce qui est produit. Un meilleur indicateur prendrait en compte la disponibilité pour tous des biens essentiels tels que nourriture, logement, environnement sain. Le produit intérieur brut, devrait être remplacé par le produit intérieur de bonheur. Le bonheur des gens est très rarement pris en compte par les hommes politiques. Lorsque d’aventure il l’est, ce qui est le cas de la loi sur les trente cinq heures de travail hebdomadaire qui facilite considérablement la vie des salariés, ses auteurs sont vilipendés par leurs adversaires et mollement soutenus, voire trahis, par leurs amis … Essayons de faire une projection dans le temps. Le monde industriel moderne est né au 19ème siècle, il a atteint sa vitesse de développement maximum au 20ème et il amorce une décélération au 21ème. Il pourrait atteindre un pallier de stabilité au cours du 22ème siècle et porter alors tous ses fruits, si les problèmes énergétiques et environnementaux ont été réglés… Compte tenu de l’effort nécessaire pour ajuster les bases matérielles de notre civilisation à ces contraintes, ce n’est pas la langueur économique qui est à craindre, c’est la surchauffe. Le collectivisme sobre doit être préféré chaque fois que c’est possible à l’individualisme dispendieux. Ce point de vue va complètement à rebours de l’état d’esprit des citoyens américains dont la mentalité s’est forgée dans des espaces vierges, quasi illimités et aux ressources abondantes. Ils souhaitent, comme c’est assez naturel, persévérer dans leur être, mais ceci a un coût, pour eux-mêmes et pour les autres. L’histoire a toutefois démontré qu’il ne fallait jamais désespérer du pragmatisme américain et rien n’empêche, puisque les politiques menées les années passées ont déclenché une crise majeure, qu’un nouveau «  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/New_Deal" New Deal » proposé par un président humaniste ne replace la société américaine dans un courant opposé aux tendances actuelles, courant dont elle prendrait assez naturellement la direction. Dans un monde considérablement rétréci, une véritable autorité supranationale est devenue indispensable, que ceci plaise ou non, pour résoudre avec succès les problèmes liés à la stabilité économique, politique et environnementale de la planète. En l’absence d’autres candidats, ce peut être l’objectif d’une Europe élargie aux dimensions du monde. Malgré cela une ou deux générations ne seront pas de trop pour sortir du trou où nous nous trouvons actuellement et nous ouvrir vers l’espace, espoir et refuge. Nous serons alors véritablement à la fin d’une histoire faite de bruit et de fureur. Cette entreprise salvatrice peut redonner du sens à la vie d’une communauté humaine qui se plaint amèrement d’en manquer. Cette sortie par le haut sera rendue encore plus difficile, sinon impossible, si les décisions douloureuses à prendre sont différées parce que trop d’attention et d’efforts auront été dilapidés à traiter (mal) des problèmes artificiellement gonflés comme le terrorisme ou de faux problèmes comme les préférences religieuses.
Parce que le ciel paraît vide, parce qu’aucun dieu ne semble disposé à venir nous tirer du mauvais pas où nous nous sommes fourvoyés, l’union de tous les hommes de bonne volonté est plus que jamais nécessaire. Les incroyants ne doivent pas être absents de cette union mais au contraire y jouer un rôle moteur. Incroyants, encore un effort si vous voulez que la race des hommes soit sauvée. Cependant, arrivés devant le dernier obstacle, beaucoup hésitent, renâclent, et finalement se dérobent. C’est précisément ce qui s’est produit lors des dernières réunions internationales consacrées à l’évolution du climat. Il est donc temps de changer de méthode. Observons à ce sujet que les nations qui ont refusé de s’engager dans des actions efficaces contre le réchauffement climatique sont à peu près les mêmes que celles qui refusent de désarmer. Les deux phénomènes sont liés. Aucune de ces nations ne veut baisser sa garde, que ce soit dans le domaine économique ou dans le domaine militaire. Rien donc ne se fera tant qu’une confiance mutuelle n’aura pas été établie. La création de boucliers anti-missiles visant à neutraliser d’hypothétiques adversaires alors qu’on ne cesse d’améliorer ses propres armes, n’est pas la meilleure manière d’établir cette confiance. C’est par le désarmement qu’il faut commencer, ce qui aura également pour effet de dégager les ressources nécessaires pour financer les adaptations indispensables. Il n’y aura pas de paix possible tant que les valeurs laïques, pacifiques par nature, n’auront pas pris le pas sur les valeurs religieuses génératrices de conflits dans les relations entre les hommes comme entre les nations. Le  HYPERLINK "http://fr.wikipedia.org/wiki/Noeud_gordien" nœud gordien du conflit israélo-palestinien doit être prioritairement tranché faute de quoi ce conflit continuera d’empoisonner la vie des habitants de cette planète si même il ne l’abrège pas. Il faut pour cela que les Etats-Unis cessent d’opposer leur veto à toutes les résolutions des Nations Unies qui exigent d’Israël un comportement responsable mais au contraire contribuent de tout leur poids à les faire appliquer. Demander aux palestiniens et aux israéliens de se mettre d’accord entre eux, c’est véritablement se moquer du monde, prétendre au sérieux la menace iranienne également. La communauté internationale se lèverait comme un seul homme pour défendre, s’il était attaqué, un état d’Israël qui respecterait les droits des palestiniens. Par leur refus de contribuer à régler le problème israélo-palestinien, par leur acceptation d’inégalités et d’iniquités scandaleuses, par leur refus de considérer sérieusement le problème du réchauffement climatique, par leur refus d’apprécier les phénomènes religieux pour ce qu’ils sont, par leur obstination à se surarmer, par leur sacrifice des libertés démocratiques à un objectif « sécuritaire » inatteignable, par l’espionnage tous azimuts systématique et souvent illégal, les Etats-Unis prennent une responsabilité écrasante dans la genèse de la catastrophe qui se prépare. Il y a bien quelque chose de pourri dans le royaume de Danemark. Le pire en la matière est que les Etats-Unis servent de modèle à une bonne partie du monde développé.
La séquence à réaliser pour que l’aventure humaine ait une chance de se poursuivre pourrait être la suivante 
Apaiser tous les conflits internes et externes auxquels des démocraties se trouvent mêlées. C’est ce que l’Europe a fait et que les présidents Obama et Poutine ont commencé de faire.
Arrêter la production d’armements nouveaux ainsi que la recherche militaire
Ne conserver qu’une structure d’encadrement des forces armées pouvant faire appel le cas échéant à des soldats déjà formés tels que policiers et gendarmes, ou à des appelés recrutés dans la fonction publique en contrepartie de la sécurité d’emploi que procure cette fonction.
Stabiliser puis réduire les endettements car on ne peut garder perpétuellement de tels boulets aux pieds. Des dettes de cette ampleur ne pourront jamais être remboursées selon les termes prévus. Les pays qui essaient en ce moment de rembourser en respectant les échéances ne semblent avoir aucune chance d’y parvenir car ils nagent moins vite que le courant qui les entraîne. Ils s’épuisent en pure perte à rembourser une dette largement due aux malversations des possédants. Au surplus les prêteurs ne souhaitent nullement condamner leurs débiteurs à la misère car ce sont aussi leurs clients. Les prêteurs souhaitent au contraire pouvoir continuer à prêter dans un environnement stable pour devenir encore plus riches. Les débiteurs doivent donc utiliser leur pouvoir de nuisance pour renégocier leur dette. La seule question est de savoir s’ils ont intérêt à le faire collectivement ou non. Si elle agit isolément la France peut ne pas mettre suffisamment en péril le système financier international et son initiative risque de se retourner contre elle. Collectivement plusieurs grands pays d’Europe pèsent un poids suffisant peut renégocier leur dette. Unis ils sont capables de résister à des prêteurs refusant des délais plus longs et des taux plus bas. Si certains prêteurs perdent un peu d’argent dans cette négociation ce n’est pas trop grave dans la mesure ou ces éventuels perdants ne sont pas particulièrement à plaindre. Ceci vaut mieux pour eux en tout cas que d’avoir affaire à une débandade générale ou à des gouvernements issus de révoltes populaires qui refuseraient de reconnaître les dettes de leurs prédécesseurs. S’il n’y a pas de moyen alternatif il faut donc, sans trop de scrupules, aller chercher l’argent là où il est. Les conditions dans lesquelles cet argent a été accaparé sont le plus souvent de nature à soulager la conscience de ceux qui participeront à l’opération. La popularité de Robin des Bois ne s’est jamais démentie et la relance de la machine économique doit primer toute autre considération.
Promouvoir un enseignement fondé sur une approche scientifique de tous les phénomènes y compris éthiques et qui soit à la fois ludique, évolutif et bon marché
Instaurer une communauté de même nature que la communauté européenne et selon des critères de même niveau entre toutes les démocraties de bonne volonté
Promouvoir par le biais de cette communauté la régulation du système capitaliste, la stabilisation du climat si celle-ci est encore possible, la pérennisation des ressources en matières premières et énergie et le contrôle de la démographie en quantité et qualité
Après obtention de résultats suffisants des actions précédentes libérer la production et répartir les produits de façon économiquement saine et raisonnablement égalitaire. Le partage des richesses n’est incompatible ni avec la démocratie ni avec les droits de l’homme ; il en fait même partie. La précarité est incompatible avec le bonheur de l’être humain, elle doit être bannie.
Il n’est pas sûr que le ressenti des citoyens corresponde spontanément à cet ordre de priorité. Un important effort pédagogique est donc à entreprendre. Il n’est pas acquis non plus que les évènements laissent aux esprits le temps d’évoluer. Il faut probablement s’attendre à entrer dans une zone de turbulences. Au delà de ce souci essentiel et immédiat d’éviter la catastrophe la race des hommes doit s’attacher à promouvoir les comportements moraux, préserver la paix universelle., rechercher la vérité en tous domaines et la rendre accessible à tous, permettre à chacun d’utiliser pleinement les dons physiques et mentaux dont la nature l’a gratifié, faire de la terre un paradis où l’air et l’eau seront purs, les déserts fleuris, les carnivores végétariens, le travail jeu, les hiérarchies amitiés et solidarités, les êtres conscients libres et égaux en dignité et en droits, la maladie et la mort vaincues, le ciel exploré et habité. Si nous n’avons pas cette ambition, qu’allons-nous faire pendant les siècles de siècles qu’il nous reste, espérons-le, à parcourir ? Le message caché de toutes les religions n’est-il pas cette invitation à réaliser, ici et maintenant, ce qui paraissait tout à fait impossible il y a peu et dont elles ont seulement rêvé pour plus tard, dans un autre monde ? Afin que tout soit accompli et que nous n’ayons pas de regrets au moment du big-crunch-big-bang qui redistribuera toutes les cartes.






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